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L'ART.
Parmi les hommes éminents qui travaillèrent avec un de-
vouement sans bornes à la réalisation de cette pensée, il en est
trois dont les noms se distinguent entre tous.
C'est d'abord C. B. Stetson, érudit consommé, patriote
ardent; il mit, dès le premier jour, toute sa science au service
de l'enseignement. Nous avons de lui, sous les yeux, un petit
traité anonyme, — car il poussait la modestie jusqu'à ne pas tou-
jours signer ses ouvrages, — publié vers 1872, sous ce titre :
Industrial drawing for beginners, « Le dessin industriel pour
les commençants ».
Cette publication contient deux cent cinquante dessins, ac-
compagnés des indications nécessaires pour les exécuter; exercices
de géométrie et autres d'après nature, arrangés systématique-
ment et « bien calculés », comme le dit l'auteur, pour guider
l'œil et la main, fortifier la mémoire et le jugement, cultiver le
goût, développer l'imagination et l'invention. Entre autres con-
seils, nous y trouvons celui-ci, qui nous paraît excellent à tous
égards :
« Lorsqu'il commence la copie d'un modèle, l'élève doit
procéder par points plutôt que par lignes. »
En 1874, C. B. Stetson donne un nouvel ouvrage, signé
cette fois : L'Éducation technique : ce que sont et ce que doivent
enseigner les écoles publiques américaines.
Ce travail très complet, et qui dénote un sentiment profond
des besoins de la pédagogie au point de vue pratique, a pour
bases la comparaison des méthodes et des résultats de l'éduca-
tion technique en Europe, d'après les rapports officiels. Nous y
trouvons les aperçus suivants :
« Un cours de dessin bien entendu doit embrasser de nom-
breuses sections clairement définies. L'ensemble doit être systé-
matiquement arrangé, en tenant compte :
« i° De l'ordre logique des principes;
« i° Des difficultés manuelles d'exécution;
« 5" Des capacités diverses d'élèves d'âges différents ;
« 4° Des principes généraux de l'enseignement.
« Le dessin, ne pouvant être considéré comme une chose
vague et incertaine, doit être traité aussi rationnellement que
toute autre branche de l'enseignement. »
L'auteur recommande ensuite l'usage des Text-books,
cahiers de modèles avec des explications; du tableau noir pour
dessiner en grand des dessins dictés, exercice excellent qui force
l'élève à réfléchir en reproduisant les formes exactes des choses
que représentent les mots; et du dessin de mémoire dont i im-
portance n'est plus à démontrer.
En effet, dès 1847, M. H. Lecoq de Boisbaudran, mon
maître, faisait paraître une brochure sous ce titre: Education de
la mémoire pittoresque, où pour la première fois se trouvaient
posées les bases de la méthode, mise en relief depuis par une
pratique de plus de vingt années, et qui valut à son auteur l'ap-
probation d'artistes et de savants tels que Paul Delaroche.
Eugène Delacroix, Horace Vernet, Léon Cogniet, Viollet-le-Duc,
Mérimée, François Arago, Chevreul, etc.
J. B. Stetson était certainement l'homme que ses nombreux
travaux rendaient le plus compétent pour mener à bien l'œuvre
à laquelle il avait voué sa vie. Malheureusement, une maladie
de cœur emporta trop tôt ce pionnier de l'art, puissante organi-
sation intellectuelle mal servie par un corps débile. Du moins
eut-il la joie de voir lever le grain qu'il avait si vaillamment
semé et, par suite, la consolation de n'avoir pas.travaillé en vain.
Après Stetson, nous rencontrons M. Ch. C. Perkins, pré-
sident du Comité d'éducation, directeur du Boston Art Mu-
séum, dont la patiente activité n'a cessé de se faire jour,
pendant ces dernières années, dans des discours et dans des
écrits ; propagande active servie par l'autorité qu'il doit à son
caractère, autant qu'à sa haute situation.
Autour de lui s'est groupée toute une pléiade d'hommes de
foi, joignant à la compétence la plus incontestable l'entente
claire des nécessités du moment.
Dès le début de la campagne qui se poursuit, ils amenèrent
à eux l'opinion publique.
En 1870, une loi fut promulguée qui, déclarant l'étude du
dessin obligatoire dans les écoles primaires, ordonna l'établisse-
ment, dans toute ville ayant plus de 10,000 âmes, d'écoles d'art
industriel.
Cette première et importante disposition prise, on ne tarda
pas à s'apercevoir qu'il restait encore bien à faire.
A peine, en effet, comptait-on alors à Boston cinq profes-
seurs de dessin. Que tenter dans ces conditions ?
On pensa qu'il fallait commencer par unifier l'enseignement
en adoptant une méthode unique.
Après mûr examen, on fit appel à l'Angleterre et 1 on
engagea M. Walter Smith, Master of Art, de l'école de Ken-
sington.
( La suite prochainement. ) félix ReGAMEY.
Le dessin a l'école primaire de Boston.
Le Directeur-Gérant : EUGÈNE VÉRON.
