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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 5.1879 (Teil 3)

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Champfleury: L' art familier et de parodie dans l'antiquité
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Montrosier, Eugène: Les concours de Rome en 1879: Peinture et sculpture
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https://doi.org/10.11588/diglit.17801#0208

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i64 L'A

M. E. Gebhart, dans son Essai sur la peinture de genre
dans l'antiquité, disait : « La caricature n'est assurément pas
empreinte du caractère idéal; cependant elle suppose le senti-
ment de l'idéal. Si la laideur choque l'artiste, c'est qu'elle étend
comme une ombre sur la beauté dont son regard intérieur con-
templait la pure lumière. » 1

Cette ombre de spiritualisme et d'idéal inconscients, qu'on
remarque en effet en pénétrant au fond de l'œuvre de quelques
caricaturistes, ne me paraît pas se retrouver dans la pein-
ture du vase actuel. M. Georges Perrot ne l'a pas pris de si
haut, et de ce mémoire, dans lequel les recherches côtoient la
thèse sans y faire irruption et où la pensée apparaît claire, com-
mandant son sujet, je détache le passage suivant, un des plus
judicieux aperçus sur l'art grec :

« Dans n'importe quel musée, jetez les yeux sur une collec-
tion de vases ou de terres cuites, sur une suite de rhytons ou
sur une série de petits bronzes, et vous serez frappé de trouver
là, à côté d'objets qui, par la noblesse d\i style, vous rappellent
les plus pures traditions de la statuaire, des figures et des grou-
pes d'un tout autre caractère, où se donne libre carrière une
verve satirique et moqueuse, parfois grossière jusqu'à l'indé- |

RT.

pendance. Ici ce sont des difformités physiques qu'il exagère,
comme la longueur du nez ou son insuffisance, la largeur de la
bouche, l'épaisseur d'une lèvre pendante ; ce sont des types
inférieurs, comme celui de nègre, dont il s'amuse à outrer les
traits caractéristiques. Ailleurs il prête à l'homme la tète et les
membres de l'animal, ou à celui-ci le costume et les occupations
de l'homme, et il trouve dans la confusion de ces deux natures
des effets imprévus et comiques, des allusions railleuses. A l'aide
de ces divers moyens graphiques, il tourne souvent en parodie
des personnages célèbres, des scènes empruntées au mythe, à
l'épopée ou à la tragédie. L'imagination grecque, si sobre et si
retenue dans le grand art comme dans la poésie sérieuse, s'é-
chappe et prend ses ébats avec la comédie et avec l'art du
céramiste, modeleur ou peintre. » *

On ne peut mieux dire, et je me garderai de rien ajouter à
cet aperçu sur un des côtés de l'art antique qui devra servir de
premier plan à de nouvelles recherches, à une vive et profonde
élucidation des monuments, des mœurs, de la nature d'esprit de
l'ancienne Grèce.

Champfleury.

LES CONCOURS DE ROME EN 1879

PEINTURE ET SCULPTURE

Les concours de Rome pour la peinture et la sculpture ont
offert cette année un très vif intérêt, non seulement à raison des
travaux des concurrents, mais aussi par suite des décisions du
jury et des étonnements qu'elles ont provoqués.

Plutarque avait fourni le sujet du concours de peinture. Il
s'agissait de la mort de Démosthène. Inutile de refaire ici l'his-
toire du t prince des orateurs grecs ». Bornons-nous à citer le
programme académique.

«.....En disant ces mots, Démosthène entra dans l'intérieur

du temple de Neptune, et prenant ses tablettes, comme pour
écrire, il porta le poinçon à sa bouche et le mordit, ce qu'il fai-
sait ordinairement, quand il méditait ou composait quelque
discours. Après l'y avoir tenu quelque temps, il se couvrit de sa
robe et pencha la tête. Les soldats qui se tenaient à la porte du
temple se moquaient de lui de craindre ainsi la mort, et le trai-
taient de lâche et de mou.

« Le rhéteur Archias, s'étant rapproché de lui, l'engageait à
se lever et lui répétant les mêmes propos, il lui promettait de le
réconcilier avec Antipater. Démosthène, qui sentait que le poison
avait fait son effet, se découvrit et fixant son regard sur Archias
qui avait été tragédien : « Tu peux maintenant, lui dit-il, jouer
« le rôle de Créon dans la tragédie et faire jeter ce corps où tu
<c voudras/sans lui accorder les honneurs de la sépulture. O Nep-
« tune, ajouta-t-il, je sors vivant de ton temple, mais Antipater et
« les Macédoniens ne l'auront pas moins souillé par ma mort ».

« Il finissait à peine ces mots qu'il se sentit trembler et
chanceler. Il demanda qu'on le soutînt pour marcher, et comme
il passait devant l'autel du dieu, il tomba et mourut en poussant
un profond soupir ».

S'ils s'étaient avisés de prendre à la lettre un programme
aussi complexe, les concurrents eussent été fort embarrassés.
A moins d'imiter les gothiques qui ne se gênaient pas pour
retracer sur un même panneau les incidents successifs d'une
action, nous ne voyons pas comment ils auraient pu s'en tirer,

car c'est véritablement une tragédie en trois actes qu'on leur
demandait de peindre en un seul tableau.

Premier acte : Démosthène en butte aux railleries des
soldats.

Second acte : Entrée du rhéteur Archias. Dernier discours
de Démosthène.

Troisième acte : Dernier soupir de Démosthène.

Avouons qu'il n'était pas commode de représenter à la fois
Démosthène mordant son poinçon, parlant et mourant. Aussi les
concurrents ont-ils été obligés de choisir. Il en est qui ont fait
un choix assez sommaire. Tel M. Fritel qui, éludant les difficul-
tés du groupement d'un grand nombre de personnages, s'est
contenté d'un Démosthène chancelant et convulsif dont Archias
étudie l'agonie.

M. Bramtôt, qui a obtenu le premier grand prix, a disposé
la scène avec intelligence. Son Démosthène touche à la minute
suprême, et son regard voilé se dirige vers la statue de Neptune.
Des soldats l'entourent, des clients le soutiennent. Un grand
trouble remplit le temple. Des fleurs d'une exquise coloration
gisent sur les dalles. L'ensemble de la composition est habile-
ment ordonnancé, et la main du jeune artiste déjà familiarisée
avec les ressources de la brosse a traité d'excellents morceaux.
Son Archias a l'air d'un Mounet-Sully figé, mais les architectures
qui encadrent la scène sont bien comprises, et l'air y circule.
Somme toute, c'est là une œuvre distinguée, et peut-être la
plus satisfaisante de toutes si l'on est d'autant plus satisfait d'une
œuvre qu'elle compte moins de défauts et d'incorrections.

Pour nous qui, surtout chez un débutant, préférons une
qualité saillante où l'on puisse voir un indice d'avenir et le
germe d'une personnalité, nous aurions donné la palme à
M. Doucet (second grand prix de 1878), d'accord avec la section
de peinture, contre les autres sections de l'Académie. Certes le
tableau de M. Doucet n'est pas irréprochable. L'attitude de son
Archias est presque comique et donnerait à penser que ce tragé-

1 Archives des Missions scientifiques et littéraires, 1S68.

2. Georges Perrot, le Triomphe d'Hercule, caricature grecque d'après un vase de la Cyrénaîque. Paris, typ. Chamerof, 1876. In-j".
 
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