DES EMPEREURS D'OCCIDENT.
Maison dans celle de Franconie, 8c les troubles d’Ita-
üe, occuperent les premieres années de son régne.
L’an 1061 3 les Romains , suivant Benzon, lui en-
voyerent, par une députation solemnelle, les orne-
mens du Patriciat ; savoir, la clamyde, la mitre, l’an-
neau 8c le cercle patricial. Les Seigneurs Allemands
souffroient impatiemment d’être gouvernés par une
femme. L’an 1062, Annon , Archevêque de Colo-
gne, enleve Henri à l’Impératrice , sa mere, 8c se
rend maître du gouvernement avec Adalbert, Ar-
chevêque de Brème. L’Impératrice reçut cette dis-
grace avec beaucoup de constance 8c de résignation.
Elle quitta l’Allemagne pour se retirer à Rome , où
elle vécut saintement ? sous la diredtion de Pierre de
Damien, jusqu’à sa mort arrivée le 14 Dccembre
1077. Des ssatteurs s’étant inssnués dans l’esprit du
jeune Prince, lui corrompent le cœur 8c l’entraînent
dans le désordre. L’Archevèque Adalbert, l’un de
ceux qui favorisoient ses mauvais penchans , souieve
contre lui tous les Seigneurs distingués par leur mé-
rite, 8c se voit obligé d’abandonner la Cour. Henri,
comme nous l’avons vu, avoit été fiancé, l’an 1055,
par son pere à Berthe , fille d’Otton, Marquis de
Suze. Annon lui fit épouser cette Princesse en 1066.
Mais Berthe, dont la main n’étoit pas de son choix, ne
put réussir à lui plaire. II entretint plusseurs concu-
bines à la fois , attenta à i’honneur des femmes dont
la beauté frappa ses yeux, 8c pour en jouir librement
flt périr secretement leurs maris. Ses revenus n’é-
tant pas suflisans pour fournir à ses débauches, il mit
à prix d’argent les investitures des Bcnéfices, dont il
faisoit un commerce public. II éloigna la Reine sa
femme dont la présence lui devenoit de jour en jour
plus insupportable, 8c convoqua, l’an 1069 , un Con-
cile à Mayence pour faire caiser son tnariage. Mais Je
Légat Pierre de Damien , qui se trouvoit à cette
Assemblée, lui défendit, de la part du Pape Ale-
xandre II, d’exécuter son dessein. Bertlae fut rap-
peliée de Lauresham 011 il l’avoit reléguée 3 mais il
continua de la mépriser 8c de la maltraiter. Toute
l’Allemagne murmura contre la conduite de Henri,
l’injustice de ses Ministres 8c la licence de ses trou-
pes. L’an 1073 , commencerent les longues 8c fa-
meuses guerres des Saxons 8c des autres mécontens
contre Henri. Vers le mème tems s’éleva la que-
relle, non moins fameuse, entre ce Prince 8c le Pape
Grégoire VII, touchant les investitures des Béné-
fices. (Voy. dansla Chronol. desPapes, p. 279,Gré-
goire VII, & dans celle des ConciLes , p. 179, col. 2
& suivantes, ceux qui fe font tenus d cette occason ,
depuLs celui de Worms> du 23 Jaa\ier 1076, juf-
qu à celui d''Autun du 16 Octobre 1094.) L’an 1075,
Henri gagne une grande bataille sur les Saxôns , le
8 Juin , près de l’Ùnstrut 3 mais cette viâroire n’a-
terra point les rebelles. ( Marian. Scot. ). Excités par
le Pape, ils tiennent à Forcheim , le 15 Mars 1 077,
une Diete où ils élisent Roi de Germanie, à la place
deHenri, qu’ils avoient déposé deux jours auparavant,
Rodolphe, Dllc de Suabe, son beau-frere, qui fut
couronné le 16 du mème mois. Les deux Princes
rivaux se livrerent deux batailles en 1078. Henri,
battu dans la premiere, eut sa revanche dans la se-
conde donnée le 7 Août. Semblable alternative en
1080. Rodolplie , le 27 Janvier, attaqué par Henri,
remporte la viftoire à Flatciieim en Saxe. La nou-
velle de cet événement étant venue à Rome , Gré-
goire confirma l’éledion de Rodolphe , sur laquelle
il avoit héssté jusqu’alors, & lui envoya, en ssgne
