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La caricature: revue morale, judiciaire, littéraire, artistique, fashionable et scénique — 1833 (Nr. 113-164)

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Numéro 152 (3 Octobre 1833)
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https://doi.org/10.11588/diglit.26557#0243

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3* ANNÉE.

IVcmèro 152.

Tout ce qui concerne la rédaction doit être adressé, franco,
à M. Louis Dbsnoyers (Derville), Rédacteur en chef,
au Bureau de la Caricature, galerie Véro-Dodal. —
Tout ce qui a rapport aux dessins doit être adressé à
M. Cii. Piiilipox.

3 OCTOBRE 1833.

Les réclamations, abonnemens et envois d’argent doivent
être adressés, franco, à VI. Cii. Philipon, directeur
du journal , au Bureau, de la Caricature , galerie Véro-
IJodat, au-dessus du grand Magasin de Lithographies
d’Auiîebt.

CASTIGAT RIDENDO MORES.

POLITIQUE, MORALE, LITTÉRAIRE ET SCÉNIQUE.

m «ESSËS

LOUIS-PHILIPPE, POÈTE FRANÇAIS,

OU A PEU PUES.

Je vous ai déjà signalé la nouvelle œuvre que M. Croûte de
Tourlavillé vient d’adresser à M. Viennet, comme un lointain
écho du charivari d’Estagel. Or, voici bien d’une autre chose! Les
journaux ont contesté depuis, non pas le talent, ce qui ne fait plus
question, mais l’existence même de M. Croûte de Tourlavillé.
On a été jusqu’à dire qu’au pis-aller M. Croûte ne serait qu’un
pseudonyme au moyen duquel un auguste personnage écoule-
rait dans le public le trop plein de sa verve poétique, comme il
écoule sa prose par le canal de M. Pépin. On conçoit alors l’im-
mense intérêt qui s’attache à cette nouvelle épître de l’auteur
du Soleil de Juillet. Le fait est que, depuis huit jours, il n’est
bruit que decela, dans le monde littéraire et politique. En voici
donc quelques nouveaux fragmens. Dans ce récit, Louis-Phi-
lippe (si toutefois Louis-Philippe est Croûte), nous ferait part de
l’aventure qui lui serait arrivée dernièrement avec un noir Bou-
singot.

C’était un jour de deuil,

Dit-il, (sans doute le jour où il prit le deuil d’une petite prin-
cesse portugaise. )

J’errais loin dans la foule :

Une pensée (hélas ! la colère céleste
N’inspira jamais rien de plus désespérant)

Vers un noir Bousingot me dirige à l’instant.

Il était sur le bord d’une rivière ; ô crime!

Son oeil sombre et farouche en mesurait l’abîme,

Comme s’il y cherchait laVnort par désespoir!

Prévoyant un malheur et désirant savoir

Quel est l’affreux chagrin dont le fardeau l'accable,

Je m’approche en tremblant de ce monstre effroyable.

Mais à peine sur lui j’attache mes regards,

Qu’une femme éperdue, et les cheveux épars :

« Ah ! monsieur, apprenez la déplorable histoire
« Que la postérité refusera de croire !

« Mon (ils, s’écria-t-elle, est impie à tel point,

« Qu’il est persuadé que Dieu n’existe point.

« Les livres autrefois avaient pour lui des charmes ;

« Au seul nom des vertus il répandait des larmes ;

« Sans doute le démon l'agite et le poursuit :
h Je l’ai vu quelquefois passer toute une nuit,

« En proie à là fureur de guerres intestines,

U Sur le bord d’un torrent qui baigne ces ruines.

« C’est quand il sort du club ou de quelque sabbat,

« Qu’il y vient méditer la chute de l’État. »

•—• « Madame, répondis-je, en versant quelques pleurs,
i Le ciel aura pitié de vos longues douleurs. >>

A peine ces accens sont sortis de ma bouche.

Que Bousingot, sur moi lançant un œil farouche,

Sinistre avant-coureur d’un désespoir fatal,

Vomit, comme un volcan, ce discours infernal :

« Nous autres Bousingots, soleils du genre humain,

« Si Philippe n’eût pas trahi votre destin,
n Nous aurions interdit les prêtres et les temples ,
a Et donné des vertus les plus rares exemples ;

« Mais le peuple inconstant hait notre liberté,
u fl semble satisfait, glorieux, enchanté,
n Et, quand d’Orléans passe, il lui crie avec joie :

« Vive le roi ! la iiost !» A ce mot, il se noie.

Sentant à chaque pas, mon âme qui s’enfuit,

J’allai m’ensevelir dans mon triste réduit.

C’était en effet ce que Louis-Philipppe (si toutefois Louis-
Philippe est Groûte) avait de mieux à faire. Malheureusement,
à peine est-il rentré chez lui, nous dit-il ,

Qu’un affreux Bousingot, à l’œil louche et hagard,

Par ses coups redoublés vient enfoncer ma porte !

Le poignard à la main, la rage le transporte :

Ma femme à son aspect pousse des cris d’effroi !

Le monstre furieux s’est avancé sur moi,

Et d’une voix pareille à la voix du tonnerre :
ii Cruel homme ! dit-il, qu’as-tu fait de mon frère ?

« —Votre frère ! monsieur, quel est-il, s’il vous plaît ? »

A ces mots, il me livre un funeste combat.

Comme un tigre affamé qui poursuit une proie,

En mille noirs détours sa rage se déploie :

Hélas! je périssais sans le plus prompt secours!

« O vous que j’aime tant! Muses, sauvez mes jours!

« Vous le savez, le ciel est l’ami des poètes !

« Laissez-moi mettre lin à mes œuvres complètes!

Si le reste des œuvres complètes doit ressembler à celle-là,
les muses nous rendront un assez mauvais service. Enfin
n’importe !

LesMuses. à l’instant, sensibles à mes pleurs,

Continue-t-il,

Font expirer le monstre au sein de ses fureurs.

Certainement Bousingot n’a que ce qu’il mérite. Or, vous
croyez peut-être que maintenant, qu’il est mort, Bousingot va
laisser Louis-Philippe tranquille. Du tout ! Bousingot est exac-
tement le contraire de la Palisse; c’est un quart d’heure après,
et non pas avant sa mort, qu’il est encore en vie.

Depuis ce fatal jour, plaintif et solitaire,

Le sombre Bousingot, plongé dans la misère,
 
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