L'ART.
La Commission directrice est composée d'amateurs et de
savants distingués :
Son Altesse le prince de Ligne, président ;
MM. le lieutenant-général Donny, vice-président;
Alphonse Balat, architecte du Roi, membre de la
classe des Beaux-Arts de l'Académie royale de
Belgique ;
Le comte Léopold de Beauffort:
R. Chalon, l'émincnt numismate, membre de la classe
des Lettres de l'Académie royale de Belgique ;
Le marquis Théodule de Rodes ;
Onghena, de Gand, qui a récemment vendu sa col-
lection bien connue à M. le baron Adolphe de
Rothschild ;
De Meester de Ravestein, envoyé extraordinaire et
ministre plénipotentiaire, possesseur d'une collection
très-importante, très-précieuse, dont il vient géné-
reusement de faire don au Musée ;
Schuermans, conseiller à la cour d'appel de Liège ;
Et le chanoine Reusens, professeur à l'Université de
Louvain.
Le Conservateur est M. Théodore Juste, membre de la
classe des Lettres de l'Académie royale de Belgique. Était-il
l'homme de la place ? C'est ce que nous allons examiner. Em-
ployé supérieur dans un ministère, M. Juste, qui a commis beau-
coup de livres d'histoire, — livres de poids qui n'impliquent pa^.
qu'il soit un historien, — M. Juste n'avait pas l'heur de plaire
aux divers ministres qui se succédaient dans le département au-
quel il était attaché. Un beau jour le Conservateur du Musée
d'Antiquités et d'Armures vint à mourir, et on s'empressa de se
débarrasser de M. Théodore Juste au ministère en le bombar-
dant successeur du défunt. Avait-il les qualités, la science re-
quises ? Là n'était pas la question. On ne se préoeccupe pas de
ces misères-là en Belgique quand il s'agit de questions d'art. Se
débarrasser d'un gêneur, c'était là l'essentiel, règle qui s'ap-
plique régulièrement, sans autre souci, dans la patrie des Van
Eyck et de Rubens, comme nous n'aurons que trop l'occasion
de le démontrer.
M. Juste, qui ne fait pas précisément excellentissimc ménage
avec sa Commission directrice, a publié, il n'y a pas longtemps,
un nouveau catalogue sous ce titre : Catalogue des Collections
composant le Musée royal d"Antiquités, d'Armures et d'Artillerie
{Bruxelles). Première section. Armes. Armures, Artillerie.
Précédé d'une Notice historique. Quatrième édition.
Ce fascicule de 117 pages a été la goutte d'eau qui fait dé-
border le vase.
La Commission ayant constaté que ce catalogue modèle
contenait à peu près autant d'erreurs que de mots, est allée trou-
ver le ministre pour lui exposer le cas, et le ministre lui a ré-
pondu que c'était elle qui était fautive, que c'était elle qui n'eût
pas dû laisser paraître pareil catalogue. Quant à M. Théodore
Juste il est naturellement plus que jamais en place; il n'y a rien
de changé : Commission et Conservateur se regardent plus que
jamais comme deux chiens de faïence.
Malheureusement l'armée belge compte bon nombre d'ot-
ficiers très-instruits et parmi eux un lieutenant aux carabiniers,
M. Eugène Van Vinkeroy, qui collabore à un savant recueil, la
Revue belge d'Art, de Sciences et de Technologie militaires ', et
dans le quatrième volume il a consacré sous ce titre : Une visite
aux Armures de la Porte de Bal, dix-sept pages à démontrer
avec la plus exquise courtoisie que M. Juste ne sait pas le pre-
mier mot de ce dont il parle. On s'en doutait un peu.
La conclusion du remarquable article de M. Van Vinkerov
est un vœu à la réalisation duquel il est le premier à croire
médiocrement. « Puisse, dit-il, la prochaine édition du catalo-
gue offrir moins de prise à la critique. Celui que nous possé-
dons actuellement doit provoquer chez nos visiteurs étrangers
des réflexions peu flatteuses pour notre amour-propre national. »
Malheureusement l'auteur avait débuté par constater que
M. Juste dans son avant-propos avoue lui-même qu'il s'agit d'un
catalogue provisoire.
« Les conclusions à tirer de ces lignes, dit M. Van Vinke-
roy, découlent naturellement : c'est d'abord, que depuis vingt-
quatre ans (1854-1878) nous sommes arrivés à la quatrième édi-
tion d'un ('atalogue provisoire incomplet, et renfermant des
erreurs. Ces erreurs existent en effet; elles sont nombreuses,
parfois importantes, et nous en signalerons quelques-unes con-
cernant les armures et les casques. C'est ensuite que cet état de
choses est destiné à se prolonger jusqu'au moment où les lo-
caux actuels de la Porte de Hal auront été agrandis, c'est-à-dire
indéfiniment. » Eh bien, la perspective n'est pas consolante pour
les amateurs d'antiquités.
