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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 5.1879 (Teil 4)

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Courrier des musées: deux nouveau tableaus du musée de Lille
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https://doi.org/10.11588/diglit.17802#0285

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2)6

L'ART.

Schmidt et de deux de ses enfants dont l'un, l'aîné, était le fruit
d'un mariage antérieur. Chose assez singulière, l'Index operum
Joannis Holbenii, publié dans le tome IV de la grande édition
in-folio des œuvres d'Érasme est moins aftirmatif que la tra-
dition acceptée sur la personnalité des personnages représentés.
Il décrit ainsi ce tableau : Effigies matronis mulieris sedentis
puellam gestentis, puerumque manu foventis ; illam dicunt
Holbenii conjugem, hos vero liberos.

Bien évidemment, si le rédacteur de Y Index avait partagé
sans réserves cette opinion, il eût employé d'autres termes que
ceux dont il s'est servi dans sa description.

Le portrait du musée de Bàle provient de la collection de
Boniface Amerbach, contemporain et ami de Hans Holbein,
et auquel on doit la conservation des dessins et des études de ce
maître qui sont la partie la plus précieuse du musée de Bàle.

Le portrait en question est peint sur papier, et il a été dé-
coupé suivant le contour des personnages et reporté sur un
panneau de bois qui forme actuellement le fond noir du tableau.
On ne sait à quelle époque cette opération fut exécutée, mais,
comme il est facile de le voir par les nombreuses cassures et
déchirures du papier, ce ne fut que bien postérieurement à la
date où cette merveilleuse étude fut exécutée (1528 ou 1529), et
alors que la peinture sur papier avait déjà beaucoup souffert.

Malgré les détériorations que le transport n'a pu dissimuler
et les quelques retouches rendues nécessaires, l'œuvre du musée
de Bàle est considérée avec raison comme un chef-d'œuvre, et
j'en connais peu qui donnent une aussi haute opinion du talent
tic Holbein comme portraitiste.

« Pour la manœuvre du pinceau, pour l'ampleur du modelé
et la délicatesse de l'épiderme, ce portrait de la femme d'Holbein
est un des triomphes de la peinture au rvi" siècle, le travail en
est superbe, la pâte est riche, onctueuse et fine; et le ton réchauffé
dans les ombres, ou passant, dans les clairs, aux pâleurs blondes,
reste un admirable exemple d'unité et de douceur. »

C'est en ces termes enthousiastes et parfaitement justifiés
que s'exprime M. Paul Mantz.

Le musée de Lille a la bonne fortune de posséder aujour-
d'hui une répétition de ce magnifique portrait, ou plutôt une
œuvre exécutée par Holbein d'après le portrait sur papier que le
maître n'avait pu peindre que pour lui-même, et qu'il ne con-
sidérait, sans aucun doute, tout parfait qu'il fût, que comme une
étude d'atelier.

Retrouvé sous une autre peinture, le tableau actuellement à
Lille reproduit exactement le portrait de Bàle, seulement l'ex-
pression si triste du visage de la femme a été modifiée et cela,
selon moi, pour une raison que je soumets de bonne foi aux dis-
cussions des hommes compétents, et que voici :

J'ai appelé le tableau de Bàle une étude (c'en était une,
en effet, pour Holbein, qui ne pouvaitsonger à tirer parti de cette
peinture bien qu'il y eût mis tout son art). N'est-il pas rationnel
de penser, en présence de l'œuvre que nous possédons, qu'il
aura transformé le portrait de famille en un tableau représentant
une abstraction, et que c'est ainsi qu'Elisabeth Schmidt est deve-
nue une respectable matrone symbolisant la Charité ? Et en

effet, pour que la transformation fût bien évidente, le peintre a
tracé en lettres d'or au-dessus de la tète de la femme deux ver-
sets en langue allemande dont voici la traduction * :

I.'amour de Dieu se nomme Charité.
Qui a l'amour ne porte pas de haine.

Cette inscription, en lettres gothiques allemandes d'une hau-
teur de 28 millimètres, forme deux lignes qui occupent toute la
largeur du tableau au-dessus de la tète. Il est incontestable
qu'elle a été peinte en même temps que le tableau, car si elle
était effacée l'espace vide au-dessus du portrait serait trop consi-
dérable et absolument hors de rapport avec la dimension géné-
rale du panneau.

•l'ajouterai que le tableau de Lille est peint, comme le por-
trait d'Anne de Clèves.quc possède le musée du Louvre, sur une
seule feuille de vélin collée par les bords sur un panneau de
bois.

F.n résumé, l'œuvre en question, sauf les modifications
signalées, est la reproduction exacte du tableau de Bàle ; c'est
une peinture du xvt' siècle; ce ne peutétre qu'une œuvre d'Hol-
bein. .le ne prétends point que le tableau de Lille possède, au
même degré, toutes les qualités de la peinture de Bàle, mais l'in-
fériorité relative de notre tableau peut provenir de plusieurs
causes :

i» De ce qu'il n'est qu'une répétition ;

2° De ce qu'il a souffert par l'enlèvement de la peinture qui
le recouvrait et par les quelques retouches rendues nécessaires ;

5° Et enfin parce qu'il a été peint sur une surface plus lisse
et plus polie.

En effet, dans l'original de Bàle le travail délicat du pinceau
et la touche légère laissent partout apparaître le grain du papier,
qui donne au modelé des chairs une qualité supérieure à celle
qu'offre aujourd'hui l'œuvre que je soumets à la critique.

C'est ainsi que pendant plus de trois siècles, la Madone du
musée de Dresde a été considérée comme un tableau absolu-
ment original, et ce n'est que depuis l'exposition de l'œuvre
d'Holbein faite en 1871, que le tableau de Darmstadt a détrôné
I l'œuvre consacrée qui, d'un avis à peu près général, n'est plus
regardée aujourd'hui que comme une répétition peinte posté-
rieurement par le maître.

Je n'ai pas la prétention de réclamer pareille fortune pour
notre tableau. Le portrait de Bàle est et restera l'œm re originale :
mais je crois très sincèrement que l'on peut et que l'on doit
attribuer au grand portraitiste le beau tableau échu au musée
de Lille.

Je ne me dissimule pas combien il est difficile de faire re-
connaître comme authentiques des répétitions de tableaux dont
la célébrité est européenne, mais en ce qui concerne Holbein,
on sait qu'il peignit bien des fois certains portraits, ceux d'É-
rasme et de Thomas Morus entre autres ; quoi d'extraordinaire
à ce qu'il ait utilisé son étude si poussée de Bàle en faisant un
j tableau peint sur une matière plus durable ?

J. HOUDOY,

1 Conservateur général des musées de Lille.

1. Desidem Erasnuopéra omma. Lugdum-Batarorun), Petrus Vander»Aa, 170;.
z. Voici le texte même de l'inscription :

liie Licbe Zu Gott Heist Charitas.
Wer I.icbe Hatt DerTrafftt Kein H.is*.

Cul-de-lampe composé par Prcisler.
 
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