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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 5.1879 (Teil 4)

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Robaut, Alfred: Notice sur quelques peintures murales par Corot
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https://doi.org/10.11588/diglit.17802#0253

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NOTICE SUR QUELQUES PEINTURES MURALES. 22j

en Egypte expose au Salon de 1840 ; et, plus tard, toujours à titre gratuit, il peignit pour la
même église tout un chemin de croix1. C'est assez dire qu'il fit en cet endroit de longs séjours à
diverses reprises, d'autant plus qu'il ne travaillait à cette œuvre de longue haleine que lorsqu'il
faisait mauvais temps, et quand il était absolument empêché de peindre en plein air.

Mantes fut aussi l'un des pays de prédilection du maître, à cause de la quantité de motifs
charmants fournis par les cours d'eau, les ponts, les vieux moulins et la situation pittoresque de
son élégante cathédrale aux deux tours ajourées, l'un des plus beaux ornements de la contrée.
Or, demeurait alors à Mantes un neveu de M"'c Osmond, M. Robert, notaire, auquel Corot a
laissé bien des toiles précieuses, sur lesquelles nous aurons l'occasion de revenir, et entre autres
quelques portraits de famille. Un matin, de 1840 à 1842, que Corot était venu en se promenant
de Rosny à Mantes, chez son ami et, par exception, sans ses ustensiles de travail — je gagerais
bien, en revanche, que Dame « pipette » fut de la partie, — il apprit que les ouvriers peintres
couvraient les murs de la toute petite salle de bains. En regardant faire ses estimables « confrères
en Saint-Luc », il lui prit la fantaisie de les remplacer sur-le-champ, et de peindre des vues sur
chaque panneau de la pièce. Il savait la préférence marquée de son ami pour les sites d'Italie, et
il conçut tout à coup l'idée de le servir à son goût. Sans tarder il se mit à l'œuvre, bien qu'il
manquât de tous les ustensiles nécessaires. Il demanda seulement qu'on lui laissât les pots à
couleur et les brosses, puis il envoya chercher dans une boutique du voisinage divers objets
complémentaires et quelques outils moins primitifs.

Pour commencer le voilà traçant à la craie un enchevêtrement de lignes que l'assistance —
naturellement il y avait galerie —- ne pouvait prendre que pour un barbouillage insensé ou une
révolution de toiles d'araignées..... Cela fait, il prévint qu'on allait « voir du nouveau ».

Certes, la tâche était ingrate : tous panneaux dissemblables, et l'un d'eux surtout si étroit,
qu'il mesure i",98 de haut sur om, 32 de large. N'importe : en un tour de main, le plan étant
bien combiné, la couleur s'écrasa sur place.

Quel moment ce fut, et devait-il être assez à peindre lui-même, ce lion du paysage, ce vrai
magicien — comme nous avions fini par le baptiser — abandonné à sa verve tout à la fois
emportée et calme, tirant uniquement de ses souvenirs des types de vues marquées au coin de la
plus saisissante vérité, et peut-être plus « portraits » dans leur synthèse, que si elles eussent été
peintes « ad vivum » ! Nous nous le figurons volontiers allant de l'un à l'autre paysage,
ayant l'œil comme la main à tout et partout à la fois, pour garder la grande harmonie et
donner à son petit monument un balancement de lignes et une exécution qui se tiennent comme
un bloc !

Et quel bon choix dans la disposition des sujets ! Comme toute la verve italienne est prise
sur le fait et présentée d'une manière saisissante ! Que d'audace et d'inattendu pour garnir à ce
point une salle tout irrégulière, qui n'occupe guère que deux mètres carrés de surface !

Voici d'abord de chaque côté de la porte, et en nous retournant, deux panneaux de 1 '",98 de
hauteur, mais l'un de om,Q2 de largeur. Corot y représente une vue du Golfe de Gênes : un
artiste, son carton sur les genoux, est assis sur un rocher, d'où il dessine le point de vue dont
nous jouissons nous-mêmes... Quelque palais Doria sur le haut d'un escarpement. Un bout de
mer bleue se voit par la trouée de droite, mais il n'en faut pas beaucoup pour la montrer à
l'imagination dans son immensité, lorsqu'on est en face d' « un Corot ».

L'autre côté mesure o'",8o de largeur; il nous montre une Gorge du Tyrol, quelque torrent
échappé du Tessin ou de l'un des grands lacs qui sont au nord de Milan et que bordent des
montagnes d'un aspect particulièrement nacré, à cause du voisinage des masses d'eau avec le
croisement des rayons solaires. Des arbres élancés, au tronc garni de lierre, se bercent en tous
sens, mêlant leurs racines aux robustes rochers dont la verdure ranime les tons grisâtres. Au
fond, à droite, une colline rosée jaune, sur le sommet de laquelle se perd une forêt d'oliviers. (Je

1. Les compositions n'étaient pas île lui : il fit faire par un jeune homme les préparations sur toile (om,42 X om,6-i) d'après des

lithographies assez médiocres de l'école allemande moderne, et il les modifia en bien des points. — Commencée vers 18;/., cette suite de
quatorze sujets fut inaugurée le 22 mai 1859.

TOMK XIX. 2r)
 
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