NOTRE BIBLIOTHÈQUE. 19
M. Francesco Lojacono a peint un ciel superbe, d'une profondeur infinie, pour son Dopo il
tramonto, très bon tableau qu'il s'est amusé à placer dans un cadre atroce, d'un cuivreux qui
tuerait net une peinture moins saine. Son Presso Posilippo se recommande de son côté par une
impression très vraie.
Dans le Monte Tiberio de M. Rubens Santoro, le fond est très habilement traité.
Lorsque j'aurai cité Sul Marc, morceau tout à fait distingué dû au pinceau de M"'c Julia
Hollman-Tedesco, j'aurai probablement signalé tout le dessus du panier du contingent napolitain,
et je ne crois très sincèrement pas que parmi tous ces vaillants artistes que j'ai eu tant de plaisir
à louer comme ils le méritent, il s'en trouve un seul capable d'exposer des mains sans dessin
aucun comme celles du Saint Antoine de M. Morelli, ou une figure aussi dépourvue de jambes
que Test cet infortuné saint.
Paul Leroi.
{l.a fin prochainement.)
NOTRE BIBLIOTHÈQUE
CCII
Heuman Sevogel, de Bâle, et sa Famille, par K. Vischer-Mérian.
Grand in-40, couverture en parchemin. Bàle, 1880. Benno
Schwabe. éditeur.
îpî^B^TsSjCI °us ce titre, M. Vischer-Mérian nous raconte
pj^fmN^o l'histoire d'une famille hâloise au moyen âge.
Des études sur le château de Wildenstein
kK^fv/^ amen^rent l'auteur à étudier sérieusement les
\ ^^X^^ archives de Liestal et de Bâlc. C'est dans ces
vieux documents qu'il trouva les renseignements nécessaires à
la reconstitution de l'histoire d'une famille qui est en même
temps l'histoire de Bâle.
Les hevogel étaient une de ces riches familles bourgeoises,
dont l'origine se perd dans la nuit du moyen âge, et qui devin-
rent, parleur activité et les circonstances favorables à leur ambi-
tion, comme les seigneurs et les rois des petites républiques
suisses.
Le premier des Sevogel, Henri, est nommé dans les actes
du cloître de Sainte-Claire, en 1322. En 1324, nous retrouvons
son fils, Henri Sevogel le jeune.
Henri Sevogel, le vieux, et sa femme Elisabeth ne laissent
guère de traces historiques. La vie de Henri le jeune et de sa
femme Agnès nous offre des détails curieux sur la situation des
changeurs à cette époque reculée. Les corporations, l'état moné-
taire, la propriété territoriale, le commerce de l'époque, toutes
ces grandes lignes de l'existence sont admirablement dessinées
dans les documents que l'histoire de ces générations antiques
nous a conservés. Henri est nommé membre du conseil de Bille :
c'est l'aristocratie financière qui s'empare du domaine politique.
Il est remplacé au conseil, en 1363, par son fils Conrad,
dont la femme porte le nom d'Elsina Zem Rosen. C'était un
dévot, grand ami du clergé, ef qui fit de riches présents aux
couvents et aux églises. De nombreux monuments, entre autres
les églises restaurées par ses soins, attestent la pieté de Conrad.
Peterman Sevogel et sa femme Margaretha Marschalk for-
ment la quatrième génération de cette famille, toujours peu
nombreuse. En 1374. lors de la lutte des Bàlois contre leur
évèque Jean de Vienne et le duc Léopold d'Autriche, Bâle est
assiégée. Peterman joue un certain rôle dans les affaires mili-
taires. Il n'appartient plus à la corporation, comme ses aïeux.
Il est devenu bourgeois de Bâle : c'est à ce titre qu'il entre au
conseil. La famille s'est évidemment enrichie. Peterman achète
le Camerers Hof et le château de Wildenstein.
Bernard Sevogel est appelé au conseil en 1406. Il avait rendu
de grands services financiers à la ville, toujours en guerre avec
les nobles autrichiens. Nous trouvons ici un recensement très
remarquable des fortunes à imposer, et des chevaux à employer
en temps de guerre. Bernard commanda une des compagnies
chargées de garder la ville.
