Overview
Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

La chronique des arts et de la curiosité — 1869

DOI issue:
Nr. 28 (11 Juillet)
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.26661#0168
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
CHRONIQUE DES ARTS.

â

des résultats qui sont mensongers. Combien
peuvent étudier l’antique? Le nu en plâtre
est à l’index, à plus forte raison, le nu hu-
main. L’exemple de l’Italie prouve cepen-
dant que le culte du beau n’est pas pro-
scrit, puisqu’au Vatican même, on admire
tout à son aise les plus belles statues nues
des dieux et des déesses de l’antiquité
païenne. Si l’on ne remédie pas à ce fâcheux
état de l’enseignement du dessin en France,
nous aurons bientôt cent paysagistes pour
un peintre d’histoire. Et il y aura aussi
moins d’ouvriers capables de rivaliser avec
ceux des peuples voisins. Parce qu’il y aura
encore à Paris des industries très-brillantes,
on croira que c’est l’essentiel, mais il vau-
drait mieux que la province pût fournir un
nombreux contingent de talents comme
cela se voit dans d’autres professions. Autre-
fois, tous les corps de métier fournissaient
des ouvriers excellents même en province,
comme nous pouvons en juger d’après les
édifices disséminés dans toute la France.
Nous comprenons très-bien qu’alors les dis-
tances étaient difficiles à franchir, et qu’il
valait mieux s’adresser sur' les lieux à un
ouvrier pour forger une espagnolette ou
une grille, que de les faire venir de Paris.
Mais pourquoi ne mettrions-nous pas les ou-
vriers dans la possibilité de mieux faire?
L’industrie provinciale y gagnerait comme
ceux qui y ont recoui’s.

Ce ne sont pas les administrations qui
nous manquent, et elles ne remédieront pas
au mal. Il vaudrait mieux former une so-
ciété pour l’enseignement du dessin en
France, comme il y en a dans beaucoup de
villes pour les expositions de peinture. Cette
société recruterait des adhérents et des fonds
pour aider et surveiller les écoles déjà éta-
blies, ou pour en fonder de nouvelles.

Commençons dans certaines questions, à
montrer que nous savons nous occuper de
nos affaires, comme les Américains, les An-
glais, les Suisses et quelquefois les Alle-
mands, et peu à peu nous finirons par nous
gouverner nous-mêmes ; ce qui serait une
grande économie, et une manière plus cer-
taine d’arriver au progrès,

André Albrespy.

LETTRES

sur l'inventaire des objets d’art

PE TOUTE LA FRANCE.

Bougival, 2 juillet 1867.

Monsieur,

Vous demandez, dans votre dernier nu-
méro de la Chronique, que l’on dresse un
inventaire général des objets d’art placés dans
les monuments publics de toute la France,
et vous recherchez les adhésions des Socié-
tés et des amateurs qui voudraient s’associer
à vous pour l’exécution de ce projet.

Pour moi, je suis heureux de vous en-
voyer la mienne, d’abord parce que cet in-
ventaire général est nécessaire en présence
du vandalisme sous ses mille formes : — des-
truction, restauration, dispersion; — puis
parce qu’il sera bon, en exécutant ce projet
en dehors du Gouvernement, de montrer à
ce Gouvernement, si peu soucieux de vos
excellents conseils, qu’on peut se passer de
lui. Je me mets donc à votre disposition, et
quelque faible que soit mon concours, il ne
vous en est pas moins acquis.

Ancien élève de l’École des chartes, archi-
viste-paléographe, je suis prêt à visiter les
départements dont les habitants resteraient
sourds à la motion d’ordre et de liberté que
vous venez de faire.

Ce sera le moyen de vous prouver quelle
joie j’éprouve en vous voyant combattre
hardiment pour l’art et la liberté, et l’occa-
sion de vous assurer que la Chronique s’ap-
puie , dans sa croisade contre les abus

ministériels, sur plus d’amis qu’elle ne
croit.

