220 L'ART.
avec un intérêt tout particulier les pages consacrées au célèbre cloître de
l'ancien couvent de San Juan de los Reyes, à Tolède.
Après avoir déploré les actes de vandalisme accomplis aux dépens de
l'église, d'abord par l'invasion napoléonienne, puis par la guerre civile,
M. Germond de Lavigne ajoute1 :
« Le cloître porte les traces cruelles d'une dévastation d'autant plus
regrettable, qu'elle s'est attaquée à un véritable chef-d'œuvre. L'une des
galeries est complètement en ruine; ses débris, presque au complet, sont
entassés le long du mur, attendant la main patiente du restaurateur. Les
trois autres côtés., avec leurs arcs portant une double guirlande de feuilles,
d'oiseaux, d'animaux et de grotesques, leurs fragiles colonnettes, leurs piliers
cachés chacun par une statue de saint, au-dessus d'un riche piédestal et sous
un dais à jour, présentent l'un des plus riches spécimens de l'art gothique
dans toute sa pureté. « Ce somptueux édifice, dit à ce sujet don José
« Amador de los Rios, auteur de Toledo pintoresca, est connu et vanté par
« tous les voyageurs qui sont venus en Espagne et qui en ont étudié les
« richesses artistiques ; il jouit dans toute l'Europe d'une immense renommée,
« et on ne rencontre pas une œuvre pittoresque où il ne figure en première
« ligne. Nos voisins, les Français, ont partagé cette admiration et cet enthou-
« siasme, et ils nous ont reproché quelquefois l'état d'abandon où se trouve
« le cloître de San Juan de los Reyes. » De même qu'autour de l'église, une
inscription à la louange des rois catholiques se développe sur la frise des
galeries le long du mur intérieur et au-dessus des chapiteaux des piliers. »
A peine arrivé à Tolède, j'ai été droit à San Juan de los Reyes,
convaincu que l'acte de vandalisme flétri tant d'années auparavant par les
deux écrivains espagnol et français avait excité l'attention des gouvernants,
et que le mal était réparé, puisqu'il pouvait l'être si facilement.
J'eus la douleur de constater qu'on l'avait au contraire laissé empirer,
et l'on m'assure que ce honteux état de choses se perpétue. Ne vous
semble-t-il pas qu'avant de songer à « faire grand » à Rome, il vaudrait
mieux ne pas y jeter l'argent par les fenêtres par pure gloriole aussi ridicule
i. Pages 302 et joj.
Motifs tirés du cloître de San Juan de Los Reyes, à Tolède. — Dessin de H. Toussaint.
avec un intérêt tout particulier les pages consacrées au célèbre cloître de
l'ancien couvent de San Juan de los Reyes, à Tolède.
Après avoir déploré les actes de vandalisme accomplis aux dépens de
l'église, d'abord par l'invasion napoléonienne, puis par la guerre civile,
M. Germond de Lavigne ajoute1 :
« Le cloître porte les traces cruelles d'une dévastation d'autant plus
regrettable, qu'elle s'est attaquée à un véritable chef-d'œuvre. L'une des
galeries est complètement en ruine; ses débris, presque au complet, sont
entassés le long du mur, attendant la main patiente du restaurateur. Les
trois autres côtés., avec leurs arcs portant une double guirlande de feuilles,
d'oiseaux, d'animaux et de grotesques, leurs fragiles colonnettes, leurs piliers
cachés chacun par une statue de saint, au-dessus d'un riche piédestal et sous
un dais à jour, présentent l'un des plus riches spécimens de l'art gothique
dans toute sa pureté. « Ce somptueux édifice, dit à ce sujet don José
« Amador de los Rios, auteur de Toledo pintoresca, est connu et vanté par
« tous les voyageurs qui sont venus en Espagne et qui en ont étudié les
« richesses artistiques ; il jouit dans toute l'Europe d'une immense renommée,
« et on ne rencontre pas une œuvre pittoresque où il ne figure en première
« ligne. Nos voisins, les Français, ont partagé cette admiration et cet enthou-
« siasme, et ils nous ont reproché quelquefois l'état d'abandon où se trouve
« le cloître de San Juan de los Reyes. » De même qu'autour de l'église, une
inscription à la louange des rois catholiques se développe sur la frise des
galeries le long du mur intérieur et au-dessus des chapiteaux des piliers. »
A peine arrivé à Tolède, j'ai été droit à San Juan de los Reyes,
convaincu que l'acte de vandalisme flétri tant d'années auparavant par les
deux écrivains espagnol et français avait excité l'attention des gouvernants,
et que le mal était réparé, puisqu'il pouvait l'être si facilement.
J'eus la douleur de constater qu'on l'avait au contraire laissé empirer,
et l'on m'assure que ce honteux état de choses se perpétue. Ne vous
semble-t-il pas qu'avant de songer à « faire grand » à Rome, il vaudrait
mieux ne pas y jeter l'argent par les fenêtres par pure gloriole aussi ridicule
i. Pages 302 et joj.
Motifs tirés du cloître de San Juan de Los Reyes, à Tolède. — Dessin de H. Toussaint.