Avec Heuman Sevogel et sa femme Gredanna d'Eptingen,
la famille arrive à son apogée. La marche sur Héricourt, l'élec-
tion au conseil, les procès avec la supérieure du couvent, Agnès
Zem Angen, les discussions avec le conseil, l'invasion des Arma-
gnacs, les Suisses à Liestal, la bataille de Saint-Jacques sur la
Birs, la mort de Heuman, nous fournissent autant d'épisodes
d'un grand intérêt historique.
Hans Bernard Sevogel est un grand ferrailleur. Il tue en
duel Hans de Waltenheim : il a comme son père des discussions
avec le conseil, dont il finit par être nommé membre.
Son fils Henri, plus violent encore, se brouille avec la ville,
avec sa sœur Véronique, avec tout le monde. La famille dispa-
rait tout à coup, à la fin du xvc siècle, sans qu'il soit possible
d'en retrouver de traces.
Tout l'ensemble constitué par ces huit générations de bour-
geois puissants a un véritable attrait pour l'historien et le philo-
sophe, 'fout y est bizarre, brutal, violent, exagéré : la richesse et
la dévotion, les brouilles et l'amitié, l'humilité et l'orgueil. Nous
sommes reconnaissants à l'auteur de nous avoir introduits dans ce
milieu, fantastique comme certains passages du Faust de Goethe.
Le volume, magnifiquement imprimé sur papier de Hol-
lande, contient 34 gravures sur bois dans le texte, et 4 eaux-
fortes hors texte. C'est M. C. F. Knaus qui s'est chargé de
l'exécution de la plupart des bois. Nous remarquons encore les
noms de MM. Hecht, de Munich, Ade, de Stuttgart, et Brock-
haus, de Leipzig.
Les eaux-fortes sont dues à MAI. J. Brunner, de Winther-
thur, et Ed. Jeanmaire, de Genève.
L'auteur et l'éditeur n'ont rien négligé pour donner à ce
volume toute la richesse extérieure qu'il comporte. Le papier a
été fabriqué exprès par la maison Thurneysen, de Saint-Alban.
La fonderie Haas a fourni les caractères. M. Vœllmy s'est chargé
de faire les dessins et reproductions nécessaires.
C'est, en somme, une publication très soigneusement faite
et qui allie tout l'intérêt passionnant de l'histoire aux attraits
inhérents à une œuvre réellement artistique.
B. Laroche.
M. Francesco Lojacono a peint un ciel superbe, d'une profondeur infinie, pour son Dopo il
tramonto, très bon tableau qu'il s'est amusé à placer dans un cadre atroce, d'un cuivreux qui
tuerait net une peinture moins saine. Son Presso Posilippo se recommande de son côté par une
impression très vraie.
Dans le Monte Tiberio de M. Rubens Santoro, le fond est très habilement traité.
Lorsque j'aurai cité Sul Marc, morceau tout à fait distingué dû au pinceau de M"'c Julia
Hollman-Tedesco, j'aurai probablement signalé tout le dessus du panier du contingent napolitain,
et je ne crois très sincèrement pas que parmi tous ces vaillants artistes que j'ai eu tant de plaisir
à louer comme ils le méritent, il s'en trouve un seul capable d'exposer des mains sans dessin
aucun comme celles du Saint Antoine de M. Morelli, ou une figure aussi dépourvue de jambes
que Test cet infortuné saint.
Paul Leroi.
{l.a fin prochainement.)
NOTRE BIBLIOTHÈQUE
CCII
Heuman Sevogel, de Bâle, et sa Famille, par K. Vischer-Mérian.
Grand in-40, couverture en parchemin. Bàle, 1880. Benno
Schwabe. éditeur.
îpî^B^TsSjCI °us ce titre, M. Vischer-Mérian nous raconte
pj^fmN^o l'histoire d'une famille hâloise au moyen âge.
Des études sur le château de Wildenstein
kK^fv/^ amen^rent l'auteur à étudier sérieusement les
\ ^^X^^ archives de Liestal et de Bâlc. C'est dans ces
vieux documents qu'il trouva les renseignements nécessaires à
la reconstitution de l'histoire d'une famille qui est en même
temps l'histoire de Bâle.
Les hevogel étaient une de ces riches familles bourgeoises,
dont l'origine se perd dans la nuit du moyen âge, et qui devin-
rent, parleur activité et les circonstances favorables à leur ambi-
tion, comme les seigneurs et les rois des petites républiques
suisses.