d’investiture, une couronne d’or, autour de laquelle
étoit écrit ce vers : Petra dedit Petro , Petrus dia-
dema Rodulpho. Mais, le 15 Oètobre suivant, Henri
fut vainqueur à son tour, 8c d’une maniere plus dé-
cisive , à la bataille donnée à Wolîcsheim, jprès de
Géra dans la Thuringe. Rodolphe y fut bleiié mor-
tellement par Goderroi de Bouillon , d’un coup de
lance porté dans le bas ventre, 8c par un soldat, d’un
coup de sabre qui lui emporta la main droite. Dans
cet état il se fait porter à MersboLirg , où il mourut
dans de grands sentimens de repentir. Le même jour
qu’il expira , les troupes de Henri battirent encore
celies de Ja Comtesse Matlailde. C’est ainsi qLie le
Ciel démentoit les malédiùtions que Grégoire don-
noit atix armes de ce Prince. Henri, l’an 1081, passe
les Monrs au commencement de Mars, & Va se pré-
senter vers la Pentecote devant Rome dont il trouve
les portes fermées. N’osant entreprendre de les en-
foncer, il se retire , 8c laisse l’Antipape Guibert,
qti’il avoit fait élire le 2 5 Juin de l’année précédente,
avec des troupes qui ravagent le pays. Les rebelles
d’Aliemagne, malgré la derniere vicftoire remportée
sur eux, persistoient toujours dans leur révolte. Le
9 Août de la même année (1081) 8c non pas de la
suivante, comme le marque Pagi d’après Marianus
Scotus 8c la Chronique d’Hildesheim , s’étant assem-
blés en Diete à Goslar, ils procedent à i’éledtion I
d’un nouveau Roi. Les suffrages tombent sur Her-
man de Luxembourg, Comte de Salm , qui fut
couronné le 2 6 Décembre suivant par l’Archevèque
de Mayence. Henri avoit toujours à cœur la prise
de Rome, dans le dessein de se rendre maître de la
personne du Pape 8c d’imposer par là à ses ennemis.
Etant revenu, l’an 1082, devant cette ville, il en
forme le ssége qui traîne en longueur. Enfin l’an
1084, il entre par intelligence dans Rome Ie 21
Mars , un jeudi, avec l’Antipap.e , qu’ii fait intro-
niser le Dimanche suivant, sous le nom de Cié-
ment III, reçoit de ses mains la couronne impériale
le jour de Paque, 31 Mars , assîége ensuite Gré-
goire VII dans ie Château S. Ange où il s’étoit ren-
fermé. Robert Guiscard, Duc de la Pouille, in-
terrompt ses conquètes sur les Grecs pour venir au
secours du Pape. Henri, à son approche , quitte
Rome , se retire en Lombardie pour faire la guerre
à la Comtesse Mathilde, sa coufine , déclarée pour
Grégoire VII, 8c de-là repasse en Allemagne. Les
affaires de l’Anticésar Herman ne prospéroient pas I
mieux que celles de l’Antipape Guibert. L’an 1088,
se voyant méprisé des Saxons, il fait sa paix avec
Henri, 8c retourne dans son Comté de Salm. II y
est tué peu de tems après en faisant, par maniere de
divertissement, le ssége d’un Château pour exercer
ses troupes 8c éproLiver leur courage. ( Helmolde 8c
Albert de Stade disent qu’il fut écrasé par un des
battans de la porte qui se détacha de ses gonds. ) Sa
retraite ne rendit point à Henri la supériorité sur ses
ennemis. Vers la fin de la même année, il est entic-
rement défait par les rebelles , 8c n’échappe qu’avec
peine du combat. Malgré ce revers, le desir de se
venger de la Comtesse Mathilde, lui fait entrepren-
dre, l’an 1090, une nouvelle expédition au-delà
des Monts. II investit au mois de Juillet la ville de
Mantoue, appartenante à la Comtesse, 8c s’en rend
le maître, après un ssége ou blocus de 9 mois, Ie
11 Avril, jour du Vendredi-Saint de l’année sui-
vante. Les aftaires d’Allemagne le rappellant, en
1092 , il laisse en Italie Conrad, son fils aîné, pour
Tçme IL
Maison dans celle de Franconie, 8c les troubles d’Ita-
üe, occuperent les premieres années de son régne.
