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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 5.1879 (Teil 3)

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Mussini, Luigi: Les travaux de restauration de l'Église de Santa Croce, à Florence
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https://doi.org/10.11588/diglit.17801#0314

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26o L'A

se rangent comme les préce'dentes au pourtour du transept.

La chapelle Bonaparte, contiguë à celle des Peruzzi, et la
troisième à gauche de l'abside, n'est pas encore entre'e dans le
courant qui l'environne de toutes parts. Représenté par le cardinal
Bonaparte, le majorât de la branche de Lucien, duquel relève
cette chapelle, n'a pas cru pouvoir, et cela pour des motifs trop
intimes pour que nous ne les respections, adhe'rer aux vœux des
fabriciens de Santa Croce.

Il n'est pas sans intérêt de rappeler ici à quelle occasion
cette chapelle, autrefois Giugni, est passée sous le patronage de
la famille Bonaparte.

C'est en l'année 1845 que l'on entreprit de restaurer l'an-
cienne crypte qui s'étend au-dessous de l'abside et des chapelles
du transept. Ce souterrain était devenu depuis nombre d'années
le réceptacle de toute sorte de déblais, qui, enlevés à grand'-
peine, laissèrent à découvert les armoiries des familles qui
avaient eu là leurs caveaux ; et entre autres celles des Bona-
parte avec cette inscription : Armes de Jean Bonaparte et de
son descendant François de François Bonaparte (c'est-à-dire
François fils de François). Ce Jean Bonaparte fut podestat de
Florence en l'année 1334. Cette sépulture, placée au centre de
la crypte au-dessous du maître-autel, fut aussitôt restaurée avec
le plus grand soin, de même que la crypte entière.

Cette découverte importante qui date, comme je l'ai dit,
de 1843, ne fut certes pas étrangère à l'achat que Julie Clary
Bonaparte faisait en 1845 de la chapelle Giugni, en inhumant dans
l'ancien caveau de la famille les cendres du roi Joseph son époux
décédé l'année précédente, et celles de sa fille la princesse Char-
lotte, veuve deCharles-Louis Napoléon, frère aîné de l'empereur
Napoléon III. C'est en cette chapelle que furent placés depuis
les monuments de cette princesse et de sa mère, dus au ciseau de
l'illustre statuaire Bartolini. — Dix-huit ans plus tard, en juin
1863, le prince Charles Bonaparte vint réclamer les cendres de
Joseph pour les transporter en France, et c'est M. le comte
Fabbroni qui en surveilla l'exhumation et signa le procès-verbal
et l'acte consignataire.

Il est d'ailleurs parfaitement naturel que tout cela ait ajouté
un stimulant à la vive sollicitude avec laquelle le chef de la fabri-
que poursuivait la restauration complète de la chapelle Bonaparte,
et rien ne saurait mieux justifier son regret de ne pas avoir
atteint son but : un regret qu'entretiennent aussi des traditions
de famille de la nature la plus respectable.

M. le comte Fabbroni est le petit-fils du savant Jean Va-
lentin Fabbroni, qui, conseiller d'État sous le premier empire,
prit part aux travaux de la commission chargée d'établir le
système métrique décimal sur la mesure d'un degré du méri-
dien, et dont les services furent récompensés par la croix de
commandeur et le titre de baron de l'empire. Le père de M. Fab-
broni fut à son tour décoré par Napoléon Ier, et nommé procu-
reur impérial. Le représentant actuel de cette famille, où la
science et la distinction semblent héréditaires, ancien premier
référendaire au conseil d'État, est commandeur des ordres des
SS. Maurice et Lazare et de la Couronne d'Italie, et l'œuvre
entreprise et poursuivie à Santa Croce avec autant de zèle que
de succès, cette œuvre qui méritait d'être décrite avec un sen-
timent de sympathie et d'approbation sans réserve , n'est pas
son seul titre à l'estime et à la considération de ses concitoyens.

Revenons au plan général de restauration actuellement
interrompu par suite d'épuisement de fonds. Si regrettable que
soit cette interruption, elle a eu l'avantage, en rouvrant l'église,
de mettre le public à même de se passionner pour une tâche à
l'accomplissement de laquelle il est appelé à concourir par ses
offrandes patriotiques.

Le public a donc vu avec une vive satisfaction toute la
région du transept rétablie en son caractère primitif, et il fait
des vœux pour que les trois nefs soient au plus tôt soumises au
même travail de radicale épuration.

