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La caricature: revue morale, judiciaire, littéraire, artistique, fashionable et scénique — 1832 (Nr. 62-112)

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Numéro 70 (1er Mars 1832)
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https://doi.org/10.11588/diglit.26416#0054

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Outre les titres, pensions, préfectures, bureaux de timbre, de lo-
terie et de tabac, croix tPhonneur, places de garde-champêtre; et
toute celte racaille de faveurs , telle que souris, saluts, coups de cha-
peau, poignées demain, dîners et bals, petite monnaie de recon-
naissance qui commence à se déprécier furieusement, et dont le mi-
nistère se sert pour acheter des services, et nous pour en récompenser ;
outre ces brimborions, disons-nous, il est en France un singulier
système de rémunération ! Un homme s’cst-il enfui à l’étranger, a-t-il
levé contre sa patrie letendart espagnol, a-t-il abjuré devant sa fa-
mille ces exécrables couleurs tricolores, qu’il avait portées jadis, et
pour lesquelles, un jour, il feindra de nouveau un hypocrite amour?
Vite, on s’empresse de le combler d’honneurs et de richesses.

Cet autre a-t-il bien mérité de la liberté par un siècle de constans
efforts? Qu’on le jette à l’écart, qu’on l’injurie, et que les aboycurs de
la presse dévouée viennent ordurer le piédestal qu’a dressé d’avance,
pour son grand nom , l’admiration des deux mondes.

Descendons plus bas. Avez-vous brûlé en 1815 quelque drapeau
tricolore? Soyez ministre.

Avez-vous, au contraire, relevé en juillet le drapeau tricolore?
Avez-vous quelque part crié vivent les Polonais? Avez-vous enfin public
hautement quelque grande vérité? Qu’on vous empoigne sans délai,
qu’on vous assomme sans jugement, qu’on vous envoie meme aux ga-
lères. C’est tout ce que mérite un patriote, et Bicêtre bientôt devien-
dra l’antichambre du Panthéon.

Ah! pardon... j’en oubliais, et des meilleures. Le ministère vient
d’introduire de notables améliorations dans le système des grâces et
faveurs.

Un citoyen, maintenant, a-t-i! rendu quelque service? on ne lui
donne plus la Croix-d’Honneur; la Croix-d’Honneur n’étant plus des-
tinée qu’à récompenser les citoyens qui n’ont rendu aucun service.
On lui permet, avec signature, paraphe et sceaux du roi (comme
vous pouvez voir au Bulletin des Lois, n° 3^53), on lui permet,
disons-nous, de se creuser des latrines (pardon dustyle, c’est celui de
l’ordonnance). On lui accorde des latrines. Cela ne va pas encore
jusqu’à la fosse inodore, laquelle probablement ne doit rémunérer
que les sauveurs d’État, les Guizot, les Dupin, et doit correspondre
au grade de Grand-Cordon dans ce nouvel ordre de chevalerie, où
Yanglaise, j’imagine, représentera le grade d’officier. Mais ce qu’il y a
de certain, c’est qu’on verra des gens signer ainsi : —Un tel, chevalier
des latrines, comme on dit : •—'Un tel, chevalier de Saint-Louis, che-
valier de la Légion-d’Honneur. Les latrines vont de pair maintenant
avec les Croix-d’Honneur, dans le système de munificence ministé-
rielle. Et même, on s’accorde déjà, assez généralement, à préférer
les latrines.

L. Deuville.

|Uand)e$.

— N» 141. —

Allons donc ! allons donc ! Faisons le saut périlleux !

— X" 142. —

Je cachot sera désormais une vérité! — Ouvrez la porte, s’il vous
plaît.

550 -

Jtttitai 8te&.

LE MOINE DE SAINT-PIEUSE DE ROME.

Dans Avignon , vivaient deux jeunes gens qui n’avaient pas attendu
le consentement de leurs païens pour s’aimer de l’amour le plus ten-
dre. Eugène était fils d’un honnête négociant, riche de vertus et
de millions. Clara devait le jour à l’un de nos hommes blasonnés de
l’ancien régime, gueux, mais noble; fier, mais plat.

Le négociant, vaincu par les sollicitations de son fils, consentit à
demander la main de la jeune fille, mais sa demande fut rejetée. Le
négociant haussa les épaules, Eugène tomba malade, la faculté inter-
vint, l’amoureux fut aux portes du tombeau, mais avant de faire le
grand voyage il partit pour Rome, Rome séjour d’un pape après avoir
été celui des Césars. Sic transit, gloria_

Arrivé dans cette ville, le premier soin d’Eugène fut d’aller visiter
cette fameuse basilique où sont entassées tant de merveilles. Le pape
officiait. La majesté du lieu, la pompe du spectacle, ces voix qui
n’appartiennent ni à l’homme, ni à la femme, cette musique déli-
cieuse, tout ravit Eugène ; sa contemplation extatique l’empêcha de
s’apercevoir qu’il était entré dans un confessionnal, que les chants
avaient cessé et que le Saint-Père était rentré au Vatican.

Depuis long-temps la nuit avait remplacé le jour, et il ne fallut
pas moins qu’une circonstance extraordinaire pour le tirer de la
profonde rêverie dans laquelle il était plongé. Au moment où l'heure
solemnelle de minuit était répétée dans Rome, au milieu de l’ombre
immense qui l’environnait, Eugène vil poindre vers la sacristie une
faible lueur causée par l’arrivée d’un moine tenant un cierge à la
main. Ce moine paraissait appartenir à un ordre aboli depuis des
siècles. Sa présence inspirait la terreur ; sa haute stature, ses joues
creusées par la souffrance, ses yeux brûlant d’urx feux sombre et inter-
rogeant l’obscurité semblaient chercher à déchirer l’épais rideau qui
le séparait de la place où il voulait aller ; ses pas étaient solemnelle-
ment symétriques.

Arrivé près du chœur, il déposa à terre le cierge qui tremblait dans
sa main décharnée, et debout de toute sa grandeur, élevant ses bras
au ciel, il s’écria d’une voix qui semblait sortir d’un sépulcre : « Y a-
t-il ici un être vivant qui veuille servir la messe? »

Eugène, que cette apparition avait glacé d’horreur, sentait sa
langue paralysée et les paroles du moine frappaient son oreille comme
un bourdonnement confus.

Le moine, qui laissa vainement écouler quelques minutes pour
donner à une réponse long-temps inespérée le temps d’arriver, répéta
la même invocation , et le tressaillement qu’elle communiqua à Eu-
gène fut pareil à celui d’une commotion électrique; celui-ci comprit
la demande du religieux, mais incapable d’y répondre, il attendait
avec anxiété la fin de ce qu’il croyait une horrible vision.

Cependant une troisième fois le moine répéta sa prière ; mais alors
sa voix tremblait d’angoisse, ses yeux se ternirent et son corps agité
d’un tremblement universel parut ployer sur ses genoux, un soupir
déchirant s’échappa de sa poitrine en entendant le silence seul qui
répondait à ses supplications.

Soit que la terreur agît moins sur ses esprits, soit qu’une pitié im-
périeuse lui arrachât les paroles de la bouche et maîtrisât ses mouve-
mens, Eugène s’élança du confessionnal et, de la même voix que fait
entendre l’enfant peureux la nuit, il cria : « Me voilà ! »

A la vue de celui qui venait combler scs vœux , le moine levant les
yeux au ciel sembla lui adresser des actions de grâces. Il procéda à
la cérémonie tant desirée : alors une douceur angélique remplaça le
feu sombre qui dévorait ses regards, une certaine majesté se répandit

LA CARICATURE.
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