La chronique des arts et de la curiosité (1903)

ET DE LA CURIOSITÉ

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le centre auquel il se rapporte, La Trinité, ou Le
Christ mort sur les genoux du Père Éternel,
surmonté de la Colombe, dont la provenance se
trouve avoir été la même. Grâce à la libéralité de
M. Lafontaine, nous avons maintenant les trois
quarts du Triptyque de Saint-Orne^', et nous
pouvons espérer, à bon droit, le reconstituer un
jour en sou entier. Kn ce qui concerne le volet
gaucho à retrouver — il représentait, sans doute,
saint Jean et la Vierge, ou saint Jean et deux
personnages masculins, — le don do M. Lafon-
taine m'a permis d'entreprendre déjà des recher-
ches à ce sujet, plus efficacement qu'auparavant,
et je no désespère pas de les voir aboutir à plus
ou moins bref délai. Je n'en puis dire plus long,
réservant des descriptions et considérations plus
étendues pour le travail que je prépare sur Colin
do Coter et ses affinités étroites avec le maître
anonyme do Mérodc-Flémalle. Je me borne ici à
souligner encore l'heureux état de conservation du
beau panneau (1) si gracieusement et si à propos
offert par M. Lucien-Claude Lafontaine, dont le
nom ne peut plus être oublié des amateurs et con-
naisseurs d'art flamand. Je dis « si à propos », à
cause aussi de l'achat récent de la Liseuse de la
vente Lelong, qui se rattache de fort près au
groupe de Colin do Coter.

Par une de ces coïncidences heureuses et peu
communes qui donnent à l'aveugle dieu Hasard
ligure d'intelligence, c'est aussi d'un maître fla-
mand, installé à Bruxelles, mais au xvr siècle,
Bernard van Orley, qu'est signée et datée la Sainte
Famille dont l'acquisition par le Louvre à la
vente Otlet a suivi do tout près le don des Trois
Saintes Femmes en pleurs de Colin de Coter. Cette
œuvre, agréable d'aspect comme une tapisserie,
harmonieuse et originale comme composition, est
certainement à compter parmi les plus heureux
efforts que je connaisse de l'italianisme flamand,
si souvent maladroit et à contresens.

Le maître brabançon, célèbre surtout par ses
cartons de tapisseries et sa réception d'Albert Du-
rer, a opéré là, entre Raphaël et Mabuse, une
mixture d'une saveur singulière, et qui n'est ni
sans mérita ni sans charme. Vous verrez l'habile
groupement des personnages, soutenu par la noble
stabilité de l'architecture ; vous verrez le doux et
beau modelé, l'élégance des mains, vous goûterez
l'intérêt de portrait du petit saint Jean, et la jolie
exécution libre — bien rare en. 1521, date du ta-
bleau — des Heurs qu'il offre à profusion au divin
Enfant... L'œuvre provient de la galerie de Jac-
ques II d'Angleterre.

Ces deux œuvres bruxelloises des xv° et xvr siè-
cles, entrées aux derniers jours de décembre en
notre possession, sont précieuses à dos degrés et
égards divers, et comblent dans nos collections
flamandes, encore si pauvres, si incomplètes, des
lacunes tout à fait importantes. Ceci dit indépen-
damment du mérite esthétique de ces deux poin-
tures, qui est remarquable. C'est une faible com-
pensation, à coup sûr, pour la perte de l'exquise
Vierge aux anges du maître de Moulins, ravie à
nous par Bruxelles, que l'entrée en possession de
ces deux peintures nées à Bruxelles et qui eussent
pu être revendiquées par cette ville. Mais elle pos-

(1) La grisaille qui se trouve au revers — une
Sainte Barbe — est aussi un morceau intéressant,
avec les armoiries du bas, document précieux.

sédait déjà des Bernard van Orley authentiques
et un magnifique ensemble de Primitifs nationaux ;
tandis que nous n'avons rien encore du maître de
Moulins, du plus cligne successeur de Jean Fouquxt

Camille Benoit.

Académie des Beaux-Arts

Séance du 27 décembre 1902

Election. — M. Watts, peintre anglais, est élu
correspondant étranger en l'emplacement de
M. Siemiradzki, do Rome, décédé. M. Watts est
l'auteur de nombreuses compositions dans le génie
préraphaélite. Il a exposé plusieurs fois à nos
Salons et a obtenu, en 1878, une médaille do
1"> classe. Il est chevalier de la Légion d'honneur.

Concours. — L'Académie arrête le programme
du concours Achille Leclère pour 1903, qui aura
lieu sur le sujet suivant : « LaporLo d'entrée d'une
grande bibliothèque ». Les esquisses devront être
rendues au secrétariat do l'Institut, le 8 janvier
1903, avant qualre heures. Le jugement des es-
quisses aura lieu le 10 janvier 1903. Les dessins
rendus seront remis au secrétariat, le 4 mars,
avant qualre heures. Le jugement définitif aura
lieu le 7 mars.

Académie des Inscriptions

Séance du 19 décembre 1902

Élections. — L'Académie nomme en comité se-
cret :

1° Correspondants étrangers : MM. Murray, con-
servateur du Musée Britannique, auteur, entre
autres travaux, d'une histoire de la sculpture grec-
que, et Friedlauidcr, de Berlin, autour d'un.excel-
lent travail sur « les mœurs des Romains sous
l'Empire », qui a été traduit en français;

2° Correspondants nationaux : MM. Brutails,
archiviste do la Gironde, archéologue bien connu
par ses publications sur l'architecture gothique et
romane; Gsell, directeur du musée d'Alger, pro-
fesseur à la Faculté de cette ville, auteur d'impor-
tantes études sur la période romaine en Algérie,
et Cosquin, folkloristo des provinces de l'Est,
auquel on doit de très curieuses et très intéres-
santes monographies sur la diffusion des contes
populaires de celte partie de la France.

Fouilles dcTunis. — M. Merlin, membre de l'École
française do Rome, rend compte des fouilles que
M. Gauckler, directeur du service dos antiquités
en Tunisie, lui a confiées, en 1901 et 1902, à Dougga,
l'antique Thugga, pour continuer le déblaiement
des abords du Capitolo.

En 1901 et au printemps de 1902, on a dégagé,
au sud du temple, tout un quartier de la yille ro-
maine avec ses rues, ses places, ses maisons. Bans
une de celles-ci, il y avait encore en place une
mosaïque où était figuré un cocher vainqueur aux
jeux du cirque, monté sur un quadrige.

A l'automne de 1£02, M. Merlin et M. Bruel,.
architecte diplômé, ont commencé à débarrasser le