Agréez, monsieur, les salutations em-
pressées de votre dévoué lecteur,

F. Herbet.

fi juillet 1869.

Monsieur,

Vous vous adressez à l’initiative des cu-
rieux, des savants, des amateurs, pour
dresser un inventaire général des richesses
artistiques que la France 'possède. L’idée
de cet inventaire est excellente et je ne
cloute pas que les curieux , les savants et
les amateurs ne répondent à votre appel.
Mais l’administration elle-même ne pour-
rait-elle, clans une certaine mesure, con-
courir à ce grand travail ? Je ne suis pas
d’avis d’en appeler toujours à l’État, mais
je crois qu’il faut lui demander d’entre-
prendre ce qui réellement rentre dans son
rôle et ce que seul il peut faire.

Nous avons un immense musée, le Louvre,
dont toutes les collections sont minutieuse-
ment décrites ou finiront bientôt par l’être ;
mais ce grand musée expose encore dans sa
décoration extérieure une riche collection
de statues, et l’on n’a jamais pensé à nous
donner le catalogue de ces statues. Ce que
je demande n’est pas sans précédent.
VL Soulié a publié, dans un excellent li-
vret, la description de toutes les œuvres
d’art qui concourent à l’ornementation du
palais et du parc de Versailles. Ce catalogue,
que je demande pour le Louvre et les Tuile-
ries, je voudrais aussi qu’on le fît pour le
Luxembourg, pour le Tribunal de com-
merce,... pour chacune des églises de Paris,
pour Fontainebleau, pour Saint-Cloud, pour
Compiègne... L’administration a seule entre
les mains les éléments d’un pareil travail.
Seule, elle peut facilement dresser l’in-
ventaire des milliers de statues qu’elle a
commandées à des centaines d’artistes ;
seule, elle peut nous dire sûrement quelles
sont à Notre-Dame les sculptures anciennes,
modernes ou restaurées. Je ne demande
aucune monographie luxueuse, je ne vou-
drais qu’un simple catalogue du format des
livrets du Louvre, pouvant être livré au
plus bas prix possible. On ne peut objecter
la dépense; elle serait minime, et ces cata-
logues, vendus par les gardiens de chaque
monument, couvriraient certainement la
dépense occasionnée par leur confection. En
admettant même qu’il n’en soit pas ainsi,
l’État et la Ville peuvent-ils hésiter à faire
ce sacrifice ? Ils ont dépensé des centaines
de millions à édifier l’Opéra, le Louvre, la
Trinité et bien d’autres monuments, à res-
taurer Notre-Dame, la Sainte-Chapelle et
Fontainebleau, et ils se refuseraient à dépen-
ser quelques milliers de francs pour don-
ner la description de ces monuments ? La
réalisation d’une telle idée ferait honneur
aux administrateurs qui la mèneraient à
bonne fin et divulguerait le mérite de
tous ceux qui ont contribué à l’embellis-
sement de Paris par de nouveaux monu-
ments et par la restauration des anciens
édifices. Les artistes, peintres, architectes et
sculpteurs auraient leurs œuvres mieux con-
nues; le public s’intéresserait plus aux ta-
bleaux, monuments et statues dont il con-
naîtrait les auteurs ; et les curieux se réjoui-
raient de cette moisson de documents. —
Qu’on nous donne donc sur chaque édifice
de Paris, sans aucune exception, une pe-
tite brochure à bon marché, contenant briè-
vement l’historique du monument et décri-
vant chacune des œuvres d’art qui concou-
rent à sa décoration. Presque tous les édifices
importants sont achevés, presque toutes les
grandes restaurations sont terminées, l’heure
est venue de nous faire connaître à qui nous
les devons, d’enregistrer ce qu’ont fait les
anciens et ce qu’on a ajouté à leur œuvre.
La ville de Paris publie de gros volumes

pour les savants: qu’elle en publie de petits
pour le public ! La ville de Paris crée un
musée spécial à son histoire: qu’elle donne
le catalogue de l’immense musée qu’elle
possède par des monuments qui retracent
tout son passé !

