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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 14.1888 (Teil 1)

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CDLXIV

Le Meuble en France au XVIe siècle, par Edmond Bonnaffé,
ouvrage orné de cent vingt dessins. In-40 raisin de
286 pages. Paris, Librairie de l’Art, 29, cité d’Antin.

En tête de son ouvrage, M. Bonnaffé a placé une intro-
duction charmante, d’une allure très vive et d’un tour fort
littéraire. Il y montre quelle est l’importance historique
des travaux de ce genre. Aujourd'hui, en effet, la notion
de l’histoire s’est singulièrement renouvelée. Nous atta-
chons moins d’importance à l’histoire des traités et des
batailles. Nous croyons mieux atteindre la vérité sur le
passé par des études qui ont pour objet les mœurs ou les
arts. C’est en ce sens que Mérimée déclarait préférer un
recueil d’anecdotes aune chronique solennelle; c’est aussi
pour cela que M. Taine a pu dire : « L’histoire de France,
pendant les deux derniers siècles, est au Cabinet des
estampes.

Dans les pages si colorées et si brillantes de son Intro-
duction, M. Bonnaffé soutient la même doctrine. « On ne
connaît bien un peuple, nous dit-il, qu’en l’étudiant chez
lui, dans sa maison, dans son costume et dans son mobi-
lier. » Le mobilier surtout a une importance particulière,
parce que, « à la longue, il s’établit une affinité frappante
entre le meuble et l’individu ».

Le livre de M. Edmond Bonnaffé débute par un cha-
pitre général sur l’art du meuble en Europe au xvic siècle.
L’auteur y étudie comment les différents peuples européens
ont, à cette époque, traité le bois, cette substance admi-
rable, étonnamment durable (comme en témoignent les
bois du Musée de Boulacq), plus souple que la pierre, plus
« chaude », plus tendre à l’outil, tantôt se prêtant aux cise-
lures délicates et rivalisant alors avec le bronze, tantôt
ayant 1’ « éclat et le poli du marbre ».

M. Bonnaffé nous montre l’Angleterre au xvie siècle,
employant surtout le chêne, ayant du goût pour l'orne-
mentation bizarre, excessive, pour les attitudes grotesques

Table.

(Collection de M. Spitzer.) — Gravure extraite de : le Meuble en France.

des figures, exécutées avec lourdeur et rudesse. En
Flandre, où prévaut également le chêne, se fait sentir
l’influence fastueuse des ducs de Bourgogne et de cette
cour aux mœurs tout ensemble « violentes et raffinées »
que Fromentin, dans les Maîtres d’autrefois, a si finement
caractérisée. En Espagne, oit l’on emploie le noyer, le
cèdre, le cyprès, s’exercent desinfluences d’abord flamandes,
puis florentines, qui laissent subsister néanmoins le carac-
tère ethnique et national. L’Allemand, lui, en travaillant
le chêne, reste un « gothique impénitent ». Dürer et son
école l’inspirent. Si l’aspect général est laborieux et lourd,
on a, en compensation, la puissance passionnée, l’allure
robuste et expressive. L’Italie met en œuvre le noyer et le
châtaignier, l’ébène, le cyprès et le cèdre. Là, on revient à
l’ornement romain, l’arc, le sarcophage, le pilastre à can-
délabre. Là aussi l’on se plaît à peindre, à dorer le bois, à
le déguiser de mille manières, à l’enrichir d’ivoires et de
pierres.

L’auteur, dans le chapitre suivant, arrive à la France et
à son « école sans rivale », à cet art à la fois simple et très
raffiné, qui présente un caractère général de mesure, de
discrète élégance et d’esprit.

Tome XLIV.

Ici, comme ailleurs, la France excelle à réunir, à com-
biner, à fondre heureusement les données opposées. L’art,
d’abord influencé par la Flandre et la Bourgogne, devient
italien, avec l’école de Fontainebleau. Alors prédomine le
décor antique, les guirlandes, le cortège des dieux et des
héros, des nymphes, des Saisons et des Heures. Alors
aussi le noyer succède au chêne. C’est sous Henri II que
cet art produit ses plus purs chefs-d’œuvre. Le meuble
alors est un modèle de sobre richesse et de distinction. Il
est exquis, avec ses sveltes colonnes, ses touches d’or
clairsemées, ses incrustations légères de marbre, et ces
figures allongées, où se manifestent la grâce, le goût et
l’esprit de Goujon. Sous Charles IX et Henri III, le type
demeure excellent, mais présente une tendance dangereuse
vers l’opulence et l’effet.

Une des parties les plus originales et les plus belles du
travail de M. Bonnaffé est son troisième chapitre : la Géo-
graphie du meuble, en France. Ce que l’auteur a fait pré-
cédemment pour les divers pays de l’Europe, il le fait
maintenant pour les diverses régions de la France. Mais
ici la besogne est autrement complexe, autrement délicate.
M. Bonnaffé a fort bien réussi dans cette tentative d1 « es-

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