N» 14.
DIMANCHE 4 AVRIL.
1869.
ABONNEMENTS.
*
Paris. Un an : 15 fr.
—.Six mois : 8 fr.
Départements .... Un an : 18 fr.
— .... Six mois : 10 fr.
Un numéro : 20 cent.
Pour l’étranger, le port en sus.
Rédaction, 55, rue Vivienne.
ABONNEMENTS.
Paris. ....... Un an : 15 fr
—.. Six mois : 8 fr
Départements .... Un an : 18 fr.
.
— .... Six mois : 10 fr.
Un numéro : 20 cent.
Pour l’étranger, le
Administration,
Correspondances étrangères. — Nouvelles
des galeries publiques, des ateliers. —1
Bibliographie des livres, articles de revues
et estampes, publiés en France et à
l’Etranger.
Expositions de Province et de l’Etranger.
Comptes rendus et annonces des ventes
publiques de tableaux, dessins, estampes,
bronzes, ivoires, médailles, livres rares,
autographes, émaux, porcelaines, armes,
objets de curiosité, etc.
Revue des Arts industriels.
CHRONIQUE
DES ARTS ET DE LA CURIOSITÉ
GUIDE SPÉCIAL DES ARTISTES ET DES AMATEURS
JOURNAL POLITIQUE PARAISSANT LE DIMANCHE
UN MUSÉE-ÉCOLE A CRÉER.
Le 26 mars restera une date mémo-
rable pour l’histoire administrative de
nos musées. Dans un décret, motivé par •
un rapport où la liste civile reconnaît son
impuissance à développer nos collections,
l’Empereur remet à l’État les œuvres que
la couronne ne peut utiliser pour répan-
dre l’étude, le goût des beaux-arts et don-
ner ainsi une entière satisfaction à un
grand intérêt public. Qui aurait cru, la
semaine dernière, que nous étions si près
de lire un semblable aveu, d’apprendre
une telle concession faite à l’opinion pu-
blique? Les administrateurs du Louvre
né*longpaient guère, il y a peu d’années,
à rendre à la nation les trésors qu’ils
détenaient dans des greniers sans utilité •
pour personne; ils s’efforcaient, bien au
contraire, de démembrer les collections de
l’État au profit de collections que la liste
civile, livrée à ses seules ressources, était
incapable d’augmenter ’ sérieusement.
Après avoir dépouillé, en 1852, le Musée
d’artillerie, la Bibliothèque impériale et
la Bibliothèque de l’Arsenal, de morceaux
précieux pour composer le Musée des
souverains, ils essayaient encore, neuf
ans plus tard, d’enlever à la Bibliothèque
impériale ses vases, ses bronzes, ses
marbres et autres objets d’art! On n’a
pas oublié aussi les efforts tentés, en
1862, pour fermer brusquement le Musée
Campana exposé au palais de l’Indus-
trie et pour en transporter sans délai les
richesses au Louvre, bien qu’aucune salle
ne fût prête pour les y recevoir, et cela
au moment où les visiteurs présentaient
encore une moyenne de 1,800 personnes
par jour. A la hâte qu’ils mirent à s’em-
parer de trésors payés avec les deniers
de la France, il semblait, en .vérité,
qu’ils voulussent étouffer l’idée, qui com-
mençait à germer, de voir l’État fonder
des musées lui appartenant en toute pro-
priété et former un département des arts
appliqués à l’industrie. Était-il donc si
difficile de prévoir, dès cette époque,
que le Louvre, dans lequel on établissait
des ministères, une direction de haras,
des casernes et des écuries, contrairement
au décret du 1" décembre 179A, était et
serait toujours trop étroit pour exposer
tout ce qu’il contenait? Assurément,non.
Les greniers regorgeaient de tableaux,
et l’adjonction du Musée Campana’aux
Musée du Louvre devait avoir pour ré-
sultat inévitable de mettre dans les ga-
leries nombre de vases et autres objets
similaires façonnés par des ouvriers aux
lieu et placd de tableaux qui reprodui-
sent la pensée d’un artiste.
