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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 6.1880 (Teil 4)

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Soldi, Émile: Les arts au moyen age, [3]
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https://doi.org/10.11588/diglit.18610#0114

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104 L'ART.

Depuis la révélation de Notre-Dame par Victor Hugo et les travaux des Lassus, des Lenoir,
des Viollet-le-Duc, des Boeswilwald, par un retour facile à prévoir, on admire les monuments
gothiques, que l'on considérait encore comme barbares il y a seulement cinquante ans.

On a compris que la domination des arts classiques dans des pays de climat, de mœurs et
de matériaux différents, a été une longue erreur, et chaque pays reprend ses traditions d'art
national, qui datent partout du moyen âge1.

De son côté, notre école d'architecture, obligée de faire simple et à bon marché, dans la
construction des églises, étudie et réadopte le style roman. La peinture a également éprouvé
le danger qu'il y a à imiter les maîtres de l'apogée : Raphaël, Léonard de Vinci, Titien. Cette
apogée n'est qu'une résultante. Amenés aujourd'hui à chercher une nouvelle voie, les peintres
s'inspirent plutôt des primitifs : Giotto, Ghirlandajo, Masaccio, Holbein, Albert Durer, et de la
manière large, simple et sincère avec laquelle ils ont su rendre la nature.

La sculpture n'est plus un faible pastiche de l'antique, sans vie, sans vérité, sans originalité;
elle revient aussi à l'étude directe de la nature comme l'ont fait les primitifs italiens, Donatello
et son école. La mosaïque, la tapisserie, l'imagerie, dévoyés par la Renaissance, reprennent les
grandes traditions décoratives dans les grands siècles qui la précèdent.

Partout la date où commence, où finit l'esprit du moyen âge, est factice. Pour la plus grande
partie du monde la Renaissance italienne n'a jamais existé; son caractère et son style étaient
trop en désaccord avec les mœurs de presque tous les pays. Il faut aller jusqu'au xvne ou
xviii6 siècle pour voir chez les uns ou les autres un changement notable : en Europe, certains
progrès, en Asie une profonde décadence. L'esprit français, particulièrement souple, sut exception-
nellement tirer pour certains arts quelque profit du pastiche de la Renaissance italienne. Des
églises, Saint-Eustache par exemple, les palais des bords de la Loire et de la Seine, si fins, si
distingués, appropriés à toutes les délicatesses de la vie élégante française, luttent avec ceux de
l'Italie, et ces qualités propres ont pu encore renaître et même s'imposer au monde dans les
divers styles qui se succèdent — malgré la règle et l'équerre de Louis XIV, — jusqu'au règne
de Louis XVI.

L'Allemagne jusqu'au siècle dernier est restée complètement gothique ; encore actuellement
en Bavière, à Bade, etc., les mœurs, les costumes, l'esprit, sont ceux du moyen âge. Les
lettres latines commencent à peine à être en usage. Le retour à l'étude exclusive de l'antique,
qui date de l'école d'Owerbeck, a tué pour un temps l'école allemande.

Les meilleures œuvres littéraires sont encore celles qui sont inspirées directement de l'histoire
ou des légendes nationales, de Gœthe et Schiller à Wagner; poètes et musiciens leur doivent
leurs plus riches sources d'inspiration. Dans bien des villes du Nord le sablier de l'aïeul s'égrène
toujours sur la cheminée, le silence de la nuit est interrompu par le veilleur du moyen
âge.

Les premières, les plus graves atteintes qui ont fait disparaître le sens artistique des entrailles
mêmes de la société sont venues de la Renaissance. L'invention de l'imprimerie a tué l'imagerie
et l'enluminure, les belles enseignes artistiques des maisons et des commerçants; les bibles de
Luther et de Calvin y ont trouvé un puissant appui, et par elles la moitié de l'Europe a été
entraînée dans la nouvelle réforme peut-être plus sensée, plus philosophique, mais iconoclaste,
c'est-à-dire sèche et anti-artistique.

Les guerres civiles qu'elle a produites ont arrêté l'art dans tout le nord de l'Europe
jusqu'au xvme siècle. Dans ces contrées l'intolérance devient de plus en plus violente, les
massacres et les guerres de religion commencent, la guerre de Trente ans éteint, arrête tout
progrès, même dans l'industrie.

Le Sud passe sous la domination espagnole. Grâce aux richesses du nouveau monde et au
génie de Charles-Quint, les jésuites et leur style l'envahissent. L'influence de la Compagnie, en
lutte contre le protestantisme, établit, dans tous les pays où elle reste dominante, le style de la

i. On se rappelle la condamnation universelle des tentatives classiques du roi Louis de Bavière. Aujourd'hui, à Nuremberg, on oblige les
propriétaires à bâtir les maisons dans le style moyen âge.
 
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