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La caricature: revue morale, judiciaire, littéraire, artistique, fashionable et scénique — 1832 (Nr. 62-112)

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Numéro 66 (2 Février 1832)
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https://doi.org/10.11588/diglit.26416#0029

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' —— Numéro 0 6. «—-

Tuut ce qui concerne la rédaction doit être adresse', francot
à ÏVI. A. Audibeet, Rédacteur en chef de la Caricature,
rue Bergère , n. ig.

CASTIGAT RIDENDO MOïtfiS.

-2 FÉVRIER 1852.

'«RK»

Les réclamations et envois d’argent doivent être adresses,
franco, au grand Magasin de Caricatures d’AueEC.T,
galerie Véro-Dodat.

^1#^-

MORALE , RELIGIEUSE, LITTERAIRE ET SCENIQUE.

Acquittement de la Caricature.

COUR D’ASSISES. — Président : M. Sylvestre. — Avocat général : M" Delapalme.
— Défenseur : Me Étienne Blanc.

C’est lundi dernier, 3o janvier, qu’a été jugé devant la Cour d’As-
sises le procès intenté à notre Gérant, pour la caricature du Peuple
affranchi, publiée dans le numéro 5?. de notre journal. L’accusation
a été soutenue par M” Delapalme qui, après avoir supputé tous les
bienfaits du gouvernement actuel, l’ère de la liberté dans laquelle
nous vivons, et le bonheur du peuple, a opposé à ce tableau la litho-
graphie incriminée. Il a prétendu qu’elle ne pouvait être l’œuvre d’un
bon citoyen, puisque les reproches calomnieux quelle contient por-
tent évidemment atteinte à la force du gouvernement.

M* Étienne Blanc, avocat des trois prévenus, le Gérant, l’Éditeur
et rimprimeur-lithograplie, a ensuite pris la parole :

« Je suis charge', a-t-il dit, de la défense de Philipon, Aubert et Delaporte. Je la pré-
senterai en deux mots, maigre la sévérité du réquisitoire que vous venez d’entendre, sévé-
rité qui contraste bien malheureusement avec la légèreté d’un croquis. Aubert vous a dit,
pour sa défense, qu’il tenait un dépôt du journal, que sa responsabilité e'tait à l’abri par
celle d$i gérant Philipon. J’ajoute que cette responsabilité doit suffire aux rigueurs de la
loi j que les réquisitions lancées contre lui sont en contradiction avec les erremens suivis jus-
qu’à ce jour par le ministère public. Parmi les nombreux procès intentés aux autres jour-
naux , jamais on n'a fait comparaître à cette barre les centaines d’individus qui tiennent à
Paris ou en Province un dépôt du journal incriminé.

Quant à Philipon, voici sa défense : la lithographie poursuivie a dit : — Le peuple fut
grand, le peuple est malheureux et chargé d'impôts. — Est-ce une erreur, un men-
songe? Consultez les percepteurs, ils vous diront les larmes et les plaintes des malheureux
qui paient la capitation nouvelle. Est-ce une vérité ? Alors, c’est une page d’histoire. Les
réquisitoires peuvent bien l’effacer du journal ; mais des souvenirs, jamais. Pourquoi ne
pourrions-nous l’écrire?

Messieurs, vous conviendrez avec moi qu’un gouvernement est bien malheureux quand
la vérité excite à le haïr. J’ai fini ma défense, car tout est dit, quand tout est prouvé. »

Après cette brève et logique allocution , Philipon prononce d’une
voix affaiblie le discours suivant, qu’il a été plusieurs fois obligé d’in-
terrompre , à cause des souffrances douloureuses qui lui ont fait de-
mander d etre transféré de Sainte-Pélagie dans une maison de santé.

* Messieurs j

Après la révolution de juillet , quand la Charte fut devenue une vérité, j'eus le tort de
croire que la presse allait être une liberté; je plaçai ma petite fortune dans un journal qui
devint bientôt le Miroir, ou plutôt le tableau fidèle de notre société, de ses mœurs, de
ses erreurs, de sa politique et de ses folies.

Je me bornai à copier naïvement ce qui se présentait à mes yeux f et quand je vis le
peuplé misérable, je dus le peindre revêtu des insignes de la misère. Puis, comme toute
chose présente deux côtés différées, par un titre je fis voir lé côté brillant et poétique sous
lequel on pouvait le considérer, et, par une autre inscription, je montrai le côte pro-
saïque ou positif,

Ce côté prosaïque était-il un mensonge? Personne ne saurait disconvenir que ce fut la
vérité. Aussi, l’actutsalion qui pèse sur un croquis tellement innocent me parut-elle long-
temps une aberration. *

Cependant, Messieurs, je dois le dire, je comprends aujourd'hui cette accusation et
toutes celles qui s’apprêtent à pleuvoir sur moi. Voulez-vous que je vous initie également
aux mystères du parquet? Ecoutez cette prédiction, à laquelle l’indiscrétion de tous les
journaux a donné une grande publicité :

Avant uri mois, la Caricature n'existera plus: nous saurons bien Vécraser.

Qui a dit cela? Messieurs, je me bâte de répondre que ce n’est point Pavocat-général, et
je suis persuadé que sa probité se refuserait à aider un pareil attentat à la propriété d'un
citoyen ; mais ce propos est celui d’un homme du pouvoir, et l’on doit croire qu'il est, lui,
dans le secret.

Cette prédiction explique tout!

Elle explique les vingt saisies qui ont frappé mon entreprise, les retards illégaux de
la poste , l’application qu'on veut faire contre moi de cette loi de privilège qui oblige cer-
tains journaux à verser un cautionnement, tandis que, sous Charles X, sous l’empire de la
même loi, jamais on ne nous a demandé de cautionnement pour le journal la Silhouette ,
que j'avais également fondé , et qui n'était autre chose que mon journal la Caricature,
sous un autre litre; cette prédiction explique les visites et toutes les autres vexations aux-
quelles sont de temps en temps soumis quelques-uns de nos abonnés ; elle explique ces saisies
avant même la publication, c'est-à-dire, cette censure préalable qu’on a exercée contre
moi, et dont la chambre de mise en accusation a fait justice; elle explique ces visites
domiciliaires faites chez moi, comme s'il se fut agi d’une conspiration ; elle explique l’obs-
tination à traîner sur ces bancs, pour les fatiguer et les dégoûter, et mon imprimeur qui
ne peut pas être le censeur des dessins que je lui apporte, et M. Aubert, qui n’est pour
rien dans mon journal ; elle explique mes six mois de prison et mes deux mille francs
d’amende pour des dessins cent fois moins mordans que tout ce qu’on peut faire en Angle-
terre sans êtAe inquiété ; elle explique mon arrestation d’après cette libérale interprétation
de la loi, qui fait assimiler les écrivains à des voleurs pris en flagrant délit ; elle explique
les difficultés que j’éprouve à obtenir mon transfert dans une maison de santé quand la
maladie s'est emparée de moi depuis quinze jours, quand je suis menacé, par une névralgie,
de la perte de ma vue; elle explique tout, et le procès d’aujourd’hui, et les procès qui me
restent à vider , et ceux qui viendront sans doute.

Tenez, Messieurs, puisque le ministère public ne s’est pas nettement expliqué, pour en
finir d’un seul coup, car l’agonie est plu9 cruelle que la mort, je viens suppléer à ce si-
lence :

Six mois de prison, c’est trop peu !

Deux mille francs d’amende, c’est trop peu!
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