Ce que Paris doit faire, quelques grandes
villes de province le voudront également.
Pour les villes moyennes et petites, pour les
villages, que l’initiative privée se charge /lu
travail, et ce sera un honneur pour vous,
monsieur, d’avoir fait appel à cette initia-
tive et de lui avoir proposé le moyen de
réunir tous les efforts particuliers dans un
vaste ensemble qui nous fera connaître les
richesses de notre pays. Bien des œuvres
oubliées seront ainsi révélées, bien des ar-
tistes tombés dans l’oubli reprendront une
place dans l’histoire, bien des monuments
dédaignés appelleront l’attention de tous, et
les Français qui vont admirer les merveilles
de la Flandre et de l’Italie apprendront que
leur pays a des œuvres d’art non moins
belles à leur montrer.

Agréez, etc.

Un de vos Lecteurs.

30 juin 1869.

L’inventaire des archives départementales
a été commencé en 1862 ; il se poursuit ac-
tivement; celui de nos bibliothèques publi-
ques est presque terminé ; la conservation
de nos monuments historiques est depuis
un quart de siècle l’objet de soins assidus.
Seules, les richesses artistiques que la
France possède sont encore livrées à toutes
les chances de destruction. Nul ne veille à
ce qu’aucune ne périsse ou ne disparaisse.

Et cependant la conservation des œuvres
d’art contenues dans les édifices publics, im-
porte pour le moins autant que la conserva-
tion de nos monuments, de nos bibliothèques
ou de nos archives. Faire connaître à tous
les peintures, les sculptures, antiquités et
curiosités de tous âges que renferment no§
musées, nos églises, nos institutions hospi-
talières, quelle magnifique tâche! que de
services elle rendrait aux arts, à l’histoire!
Ce travail considérable, qui n’est en somme
qu’un patient et scrupuleux contrôle, la Ga-
zette des Beaux-Arts a osé l’entreprendre,
confiante qu’elle est dans le dévouement de
nos Sociétés d’art et d’archéologie qui déjà
ont arraché à l’ignorance et sauvé de la des-
truction tant de monuments précieux.

C’est un fait analogue à la vente clandes-
tine du rétable de Lucy-sur-Cure, aujour-
d’hui l’ornement du musée d’Auxerre, qui
a suggéré à la Gazette des Beaux-Arts sa
louable initiative. Une église de Nantua pos-
sédait naguère une toile capitale d’Eugène
Delacroix, représentant le Martyre de Saint-
Sébastien. La fabrique, ayant besoin d’argent,
vendit ce tableau, don du gouvernement, à
un marchand de Paris en échange d’une
autre toile et d’une somme de 21,000 fr.
Là-dessus, grand émoi parmi les amateurs
de la ville; une pétition fut signée parmi
eux et appuyée par le Conseil municipal,
mais à deux voix de majorité seulement.
Séance tenante, une commission fut formée
chargée de poursuivre la réintégration du
tableau.

Il est en France peu de départements,
peu de villes même, qui n’aient été témoins
d’entreprises analogues et obtenant trop
souvent un plein succès. Notre musée a
profité, nous le disions tout à l’heure, de la
vente irrégulière du beau rétable de Lucy.
Mais qu’arriverait-il de la vente dont sont
menacées nos splendides tapisseries de l’Hô-
tel-Dieu, vente proposée plus d’une fois à
la commission de l’hospice, et qui a failli,
dit-on, s’accomplir tout récemment? Il
arriverait sans doute qu’en raison de l’élé-
vation des prix offerts, cette vente, une
fois opérée, pourrait bien devenir défini-
tive. Auxerre se trouverait ainsi privé à ja-

