DOI issue:
Numéro 135 (6 Juin 1833)
DOI Page / Citation link:https://doi.org/10.11588/diglit.26557#0140
3“ ANNÉE
—— Numéro 155. «—■
Tout ce qui concerne la rédaction doit être adressé, franco,
à M. Louis Desnoyehs (Déraillé), Rédacteur en chef,
au Bureau de la Caricature, galerie Vero-Dodat.—
Tout ce qui a rapport aux dessins doit être adressé à
M. Cii. Phii.ipon.
.CASTJCAT RJDENDO MORF.S.
Les réclamations, abonnemens et envois d’argent doivent
être adressés, franco, à M. Ch. PHILTPON, directeur
du journal, au Bureau delà Caricature, galerie Vc'ro-
Dodat, au-dessus du grand Magasin de Lithographies
d'Aubert.
6 JUIN 1855.
POLITIQUE , MORALE,
LITTÉRAIRE ET SCÉNIQUE.
de quelque chose qui fait le tour du monde,
ET
QUI N’EST NI LA LIBERTÉ NI LA COCARDE TRICOLORE,
Autrefois, on inculquait aux enfans les notions élémentaires, à
l’aide de la férule et du robinet. C’est aux dépens de leur dos qu’on
meublait leur cervelle; et si la science ne pénétrait pas dans le sanc-
tuaire de leur intelligence, ce n’était pas faute de frapper à la porte,
et surtout de frapper fort.
La science pourtant n’y pénétrait jamais. A force d’avanies, le moral
devenait insensible, imperméable comme le physique, et la dureté
de la peau s’étendait jusqu’à l’intelligence. MM. Viennet, Mahul,
Lulchiron, Monllosier, Jaubert, Séguin, Gaillard, Dubois (dont on
fait les flûtes), et presque tous nos hommes d’état ont été élevés d’a-
près l’ancienne méthode.
Le peu de succès obtenu par cette méthode dans l’éducation civile
aurait dû, ce me semble, détourner le Neuf-Août de l’appliquer à
l’éducation politique; mais il est écrit que les lumières de l’expérience
seront toujours perdues pour les gouvernemens, à plus forte raison
pour le Neuf-Août qui, en fait de lumières, ne possède que les lumières
de M. Ganneron.
Le Neuf-Août a dqpc entrepris, dès le commencement, de faire
notre éducation monarchico-constitutionnelle à grands coups de bâton
de férule. Il a recruté pour le roi des barricades l’amour unanime,
par voie coercitive ; il a transporté dans ses instructions de police les
coups, la prison , les frères correcteurs, en un mot, toute la pénalité
des vieux collèges ; il a même poussé l’esprit d’imitation jusqu’à
«oudre la croix-d’honneur au gilet des élèves les plus récalcitrans ,
comme jadis les maîtres d’étude leur attachaient un écriteau ou des
oreilles d’âne.
Jusqu’à présent les progrès de l’amour unanime ne prouvent pas
que ce système d’éducation soit plus efficace dans l’ordre civil que
dans l’ordre politique , et qu’il obtienne plus de succès dans la règle
«nio regew que dans la règle amo deum. On pourrait même croire qu’il
a produit un effet directement contraire à celui qu’on espérait, et que,
de même que la férule du professeur étouffait le germe de plus d’une
capacité naissante, cl faisait de mécbans enfans qui seraient peut-être
devenus des Voltaire , de même le bâton des assommeurs et l’épée
des piqueurs de police a figé dans plus d’un cœur l'enthousiasme ta-
merlanesque prêt à faire explosion.
Ce résultat n’a pas empêché nos voisins de nous emprunter cette
méthode perfectionnée. Le Neuf-Août s’est fait un vrai plaisir d’expé-
dier à tous les ordres de choses qui lui en ont adressé la demande, franc
de port, l’explication du système avec plans figuratifs et tout le maté-
riel nécessaire à son exploitation. Une fois en train de munificence ,
il aurait bien pu y joindre aussi le personnel; e’est une prodigalité
contre laquelle je suis bien sûr que personne en France naîtrait:
réclamé.
C’est ainsi que nous avons vu î’assommage florir à Rome sous la
haute direction de notre commissaire de police, et se rassembler
avec armes au nombre de plusieurs centaines pour empêcher les ras-
semblemens de deux personnes avec chapeaux blancs et moustaches à
pointes.
C’est ainsi qu’en Belgique l’assommeur forçait tout récemment les
passa ns à crier : Vive Léopold J".
C’est ainsi qu’à Francfort, des assommeurs instruits à l’école fran-
çaise ont donné des leçons d'ordre public.à la jeunesse allemande.
C’est ainsi qu’en Angleterre la baguette des constables a été rem-
placée un moment par le bâton des assommeurs qu’a brisé le jury
anglais comme notre Cour de Cassation a cassé Dubois ( dont on fait
les flûtes ).
Espérons que l’assommeur ne s’arrêtera pas en si beau chemin , et
qu’à défaut de scs lois et de ses institutions, le Neuf-Août léguera a
l’Europe ses bâtons d’ordre public et ses dagues de suffrage una-
nime.
Il avait été dit, après nos trois grands jours, que quelque chose en
France ferait le tour du monde en i83o ; ce devaient être la cocarde
tricolore et la liberté; en i833 , ce sont nos millions et nos assommeurs.