Ici les grands et lourds autels vasaresques, condamnés à

RT.

disparaître pour être successivement remplacés par les monu-
ments honoraires du Panthéon italien : là le badigeon qui en
tombant laissera à découvert les fresques dont l'existence est
attestée par Vasari, et la pierre de taille des piliers ; partout
une foule de réparations que je ne m'attarde pas à décrire.

D'autant qu'il me reste à dire un mot du grand travail au
moyen duquel le cloître et le portique longeant le côté sud de
l'église, débarrassés des constructions qu'on y avait adossées à
différentes époques, viennent de se révéler à nous sous l'aspect
le plus charmant et le plus inattendu.

La pioche a eu raison des bâtiments qui obstruaient le por-
tique sur deux tiers de sa longueur ; elle n'a pas davantage
épargné les constructions parasites qui occupaient une moitié
du cloître, et celles qui bouchaient les jolies arcades à double
étage adossées au mur extérieur de l'ancien réfectoire.
Elle a même dégagé les trois grandes arcades qui longent la
place, toutes décorées de peintures dont on ne soupçonnait pas
l'existence. La porte donnant accès au cloître a été décorée au
dehors d'un portail par M. de Fabris, l'éminent artiste qui a
succédé à M. Mazzei comme architecte de la fabrique et direc-
teur des restaurations. — C'est adossé à cette porte d'entrée
qu'on jouit de l'aspect de ce beau décor, dont l'admirable porti-
que de la chapelle Pazzi par Brunellesco occupe le centre, ce
portique dont les réparations sont d'autant plus attendues qu'il
y a là une question de solidité qui les rend très urgentes.

Dans l'ancien réfectoire, la grande fresque de Giotto, repré-
sentant la Sainte-Cène, ce type primordial de celle de Léonard
et de bien d'autres, se déroule sur toute une paroi, hier encore
battue par la pluie comme une.muraille extérieure. Il va sans
dire qu'elle s'en ressent, mais on vient d'y pourvoir, et les enva-
hissements de l'humidité ne sauraient s'étendre davantage. Si
nous n'avions maugréé cent fois contre les énormes métiers d'un
fabricant de mauvais tapis qui nous masquaient brutalement
cette grande page de l'ami d'Alighieri, nous nous refuserions
à croire que Florence, cette Athènes de l'Italie, ait si longtemps
toléré pareil vandalisme. Aujourd'hui le vaste réfectoire, dont
les fenêtres en ogive sont en voie de restauration, sera utilisé
pour la conservation des objets d'art qui, malgré des qualités
respectables, ne pourront être placés dans l'église.

Lorsque j'eus la bonne fortune de visiter, en compagnie de
M. le comte Fabbroni, les travaux que je viens de décrire, je dus
à son exquise obligeance de remplir mon carnet et ma mémoire
d'une double série de notes et de renseignements importants.
Mais placé depuis devant ce qui s'appelle l'embarras des riches-
ses, j'ai dû partager mes documents en différents groupes et
assujettir chaque groupe à une sorte de fusion. J'ai cru ne rien
devoir omettre de ce qui caractérise l'œuvre entière et les
résultats acquis, mais j'ai dû craindre les minutieuses descrip-
tions de détail qui fatiguent l'attention lorsque pour tous les
lecteurs elles n'ont pas, pour les rendre claires et attachantes,
le contrôle du souvenir des lieux et des choses décrites.

Arrivé ainsi au terme de cette notice, je tiens à rendre hom-
mage à la mémoire de l'éminent artiste qui dressa le plan et
dirigea d'abord les travaux accomplis jusqu'ici. Enlevé dans la
fleur de l'âge, M. Mazzei avait devant lui l'espoir d'une bril-
lante carrière où son talent aurait eu lieu de s'affirmer en des
tâches de plus en plus importantes. Heureusement M. de Fa-
bris , qui, comme nous l'avons dit plus haut, a remplacé
M. Mazzei, est lui-même un artiste d'une haute valeur.

Puissent les nombreux monuments qui réclament le secours
du restaurateur tomber toujours en d'aussi bonnes mains : puisse
aussi un esprit étroit et inintelligent de prétendue conservation
ne pas mettre obstacle, comme il le fait surtout dans les villes
de province, à ce travail réparateur qui a pour mission de faire
justice des licences que le mauvais goût des deux derniers siè-
cles se permettait aux dépens des plus admirables monuments
du moyen âge.

L. Mussini.
 
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