286
L'ART.
CCXI1I
L'Opéra à Veau-forte. Irc série: cinq planches par Faut. Re-
nouard. Paris, Librairie de l'Art, Jules Rouam, éditeur.
Les abonnés de l'Art connaissent bien M. Paul Renouard.
Les séries de dessins que nous avons publiées de lui à plusieurs
reprises ont démontré surabondamment qu'il y a peu d'artistes
qui saisissent et qui rendent avec plus de vérité les attitudes et
les gestes. Sa faculté maîtresse, sa qualité dominante, c'est la vie
et l'expression Je ne connais pas de faculté plus essentielle à
un dessinateur. A la fidélité et à la puissance du dessin, il a
ajouté la couleur. La série de ses dessins des Pensionnaires du
Louvre - renferme un grand nombre de dessins à la plume qui
ressemblent absolument à des eaux-fortes, et qui ont une inten-
sité de couleur vraiment extraordinaire. Ce caractère nous avait
déjà frappé dès la première année de la publication de F Art, et
nous nous plaisons à rappeler que nos encouragements ne sont
peut-être pas pour rien dans le parti qu'a pris M. Paul Renouard
de se mettre à l'eau-forte.
Cette première série qu'il publie sur l'Opéra suffirait à
prouver que le conseil que nous lui donnions alors partait d'une
observation assez juste de la nature de son talent. Dans chacune
de ces cinq planches, on retrouve cette justesse du coup d'œil,
cette préoccupation de la vie et de la réalité, ce sentiment de
l'ensemble, cette vérité d'attitude, de mouvement, que nous
avons si souvent remarquée dans ses dessins.
Il nous semble difficile de trouver quelque chose de plus
étudié, de plus compléta ce point de vue, que le Charpen-
tier, que nous avons publié dans l'Art. La construction de la
tète et la diversité des plans sont rendues avec une exactitude
des plus saisissantes. On en peut dire autant des mains, dont
l'artiste n'a cru devoir ni esquiver ni atténuer les déformations
produites par le travail.
Une Visite sur les toits a un autre caractère. Ce qui frappe
surtout ici, c'est la justesse de l'observation avec laquelle sont
rendues les diverses attitudes de ces personnages peu habitués
à marcher sur les toits, par un vent comme celui qu'il fait en ce
moment. Un seul, un architecte sans doute, se tient droit, avec
une certaine affectation de raideur qui fait d'autant mieux
ressortir le contraste de la marche hésitante et courbée de ses
compagnons de route.
Les trois autres planches: le Spectre d'Hamlet, la Loge des
comparses, la Leçon de danse, nous font pénétrer dans les mys-
tères de l'Opéra, et présentent chacune un intérêt particulier.
J'avoue cependant que je les aime moins que les deux pre-
mières. Il y manque une des qualités qui éclatent le plus mani-
festement dans les dessins de M. Renouard, le rendu des
substances, l'observation exacte des caractères particuliers que
prend la réflexion des rayons lumineux sur les matières de
densités différentes. C'est surtout par l'habileté à rendre ces
diversités que se distinguent les eaux-fortes de Jules Jacquemard.
Jamais peut-être personne n'a eu au même degré que lui le dis-
cernement de l'œil, l'acuité spéciale de la vision qui saisit ces
finesses et les rend de manière à ne laisser au spectateur aucun
doute sur la nature matérielle des objets qu'il représente.
Je ne puis croire cependant que M. P. Renouard néglige
volontairement ce côté si important de l'art de l'aquafortiste, 11
me paraît impossible qu'il ne parvienne pas bientôt à rendre
dans ses eaux-fortes des nuances dont ses dessins à la plume
prouvent évidemment qu'il a le très juste sentiment. Quand le
maniement de l'acide lui sera devenu complètement [familier,
il n'est pas douteux pour nous qu'il y retrouve toutes les qua-
lités dont il fait preuve ailleurs, et même qu'il les retrouve
complétées et rehaussées par l'accent et la vigueur qui sont
propres à l'eau-forte.
Dès aujourd'hui, M. Renouard tient une place très hono-
rable parmi les aquafortistes, mais il peut certainement faire
encore mieux que cela. Il n'a pas encore acquis toute la
gamme des finesses et des vigueurs dont l'emploi raisonné et
l'opposition donnent à l'eau-forte tant de saveur en permettant
de tout rendre depuis les plus délicates transparences de l'atmo-
sphère jusqu'aux noirs les plus intenses, depuis le velouté d'une
joue d'enfant jusqu'aux rigidités du plus dur métal. Mais M. Re-
nouard est un chercheur et un travailleur ; ce qui lui manque de
ce côté, il l'acquerra certainement, et il l'acquerra bientôt,
car il n'a pas en somme un bien grand espace à parcourir avant
d'arriver au but. Ses qualités natives l'y portent du reste tout
naturellement. Il est encore un peu dominé par le procédé.
