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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 4.1878 (Teil 2)

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Véron, Eugène: La Société des Amis des Arts de Marseille
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https://doi.org/10.11588/diglit.16909#0137

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n8

L'ART.

Eisen, Le Prince, Cochin, Lancret, Greuze, P. Al. Wille, les
Saint-Aubin, Dandré-Bardon, J. M. Pierre, Caresme, L. Boilly,
Lagrenée, etc.

J'en passe, ne voulant pas copier tout le catalogue, mais
cela suffit pour faire entrevoir ce que renferment de trésors les
cartons des amateurs marseillais, renvoyant pour le reste au
compte rendu de M. Brès.

La Société avait l'intention de faire succéder à cette exposi-
tion de dessins une exposition de gravures anciennes, également
empruntées aux cabinets des amateurs de Marseille. Mais comme
à ce moment-là même les artistes marseillais se trouvèrent avoir
dans leurs ateliers un certain nombre d'œuvres achevées, ils deman-
dèrent à la Société de remettre à un autre jour l'exposition proje-
tée et déjà préparée, et de la remplacer par une exposition de
leurs ouvrages. C'est ce qui fut fait, et je pus, aumoment de mon
départ de Marseille, jeter un coup d'œil rapide sur l'ensemble.

Il y a à Marseille un assez grand nombre d'artistes, et parmi
eux il n'en manque pas qui ont du talent, autant que j'en ai pu
juger dans cette trop courte visite. Mais le temps m'a manqué
pour étudier, comme il l'aurait fallu, ces 120 toiles. Je dois donc
me contenter de transcrire quelques impressions, au hasard de
notes prises en courant et sans catalogue.

Les paysagistes dominent à Marseille comme partout. Il y en
a au moins une quinzaine dont les noms méritent d'être men-
tionnés. Malheureusement la plupart sont plus ou moins atteints
d'orientalisme, c'est-à-dire qu'ils sacrifient trop aux effets du
soleil et à la sensation lumineuse. L'impression intime et person-
nelle, le sentiment poétique du paysage, qui éclate si vivement
dans les toiles de Rousseau et de Jules Dupré, est presque com-
plètement laissé de côté par les peintres marseillais. Leurs ceu -
vres ont un dehors très-brillant, mais le dedans manque un peu.
Il y a là évidemment un résultat qu'il faut attribuer en partie au
climat, à l'habitude du grand soleil, de la lumière violente, mais
aussi au succès qu'ont obtenu les inventeurs de l'orientalisme et
à l'engouement qu'a excité dans ces derniers temps la peinture
kaléidoscopique de Fortuny. Cet engouement touche à sa fin,
et il faut espérer que les artistes de Marseille s'en guériront
comme les autres.

L'Oasis, laChasse, le Passage delà Rivière, de M. Huguet,
sont de bonnes toiles. La lumière de l'Orient y est bien rendue, sans
exagération ni crudité ; les tons des terrains et des pierres sont
justes et les taches des animaux et des costumes sont en général
bien distribuées. Mais on a vu cela cent fois aux expositions
depuis 1830. Que nos artistes se soient empressés de courir aux
pays du soleil, à cette époque, on le conçoit sans peine, il y avait
là une source de sensations et d'effets nouveaux; mais ces sen-
sations et ces effets ont été bien vite épuisés, justement à eau se
de leur étrangeté et de leur intensité; ajoutons à cela que ces
effets sont en somme peu variés, comme tout ce qui est extrême,
et qu'ils ont été dès l'abord admirablement rendus par des
artistes qui, outre leur génie, avaient sur leurs successeurs le
double avantage de leur propre émerveillement et de la sur-
prise du public. Je ne sais s'il serait possible de renouveler cette
veine, mais en tout cas cela ne pourrait se faire que par une
puissance de personnalité sur laquelle il serait téméraire de
compter.

Quelque réel que soit le talent de MM. Huguet, Boze,
Chataud, Bain, Saint-Pierre, on ne peut, en voyant leurs scènes
et leurs paysages orientaux, leurs fantasias et leurs sérails, se
défendre des souvenirs qu'ils provoquent et qui ont pour effet
nécessaire de faire considérer comme des imitations plus ou
moins réussies des œuvres parfaitement sincères et originales.

