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CHRONOLOGIE HISTORIQUE
CHRONOLOGIE HISTORIQLTE
D E S
COMTES D E BOULOGNE.
Le Boulonois, compris anciennement clans le pays des Morîns et depuis dans le Ponthieu Jusqu’après le mi-
lieu du ix e siécle, forme aujourd’hui cîans la basse Picardie une étendue de douze lieues en longueur sur
huit de largeur, entre le Comté de Guines, PArtois, le Ponthieu etl Ocean.
On convient maintenant que Boulogne, sa capitale, est le Gesoriacum des Anciens. Le nom àeBononia,
changé depuis par altération en celui de Bolonia, ne paroît îui avoir été donné que vers la fm du m e siécle
de PEglise. Le plus ancien auteur qui ait identifié Gesoriac avec Boulogne est le Rhéteur Eumenius Pacatus.
Dans le panégyrique de PEmpereur Constance Chlore, parlant d’une expédition de ce Prince contre le
tyran Carausius et les écumeurs de mer, il fait mention d’une estacade au moyen de laquelle il lcs avoit
empêchés de sortir du port de Gesoriac dont ils s’étoient saisis; et dans le panégyrique de Constantin , fds
de Chlore , il dit, en rappellant cette même action , que c’étoit au port de Boulogne qu’elle s’étoit passée
Exercitum illum qui Bononiensis oppidi littus insederat, terrâ pariter ac mari sepsit. L’auteur anonyme
d’une vie du même Constantin, publiée par Elenri de Valois à la suite de son Ammien Marcellin, est encore
plus formel, en prenant indisféremment Gesoriac et Boulogne dans un même texte ; c’est en parlant de la
célérité avec laquelle Constantin traversa l’Italie et les Alpes, et se rendit auprès de son pere à Boulogne ,
nommé Gesoriac, dit-il, par les Gaulois,pour se soustraire aux embuches qui lui étoient dressées à la Cour de
Dioclétien : Qui ut Severum per Italiam transiens vitaret, sutnmd festinatione, veredis post se truncatis,
Alpes transgressus ad patrem Constantium venit apud Bononiam quam Galli priîis Gesoriacum voca-
bant. Ce qui donna occasion de substituer à Gesoriacum le nom de Bononia , c’est, suivant l’opinion
la plus probable, l’établisseinent d’une colonie italienne, tirée de Bologne la grasse.
Gesoriac étant un des ports les plus fréquentés de la Gauie belgique , Caligula, dans le tems qu’il étoit sur
les lieux, feignant de vouloir s’embarquer avec une flotte pour la Grande-Bretagne, y ht construire un pliare,
qui s’est conservé jusques vers le milieu du dernier siécle, sous le nom de Tour d’ordre, en latin Turris
ardens, et par corruption Turris ordans ou odrans.
Cette Tour, bâtie sur la falaise qui commandoit le port, étoit octogone , et chacun de ses côtés avoit en-
viron 25 pieds. Douze especes de galeries , ménagées extérieurement dans l’épaisseur du mur, la rétrécis-
soient graduellement jusqu’au somrnet, où l’on allumoit, pendant la nuit, des feux pour servir de guide
aux vaisseaux qui naviguoient dans la Manche.
Plusieurs modernes ont prétendu que le port de Boulogne est le portus Iccius, où César s’embarqua deux
fois pour passer dans la Grande-Bretagne. Mais nous préférons le sentiment de M. d’Anville , qui pense que
ce port est Wit-Sand ou Wissan , à trois lieues de Guines, vers l’Occident.
Le Boulonois n’a eu des limites fixes et déterminées qu’après avoir été détaché du Ponthieu pour former
un Comté particulier.
HERNEQUIN.