Qu'il s'en rende complètement maître comme il l'est de la plume,
et les amateurs se disputeront ses eaux-fortes.
Eugène Véron.
CCXIV
Manuel du Procédé de Phototypie, par Julius Allgeyer. Un
volume in-ia de 200 pages, illustré de 20 gravures. Leipzig,
1881. Karl Scholtze , éditeur. (Handbuch ûber das Licht-
druck-Verfahren, von Julius Allgeyer.)
Ce traité pratique des procédés phototypiques a pour but,
dit l'auteur, de fournir aux commençants les indications néces-
saires, pour triompher rapidement des difficultés inséparables
du début.
Le livre de M. Allgeyer nous offre d'abord deux chapitres
consacrés : le premier, à une introduction ; le second, à un
aperçu historique intéressant. Puis, l'auteur traite de la partie
technique dans différents chapitres, dont voici les titres :
A. Le local et la disposition générale ;
B. L'épreuve négative ;
C. La planche à imprimer ;
D. La copie ;
E. L'impression ;
F. La retouche ;
G. Résumé général ;
H. Défauts et accidents du procédé ; leurs causes et les
moyens d'y remédier ;
/. Des épreuves et des essais.
Enfin, un appendice étudie quelques procédés spéciaux : la
substitution des plaques de zinc aux plaques de verre, le trans-
port de l'épreuve, les procédés de l'épreuve négative, la photo-
typographie, l'impression en couleur.
En somme, le Manuel du Procédé de Phototypie nous paraît
répondre parfaitement aux intentions de l'auteur. Les descrip-
tions, assez courtes pour ne pas fatiguer l'attention, sont cepen-
dant très complètes dans leur concision. Le livre de M. Julius
Allgeyer est destiné, par la clarté de l'exposition et l'étude
sérieuse des moindres détails, à rendre de véritables services.
B. Laroche.
27S à 2S4. — Tome il, pages 10 à 2,- et ;i à 3 S - — t^ette série est publiée en
1. Voir l'Art, l" année, tome III, pages ;S à 65.
2. Voir l'Art, 6" année, tome I°r, pages 158 à 16;, — 1S2 à 189, — 25g à 203, -
un volume, avec les articles de M. Louis Leroy, à la librairie de l'Art.
L'ART.
CCXI1I
L'Opéra à Veau-forte. Irc série: cinq planches par Faut. Re-
nouard. Paris, Librairie de l'Art, Jules Rouam, éditeur.
Les abonnés de l'Art connaissent bien M. Paul Renouard.
Les séries de dessins que nous avons publiées de lui à plusieurs
reprises ont démontré surabondamment qu'il y a peu d'artistes
qui saisissent et qui rendent avec plus de vérité les attitudes et
les gestes. Sa faculté maîtresse, sa qualité dominante, c'est la vie
et l'expression Je ne connais pas de faculté plus essentielle à
un dessinateur. A la fidélité et à la puissance du dessin, il a
ajouté la couleur. La série de ses dessins des Pensionnaires du
Louvre - renferme un grand nombre de dessins à la plume qui
ressemblent absolument à des eaux-fortes, et qui ont une inten-
sité de couleur vraiment extraordinaire. Ce caractère nous avait
déjà frappé dès la première année de la publication de F Art, et
nous nous plaisons à rappeler que nos encouragements ne sont
peut-être pas pour rien dans le parti qu'a pris M. Paul Renouard
de se mettre à l'eau-forte.
Cette première série qu'il publie sur l'Opéra suffirait à
prouver que le conseil que nous lui donnions alors partait d'une
observation assez juste de la nature de son talent. Dans chacune
de ces cinq planches, on retrouve cette justesse du coup d'œil,
cette préoccupation de la vie et de la réalité, ce sentiment de
l'ensemble, cette vérité d'attitude, de mouvement, que nous
avons si souvent remarquée dans ses dessins.
Il nous semble difficile de trouver quelque chose de plus
étudié, de plus compléta ce point de vue, que le Charpen-
tier, que nous avons publié dans l'Art. La construction de la
tète et la diversité des plans sont rendues avec une exactitude
des plus saisissantes. On en peut dire autant des mains, dont
l'artiste n'a cru devoir ni esquiver ni atténuer les déformations
produites par le travail.
Une Visite sur les toits a un autre caractère. Ce qui frappe
surtout ici, c'est la justesse de l'observation avec laquelle sont
rendues les diverses attitudes de ces personnages peu habitués
à marcher sur les toits, par un vent comme celui qu'il fait en ce
moment. Un seul, un architecte sans doute, se tient droit, avec
une certaine affectation de raideur qui fait d'autant mieux
ressortir le contraste de la marche hésitante et courbée de ses
compagnons de route.