L’an 1061 3 les Romains , suivant Benzon, lui en-
voyerent, par une députation solemnelle, les orne-
mens du Patriciat ; savoir, la clamyde, la mitre, l’an-
neau 8c le cercle patricial. Les Seigneurs Allemands
souffroient impatiemment d’être gouvernés par une
femme. L’an 1062, Annon , Archevêque de Colo-
gne, enleve Henri à l’Impératrice , sa mere, 8c se
rend maître du gouvernement avec Adalbert, Ar-
chevêque de Brème. L’Impératrice reçut cette dis-
grace avec beaucoup de constance 8c de résignation.
Elle quitta l’Allemagne pour se retirer à Rome , où
elle vécut saintement ? sous la diredtion de Pierre de
Damien, jusqu’à sa mort arrivée le 14 Dccembre
1077. Des ssatteurs s’étant inssnués dans l’esprit du
jeune Prince, lui corrompent le cœur 8c l’entraînent
dans le désordre. L’Archevèque Adalbert, l’un de
ceux qui favorisoient ses mauvais penchans , souieve
contre lui tous les Seigneurs distingués par leur mé-
rite, 8c se voit obligé d’abandonner la Cour. Henri,
comme nous l’avons vu, avoit été fiancé, l’an 1055,
par son pere à Berthe , fille d’Otton, Marquis de
Suze. Annon lui fit épouser cette Princesse en 1066.
Mais Berthe, dont la main n’étoit pas de son choix, ne
put réussir à lui plaire. II entretint plusseurs concu-
bines à la fois , attenta à i’honneur des femmes dont
la beauté frappa ses yeux, 8c pour en jouir librement
flt périr secretement leurs maris. Ses revenus n’é-
tant pas suflisans pour fournir à ses débauches, il mit
à prix d’argent les investitures des Bcnéfices, dont il
faisoit un commerce public. II éloigna la Reine sa
femme dont la présence lui devenoit de jour en jour
plus insupportable, 8c convoqua, l’an 1069 , un Con-
cile à Mayence pour faire caiser son tnariage. Mais Je
Légat Pierre de Damien , qui se trouvoit à cette
Assemblée, lui défendit, de la part du Pape Ale-
xandre II, d’exécuter son dessein. Bertlae fut rap-
peliée de Lauresham 011 il l’avoit reléguée 3 mais il
continua de la mépriser 8c de la maltraiter. Toute
l’Allemagne murmura contre la conduite de Henri,
l’injustice de ses Ministres 8c la licence de ses trou-
pes. L’an 1073 , commencerent les longues 8c fa-
meuses guerres des Saxons 8c des autres mécontens
contre Henri. Vers le mème tems s’éleva la que-
relle, non moins fameuse, entre ce Prince 8c le Pape
Grégoire VII, touchant les investitures des Béné-
fices. (Voy. dansla Chronol. desPapes, p. 279,Gré-
goire VII, & dans celle des ConciLes , p. 179, col. 2
& suivantes, ceux qui fe font tenus d cette occason ,
depuLs celui de Worms> du 23 Jaa\ier 1076, juf-
qu à celui d''Autun du 16 Octobre 1094.) L’an 1075,
Henri gagne une grande bataille sur les Saxôns , le
8 Juin , près de l’Ùnstrut 3 mais cette viâroire n’a-
terra point les rebelles. ( Marian. Scot. ). Excités par
le Pape, ils tiennent à Forcheim , le 15 Mars 1 077,
une Diete où ils élisent Roi de Germanie, à la place
deHenri, qu’ils avoient déposé deux jours auparavant,
Rodolphe, Dllc de Suabe, son beau-frere, qui fut
couronné le 16 du mème mois. Les deux Princes
rivaux se livrerent deux batailles en 1078. Henri,
battu dans la premiere, eut sa revanche dans la se-
conde donnée le 7 Août. Semblable alternative en
1080. Rodolplie , le 27 Janvier, attaqué par Henri,
remporte la viftoire à Flatciieim en Saxe. La nou-
velle de cet événement étant venue à Rome , Gré-
goire confirma l’éledion de Rodolphe , sur laquelle
il avoit héssté jusqu’alors, & lui envoya, en ssgne
d’investiture, une couronne d’or, autour de laquelle