« En attendant les améliorations et les aménagements fu-
turs, que la génération actuelle ne verra sans doute jamais dans
un pays où le provisoire devient souvent le définitif, on pourrait,
dès maintenant, rectifier, compléter le catalogue et en faire le
« Cours d'archéologie populaire », prévu dans l'avant-propos. »
On pourrait, mais non pas M. Juste, qui ne rappelle que
trop le maître d'école de la Grande-Duchesse. {A suivre.)
CHRONIQUE FRANÇAISE ET ETRANGERE
Franck. — Le règlement l>u Sai.on. — En instituant
le Salon triennal, M. le ministre Bardoux avait fait insérer au
Journal officiel du ; 1 décembre dernier le règlement du Salon
prochain qui, dans sa pensée, devait être graduellement aban-
donné à l'initiative des artistes. Entre autres dispositions nou-
velles, ce règlement n'attribuait la faculté d'être <t hors con-
cours » qu'aux seuls artistes ayant obtenu une médaille de
première classe. De là une certaine émotion parmi les peintres.
Voici les observations qui viennent d'être soumises au nouveau
ministre, M. Jules Ferry, par un grand nombre d'artistes :
« Jusqu'à l'année 1S77, un peintre devenait « hors concours»
quand il avait obtenu, soit trois médailles de troisième classe, soit
une de première. D'après le règlement nouveau, on est mis « hors
concours » seulement avec une médaille de première classe. Ces
médailles de première classe, qui ne sont qu'au nombre de trois
par composition, sont généralement accordées aux travaux de
grandes dimensions ou à la peinture d'histoire; il y a très-peu
d'exemples de premières médailles accordées par le jury à des
peintres de genre, de paysage ou de nature morte.
« Faire un règlement aussi sévère, c'est presque déclarer que
tout peintre qui ne se consacre pas à la peinture historique ou
décorative ne sera jamais « hors concours », et de plus cela pa-
raît presque une injustice, puisque ceux qui nous ont précédés ont
eu des conditions plus faciles : la plupart des peintres actuelle-
ment hors concours n'ayant pas obtenu de médaille de première
classe aux expositions annuelles.
« Si tout peintre ayant obtenu, soit une médaille de troi-
sième classe et une de deuxième, soit une de deuxième avec
1. Cette excellente publication paraît en volume tous les trime>tre3 à Bruxelles, chez Muquardt, rue de la Régence, et à Paris, chez J. Humaine, rue et
passage Dauphine, 30.
La Commission directrice est composée d'amateurs et de
savants distingués :
Son Altesse le prince de Ligne, président ;
MM. le lieutenant-général Donny, vice-président;
Alphonse Balat, architecte du Roi, membre de la
classe des Beaux-Arts de l'Académie royale de
Belgique ;
Le comte Léopold de Beauffort:
R. Chalon, l'émincnt numismate, membre de la classe
des Lettres de l'Académie royale de Belgique ;
Le marquis Théodule de Rodes ;
Onghena, de Gand, qui a récemment vendu sa col-
lection bien connue à M. le baron Adolphe de
Rothschild ;
De Meester de Ravestein, envoyé extraordinaire et
ministre plénipotentiaire, possesseur d'une collection
très-importante, très-précieuse, dont il vient géné-
reusement de faire don au Musée ;
Schuermans, conseiller à la cour d'appel de Liège ;
Et le chanoine Reusens, professeur à l'Université de
Louvain.
Le Conservateur est M. Théodore Juste, membre de la
classe des Lettres de l'Académie royale de Belgique. Était-il
l'homme de la place ? C'est ce que nous allons examiner. Em-
ployé supérieur dans un ministère, M. Juste, qui a commis beau-
coup de livres d'histoire, — livres de poids qui n'impliquent pa^.
qu'il soit un historien, — M. Juste n'avait pas l'heur de plaire
aux divers ministres qui se succédaient dans le département au-
quel il était attaché. Un beau jour le Conservateur du Musée
d'Antiquités et d'Armures vint à mourir, et on s'empressa de se
débarrasser de M. Théodore Juste au ministère en le bombar-
dant successeur du défunt. Avait-il les qualités, la science re-
quises ? Là n'était pas la question. On ne se préoeccupe pas de
ces misères-là en Belgique quand il s'agit de questions d'art. Se
débarrasser d'un gêneur, c'était là l'essentiel, règle qui s'ap-
plique régulièrement, sans autre souci, dans la patrie des Van
Eyck et de Rubens, comme nous n'aurons que trop l'occasion
de le démontrer.
M. Juste, qui ne fait pas précisément excellentissimc ménage
avec sa Commission directrice, a publié, il n'y a pas longtemps,
un nouveau catalogue sous ce titre : Catalogue des Collections
composant le Musée royal d"Antiquités, d'Armures et d'Artillerie
{Bruxelles). Première section. Armes. Armures, Artillerie.
Précédé d'une Notice historique. Quatrième édition.