Hernequin , neveu de Baudouin le Chauve, Comte
de Flandre , fut établi Cointe de Boulogne par Hel-
gaud I, Comte de Ponthieu , dont il avoit épousé la
jfille, noinmée Berthe. II fit hommage à Baudouin ,
son oncle , de la terre de Merx , ou Marc, qu’il pos-
sédoit entre Guines et Gravelines ; et c’est le prernier
hommage , dit une ancienne Chronique , que oncques
Comte de Boulogne feit au Comte de Flandre , sans
plus de la terre de Merh : ne plus ne moins , ajoute-
t-elle , nest tenu par droitle Comte de Boulogne tenir
par anchiseure dudit Comte de Flandre que Merque.
L’an 882, les Nonnands , sous la conduite de Gor-
rnond et d’Isembert, renégat françois , ayant fait une
descente au port de Wimeru, à une lieue de Boulogne,
le Comte Hernequin marcha contre eux , et fut battu'.
Mais au lieu de se retirer à Boulogne, il passa la ri-
viere de Lianne et ensuite la Canche. Les Barbares ce-
pendant prirent Boulogne, où ils exercerent des cruau-
tés inouies, et de là marchant vers la Somme , ils y
joignirent d’autres bandes des leurs quiavoient abordé
par l’embouchure de cette riviere. Hernequin , avec
d’autres Seigneurs voisins, leur ayant livré un nou-
veau combat, y fut blessé à mort, et alla expirer à
l’Abbaye de Samer, où Berthe , sa femme , s’étoit re-
tirée.
R E G N I E R.
882. Regnier , dit aussi Raginaire ouVaginaire,
fils d’Hernequin, lui succëda au Comté de Boulogne.
II avoit été élevé à la Cour de Baudouin I, Comte de
Flandre ; et la liberté dont il y avoit joui avoit dégé-
néré en licence. II en revint avec des mœurs fort dé-
pravées , que l’exemple d’ADÉLAÏDE , Dame très ver-
tueuse, qu’il avoit épousée par les soins de Baudouin,
ne put corriger. Regnier fut un Prince féroce , qui ne
prenoit conseil que de son caprice, et ne suivoit d’au-
CHRONOLOGIE HISTORIQUE
CHRONOLOGIE HISTORIQLTE
D E S
COMTES D E BOULOGNE.
Le Boulonois, compris anciennement clans le pays des Morîns et depuis dans le Ponthieu Jusqu’après le mi-
lieu du ix e siécle, forme aujourd’hui cîans la basse Picardie une étendue de douze lieues en longueur sur
huit de largeur, entre le Comté de Guines, PArtois, le Ponthieu etl Ocean.
On convient maintenant que Boulogne, sa capitale, est le Gesoriacum des Anciens. Le nom àeBononia,
changé depuis par altération en celui de Bolonia, ne paroît îui avoir été donné que vers la fm du m e siécle
de PEglise. Le plus ancien auteur qui ait identifié Gesoriac avec Boulogne est le Rhéteur Eumenius Pacatus.
Dans le panégyrique de PEmpereur Constance Chlore, parlant d’une expédition de ce Prince contre le
tyran Carausius et les écumeurs de mer, il fait mention d’une estacade au moyen de laquelle il lcs avoit
empêchés de sortir du port de Gesoriac dont ils s’étoient saisis; et dans le panégyrique de Constantin , fds
de Chlore , il dit, en rappellant cette même action , que c’étoit au port de Boulogne qu’elle s’étoit passée
Exercitum illum qui Bononiensis oppidi littus insederat, terrâ pariter ac mari sepsit. L’auteur anonyme
d’une vie du même Constantin, publiée par Elenri de Valois à la suite de son Ammien Marcellin, est encore
plus formel, en prenant indisféremment Gesoriac et Boulogne dans un même texte ; c’est en parlant de la
célérité avec laquelle Constantin traversa l’Italie et les Alpes, et se rendit auprès de son pere à Boulogne ,
nommé Gesoriac, dit-il, par les Gaulois,pour se soustraire aux embuches qui lui étoient dressées à la Cour de
Dioclétien : Qui ut Severum per Italiam transiens vitaret, sutnmd festinatione, veredis post se truncatis,
Alpes transgressus ad patrem Constantium venit apud Bononiam quam Galli priîis Gesoriacum voca-
bant. Ce qui donna occasion de substituer à Gesoriacum le nom de Bononia , c’est, suivant l’opinion
la plus probable, l’établisseinent d’une colonie italienne, tirée de Bologne la grasse.
