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La caricature: revue morale, judiciaire, littéraire, artistique, fashionable et scénique — 1832 (Nr. 62-112)

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Numéro 101 (11 Octobre 1832)
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https://doi.org/10.11588/diglit.26416#0237

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807 ---— LA CARICATURE.-808

voyez-vous. Toute la France-honnètes-gens y eût passé, vous dis-je !
Je n’ai donc pas été moins exposé que vous, quoique je fusse allé à
la campagne; et j’ai raison de m’indigner contre l’indulgence avec
laquelle on traite les scélérats.

Le Capitaine. — Peste! voisin, de l’indulgence !...

Patrouillard.—Oh ! je vous vois venir, sacrédié! vous allez me
parler de quelques misérables condamnations aux galères. Mais,
sacrédié! qu’est-ce que c’est que. dix ans de galères pour de pareils
monstres , quand les plus simples voleurs de grands chemins sont
condamnés au double. Enfin n’importe ! il nous restait une consola-
tion ; nous avions l’espoir d’obtenir le prix de notre dévouement à
l’ordre de choses. On aura beau faire, quejedisais, le jury a prononcé,
par erreur, il est vrai, mais enfin il a prononcé. On ne peut donc pas
nous priver de la tête du scélérat. Eh bien! du tout, sacrédié ! on se
permet de commuer sa peine, et au moment où nous sommes à
attendre qu’on le Guizotine , on nous apprend que le scélérat en sera
quitte pour passer le reste de ses jours en prison ! Et vous appelez
cela de la justice ! Et vous ne voulez pas qu’on se révolte !

Le Capitaine. —Ma foi non! Le condamné inspirait le plus grand
intérêt; son crime ressemblait beaucoup à ce qu’on appelait héroïsme
deux ans auparavant... Et d’ailleurs... la crainte de l’opinion...

Patrouillard. — Basic! voulez-vous que je vous dise?... le gouver-
nement, c’est un égoïste, qui ne pense qu’à lui, et nullement à ses
vrais amis, comme vous et moi.

Le Capitaine. — Oh ! quant à moi , je trouve que c’est la première
fois qu’il a le sens commun, et, à quelques exceptions près, nous
pensons tous de même dans la compagnie.

Patrouillard, se levant brusquement. — Ah,’oui-dà ! vous pensez
qu’il a bien fait ! et vous le dites ! Je ne vous aurais jamais cru si mau-
vais citoyens ! Non, non, non, non, sacrédié! S’il avait tout bonne-
ment ordonné de rendre la liberté au scélérat dont on nous vole, oui, je
le répète, dont on nous vole, dont on nous extorque la tête, hé! bien,
je ne dis pas que j’en eusse été extrêmement satisfait, mais enfin j au-
rais patienté , parce que je suis certain que, grâce aux sergens de
ville et à M. Vidocq , le scélérat n’eût pas survécu à la première
émeute. Mais le condamner à vivre tranquillement de longues années
dans une bonne prison! une prison bien solide, bien clôturée, à
l’abri des intempéries et des assommeurs! à l’abri même de la protec-
tion de la brigade de sûreté! Allons donc! voilà ce qui m’irrite, ce
qui m’ulcère, ce qui me décide à abandonner l’ordre de choses à son
malheureux sort ! Oui, je le délaisse et le maudis, sacrédié ! et je
donne ma démission de garde national, sacrédié ! Et voilà mon fusil,
sacrédié ! ma giberne, sacrédié! et mon sabre aussi, sacrédié! Et.
voyez-vous , on me dirait maintenant : Restez , Patrouillard , et vous
aurez deux têtes, dix têtes, vingt têtes, que je répondrais, non,
sacrédié! cherchez ailleurs des défenseurs ; mais ce ne sera pas moi,
sacrédié ! ni aucun des hommes modérés dont vous n’avez pas craint
de froisser aujourd’hui les plus douces illusions. Car je vois bien que
l’opposition a raison ; je vois bien qu’on ne tient aucune de ses pro-
messes, et que rien n’est une vérité, pas même la Guizotine, sacrédié !

La Glaneuse est un joli petit journal qui remplissait avec ta-
lent, à Lyon, la tâche que nous nous sommes imposée à Paris, de
couvrir de ridicule l’absurde Juste-Milieu; mais le Juste-Milieu l’avait
un moment écrasée sous le poids des poursuites et des persécutions.
On sait qu’il n’a que cette manière de répondre à ses adversaires.

La Glaneuse reparaît, et nous nous en réjouissons. Elle est faite
par des hommes de talent et de cœur, par de bons patriotes, tracassés
comme nous; voilà bien des motifs pour nous intéresser à son succès.
Il en est un encore, c’est que nous sommes Lyonnais et que la réus-
site de M. Granier prouvera que notre ville natale n’est pas si loin
de nos opinions qu’on le dit. Puisse la Glaneuse faire une ample
moisson d’abonnés!