Ai.TAR.....
—— Numéro 155. «—■
Tout ce qui concerne la rédaction doit être adressé, franco,
à M. Louis Desnoyehs (Déraillé), Rédacteur en chef,
au Bureau de la Caricature, galerie Vero-Dodat.—
Tout ce qui a rapport aux dessins doit être adressé à
M. Cii. Phii.ipon.
.CASTJCAT RJDENDO MORF.S.
Les réclamations, abonnemens et envois d’argent doivent
être adressés, franco, à M. Ch. PHILTPON, directeur
du journal, au Bureau delà Caricature, galerie Vc'ro-
Dodat, au-dessus du grand Magasin de Lithographies
d'Aubert.
6 JUIN 1855.
POLITIQUE , MORALE,
LITTÉRAIRE ET SCÉNIQUE.
de quelque chose qui fait le tour du monde,
ET
QUI N’EST NI LA LIBERTÉ NI LA COCARDE TRICOLORE,
Autrefois, on inculquait aux enfans les notions élémentaires, à
l’aide de la férule et du robinet. C’est aux dépens de leur dos qu’on
meublait leur cervelle; et si la science ne pénétrait pas dans le sanc-
tuaire de leur intelligence, ce n’était pas faute de frapper à la porte,
et surtout de frapper fort.
La science pourtant n’y pénétrait jamais. A force d’avanies, le moral
devenait insensible, imperméable comme le physique, et la dureté
de la peau s’étendait jusqu’à l’intelligence. MM. Viennet, Mahul,
Lulchiron, Monllosier, Jaubert, Séguin, Gaillard, Dubois (dont on
fait les flûtes), et presque tous nos hommes d’état ont été élevés d’a-
près l’ancienne méthode.
Le peu de succès obtenu par cette méthode dans l’éducation civile
aurait dû, ce me semble, détourner le Neuf-Août de l’appliquer à
l’éducation politique; mais il est écrit que les lumières de l’expérience
seront toujours perdues pour les gouvernemens, à plus forte raison
pour le Neuf-Août qui, en fait de lumières, ne possède que les lumières
de M. Ganneron.
Le Neuf-Août a dqpc entrepris, dès le commencement, de faire
notre éducation monarchico-constitutionnelle à grands coups de bâton
de férule. Il a recruté pour le roi des barricades l’amour unanime,
par voie coercitive ; il a transporté dans ses instructions de police les
coups, la prison , les frères correcteurs, en un mot, toute la pénalité
des vieux collèges ; il a même poussé l’esprit d’imitation jusqu’à
«oudre la croix-d’honneur au gilet des élèves les plus récalcitrans ,
comme jadis les maîtres d’étude leur attachaient un écriteau ou des
oreilles d’âne.
Jusqu’à présent les progrès de l’amour unanime ne prouvent pas
que ce système d’éducation soit plus efficace dans l’ordre civil que
dans l’ordre politique , et qu’il obtienne plus de succès dans la règle
«nio regew que dans la règle amo deum. On pourrait même croire qu’il
a produit un effet directement contraire à celui qu’on espérait, et que,
de même que la férule du professeur étouffait le germe de plus d’une
capacité naissante, cl faisait de mécbans enfans qui seraient peut-être
devenus des Voltaire , de même le bâton des assommeurs et l’épée
des piqueurs de police a figé dans plus d’un cœur l'enthousiasme ta-
merlanesque prêt à faire explosion.
Ce résultat n’a pas empêché nos voisins de nous emprunter cette
méthode perfectionnée. Le Neuf-Août s’est fait un vrai plaisir d’expé-
dier à tous les ordres de choses qui lui en ont adressé la demande, franc
de port, l’explication du système avec plans figuratifs et tout le maté-
riel nécessaire à son exploitation. Une fois en train de munificence ,
il aurait bien pu y joindre aussi le personnel; e’est une prodigalité
contre laquelle je suis bien sûr que personne en France naîtrait:
réclamé.
C’est ainsi que nous avons vu î’assommage florir à Rome sous la
haute direction de notre commissaire de police, et se rassembler
avec armes au nombre de plusieurs centaines pour empêcher les ras-
semblemens de deux personnes avec chapeaux blancs et moustaches à
pointes.
C’est ainsi qu’en Belgique l’assommeur forçait tout récemment les
passa ns à crier : Vive Léopold J".
C’est ainsi qu’à Francfort, des assommeurs instruits à l’école fran-
çaise ont donné des leçons d'ordre public.à la jeunesse allemande.
C’est ainsi qu’en Angleterre la baguette des constables a été rem-
placée un moment par le bâton des assommeurs qu’a brisé le jury
anglais comme notre Cour de Cassation a cassé Dubois ( dont on fait
les flûtes ).
Espérons que l’assommeur ne s’arrêtera pas en si beau chemin , et
qu’à défaut de scs lois et de ses institutions, le Neuf-Août léguera a
l’Europe ses bâtons d’ordre public et ses dagues de suffrage una-
nime.
Il avait été dit, après nos trois grands jours, que quelque chose en
France ferait le tour du monde en i83o ; ce devaient être la cocarde
tricolore et la liberté; en i833 , ce sont nos millions et nos assommeurs.
Ai.TAR.....