Le premier des Sevogel, Henri, est nommé dans les actes
du cloître de Sainte-Claire, en 1322. En 1324, nous retrouvons
son fils, Henri Sevogel le jeune.
Henri Sevogel, le vieux, et sa femme Elisabeth ne laissent
guère de traces historiques. La vie de Henri le jeune et de sa
femme Agnès nous offre des détails curieux sur la situation des
changeurs à cette époque reculée. Les corporations, l'état moné-
taire, la propriété territoriale, le commerce de l'époque, toutes
ces grandes lignes de l'existence sont admirablement dessinées
dans les documents que l'histoire de ces générations antiques
nous a conservés. Henri est nommé membre du conseil de Bille :
c'est l'aristocratie financière qui s'empare du domaine politique.
Il est remplacé au conseil, en 1363, par son fils Conrad,
dont la femme porte le nom d'Elsina Zem Rosen. C'était un
dévot, grand ami du clergé, ef qui fit de riches présents aux
couvents et aux églises. De nombreux monuments, entre autres
les églises restaurées par ses soins, attestent la pieté de Conrad.
Peterman Sevogel et sa femme Margaretha Marschalk for-
ment la quatrième génération de cette famille, toujours peu
nombreuse. En 1374. lors de la lutte des Bàlois contre leur
évèque Jean de Vienne et le duc Léopold d'Autriche, Bâle est
assiégée. Peterman joue un certain rôle dans les affaires mili-
taires. Il n'appartient plus à la corporation, comme ses aïeux.
Il est devenu bourgeois de Bâle : c'est à ce titre qu'il entre au
conseil. La famille s'est évidemment enrichie. Peterman achète
le Camerers Hof et le château de Wildenstein.
Bernard Sevogel est appelé au conseil en 1406. Il avait rendu
de grands services financiers à la ville, toujours en guerre avec
les nobles autrichiens. Nous trouvons ici un recensement très
remarquable des fortunes à imposer, et des chevaux à employer
en temps de guerre. Bernard commanda une des compagnies
chargées de garder la ville.
Avec Heuman Sevogel et sa femme Gredanna d'Eptingen,
la famille arrive à son apogée. La marche sur Héricourt, l'élec-
tion au conseil, les procès avec la supérieure du couvent, Agnès
Zem Angen, les discussions avec le conseil, l'invasion des Arma-
gnacs, les Suisses à Liestal, la bataille de Saint-Jacques sur la
Birs, la mort de Heuman, nous fournissent autant d'épisodes
d'un grand intérêt historique.
Hans Bernard Sevogel est un grand ferrailleur. Il tue en
duel Hans de Waltenheim : il a comme son père des discussions
avec le conseil, dont il finit par être nommé membre.
Son fils Henri, plus violent encore, se brouille avec la ville,
avec sa sœur Véronique, avec tout le monde. La famille dispa-
rait tout à coup, à la fin du xvc siècle, sans qu'il soit possible
d'en retrouver de traces.
Tout l'ensemble constitué par ces huit générations de bour-
geois puissants a un véritable attrait pour l'historien et le philo-
sophe, 'fout y est bizarre, brutal, violent, exagéré : la richesse et
la dévotion, les brouilles et l'amitié, l'humilité et l'orgueil. Nous
sommes reconnaissants à l'auteur de nous avoir introduits dans ce
milieu, fantastique comme certains passages du Faust de Goethe.
Le volume, magnifiquement imprimé sur papier de Hol-
lande, contient 34 gravures sur bois dans le texte, et 4 eaux-
fortes hors texte. C'est M. C. F. Knaus qui s'est chargé de
l'exécution de la plupart des bois. Nous remarquons encore les
noms de MM. Hecht, de Munich, Ade, de Stuttgart, et Brock-
haus, de Leipzig.
Les eaux-fortes sont dues à MAI. J. Brunner, de Winther-
thur, et Ed. Jeanmaire, de Genève.
L'auteur et l'éditeur n'ont rien négligé pour donner à ce
volume toute la richesse extérieure qu'il comporte. Le papier a
été fabriqué exprès par la maison Thurneysen, de Saint-Alban.
La fonderie Haas a fourni les caractères. M. Vœllmy s'est chargé
de faire les dessins et reproductions nécessaires.
C'est, en somme, une publication très soigneusement faite
et qui allie tout l'intérêt passionnant de l'histoire aux attraits
inhérents à une œuvre réellement artistique.
B. Laroche.