LETTRE DE L'EX-DEFUNT ROI D'ESPAGNE
A UN DE SES CONFRÈRES D’EUROPE.

Mon cher et sacré Confrère,

Il m’est revenu, par mon ambassadeur auprès de votre chère et
sacrée personne, que vous aviez fait répandre dans votre empire le
bruit que j’étais mort et enterré.

Il paraît que vous aviez besoin de quelque nouvelle intéressante
qui opérât une utile diversion relativement à vos affaires intérieures,
attendu que les assassinats n’y ont pas réussi ; ou bien encore , que
vous vouliez gagner quelques millions sur les fonds publics, attendu
que vous êtes extrêmement pauvre, comme chacun sait.

Quoiqu’il en soit, c’est une fort mauvaise plaisanterie , mon cher
et sacré Confrère, que vous m’avez jouée-là; et vous me permettrez
de vous en témoigner mon sacré mécontentement.

Il en est résulté que , toute l’Europe me croyant mort, chacun s’est
mis à dire sa façon de penser sur moi, avec une franchise qui n’a eu
rien d’aimable.

On a dit que j’étais un imbécille, un scélérat, un brigand; que
j’avais empoisonné mon père; que ma mère s’était assez mal trouvée
de m’avoir eu pour fils; qu’enfin j’étais féroce, et qui pis est, fort
lâche; toutes choses qui peuvent être vraies, mais qui n’en sont pas
moins désagréables à entendre.

Jusque-là cependant, cela eût pu passer, car de mon vivant même,
on se gêne assez peu, comme vous le savez, pour m’en dire de pa-
reilles. Mais le bruit de ma mort s’est répandu de proche en proche
jusque dans mes propres états. Et alors.... oh! ma foi alors , il s’est
fait contre moi une dégringolade de malédictions, que les oreilles
m’en cornent encore !

« — Enfin ! » s’écriaient les apostoliques, « nous en voilà donc déli-
ce vrés! Son âme, pour sûr, est allée en enfer, car c’était un cafard
« qui, au fond, 11e croyait à rien. Ce qui le prouve, c’est qu’il n’en-
« tendait que six messes par jour avant de déjeûner, et quinze les
« dimanches et fêtes ; tandis que Don Carlos en entendrait douze dou-
« zaines sans boire ni manger. Don Carlos fera un bien plus grand
« roi. Vive Don Carlos! »

« —C’est bien fait! » s’exclamaient les négros, « carcetaitun tyran !

« Que le diable l’emporte, et le fasse bouillir, et le rôtisse, et le
« larde, et venge sur lui, à grands coups de fourche, la mort de ce
« pauvre Riégo, et les milliers de crimes qu’il a contresignés! »

Enfin, tout le monde en général vociférait : « Ma foi, tant mieux ! »

J’ai même vu le moment où les constitutionnels s allaient lever en
masse, d’un côté, et les partisans de mon frère de l’autre, pour me
donner un successeur. La situation devenait perplexe.

Mais c’est surtout dans mon palais, parmi mes courtisans, parmi
mes domestiques, que celte fausse nouvelle a produit un excès de
joie, bien pénible à mon amour-propre. Les voilà donc, ces hommes
à crachats, à rubans, à breloques de toute espèce; et ces valets si
humbles, si soumis, si rampans; vils animaux tous, qui nous lèchent
le pied quand nous sommes debout, qui nous mordent au visap-e
quand nous sommes par terre ! Ah, Dieu ! de quelles épithètes les in-
fâmes ont chargé ma mémoire!....

Et vous le dirai-je ?.... Il n’est pas jusqua la reine, jusqu’à ma
femme elle-même qui, se hâtant d’essuyer les feintes larmes que mon
agonie lui avait fait répandre, ne fît sa petite partie dans ie grand
charivari qu’on donnait à mes augustes mânes! Elle fut sur le point,
la malheureuse, de me donner également un succeseur, séance te-
nante, en la personne d’un jeune capitaine d’alguasils, héritier pré-
somptif de son cœur, selon toute apparence, et que je soupçonne fort,
depuis ce moment, d’avoir déjà pris des à-comptes sur la succession.

Tels sont, mon cher et sacré Confrère, les augustes emhêtemens que
m’a valus votre diable d’idée! N’en riez pas! Je voudrais parbleu bien
vous voir à pareille passe, vous qui vous flattez d’être adoré de tout
le monde ! Je voudrais bien que le bruit de votre trépas se répandît
un moment dans votre empire! Ah! vraiment, vous en entendriez
de belles! L’un s’écrierait : « Ce fut un avare! » L’autre dirait : » Ce fut
un méchant ! » Celui-ci ajouterait : « Ce fut un fourbe, un parjure, un
traître, qui ruina son peuple, qui viola ses sermens, qui foula aux
pieds les lois de son pays, qui démoralisa, corrompit, vénalisa ». Ce
serait en un mot un concert d’injures et de récriminations à vous
faire dresser la perruque sur la tête !

Et puis, il faudrait entendre, quand ils reconnaîtraient que la
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