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Revue égyptologique — 2.1881

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Nr. 2-3
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Revillout, Eugène: Entretiens philosophiques d'une chatte éthiopienne et d'un petit chacal Koufi, [3]
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https://doi.org/10.11588/diglit.10049#0123

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Entretiens philosophiques d'une chatte et d'un chacal.

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coup — peut-être inconsciemment — des doctrines chrétiennes, qui tendaient à se répandre
partout dans la vallée du Nil. Le chacal fut donc obligé de revenir à la charge. Cette fois,
voulant en finir, il fit tête et s'attaqua directement, bien qu'en paraboles, à cet axiome chré-
tien, qu'on chercherait en vain dans la morale égyptienne, déjà si pure pourtant : Faits le
bien pour le mal, ou, sous la forme citée par lui : On complote contre toi — Tu arriveras,
tu feras le bien.

L'apologue qu'il nous raconte a pour but de nous montrer que cette maxime n'est
qu'une ruse de guerre des forts qui sont habiles et qui veulent persuader aux faibles de se
laisser manger. On se souvient, sans doute, de la fable du lion malade et du renard. L'apo-
logue du lion et des chacals représente la même donnée.

Il nous reste à dire que cette doctrine du chacal paraît avoir été fort goûtée des in-
cantateurs qui ont rédigé l'infâme livre de sorcellerie dont nous avons fait connaître quelques
fragments. Ces industriels qui exploitaient la crédulité publique et lui offraient des moyens
faciles pour empoisonner, pour séduire, bref pour exécuter tous les crimes — ces misérables
que les lois romaines frappaient, avec raison, des plus cruels supplices — estimaient cette
philosophie — que soutenait naguère encore, dans une conférence publique, un célèbre cri-
minel, savant distingué, Lebiès, après avoir assassiné une pauvre femme. Nous avons la preuve
positive de cette prédilection des sorciers; car la main de celui qui a écrit le livre d'incanta-
tions dont nous avons parlé précédemment, a aussi tracé plusieurs de ses formules magiques
sur la partie blanche de notre papyrus, conservé par lui avec soin et qu'il relisait, sans
doute, de temps en temps pour étouffer la voix de sa conscience.

L'ouvrage des Entretiens philosophiques avait, du reste, une certaine notoriété à cette
époque. Le prophète-tribun Sénuti — lors du livre qu'il composa contre les païens de son
temps — semble en avoir eu connaissance, puisque — plein des idées de naturalisme qui
avaient alors cours depuis Evhemere et que partageait, du reste, notre chacal — et, voyant
Isis causer avec un oiseau, il en conclut qu'Isis était elle-même un oiseau 1 déifié — ce qui
n'a absolument aucune base mythologique. Ailleurs encore, Sénuti se moque des prétendues
conversations d'oiseaux dont les païens parlaient — conversations qui se bornaient, en réalité,
à des sons inarticulés : Tics, Tics, Kouaks, Kouaks2. Que signifiait donc cette phrase si souvent
répétée par le philosophe égyptien : « Ecoute l'oiseau ! Vois l'oiseau ! »

Nous allons maintenant en arriver à notre texte.

C'est le chacal Konfi qui parle3 :

« Vois l'oiseau ! Écoute l'oiseau. — (Il dit : « Ce que le voisin m'a fait) je le lui fais !

« Le vautour (dévorait) les abu de la montagne. .. . Isis vit cet oiseau qui n'épargnait
» nul autre. Il arriva un jour qu'Isis lui dit : Voyons! oiseau! mon œil est choqué de tes
» actions et ma vue de tes méfaits. — (L'oiseau dit : 11 en est ainsi parce qu'il) m'est arrivé

1 Zoega, p. 599. Voir aussi ma biographie du prophète Sénuti.

2 Voir ma biographie de Sénuti.

3 Ce texte, dont nous reproduisons le mot à mot dans les planches, se trouve dans la publication
dos Monuments de Leyde de M. Leemaks (IIe partie, pl. C'CXX et suiv.). Il commence au dernier tiers de
la colonne 18 papyrus 384, et comprend, en outre, les colonnes 14, 15 et lfi. Dans quelques lignes de la
colonne 13 se trouvent de nombreuses lacunes causées par les déchirures du papyrus et que nous avons
dû remplir hypothétiquement. A la colonne 16 nous trouverons aussi des lacunes causées par l'effacement
de l'écriture.
 
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