Non, si la liste civile restitue à l’État
des œuvres dont elle ne sait que faire, ce
n’est pas uniquement par' ce que ses ad-
ministrateurs ont reconnu que peu d’es-
pace pouvait être accordé à nos collections
dans un Louvre démesurément agrandi,
c’est surtout parce qu’un souille nouveau
a traversé la France. D’où est parti ce
souffle assez puissant pour opérer un
semblable revirement? C’est un point que
nous laisserons rechercher aux hommes
politiques. Pour nous, l’essentiel est de re-
cueillir, à l’heure qu’il est, tous les fruits
qui sont contenus en germe dans le dé-
cret inespéré et éclatant du 26 mars.
La liste civile se propose d’abandonner
une partie de ses droits d’usufruit qui
la gênent, en remettant à l’État des tré-
sors qu’un sénatus-consulte lui avait
concédés; et nous applaudissons fort à
cette restitution, alors môme qu’elle ne
satisferait point torft nos désirs, car nous
pensons, en 1869 comme en 1862, que
l’État devrait posséder en toute propriété
des musées ; que seul il peut les doter
convenablement, les développer et les
organiser suivant les besoins du public,
des artistes et des industriels. La France
ne doit plus se contenter d’avoir simple-
ment des musées d’apparat pour contri-
buer à l’éclat de la couronne. Nous vi-
vons à une époque où le dessin n’est plus
considéré comme un art d’agrément pro-
’ pre seulement à charmer les loisirs. Les
expositions universelles nous ont appris
que le dessin est un-puissant moyen
d’éducation et une source féconde de ri-
chesses; elles nous ont enseigné que les
musées sont des arsenaux où les travail-
leurs viennent chercher des idées pour
assurer à leur nation la prééminence sur
les marchés de l’univers. A un manœuvre
livrez un morceau d’argile et il en fera
un vase de peu de valeur; à un ouvrier
cultivé remettez cette même argile, et
dans le même espac| de temps, sans plus
d’effort matériel, il façonnera un vase
d’un prix considérable. Voilà ce que tout
le monde sait aujourd’hui, voilà ce qu’a
parfaitement compris la commerciale An-
gleterre éclairée par nos succès à l’Expo-
sition de 1851 ; et, avec son bon sens
pratique, elle a été droit au but. A la
demande des,lords du Comité du conseil
privé pour le commerce, elle a institué
un département des arts et des sciences
appliqués à l’industrie, et elle a trouvé
des millions pour fonder le Musée de
South-Kensington si admirablement or-
ganisé dans le but de répandre à Lon-
dres et dans les comtés la pratique et le
goût des arts et du dessin.
L’Europe a suivi cet exemple : l’Au-
triche, la Russie et la Prusse ont inauguré
ou vont inaugurer des institutions sem-
blables ; la Belgique se livre à des en-
quêtes pour perfectionner ses écoles, et
on se souvient encore du congrès qu’elle
a assemblé l’an dernier à Bruxelles. En
France, des cris d’alarme ont retenti de
tous côtés : MM. Natalis Rondot, de La-
borde et Mérimée ont signalé les tenta-
tives faites pour nous enlever un sceptre
que nous portons depuis des siècles ; les
journaux, les revues et, des premières,
la Gazette des Beaux-Arts ont plaidé en
faveur des arts décoratifs; les hommes
pratiques se sont émus, et la Chambre de
commerce de Lyon, la municipalité de
Limoges, sous la pression de l’initiative
privée, ont organisé des musées et for-
tifié leurs écoles. A Paris, des associa-
tions se sont constituées, et nous avons
vu le Progrès industriel, l’Union centrale
des Beaux-Arts et la Société des fabricants
de bronze surgir pour lutter contre les
progrès menaçants des pays étrangers; la
municipalité a donné une extension con-
sidérable à l’enseignement du dessin,
cherché les moyens de doter les écoles
de bons modèles, institué des examens
de professorat; mais,préoccupée d’autres
opérations jugées plus nécessaires, elle
n’a point fait assez. A tous ces efforts il
manque d’ailleurs le lien, l’anneau qui,
en les reliant, centuplerait leur force ; et
ce lien, cet anneau devrait être, comme
en Angleterre, un Musée-école, foyer
puissant d’où rayonnerait à la fois la
double éducation par les études pratiques
et-les cours oraux. L’intérêt de Paris en