L'ART.
Parmi les hommes éminents qui travaillèrent avec un de-
vouement sans bornes à la réalisation de cette pensée, il en est
trois dont les noms se distinguent entre tous.
C'est d'abord C. B. Stetson, érudit consommé, patriote
ardent; il mit, dès le premier jour, toute sa science au service
de l'enseignement. Nous avons de lui, sous les yeux, un petit
traité anonyme, — car il poussait la modestie jusqu'à ne pas tou-
jours signer ses ouvrages, — publié vers 1872, sous ce titre :
Industrial drawing for beginners, « Le dessin industriel pour
les commençants ».
Cette publication contient deux cent cinquante dessins, ac-
compagnés des indications nécessaires pour les exécuter; exercices
de géométrie et autres d'après nature, arrangés systématique-
ment et « bien calculés », comme le dit l'auteur, pour guider
l'œil et la main, fortifier la mémoire et le jugement, cultiver le
goût, développer l'imagination et l'invention. Entre autres con-
seils, nous y trouvons celui-ci, qui nous paraît excellent à tous
égards :
« Lorsqu'il commence la copie d'un modèle, l'élève doit
procéder par points plutôt que par lignes. »
En 1874, C. B. Stetson donne un nouvel ouvrage, signé
cette fois : L'Éducation technique : ce que sont et ce que doivent
enseigner les écoles publiques américaines.
Ce travail très complet, et qui dénote un sentiment profond
des besoins de la pédagogie au point de vue pratique, a pour
bases la comparaison des méthodes et des résultats de l'éduca-
tion technique en Europe, d'après les rapports officiels. Nous y
trouvons les aperçus suivants :
« Un cours de dessin bien entendu doit embrasser de nom-
breuses sections clairement définies. L'ensemble doit être systé-
matiquement arrangé, en tenant compte :
« i° De l'ordre logique des principes;
« i° Des difficultés manuelles d'exécution;
« 5" Des capacités diverses d'élèves d'âges différents ;
« 4° Des principes généraux de l'enseignement.
« Le dessin, ne pouvant être considéré comme une chose
vague et incertaine, doit être traité aussi rationnellement que
toute autre branche de l'enseignement. »
L'auteur recommande ensuite l'usage des Text-books,
cahiers de modèles avec des explications; du tableau noir pour
dessiner en grand des dessins dictés, exercice excellent qui force
l'élève à réfléchir en reproduisant les formes exactes des choses
que représentent les mots; et du dessin de mémoire dont i im-
portance n'est plus à démontrer.
En effet, dès 1847, M. H. Lecoq de Boisbaudran, mon
maître, faisait paraître une brochure sous ce titre: Education de
la mémoire pittoresque, où pour la première fois se trouvaient
posées les bases de la méthode, mise en relief depuis par une
pratique de plus de vingt années, et qui valut à son auteur l'ap-
probation d'artistes et de savants tels que Paul Delaroche.
Eugène Delacroix, Horace Vernet, Léon Cogniet, Viollet-le-Duc,
Mérimée, François Arago, Chevreul, etc.
J. B. Stetson était certainement l'homme que ses nombreux
travaux rendaient le plus compétent pour mener à bien l'œuvre
à laquelle il avait voué sa vie. Malheureusement, une maladie
de cœur emporta trop tôt ce pionnier de l'art, puissante organi-
sation intellectuelle mal servie par un corps débile. Du moins
eut-il la joie de voir lever le grain qu'il avait si vaillamment
semé et, par suite, la consolation de n'avoir pas.travaillé en vain.
Après Stetson, nous rencontrons M. Ch. C. Perkins, pré-
sident du Comité d'éducation, directeur du Boston Art Mu-
séum, dont la patiente activité n'a cessé de se faire jour,
pendant ces dernières années, dans des discours et dans des
écrits ; propagande active servie par l'autorité qu'il doit à son
caractère, autant qu'à sa haute situation.
Autour de lui s'est groupée toute une pléiade d'hommes de
foi, joignant à la compétence la plus incontestable l'entente
claire des nécessités du moment.
Dès le début de la campagne qui se poursuit, ils amenèrent
à eux l'opinion publique.
En 1870, une loi fut promulguée qui, déclarant l'étude du
dessin obligatoire dans les écoles primaires, ordonna l'établisse-
ment, dans toute ville ayant plus de 10,000 âmes, d'écoles d'art
industriel.
Cette première et importante disposition prise, on ne tarda
pas à s'apercevoir qu'il restait encore bien à faire.
A peine, en effet, comptait-on alors à Boston cinq profes-
seurs de dessin. Que tenter dans ces conditions ?
On pensa qu'il fallait commencer par unifier l'enseignement
en adoptant une méthode unique.
Après mûr examen, on fit appel à l'Angleterre et 1 on
engagea M. Walter Smith, Master of Art, de l'école de Ken-
sington.
( La suite prochainement. ) félix ReGAMEY.
Le dessin a l'école primaire de Boston.
Le Directeur-Gérant : EUGÈNE VÉRON.