LES
GRAFFITI DU DOME DE SIENNE
M. ALESSANDRO FRANCHI
ielles immenses, dignes, d'a-
près Cicognara, d'être com-
parés aux plus précieuses
mosaïques de la Grèce et de
Rome, les célèbres graffiti du
dallage du dôme de Sienne
ont été chantés sur tous les
tons. Il est juste d'en attri-
buer le principal mérite à
Beccafumi qui, en perfection-
nant l'œuvre commencée et
poursuivie par plusieurs géné-
rations d'artistes, y déploya
les qualités les mieux appro-
priées à cette nouvelle forme
de l'art, qualités dont il ne
sut en sa peinture que nous
faire regretter l'abus. Aussi
est-ce à cette œuvre remar-
Lettre tirée de l'un des Corali de la sacristie du dôme de Sienne. qUable, qUl n'a Sa pareille
Dessin de Niccola Sanesi.
nulle part, et que nul n'a
même pris à tâche d'imiter ailleurs, que les éloges prodigués à Domenico Beccafumi par Vasari
doivent d'avoir été, sauf bien des réserves, sanctionnés par la postérité.
Revenu de Rome sous l'impression plus profonde que salutaire du grand œuvre de Michel-
Ange, il ne sut, comme bien d'autres, que trébucher dans la nouvelle voie où il croyait suivre les
exemples de ce terrible guide. Le plafond de la salle Concistoro à l'hôtel de ville est là pour
nous dire une fois de plus ce qu'il en coûte de trop présumer de ses forces, et de se méprendre
sur l'essence intime des manifestations d'un grand génie. C'est là surtout que le dessin maniéré,
conventionnel, j'allais dire agaçant, par où Beccafumi croyait faire preuve d'une science éminem-
ment michelangesque, nous fait le plus regretter qu'un talent qui s'était d'abord inspiré des
sages exemples du Pérugin, n'ait pas su tirer de son propre fonds le développement de ses
qualités natives, pour parvenir à cette maturité dont ses débuts avaient fourni des gages si
remarquables.
Eh bien, ce dessin si peu personnel, mais auquel du moins ne manque pas la verve propre
aux improvisations à la plume, ce dessin dont le peintre fit trop souvent un déplorable
usage, eut la bonne fortune de trouver dans le pavé du dôme un vaste champ où il pouvait
s'affirmer avec des chances légitimes de succès. C'est sur ces immenses nielles que les crâneries
d'un burin improvisateur allaient trouver un emploi aussi séduisant qu'inattendu ; et c'était bien
Tome XI. }i
GRAFFITI DU DOME DE SIENNE
M. ALESSANDRO FRANCHI
ielles immenses, dignes, d'a-
près Cicognara, d'être com-
parés aux plus précieuses
mosaïques de la Grèce et de
Rome, les célèbres graffiti du
dallage du dôme de Sienne
ont été chantés sur tous les
tons. Il est juste d'en attri-
buer le principal mérite à
Beccafumi qui, en perfection-
nant l'œuvre commencée et
poursuivie par plusieurs géné-
rations d'artistes, y déploya
les qualités les mieux appro-
priées à cette nouvelle forme
de l'art, qualités dont il ne
sut en sa peinture que nous
faire regretter l'abus. Aussi
est-ce à cette œuvre remar-
Lettre tirée de l'un des Corali de la sacristie du dôme de Sienne. qUable, qUl n'a Sa pareille
Dessin de Niccola Sanesi.
nulle part, et que nul n'a
même pris à tâche d'imiter ailleurs, que les éloges prodigués à Domenico Beccafumi par Vasari
doivent d'avoir été, sauf bien des réserves, sanctionnés par la postérité.
Revenu de Rome sous l'impression plus profonde que salutaire du grand œuvre de Michel-
Ange, il ne sut, comme bien d'autres, que trébucher dans la nouvelle voie où il croyait suivre les
exemples de ce terrible guide. Le plafond de la salle Concistoro à l'hôtel de ville est là pour
nous dire une fois de plus ce qu'il en coûte de trop présumer de ses forces, et de se méprendre
sur l'essence intime des manifestations d'un grand génie. C'est là surtout que le dessin maniéré,
conventionnel, j'allais dire agaçant, par où Beccafumi croyait faire preuve d'une science éminem-
ment michelangesque, nous fait le plus regretter qu'un talent qui s'était d'abord inspiré des
sages exemples du Pérugin, n'ait pas su tirer de son propre fonds le développement de ses
qualités natives, pour parvenir à cette maturité dont ses débuts avaient fourni des gages si
remarquables.
Eh bien, ce dessin si peu personnel, mais auquel du moins ne manque pas la verve propre
aux improvisations à la plume, ce dessin dont le peintre fit trop souvent un déplorable
usage, eut la bonne fortune de trouver dans le pavé du dôme un vaste champ où il pouvait
s'affirmer avec des chances légitimes de succès. C'est sur ces immenses nielles que les crâneries
d'un burin improvisateur allaient trouver un emploi aussi séduisant qu'inattendu ; et c'était bien
Tome XI. }i