fait une loi absolue ; ses quatre cent mille
ouvriers, qui produisent à un taux élevé
et fournissent du travail à un million
d’ouvriers de la province, sont voués à la
fabrication des objets de luxe, et ne peu-
vent soutenir la concurrence étrangère
que par la supériorité de leur goût. 11 est
donc désirable, nécessaire que ce Musée-
école, en se formant, enrichisse la France
d’une institution rivale de celles qui ont
été créées à Londres, à Vienne, à Moscou
et à Berlin, d’une institution qui vivifie-
rait aussi bien nos industries provinciales
que nos industries parisiennes. Le.décret
du 26 mars rend facile la réalisation de
ce vœu. Que le Louvre, trop étroit pour
livrer à l’étude toutes ses richesses, res-
titue à l’État les séries d’objets d’art
décoratif qui l’encombrent sans raison
comme sans profit, et le Musée-école
serait fondé ; réuni à l’hôtel de Cluny,
augmenté dans un avenir prochain d’œu-
vres des xvii% xvrae et xixe siècles, il dé-
lierait même toute comparaison. Par ce
moyen, la liste civile trouverait l’espace
qui manque à ses collections de peinture
et de sculpture, et elle aurait l’honneur
d’avoir contribué à créer un musée indis-
pensable, distinct cependant de celui du
Louvre, et rentrant merveilleusement,
par sa destination, sous la dépendance
de l’État, dont le rôle est de veiller à tous
les grands intérêts de la nation.
Bien d’autres considérations pourraient
être invoquées en faveur de notre thèse,
mais nous les remettrons à un autre jour,
et nous nous contenterons pour aujour-
d’hui d’appeler l’attention des hommes
d’État, des membres de la commission et
des fabricants intéressés sur une question
aussi grosse. Nous aurons d’ailleurs tout le
temps de discuter cette proposition. Par
un simple décret, on 11e peut faire passer
des trésors qui appartiennent au domaine
de l’État dans des musées municipaux de
province ou même de Paris. 11 faut que
le Corps législatif intervienne, il faut
qu’il vote une loi, il faut qu’il nomme
une commission pour régler, d’accord
avec la commission composée à son point
de vue par la liste civile, quelles sont les
œuvres qui feront retour à l’État, et
pour déterminer ensuite l’affectation à
donner à ces objets.
Émile Galichon.
DIMANCHE 4 AVRIL.
1869.
ABONNEMENTS.
*
Paris. Un an : 15 fr.
—.Six mois : 8 fr.
Départements .... Un an : 18 fr.
— .... Six mois : 10 fr.
Un numéro : 20 cent.
Pour l’étranger, le port en sus.
Rédaction, 55, rue Vivienne.
ABONNEMENTS.
Paris. ....... Un an : 15 fr
—.. Six mois : 8 fr
Départements .... Un an : 18 fr.
.
— .... Six mois : 10 fr.
Un numéro : 20 cent.
Pour l’étranger, le
Administration,
Correspondances étrangères. — Nouvelles
des galeries publiques, des ateliers. —1
Bibliographie des livres, articles de revues
et estampes, publiés en France et à
l’Etranger.
Expositions de Province et de l’Etranger.
Comptes rendus et annonces des ventes
publiques de tableaux, dessins, estampes,
bronzes, ivoires, médailles, livres rares,
autographes, émaux, porcelaines, armes,
objets de curiosité, etc.
Revue des Arts industriels.
CHRONIQUE
DES ARTS ET DE LA CURIOSITÉ
GUIDE SPÉCIAL DES ARTISTES ET DES AMATEURS
JOURNAL POLITIQUE PARAISSANT LE DIMANCHE
UN MUSÉE-ÉCOLE A CRÉER.
Le 26 mars restera une date mémo-
rable pour l’histoire administrative de
nos musées. Dans un décret, motivé par •
un rapport où la liste civile reconnaît son
impuissance à développer nos collections,
l’Empereur remet à l’État les œuvres que
la couronne ne peut utiliser pour répan-
dre l’étude, le goût des beaux-arts et don-
ner ainsi une entière satisfaction à un
grand intérêt public. Qui aurait cru, la
semaine dernière, que nous étions si près
de lire un semblable aveu, d’apprendre
une telle concession faite à l’opinion pu-
blique? Les administrateurs du Louvre
né*longpaient guère, il y a peu d’années,
à rendre à la nation les trésors qu’ils
détenaient dans des greniers sans utilité •
pour personne; ils s’efforcaient, bien au
contraire, de démembrer les collections de
l’État au profit de collections que la liste
civile, livrée à ses seules ressources, était
incapable d’augmenter ’ sérieusement.