Ce fascicule de 117 pages a été la goutte d'eau qui fait dé-
border le vase.
La Commission ayant constaté que ce catalogue modèle
contenait à peu près autant d'erreurs que de mots, est allée trou-
ver le ministre pour lui exposer le cas, et le ministre lui a ré-
pondu que c'était elle qui était fautive, que c'était elle qui n'eût
pas dû laisser paraître pareil catalogue. Quant à M. Théodore
Juste il est naturellement plus que jamais en place; il n'y a rien
de changé : Commission et Conservateur se regardent plus que
jamais comme deux chiens de faïence.
Malheureusement l'armée belge compte bon nombre d'ot-
ficiers très-instruits et parmi eux un lieutenant aux carabiniers,
M. Eugène Van Vinkeroy, qui collabore à un savant recueil, la
Revue belge d'Art, de Sciences et de Technologie militaires ', et
dans le quatrième volume il a consacré sous ce titre : Une visite
aux Armures de la Porte de Bal, dix-sept pages à démontrer
avec la plus exquise courtoisie que M. Juste ne sait pas le pre-
mier mot de ce dont il parle. On s'en doutait un peu.
La conclusion du remarquable article de M. Van Vinkerov
est un vœu à la réalisation duquel il est le premier à croire
médiocrement. « Puisse, dit-il, la prochaine édition du catalo-
gue offrir moins de prise à la critique. Celui que nous possé-
dons actuellement doit provoquer chez nos visiteurs étrangers
des réflexions peu flatteuses pour notre amour-propre national. »
Malheureusement l'auteur avait débuté par constater que
M. Juste dans son avant-propos avoue lui-même qu'il s'agit d'un
catalogue provisoire.
« Les conclusions à tirer de ces lignes, dit M. Van Vinke-
roy, découlent naturellement : c'est d'abord, que depuis vingt-
quatre ans (1854-1878) nous sommes arrivés à la quatrième édi-
tion d'un ('atalogue provisoire incomplet, et renfermant des
erreurs. Ces erreurs existent en effet; elles sont nombreuses,
parfois importantes, et nous en signalerons quelques-unes con-
cernant les armures et les casques. C'est ensuite que cet état de
choses est destiné à se prolonger jusqu'au moment où les lo-
caux actuels de la Porte de Hal auront été agrandis, c'est-à-dire
indéfiniment. » Eh bien, la perspective n'est pas consolante pour
les amateurs d'antiquités.
« En attendant les améliorations et les aménagements fu-
turs, que la génération actuelle ne verra sans doute jamais dans
un pays où le provisoire devient souvent le définitif, on pourrait,
dès maintenant, rectifier, compléter le catalogue et en faire le
« Cours d'archéologie populaire », prévu dans l'avant-propos. »
On pourrait, mais non pas M. Juste, qui ne rappelle que
trop le maître d'école de la Grande-Duchesse. {A suivre.)
CHRONIQUE FRANÇAISE ET ETRANGERE
Franck. — Le règlement l>u Sai.on. — En instituant
le Salon triennal, M. le ministre Bardoux avait fait insérer au
Journal officiel du ; 1 décembre dernier le règlement du Salon
prochain qui, dans sa pensée, devait être graduellement aban-
donné à l'initiative des artistes. Entre autres dispositions nou-
velles, ce règlement n'attribuait la faculté d'être <t hors con-
cours » qu'aux seuls artistes ayant obtenu une médaille de
première classe. De là une certaine émotion parmi les peintres.
Voici les observations qui viennent d'être soumises au nouveau
ministre, M. Jules Ferry, par un grand nombre d'artistes :
« Jusqu'à l'année 1S77, un peintre devenait « hors concours»
quand il avait obtenu, soit trois médailles de troisième classe, soit
une de première. D'après le règlement nouveau, on est mis « hors
concours » seulement avec une médaille de première classe. Ces
médailles de première classe, qui ne sont qu'au nombre de trois
par composition, sont généralement accordées aux travaux de
grandes dimensions ou à la peinture d'histoire; il y a très-peu
d'exemples de premières médailles accordées par le jury à des
peintres de genre, de paysage ou de nature morte.
« Faire un règlement aussi sévère, c'est presque déclarer que
tout peintre qui ne se consacre pas à la peinture historique ou
décorative ne sera jamais « hors concours », et de plus cela pa-
raît presque une injustice, puisque ceux qui nous ont précédés ont
eu des conditions plus faciles : la plupart des peintres actuelle-
ment hors concours n'ayant pas obtenu de médaille de première
classe aux expositions annuelles.
« Si tout peintre ayant obtenu, soit une médaille de troi-
sième classe et une de deuxième, soit une de deuxième avec
1. Cette excellente publication paraît en volume tous les trime>tre3 à Bruxelles, chez Muquardt, rue de la Régence, et à Paris, chez J. Humaine, rue et
passage Dauphine, 30.