étoit écrit ce vers : Petra dedit Petro , Petrus dia-
dema Rodulpho. Mais, le 15 Oètobre suivant, Henri
fut vainqueur à son tour, 8c d’une maniere plus dé-
cisive , à la bataille donnée à Wolîcsheim, jprès de
Géra dans la Thuringe. Rodolphe y fut bleiié mor-
tellement par Goderroi de Bouillon , d’un coup de
lance porté dans le bas ventre, 8c par un soldat, d’un
coup de sabre qui lui emporta la main droite. Dans
cet état il se fait porter à MersboLirg , où il mourut
dans de grands sentimens de repentir. Le même jour
qu’il expira , les troupes de Henri battirent encore
celies de Ja Comtesse Matlailde. C’est ainsi qLie le
Ciel démentoit les malédiùtions que Grégoire don-
noit atix armes de ce Prince. Henri, l’an 1081, passe
les Monrs au commencement de Mars, & Va se pré-
senter vers la Pentecote devant Rome dont il trouve
les portes fermées. N’osant entreprendre de les en-
foncer, il se retire , 8c laisse l’Antipape Guibert,
qti’il avoit fait élire le 2 5 Juin de l’année précédente,
avec des troupes qui ravagent le pays. Les rebelles
d’Aliemagne, malgré la derniere vicftoire remportée
sur eux, persistoient toujours dans leur révolte. Le
9 Août de la même année (1081) 8c non pas de la
suivante, comme le marque Pagi d’après Marianus
Scotus 8c la Chronique d’Hildesheim , s’étant assem-
blés en Diete à Goslar, ils procedent à i’éledtion I
d’un nouveau Roi. Les suffrages tombent sur Her-
man de Luxembourg, Comte de Salm , qui fut
couronné le 2 6 Décembre suivant par l’Archevèque
de Mayence. Henri avoit toujours à cœur la prise
de Rome, dans le dessein de se rendre maître de la
personne du Pape 8c d’imposer par là à ses ennemis.
Etant revenu, l’an 1082, devant cette ville, il en
forme le ssége qui traîne en longueur. Enfin l’an
1084, il entre par intelligence dans Rome Ie 21
Mars , un jeudi, avec l’Antipap.e , qu’ii fait intro-
niser le Dimanche suivant, sous le nom de Cié-
ment III, reçoit de ses mains la couronne impériale
le jour de Paque, 31 Mars , assîége ensuite Gré-
goire VII dans ie Château S. Ange où il s’étoit ren-
fermé. Robert Guiscard, Duc de la Pouille, in-
terrompt ses conquètes sur les Grecs pour venir au
secours du Pape. Henri, à son approche , quitte
Rome , se retire en Lombardie pour faire la guerre
à la Comtesse Mathilde, sa coufine , déclarée pour
Grégoire VII, 8c de-là repasse en Allemagne. Les
affaires de l’Anticésar Herman ne prospéroient pas I
mieux que celles de l’Antipape Guibert. L’an 1088,
se voyant méprisé des Saxons, il fait sa paix avec
Henri, 8c retourne dans son Comté de Salm. II y
est tué peu de tems après en faisant, par maniere de
divertissement, le ssége d’un Château pour exercer
ses troupes 8c éproLiver leur courage. ( Helmolde 8c
Albert de Stade disent qu’il fut écrasé par un des
battans de la porte qui se détacha de ses gonds. ) Sa
retraite ne rendit point à Henri la supériorité sur ses
ennemis. Vers la fin de la même année, il est entic-
rement défait par les rebelles , 8c n’échappe qu’avec
peine du combat. Malgré ce revers, le desir de se
venger de la Comtesse Mathilde, lui fait entrepren-
dre, l’an 1090, une nouvelle expédition au-delà
des Monts. II investit au mois de Juillet la ville de
Mantoue, appartenante à la Comtesse, 8c s’en rend
le maître, après un ssége ou blocus de 9 mois, Ie
11 Avril, jour du Vendredi-Saint de l’année sui-
vante. Les aftaires d’Allemagne le rappellant, en
1092 , il laisse en Italie Conrad, son fils aîné, pour
Tçme IL