Les trois autres planches: le Spectre d'Hamlet, la Loge des
comparses, la Leçon de danse, nous font pénétrer dans les mys-
tères de l'Opéra, et présentent chacune un intérêt particulier.
J'avoue cependant que je les aime moins que les deux pre-
mières. Il y manque une des qualités qui éclatent le plus mani-
festement dans les dessins de M. Renouard, le rendu des
substances, l'observation exacte des caractères particuliers que
prend la réflexion des rayons lumineux sur les matières de
densités différentes. C'est surtout par l'habileté à rendre ces
diversités que se distinguent les eaux-fortes de Jules Jacquemard.
Jamais peut-être personne n'a eu au même degré que lui le dis-
cernement de l'œil, l'acuité spéciale de la vision qui saisit ces
finesses et les rend de manière à ne laisser au spectateur aucun
doute sur la nature matérielle des objets qu'il représente.
Je ne puis croire cependant que M. P. Renouard néglige
volontairement ce côté si important de l'art de l'aquafortiste, 11
me paraît impossible qu'il ne parvienne pas bientôt à rendre
dans ses eaux-fortes des nuances dont ses dessins à la plume
prouvent évidemment qu'il a le très juste sentiment. Quand le
maniement de l'acide lui sera devenu complètement [familier,
il n'est pas douteux pour nous qu'il y retrouve toutes les qua-
lités dont il fait preuve ailleurs, et même qu'il les retrouve
complétées et rehaussées par l'accent et la vigueur qui sont
propres à l'eau-forte.
Dès aujourd'hui, M. Renouard tient une place très hono-
rable parmi les aquafortistes, mais il peut certainement faire
encore mieux que cela. Il n'a pas encore acquis toute la
gamme des finesses et des vigueurs dont l'emploi raisonné et
l'opposition donnent à l'eau-forte tant de saveur en permettant
de tout rendre depuis les plus délicates transparences de l'atmo-
sphère jusqu'aux noirs les plus intenses, depuis le velouté d'une
joue d'enfant jusqu'aux rigidités du plus dur métal. Mais M. Re-
nouard est un chercheur et un travailleur ; ce qui lui manque de
ce côté, il l'acquerra certainement, et il l'acquerra bientôt,
car il n'a pas en somme un bien grand espace à parcourir avant
d'arriver au but. Ses qualités natives l'y portent du reste tout
naturellement. Il est encore un peu dominé par le procédé.
Qu'il s'en rende complètement maître comme il l'est de la plume,
et les amateurs se disputeront ses eaux-fortes.
Eugène Véron.
CCXIV
Manuel du Procédé de Phototypie, par Julius Allgeyer. Un
volume in-ia de 200 pages, illustré de 20 gravures. Leipzig,
1881. Karl Scholtze , éditeur. (Handbuch ûber das Licht-
druck-Verfahren, von Julius Allgeyer.)
Ce traité pratique des procédés phototypiques a pour but,
dit l'auteur, de fournir aux commençants les indications néces-
saires, pour triompher rapidement des difficultés inséparables
du début.
Le livre de M. Allgeyer nous offre d'abord deux chapitres
consacrés : le premier, à une introduction ; le second, à un
aperçu historique intéressant. Puis, l'auteur traite de la partie
technique dans différents chapitres, dont voici les titres :
A. Le local et la disposition générale ;
B. L'épreuve négative ;
C. La planche à imprimer ;
D. La copie ;
E. L'impression ;
F. La retouche ;
G. Résumé général ;
H. Défauts et accidents du procédé ; leurs causes et les
moyens d'y remédier ;
/. Des épreuves et des essais.
Enfin, un appendice étudie quelques procédés spéciaux : la
substitution des plaques de zinc aux plaques de verre, le trans-
port de l'épreuve, les procédés de l'épreuve négative, la photo-
typographie, l'impression en couleur.
En somme, le Manuel du Procédé de Phototypie nous paraît
répondre parfaitement aux intentions de l'auteur. Les descrip-
tions, assez courtes pour ne pas fatiguer l'attention, sont cepen-
dant très complètes dans leur concision. Le livre de M. Julius
Allgeyer est destiné, par la clarté de l'exposition et l'étude
sérieuse des moindres détails, à rendre de véritables services.
B. Laroche.
27S à 2S4. — Tome il, pages 10 à 2,- et ;i à 3 S - — t^ette série est publiée en
1. Voir l'Art, l" année, tome III, pages ;S à 65.
2. Voir l'Art, 6" année, tome I°r, pages 158 à 16;, — 1S2 à 189, — 25g à 203, -
un volume, avec les articles de M. Louis Leroy, à la librairie de l'Art.