Nous en dirons autant des toiles chatoyantes de M. Mirallès
(d'Armanin). Dans les genres bruyants, tout en dehors, comme
celui-là, il faut venir — ou devenir — le premier, et la seconde
condition n'est guère plus commode que la première. Les notes
éclatantes fatiguent vite, précisément parce qu'elles font une
plus forte impression, que la variété leur manque, et surtout

parce que la personnalité de l'artiste y a peu de place. Je m'i-
magine qu'un concert de trombones seuls lasserait vite les
dilettantes qui ont le plus de goût pour cet instrument. En art
comme ailleurs il est bon d'avoir plusieurs cordes à son arc.

Le plus étonnant de ces outranciers de la couleur, c'est
M. Monticelli. Ses toiles sont de véritables fanfares. Il possède
une palette prestigieuse et il est difficile d'imaginer dans ce genre
quelque chose de comparable au bouquet de femmes nues qu'il
expose au milieu d'un passage de fantaisie. Mais lui aussi n'a
qu'une corde à son arc. C'est pourquoi je lui préfère M. Boze
qui, outre un Paysage oriental et une Chasse à la Fromentin,
expose un charmant Coucher de soleil qui rappelle quelque peu
l'aspect général de certaines toiles hollandaises, mais où l'on
sent une étude personnelle et dont le ciel se fait remarquer par
une grande vérité de coloration et par une rare finesse de
tons.

Le paysage de M. Guigou rend bien l'aspect de la cam-
pagne provençale, et la dégradation des plans est exactement
saisie. M. Maglione expose deux paysages, dont l'un est un peu
uniforme de ton et manque de lumière. Dans l'autre, qui repré-
sente un chemin avec des arbres projetant leur ombre sur une
mare, il y a des détails heureux, mais l'impression est hésitante.
La même observation peut s'appliquer aux toiles de MM. Eugène
Milhau, Fraissinet, Noirot. Chacune renferme d'incontestables
qualités. On y sent des artistes consciencieux qui veulent et qui
savent rendre le caractère exact de la nature qu'ils ont eu sous
les yeux, mais qui se contentent trop facilement de cette vérité
extérieure. On n'y sent pas assez l'émotion personnelle, sans
laquelle l'art est nécessairement incomplet. Ce défaut, qui devient
celui de presque toute notre école contemporaine de paysage,
tient en partie à une erreur de doctrine, qui confond à tort les
conditions de l'art avec celles de la science. La science n'a à se
préoccuper que de la réalité des choses et son devoir est de se
dégager de toute passion humaine. A la réalité objective l'art,
pour être complet, doit ajouter la vérité de l'impression humaine.
Il n'existe que comme résultante de la combinaison de ces deux
éléments. C'est ce que néglige trop l'école naturaliste qui domine
aujourd'hui dans le paysage. Il semble que M. Duveyrier ait
quelque sentiment de cette nécessité de l'art. Il cherche l'effet et
y arrive, mais par un procédé purement matériel, par des vio-
lences de touche trop visibles.

La Rue de M. Viguier est vigoureusement brossée. La lumière
est bonne et les tons salis des murs sont d'une justesse suffi-
sante.

Les marines sont assez nombreuses, comme il convient dans
un port de mer, et l'on voit du premier coup qu'elles ont été
peintes par des artistes habitués à l'aspect de la mer. Celle de
M. Olive, qui rend admirablement le scintillement de l'eau,
tranche sur les autres par l'exagération des tons bleus. Il est pos-
sible que la Méditerranée puisse parfois présenter une colora-
tion aussi violente, mais c'est bien certainement une exception.
Pour mon compte je ne l'ai jamais vue ainsi, non plus que
MM. Maglione, Barry et Suchet, si j'en juge par les marines
qu'ils ont exposées.

Parmi les animaliers, il faut citer MM. Bouisson, Beaume,
Dauphin, Vimar, Pellegrin, Loubon et Simon. La plus remar-
quable de ces toiles me paraît être celle de M. Simon, Chèvres au
repos ; la plus étonnante est celle de M. Pellegrin qui a su faire
un tableau à peu près harmonieux, avec une femme bleue, des
cavaliers à casaques rouges, montés sur des chevaux roux ou
bruns, et une meute de chiens blancs, grâce à la proportion et
à la distribution des taches. Les Paysans et animaux à la fontaine,
de M. Loubon, forment un assez bon ensemble; il me semble
toutefois que l'âne qui arrive le dernier n'est pas tout à fait à
son plan. Il entre dans la vache qui boit.

La réduction du plafond du grand salon de la préfecture par
M. Magaud, le directeur de l'École de peinture de Marseille, pa-
raît bien conçue au point de vue de la décoration. Mais il est
 
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