Gesoriac étant un des ports les plus fréquentés de la Gauie belgique , Caligula, dans le tems qu’il étoit sur
les lieux, feignant de vouloir s’embarquer avec une flotte pour la Grande-Bretagne, y ht construire un pliare,
qui s’est conservé jusques vers le milieu du dernier siécle, sous le nom de Tour d’ordre, en latin Turris
ardens, et par corruption Turris ordans ou odrans.
Cette Tour, bâtie sur la falaise qui commandoit le port, étoit octogone , et chacun de ses côtés avoit en-
viron 25 pieds. Douze especes de galeries , ménagées extérieurement dans l’épaisseur du mur, la rétrécis-
soient graduellement jusqu’au somrnet, où l’on allumoit, pendant la nuit, des feux pour servir de guide
aux vaisseaux qui naviguoient dans la Manche.
Plusieurs modernes ont prétendu que le port de Boulogne est le portus Iccius, où César s’embarqua deux
fois pour passer dans la Grande-Bretagne. Mais nous préférons le sentiment de M. d’Anville , qui pense que
ce port est Wit-Sand ou Wissan , à trois lieues de Guines, vers l’Occident.
Le Boulonois n’a eu des limites fixes et déterminées qu’après avoir été détaché du Ponthieu pour former
un Comté particulier.
HERNEQUIN.
Hernequin , neveu de Baudouin le Chauve, Comte
de Flandre , fut établi Cointe de Boulogne par Hel-
gaud I, Comte de Ponthieu , dont il avoit épousé la
jfille, noinmée Berthe. II fit hommage à Baudouin ,
son oncle , de la terre de Merx , ou Marc, qu’il pos-
sédoit entre Guines et Gravelines ; et c’est le prernier
hommage , dit une ancienne Chronique , que oncques
Comte de Boulogne feit au Comte de Flandre , sans
plus de la terre de Merh : ne plus ne moins , ajoute-
t-elle , nest tenu par droitle Comte de Boulogne tenir
par anchiseure dudit Comte de Flandre que Merque.
L’an 882, les Nonnands , sous la conduite de Gor-
rnond et d’Isembert, renégat françois , ayant fait une
descente au port de Wimeru, à une lieue de Boulogne,
le Comte Hernequin marcha contre eux , et fut battu'.
Mais au lieu de se retirer à Boulogne, il passa la ri-
viere de Lianne et ensuite la Canche. Les Barbares ce-
pendant prirent Boulogne, où ils exercerent des cruau-
tés inouies, et de là marchant vers la Somme , ils y
joignirent d’autres bandes des leurs quiavoient abordé
par l’embouchure de cette riviere. Hernequin , avec
d’autres Seigneurs voisins, leur ayant livré un nou-
veau combat, y fut blessé à mort, et alla expirer à
l’Abbaye de Samer, où Berthe , sa femme , s’étoit re-
tirée.
R E G N I E R.
882. Regnier , dit aussi Raginaire ouVaginaire,
fils d’Hernequin, lui succëda au Comté de Boulogne.
II avoit été élevé à la Cour de Baudouin I, Comte de
Flandre ; et la liberté dont il y avoit joui avoit dégé-
néré en licence. II en revint avec des mœurs fort dé-
pravées , que l’exemple d’ADÉLAÏDE , Dame très ver-
tueuse, qu’il avoit épousée par les soins de Baudouin,
ne put corriger. Regnier fut un Prince féroce , qui ne
prenoit conseil que de son caprice, et ne suivoit d’au-