L' art: revue hebdomadaire illustrée (4.1878 (Teil 2))

ÉTUDES SUR QUELQUES MAITRES GRAVEURS. 181

par les bibliophiles ; elle a été décrite par Van Praet dans sa Notice sur Colard Mansion : Paris,
182g, itl-8. Cette édition a été imprimée par Colard Mansion dans le type qu'on appelle grosse
bâtarde, sans chiffres, réclames, ni signatures, avec minuscules en place d'initiales, sur deux
colonnes de 33 lignes chacune; elle contient 289 feuillets, et porte la date et le nom de son
imprimeur dans la souscription que voici, et qui se trouve à la seconde colonne du dernier
feuillet :

A la gloire et louenge de di-
eu et a l'instruction de tous
a este cestui euuure de boca
ce du dechiet des nobles
hommes et femmes, im-
prime a Bruges par Co-
lard mansion. Anno. M.
cccclxxvj

M. Sotzmann avait raison, l'édition de Colard Mansion, d'après les exemplaires connus, ne
contenait pas d'illustrations ; cependant le caractère de notre série correspond si bien à l'endroit,
Bruges, et à la date, 1476, qu'il n'était pas difficile de les supposer destinées à servir d'ornement
à cette édition, bien qu'elles eussent pu être retirées des exemplaires connus ou qu'elles n'y
eussent jamais été insérées. Seulement, une comparaison établie entre les gravures mômes et
quelques-uns de ces exemplaires semblait exclure une pareille hypothèse. Sauf entre le prologue
et le livre I, l'édition de Colard Mansion ne présente pas de pages toutes blanches où on aurait
pu coller des gravures ; de telles gravures ne pouvaient être placées ailleurs que sur les espaces
laissés en blanc et sans texte au recto des premiers feuillets de chaque livre. Mais ces espaces,
qui dans les exemplaires en question ne sont que de 16 à 18 lignes, sur les 3} lignes que
contient la page, ces espaces ne cadrent pas avec les dimensions des gravures, qui mesurent
environ 20 centimètres de hauteur sur 16 1/2 de largeur. Pour leur faire place, les espaces blancs
auraient dû être de 24 lignes au lieu de 16, 17, ou 18.

La question en était là lorsque tout récemment un vétéran parmi les bibliographes de la
Grande-Bretagne, M. David Laing, d'Edimbourg, appela l'attention de ses confrères sur un
exemplaire de cette même édition de Colard Mansion, faisant partie de la bibliothèque de
Lord Lothian à Newbattle, identique selon l'apparence avec ceux que l'on connaissait, mais qui
pourtant contenait, coloriées en guise de miniatures, précisément les huit gravures décrites par
Sotzmann et Passavant, avec l'addition d'une neuvième servant d'illustration au livre VII, que
nous avons décrite plus haut pour la première fois, sous le n° 7, d'après l'épreuve qui se trouve
dans le cabinet de M. Dutuit.

Comment concilier cette découverte avec les faits déjà établis ? C'est ce qu'a pu faire
M. Bradshaw à la suite d'un examen minutieux de sept sur les huit exemplaires connus de cette
édition, examen qui a donné les résultats très-curieux que voici :

Ces exemplaires appartiennent tous à une seule édition, essentiellement la même, puisqu'elle
n'a subi aucun remaniement, excepté en ce qui touche les premiers feuillets des divers livres ou
divisions de l'auteur. Il reste vrai qu'aucun de ces feuillets n'a été destiné, dans l'origine, à recevoir
une gravure des dimensions de celles dont il est question. Sur les 33 lignes qui composent la
page, tous les premiers feuillets, comme nous l'avons déjà dit, n'avaient que 16 lignes de blanc,
excepté celui du prologue, qui en avait 18, du livre V, qui en avait 17, et du livre I, qui
était couvert de texte du haut en bas. C'est dans ce premier état que se trouvent les exemplaires
du musée de Lille, de la bibliothèque de Bruges (n° 3874) et du musée Hunter à Glasgow.

Ensuite l'éditeur Colard Mansion a conçu l'idée de faire orner son édition, non pas encore de
toute une série de gravures, mais d'une seule servant d'illustration au prologue. Dans ce but il a
procédé à ce qu'on peut appeler un second tirage du livre, en retranchant le premier feuillet du
prologue, et en collant à sa place un nouveau feuillet, où la rubrique, imprimée d'abord en noir,