TROIS JOURS A MILAN
V
ans aucun doute, la série de tapisseries que
l'Union Centrale avait réunie au palais des
Champs-Élysées, lors de sa dernière exposition,
formait un merveilleux ensemble qu'on ne pou-
vait trop louer, mais cet ensemble n'était pas
sans avoir un précédent. Les ta-
pisseries exhibées à Milan étaient
pour la plupart de la plus raris-
sime beauté. Tout s'éclipsait de-
vant les emprunts faits aux palais
royaux de Turin, de Milan et de
Florence et au Dôme de Milan
dont les Ara\\i de manufacture
italienne retracent des épisodes
de la vie de Moïse et sont peut-
être moins remarquables par
l'exécution des sujets que par la
variété, le goût et l'extrême
richesse des bordures, rehaussées
d'or comme tout l'ensemble qui
donne la plus haute idée du degré de perfec-
tion auquel avait atteint au xvi* siècle cette
branche de l'industrie artistique italienne. C'est
Guglielmo Gonzaga, duc de Mantoue, qui avait
fait ce don princier au cardinal Charles Bor-
Letue composée pu Bachelier « gmie pu p. p. choftrd. romée qui l'offrit à son tour au trésor de la
cathédrale milanaise.
Du palais de Turin qui n'eût pas dû envoyer un Teniers d'une bien faible interprétation,
spécimen de décadence flamande signé F. V. D. Borght, c'est-à-dire F. Van der Borght et non
P. Van der Borgt comme le dit le catalogue, il faut mentionner avec les plus grands éloges la
tenture de sept pièces exécutées à Beauvais d'après les cartons de Boucher, sous la direction
d'Oudry, et signées Besnier et Oudry que le catalogue transforme en Besnier et Andrés, — suite
où brillent du plus charmant éclat toutes les élégantes séductions de l'art décoratif français arrivé
en quelque sorte à son apogée.
Il s'agit de Bacchus, d'Ariane, de Mars, de Vénus et de bien d'autres encore; qu'importe!
On est tellement sous le charme qu'on ne songe pas un instant à ces mythologiades en elles-
mêmes, on ne voit, on ne sent qu'une chose, c'est que c'est une fête perpétuelle pour les yeux —
et aussi pour l'esprit.
Une autre série de six pièces, — des Beauvais également et portant les mêmes signatures, —
représente des sujets empruntés aux mœurs de la Chine — une Chine un peu fantaisiste. Les
cartons ne sont pas de Boucher, comme le croyait le catalogue, mais de Le Prince, son élève ;
I. Voir l'Art, )' année, tome IV, pages 101 et 156.
V
ans aucun doute, la série de tapisseries que
l'Union Centrale avait réunie au palais des
Champs-Élysées, lors de sa dernière exposition,
formait un merveilleux ensemble qu'on ne pou-
vait trop louer, mais cet ensemble n'était pas
sans avoir un précédent. Les ta-
pisseries exhibées à Milan étaient
pour la plupart de la plus raris-
sime beauté. Tout s'éclipsait de-
vant les emprunts faits aux palais
royaux de Turin, de Milan et de
Florence et au Dôme de Milan
dont les Ara\\i de manufacture
italienne retracent des épisodes
de la vie de Moïse et sont peut-
être moins remarquables par
l'exécution des sujets que par la
variété, le goût et l'extrême
richesse des bordures, rehaussées
d'or comme tout l'ensemble qui
donne la plus haute idée du degré de perfec-
tion auquel avait atteint au xvi* siècle cette
branche de l'industrie artistique italienne. C'est
Guglielmo Gonzaga, duc de Mantoue, qui avait
fait ce don princier au cardinal Charles Bor-
Letue composée pu Bachelier « gmie pu p. p. choftrd. romée qui l'offrit à son tour au trésor de la
cathédrale milanaise.
Du palais de Turin qui n'eût pas dû envoyer un Teniers d'une bien faible interprétation,
spécimen de décadence flamande signé F. V. D. Borght, c'est-à-dire F. Van der Borght et non
P. Van der Borgt comme le dit le catalogue, il faut mentionner avec les plus grands éloges la
tenture de sept pièces exécutées à Beauvais d'après les cartons de Boucher, sous la direction
d'Oudry, et signées Besnier et Oudry que le catalogue transforme en Besnier et Andrés, — suite
où brillent du plus charmant éclat toutes les élégantes séductions de l'art décoratif français arrivé
en quelque sorte à son apogée.
Il s'agit de Bacchus, d'Ariane, de Mars, de Vénus et de bien d'autres encore; qu'importe!
On est tellement sous le charme qu'on ne songe pas un instant à ces mythologiades en elles-
mêmes, on ne voit, on ne sent qu'une chose, c'est que c'est une fête perpétuelle pour les yeux —
et aussi pour l'esprit.
Une autre série de six pièces, — des Beauvais également et portant les mêmes signatures, —
représente des sujets empruntés aux mœurs de la Chine — une Chine un peu fantaisiste. Les
cartons ne sont pas de Boucher, comme le croyait le catalogue, mais de Le Prince, son élève ;
I. Voir l'Art, )' année, tome IV, pages 101 et 156.