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L'ART.
et il devenait alors un Corrège armé de la palette d'un Titien. 11 n'est personne qui ne soit à
même de reconnaître un dessin de Rubens ; l'œil du curieux le moins érudit est habitué à
discerner son faire particulier et typique dans ces larges ébauches à la plume ou au crayon,
lavées de bistre ou d'encre, rehaussées de blanc ou d'indigo. On croirait voir deux esquisses
superposées, car le trait qui contourne les figures apparaît comme sous la transparence des
teintes au moyen desquelles le peintre semble avoir refait plutôt qu'achevé sa première
composition.
Le bel éclectisme flamand de Rubens apparaissait ainsi que son originalité, dans les onze
dessins exposés au quai Malaquais et parmi lesquels nous signalerons à la mémoire du lecteur « les
(Euvres de Miséricorde » (n° 299, collection de M. Armand), « les Trois Grâces » (n° 303,
collection de M. Dumesnil), « l'Enlèvement des Sabines » (n° 30J, même collection), intéressant
par l'inscription qui rappelle que ce dessin a été exécuté par Polyclore de Caravage dans le
Vache couchée.
Dessin d'Albert Cuijp, vigoureusement lavé d'encre de Chine.
(Exposition de dessins de maîtres anciens à l'Ecole des beaux-arts.)
Collection du duc d'Aumale.
style des graphites anciens découverts à Rome et que Rubens l'a retouché à sa manière. Nous
rappellerons enfin le « Saint François recevant les stigmates » (n° 306, de la collection de
M. de Beckerath).
A côté des dessins de Rubens, on avait eu la bonne idée d'en placer un de Jordaens, son
élève (n° 307, « le Roi boit », collection de M. Dutuit), très poussé et assez fini pour être
devenu un véritable tableau à l'aquarelle. Il était instructif de voir ce que peut devenir la manière
de Rubens sous un pinceau gras et joyeux, mais guidé par une main n'obéissant plus à un
sentiment supérieur aux instincts de l'art matérialiste.
Van Dyck se montrait, par contre, dans sa fière simplicité et dans sa perfection aussi naturelle
que charmante. L'immortel élève de Rubens n'était pas désigné par son tempérament pour
hériter de l'abondance de génie de son maître; il fut amené, en se rendant froidement compte
de l'exagération des qualités de celui-ci, à rechercher la beauté dans la vérité. Ses portraits ont
plus grand air que ceux de son maître parce qu'ils sont plus ressemblants ; sa couleur a plus de
L'ART.
et il devenait alors un Corrège armé de la palette d'un Titien. 11 n'est personne qui ne soit à
même de reconnaître un dessin de Rubens ; l'œil du curieux le moins érudit est habitué à
discerner son faire particulier et typique dans ces larges ébauches à la plume ou au crayon,
lavées de bistre ou d'encre, rehaussées de blanc ou d'indigo. On croirait voir deux esquisses
superposées, car le trait qui contourne les figures apparaît comme sous la transparence des
teintes au moyen desquelles le peintre semble avoir refait plutôt qu'achevé sa première
composition.
Le bel éclectisme flamand de Rubens apparaissait ainsi que son originalité, dans les onze
dessins exposés au quai Malaquais et parmi lesquels nous signalerons à la mémoire du lecteur « les
(Euvres de Miséricorde » (n° 299, collection de M. Armand), « les Trois Grâces » (n° 303,
collection de M. Dumesnil), « l'Enlèvement des Sabines » (n° 30J, même collection), intéressant
par l'inscription qui rappelle que ce dessin a été exécuté par Polyclore de Caravage dans le
Vache couchée.
Dessin d'Albert Cuijp, vigoureusement lavé d'encre de Chine.
(Exposition de dessins de maîtres anciens à l'Ecole des beaux-arts.)
Collection du duc d'Aumale.
style des graphites anciens découverts à Rome et que Rubens l'a retouché à sa manière. Nous
rappellerons enfin le « Saint François recevant les stigmates » (n° 306, de la collection de
M. de Beckerath).
A côté des dessins de Rubens, on avait eu la bonne idée d'en placer un de Jordaens, son
élève (n° 307, « le Roi boit », collection de M. Dutuit), très poussé et assez fini pour être
devenu un véritable tableau à l'aquarelle. Il était instructif de voir ce que peut devenir la manière
de Rubens sous un pinceau gras et joyeux, mais guidé par une main n'obéissant plus à un
sentiment supérieur aux instincts de l'art matérialiste.
Van Dyck se montrait, par contre, dans sa fière simplicité et dans sa perfection aussi naturelle
que charmante. L'immortel élève de Rubens n'était pas désigné par son tempérament pour
hériter de l'abondance de génie de son maître; il fut amené, en se rendant froidement compte
de l'exagération des qualités de celui-ci, à rechercher la beauté dans la vérité. Ses portraits ont
plus grand air que ceux de son maître parce qu'ils sont plus ressemblants ; sa couleur a plus de