Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 5.1879 (Teil 1)

DOI issue:
Nécrologie
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.17799#0281

DWork-Logo
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
NÉCROLOGIE

Un peintre peu connu, dont le talent froid et gris
n'était pas dénué d'une certaine élégance, Eugène Faure,
— un sous-Gleyre, dirait M. Emile Zola, — vient de
mourir à Paris dans sa cinquante-septième année. Il était
né à Seyssinet, près Grenoble, en 1822. Élève de David
d'Angers et de Rude, Faure se destinait d'abord à la sculp-
ture, mais il débuta en 1847 par un paysage qui obtint
les honneurs du Salon carré, honneurs inquiétants si l'on
songe qu'à cette époque les véritables maîtres du paysage
étaient invariablement refusés. Ce premier essai du
peintre appartient au musée de Grenoble. Après deux
ans de séjour en Italie, Faure revint en France et se voua
par goût à la peinture allégorique et mythologique et
par nécessité aux portraits. Parmi ses principaux tableaux,
on cite : les Rêves de la jeunesse, 1857; l'Education de
l'Amour, et un grand tableau de chasse, le Découplé, 1859;
les Premiers pas de l'Amour, 1861; la Confidence, 1863 ;
Ève, 1864. Ce tableau, acheté par M. de Morny, valut
au peintre la médaille d'or, alors unique. Au Salon
de 1872, une médaille de 2e classe était décernée à Eugène
Faure. A l'Exposition universelle de 1878 il avait une
Source qui fut peu remarquée. M. Charles Clément, dans
le Journal des Débats, consacre à Eugène Faure une
notice qui nous paraît exagérer quelque peu la valeur de
l'artiste et son importance dans l'école française. En
revanche, l'hommage rendu au caractère de l'homme
mérite d'être signalé. « Ni ses succès, dit M. Clément, ni.
les luttes et les difficultés de la vie ne lui firent perdre la
bienveillance de son humeur enjouée. Sans la moindre
vanité — je parle de la vanité maladive et coupable —■ il
était d'une intraitable fierté, et je doute qu'on l'ait jamais
vu en solliciteur dans un ministère. » Rare éloge et d'au-
tant plus honorable que la peinture allégorique est
généralement assez solliciteuse.

— Adolphe-Louis Hervier , mort quelques jours
avant Eugène Faure, était un tempérament d'artiste bien
plus richement doué. Aussi, loin d'obtenir une médaille
quelconque, fut-il refusé vingt-trois fois de suite au Salon
de Paris, à partir de l'année 1838, ainsi que le constatait
notre collaborateur M. Ph. Burty dans une notice con-
sacrée à cet « original et excellent paysagiste », et publiée
par l'Art en 1876 (2e année, tome I», page 213). Né à
Paris, élève d'Isabey, Hervier a beaucoup travaillé, beau-
coup produit, et quoique les maîtres de la critique aient
rendu justice à son talent, — notamment, en 1856, Théo-
phile Gautier, cité par M. Burty dans la notice à laquelle

nous venons de faire allusion, — il n'a jamais connu les
grandes joies du succès, et sa vie n'a été qu'une longue
souffrance. Il appartenait bien un peu à l'école de la vie
de Bohême, mais nous n'avons pas le courage de lui en
faire un grief, car s'il est vrai que la Bohème mène à la
misère, la misère aussi mène à la Bohême. C'est un cercle
vicieux. Un jour viendra où les amateurs se disputeront
les productions de cet artiste, demeuré de son vivant dans
une sorte de pénombre. C'était un vrai coloriste, et ses
moindres panneautins se font remarquer par la justesse
et la finesse de l'observation, par le charme et la vigueur
de l'exécution, par la vivacité de la touche, très-sûre et
savante, et toujours spirituelle. Théophile Gautier le pla-
çait entre Théodore Rousseau et Troyon. Il est tel de ses
tableaux qu'on pourrait comparer aux meilleurs Decamps,
car le talent d'Adolphe Hervier s'est développé dans des
voies très-diverses, et qui sait si cette diversité, dans
notre siècle de spécialisme à outrance, n'a pas mis obs-
tacle à sa popularité? Ses aquarelles, ses dessins, d'une
allure large et libre, n'offrent pas moins d'intérêt que sa
peinture. Il a fait aussi quelques lithographies, peu nom-
breuses, mais extrêmement remarquables. Hervier sera
classé au premier rang des oubliés et des dédaignés de
notre temps.

Les funérailles de Daumier. — Les obsèques de
Daumier, obsèques purement civiles, ayant eu lieu aux
frais de l'Etat, certains journaux ont crié à la dilapidation
des deniers publics, ce qui fait dire à M. Jules Claretie
dans son Mouvement parisien de l'Indépendance belge,
2 mars :

« Dilapidation ! Voilà un bien gros mot, car il faut
se rendre compte de ce qu'aura coûté à la France l'enter-
rement du pauvre Daumier. 11 habitait, à Valmondois, une
maison tout près du cimetière, si près qu'il pouvait pres-
que voir de sa fenêtre la place où il devait dormir. Des
porteurs sont venus, l'ont pris chez lui, sur son seuil, et
l'ont mené là à sa tombe, en vingt ou trente pas. On les
a payés — bien payés. Avec 3 francs ils ont paru con-
tents, et comme ils étaient quatre, et qu'ils n'y avait pas
à payer de frais d'église, c'est donc dou^e francs — je dis
dou^e francs — que les funérailles d'Honoré Daumier
auront coûté à la France! Toutes les commissions du
budget futures et toutes les criailleries ne feront pas que la
mémoire de Daumier soit beaucoup chargée et qu'elle
pèse bien lourd sur son pays avec cette épouvantable
dette : ......— ci — 12 francs. »

Le Directeur-Gérant, EUGÈNE VÉRON.

I
 
Annotationen