Après avoir dépouillé, en 1852, le Musée
d’artillerie, la Bibliothèque impériale et
la Bibliothèque de l’Arsenal, de morceaux
précieux pour composer le Musée des
souverains, ils essayaient encore, neuf
ans plus tard, d’enlever à la Bibliothèque
impériale ses vases, ses bronzes, ses
marbres et autres objets d’art! On n’a
pas oublié aussi les efforts tentés, en
1862, pour fermer brusquement le Musée
Campana exposé au palais de l’Indus-
trie et pour en transporter sans délai les
richesses au Louvre, bien qu’aucune salle
ne fût prête pour les y recevoir, et cela
au moment où les visiteurs présentaient
encore une moyenne de 1,800 personnes
par jour. A la hâte qu’ils mirent à s’em-
parer de trésors payés avec les deniers
de la France, il semblait, en .vérité,
qu’ils voulussent étouffer l’idée, qui com-
mençait à germer, de voir l’État fonder
des musées lui appartenant en toute pro-
priété et former un département des arts
appliqués à l’industrie. Était-il donc si
difficile de prévoir, dès cette époque,
que le Louvre, dans lequel on établissait
des ministères, une direction de haras,
des casernes et des écuries, contrairement
au décret du 1" décembre 179A, était et
serait toujours trop étroit pour exposer
tout ce qu’il contenait? Assurément,non.
Les greniers regorgeaient de tableaux,
et l’adjonction du Musée Campana’aux
Musée du Louvre devait avoir pour ré-
sultat inévitable de mettre dans les ga-
leries nombre de vases et autres objets
similaires façonnés par des ouvriers aux
lieu et placd de tableaux qui reprodui-
sent la pensée d’un artiste.
Non, si la liste civile restitue à l’État
des œuvres dont elle ne sait que faire, ce
n’est pas uniquement par' ce que ses ad-
ministrateurs ont reconnu que peu d’es-
pace pouvait être accordé à nos collections
dans un Louvre démesurément agrandi,
c’est surtout parce qu’un souille nouveau
a traversé la France. D’où est parti ce
souffle assez puissant pour opérer un
semblable revirement? C’est un point que
nous laisserons rechercher aux hommes
politiques. Pour nous, l’essentiel est de re-
cueillir, à l’heure qu’il est, tous les fruits
qui sont contenus en germe dans le dé-
cret inespéré et éclatant du 26 mars.
La liste civile se propose d’abandonner
une partie de ses droits d’usufruit qui
la gênent, en remettant à l’État des tré-
sors qu’un sénatus-consulte lui avait
concédés; et nous applaudissons fort à
cette restitution, alors môme qu’elle ne
satisferait point torft nos désirs, car nous
pensons, en 1869 comme en 1862, que
l’État devrait posséder en toute propriété
des musées ; que seul il peut les doter
convenablement, les développer et les
organiser suivant les besoins du public,
des artistes et des industriels. La France
ne doit plus se contenter d’avoir simple-
ment des musées d’apparat pour contri-
buer à l’éclat de la couronne. Nous vi-
vons à une époque où le dessin n’est plus
considéré comme un art d’agrément pro-
’ pre seulement à charmer les loisirs. Les
expositions universelles nous ont appris
que le dessin est un-puissant moyen
d’éducation et une source féconde de ri-
chesses; elles nous ont enseigné que les
musées sont des arsenaux où les travail-
leurs viennent chercher des idées pour
assurer à leur nation la prééminence sur
les marchés de l’univers. A un manœuvre
livrez un morceau d’argile et il en fera
un vase de peu de valeur; à un ouvrier
cultivé remettez cette même argile, et
dans le même espac| de temps, sans plus
d’effort matériel, il façonnera un vase
d’un prix considérable. Voilà ce que tout
le monde sait aujourd’hui, voilà ce qu’a
parfaitement compris la commerciale An-
gleterre éclairée par nos succès à l’Expo-
sition de 1851 ; et, avec son bon sens
pratique, elle a été droit au but. A la
demande des,lords du Comité du conseil
privé pour le commerce, elle a institué
un département des arts et des sciences
appliqués à l’industrie, et elle a trouvé
des millions pour fonder le Musée de
South-Kensington si admirablement or-
ganisé dans le but de répandre à Lon-
dres et dans les comtés la pratique et le
goût des arts et du dessin.