mais de ces derniers témoins de son opulence
passée, les seuls pour ainsi dire que nous
puissions encore offrir à l’admiration des
visiteurs éclairés. De tels faits ne pourront
plus se produire le jour où toutes les ri-
chesses d’art de la province seront invento-
riées, où chaque pièce utile, curieuse ou
importante portera son numéro d’ordre,
comme les pièces d’un musée. Cet inven-
taire ne serait point une tâche bien difficile
pour nos sociétés savantes ; il suffirait de la
partager entre cinq ou six membres de bonne
volonté; trois ou quatre mois au plus leur
'suffiraient. La Gazette des Beaux-Arts serait
le lien commun entre les diverses sociétés ;
elle les tiendraient au courant des efforts
analogues déployés dans les autres départe-
ments, elle publierait à ses frais leurs inven-
taires.

Déjà, à plusieurs reprises, la direction des
Beaux-Arts a demandé aux conservateurs
des musées départementaux l’inventaire
partiel, ou tout au moins les catalogues im-
primés des collections qui leur sont confiées.
L’appel de la Gazette des Beaux-Arts est plus
étendu, puisqu’il met à l’abri du danger les
œuvres d’art contenues dans tous les monu-
ments publics indistinctement. Il répond
ainsi plus complètement à la sollicitude des
amateurs, à leurs appréhensions de voir
chaque contrée dépouillée un beau jour de
tel ou tel morceau précieux, exposé aux
convoitises du commerce.

Comme cet appel n’a d’autre mobile
qu’un noble désintéressement, un amour
élevé des choses d’art, il sera accueilli, nous
n’en pouvons douter par les esprits d’élite
auquel il s’adresse. Toutes nos sociétés
savantes auront à cœur d’y adhérer ; elles
voudront à l’envi donner à ses auteurs les
moyens pratiques de conduire à bonne fin
l’œuvre utile à laquelle ils veulent se dé-
vouer.

Ce n’est point d’ailleurs une idée nou-
velle que celle d’inventorier les richesses
artistiques de la France. En l’an n de la pre-
mière République le comité d’instruction
publique de la Convention adoptait une
« instruction réglant la manière d’invento-
« rier et de conserver dans toute l’étendue
« de la République tous les objets qui peu-
« vent servir aux arts et aux sciences. » Si
cette « instruction, » modèle d’ordre, de sa-
gesse et de prévoyance, avait été appliquée,
combien de chefs-d’œuvre, passés à l’étran-
ger depuis soixante-quinze ans, seraient
encore aujourd’hui la gloire et d’ornement
de notre pays?

[L’Yonne.) J. Lobet.

SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE GRAVURE.

La Société française de gravure a tenu
mercredi dernier sa séance annuelle, sous la
présidence deM. Henriquel-Dupont, membre
de l’Institut. Le bureau était occupé par
MM. Lehmann, vice-président, Charles Blanc,
Henri Delaborde, membres de l’Institut, et
Émile Galichon, directeur de la Gazette des
Beaux-Arts.

L’exposé de la situation de la Société a
établi une prospérité assez grande pour
permettre de publier non pas deux gravures
suivant les termes stricts des statuts, mais
trois : la Maîtresse du Titien, parM. Danguin,
d’après le tableau du Louvre ; le Christ, de
Philippe de Champaigne, par M. Rosello,
d’après le tableau du Louvre; et la Stralo-
nice d’Ingres, par M. Flammeng, d’après le
tableau de la galerie de S. A. R. le duc
d’Aumale.

A ses compositions célèbres, le comité se
propose d’ajouter successivement d’autres
œuvres célèbres d’après Bernardino Luini,
Memlinc, Raphaël, Sebastino del Piombo,
Lesueur, Rubens. Ces noms disent assez que
les tendances de cette société, fondée dans
I le but unique d’encourager l’art de la gn>-
 
Annotationen