Fac-similé d'une eau-forte d'Kdwin Edwards.
EDWIN EDWARDS
PEINTRE DE PAYSAGES ET AQUAFORTISTE
a critique a-t-elle été équitable à l'endroit d'Edwin Edwards pendant
qu'il produisait ? S'intéressait-elle suffisamment à cet effort qui n'était
point vulgaire et qui faisait compter un volontaire de plus dans
la campagne contre la doctrine académique, ici comme au-delà du
Détroit ? A-t-elle signalé avec assez d'insistance aux fervents de
l'Eau-forte moderne des pages auxquelles l'avenir était visiblement
assuré? J'ai toujours pense et écrit le contraire, aussi souvent que je
l'ai pu. Il est certain pour tous ceux qui ont suivi l'œuvre d'Edwards
qu'il est empreint d'une'originalité, d'une ténacité, d'un parfum de
nationalité fort rares. J'espère que ces qualités ressortiront pleinement
dans l'exhibition posthume générale que fait, à Londres, sa veuve.
Le jugement définitif aura été le bon. La dure critique consacrera un talent d'essence toute
nationale et de tendance toute moderne.
J'ai beaucoup pratiqué Edwin Edwards dans le dernier tiers de sa vie. Son œuvre, fût-ce
même dans ses défauts, m'aidait à mettre le doigt sur certaines différences radicales entre l'école
anglaise et toutes les écoles du Continent. Son caractère et ses mœurs m'ont aidé plus que tous
autres à franchir la porte — difficile à ouvrir, impossible à forcer — du caractère et de
l'intérieur anglais. 11 avait le cœur fin, le jugement honnête, l'esprit curieux. 11 était assez dégagé
de préjugés nationaux pour que la fusion des amitiés se fît aussi complète que le tolère un détroit
à traverser. 11 avait lu tous nos classiques, pouvait citer de mémoire du Montaigne '. Il avait
i. Edwards avait réservé, dans sa bibliothèque nombreuse et choisie, un casier à une série spéciale : celle des livres écrits par des Français
sur l'Angleterre, voyages, études de mœurs, etc. Je lui envoyais, de temps à autre, les brochures que je bouquinais sur les quais ou les livres
qui paraissaient en librairie sur cette matière tout à fait curieuse. Voici un jugement remarquable sur les Mémoires de Philarètc Chastes que
venait d'éditer g. Charpentier (1877) : « ... Quand j'ai reçu les Mémoires de Ph. Chasles, j'étais tiop malade pour vous écrire. Je les ai lues avec
beaucoup de plaisir, les observations sur l'Angleterre de cette époque. Quant aux observations sur les mœurs, c'est beaucoup trop couleur de
rose. Il sort de prison, au temps de la Terreur, il ne voit pas avec un œil assez indifférent les institutions de mon pays et loue beaucoup trop
des choses qu'il fallait condamner. Il a le jugement trop sentimental, comme une femme, mais d'une femme qui ne sait pas juger... »
Au mois de décembre de cette même année 1877, au moment où les élections générales venaient d'ouvrir pour la Fiance une ère nouvelle,
Edwards m'écrivait : « Pour la première fois depuis ces derniers temps, je reprends estime pour la France. Sa conduite dernièrement a été
superbe (il souligne le mot deux tois). Elle s'est enfin montrée capable de ce que nous appelons « self government ... »
Tome XIX. 21
Lettre tirée d'un Ovide de 1651.
EDWIN EDWARDS
PEINTRE DE PAYSAGES ET AQUAFORTISTE
a critique a-t-elle été équitable à l'endroit d'Edwin Edwards pendant
qu'il produisait ? S'intéressait-elle suffisamment à cet effort qui n'était
point vulgaire et qui faisait compter un volontaire de plus dans
la campagne contre la doctrine académique, ici comme au-delà du
Détroit ? A-t-elle signalé avec assez d'insistance aux fervents de
l'Eau-forte moderne des pages auxquelles l'avenir était visiblement
assuré? J'ai toujours pense et écrit le contraire, aussi souvent que je
l'ai pu. Il est certain pour tous ceux qui ont suivi l'œuvre d'Edwards
qu'il est empreint d'une'originalité, d'une ténacité, d'un parfum de
nationalité fort rares. J'espère que ces qualités ressortiront pleinement
dans l'exhibition posthume générale que fait, à Londres, sa veuve.
Le jugement définitif aura été le bon. La dure critique consacrera un talent d'essence toute
nationale et de tendance toute moderne.
J'ai beaucoup pratiqué Edwin Edwards dans le dernier tiers de sa vie. Son œuvre, fût-ce
même dans ses défauts, m'aidait à mettre le doigt sur certaines différences radicales entre l'école
anglaise et toutes les écoles du Continent. Son caractère et ses mœurs m'ont aidé plus que tous
autres à franchir la porte — difficile à ouvrir, impossible à forcer — du caractère et de
l'intérieur anglais. 11 avait le cœur fin, le jugement honnête, l'esprit curieux. 11 était assez dégagé
de préjugés nationaux pour que la fusion des amitiés se fît aussi complète que le tolère un détroit
à traverser. 11 avait lu tous nos classiques, pouvait citer de mémoire du Montaigne '. Il avait
i. Edwards avait réservé, dans sa bibliothèque nombreuse et choisie, un casier à une série spéciale : celle des livres écrits par des Français
sur l'Angleterre, voyages, études de mœurs, etc. Je lui envoyais, de temps à autre, les brochures que je bouquinais sur les quais ou les livres
qui paraissaient en librairie sur cette matière tout à fait curieuse. Voici un jugement remarquable sur les Mémoires de Philarètc Chastes que
venait d'éditer g. Charpentier (1877) : « ... Quand j'ai reçu les Mémoires de Ph. Chasles, j'étais tiop malade pour vous écrire. Je les ai lues avec
beaucoup de plaisir, les observations sur l'Angleterre de cette époque. Quant aux observations sur les mœurs, c'est beaucoup trop couleur de
rose. Il sort de prison, au temps de la Terreur, il ne voit pas avec un œil assez indifférent les institutions de mon pays et loue beaucoup trop
des choses qu'il fallait condamner. Il a le jugement trop sentimental, comme une femme, mais d'une femme qui ne sait pas juger... »
Au mois de décembre de cette même année 1877, au moment où les élections générales venaient d'ouvrir pour la Fiance une ère nouvelle,
Edwards m'écrivait : « Pour la première fois depuis ces derniers temps, je reprends estime pour la France. Sa conduite dernièrement a été
superbe (il souligne le mot deux tois). Elle s'est enfin montrée capable de ce que nous appelons « self government ... »
Tome XIX. 21
Lettre tirée d'un Ovide de 1651.