L’Europe a suivi cet exemple : l’Au-
triche, la Russie et la Prusse ont inauguré
ou vont inaugurer des institutions sem-
blables ; la Belgique se livre à des en-
quêtes pour perfectionner ses écoles, et
on se souvient encore du congrès qu’elle
a assemblé l’an dernier à Bruxelles. En
France, des cris d’alarme ont retenti de
tous côtés : MM. Natalis Rondot, de La-
borde et Mérimée ont signalé les tenta-
tives faites pour nous enlever un sceptre
que nous portons depuis des siècles ; les
journaux, les revues et, des premières,
la Gazette des Beaux-Arts ont plaidé en
faveur des arts décoratifs; les hommes
pratiques se sont émus, et la Chambre de
commerce de Lyon, la municipalité de
Limoges, sous la pression de l’initiative
privée, ont organisé des musées et for-
tifié leurs écoles. A Paris, des associa-
tions se sont constituées, et nous avons
vu le Progrès industriel, l’Union centrale
des Beaux-Arts et la Société des fabricants
de bronze surgir pour lutter contre les
progrès menaçants des pays étrangers; la
municipalité a donné une extension con-
sidérable à l’enseignement du dessin,
cherché les moyens de doter les écoles
de bons modèles, institué des examens
de professorat; mais,préoccupée d’autres
opérations jugées plus nécessaires, elle
n’a point fait assez. A tous ces efforts il
manque d’ailleurs le lien, l’anneau qui,
en les reliant, centuplerait leur force ; et
ce lien, cet anneau devrait être, comme
en Angleterre, un Musée-école, foyer
puissant d’où rayonnerait à la fois la
double éducation par les études pratiques
et-les cours oraux. L’intérêt de Paris en
fait une loi absolue ; ses quatre cent mille
ouvriers, qui produisent à un taux élevé
et fournissent du travail à un million
d’ouvriers de la province, sont voués à la
fabrication des objets de luxe, et ne peu-
vent soutenir la concurrence étrangère
que par la supériorité de leur goût. 11 est
donc désirable, nécessaire que ce Musée-
école, en se formant, enrichisse la France
d’une institution rivale de celles qui ont
été créées à Londres, à Vienne, à Moscou
et à Berlin, d’une institution qui vivifie-
rait aussi bien nos industries provinciales
que nos industries parisiennes. Le.décret
du 26 mars rend facile la réalisation de
ce vœu. Que le Louvre, trop étroit pour
livrer à l’étude toutes ses richesses, res-
titue à l’État les séries d’objets d’art
décoratif qui l’encombrent sans raison
comme sans profit, et le Musée-école
serait fondé ; réuni à l’hôtel de Cluny,
augmenté dans un avenir prochain d’œu-
vres des xvii% xvrae et xixe siècles, il dé-
lierait même toute comparaison. Par ce
moyen, la liste civile trouverait l’espace
qui manque à ses collections de peinture
et de sculpture, et elle aurait l’honneur
d’avoir contribué à créer un musée indis-
pensable, distinct cependant de celui du
Louvre, et rentrant merveilleusement,
par sa destination, sous la dépendance
de l’État, dont le rôle est de veiller à tous
les grands intérêts de la nation.
Bien d’autres considérations pourraient
être invoquées en faveur de notre thèse,
mais nous les remettrons à un autre jour,
et nous nous contenterons pour aujour-
d’hui d’appeler l’attention des hommes
d’État, des membres de la commission et
des fabricants intéressés sur une question
aussi grosse. Nous aurons d’ailleurs tout le
temps de discuter cette proposition. Par
un simple décret, on 11e peut faire passer
des trésors qui appartiennent au domaine
de l’État dans des musées municipaux de
province ou même de Paris. 11 faut que
le Corps législatif intervienne, il faut
qu’il vote une loi, il faut qu’il nomme
une commission pour régler, d’accord
avec la commission composée à son point
de vue par la liste civile, quelles sont les
œuvres qui feront retour à l’État, et
pour déterminer ensuite l’affectation à
donner à ces objets.
Émile Galichon.