FRA FILIPPO LIPPI
n n'attend pas de nous une
appréciation nouvelle du style
de Fra Filippo Lippi qui oc-
cupe un des premiers rangs
parmi les peintres florentins
du milieu du xv° siècle. Tous
les historiens de l'école ita-
lienne ont amplement parlé de
cet éminent artiste, tous ont
rendu hommage aux brillantes
qualités de son talent, et cons-
taté les progrès qu'il a fait
faire à son art. Du peintre,
il n'y a plus rien de nouveau
à dire. Aussi n'ai-je pas l'in-
tention de reprendre un sujet
qui peut être considéré comme
épuisé. Je me propose une tâ-
che plus modeste et plus con-
forme à la nature de mes étu-
des. Je voudrais, à l'aide de
La Visitation, '
divers documents presque tous
inédits que j'ai eu la bonne
fortune de découvrir dans les Archives de Florence, examiner et éclaircir certains faits, les uns
peu connus, les autres controversés, de la vie *si riche en aventures de Fra Filippo.
Parmi ces faits, le principal et le plus important est sans contredit celui qui concerne
Lucrezia Buti. En fait de détails à ce sujet nous n'avions jusqu'ici que quelques lignes de Vasari.
Il est vrai que les documents auxquels je viens de faire allusion ne m'ont donné que l'affirmation
du fait, sans indication précise d'aucune des circonstances qui l'accompagnent. Il m'a donc fallu
recourir à certaines conjectures. Le lecteur jugera si elles sont rationnelles, comme je le pense,
et de nature à fournir une explication plus satisfaisante et plus complète de cet épisode capital
de la vie de Fra Filippo.
Fils de Tommaso di Lippo, lequel était lui-même issu d'un autre Lippo, boucher, et d'Antonia
di Ser Bindo Sernigi, sa femme, Frère Philippe naquit à Florence vers 1406 dans une petite
maison de la rue d'Ardiglione près de la place del Carminé. On verra dans le cours de cet essai
pourquoi j'assigne à sa naissance la date de 1406 et non celle de 1412, adoptée par Vasari et les
autres historiens.
Le petit Filippo perdit son père peu après l'année 1410. Il avait alors cinq ans. Monna
Antonia, sa mère, n'était pas riche ; elle eut beaucoup de peine à l'élever, lui et une sœur
un peu plus jeune, Piera, qui plus tard fut mariée à un Antonio di Lippo, de Prato. Vasari
prétend que la mère de Fra Filippo mourut un an après la naissance de son fils, c'est-à-dire
d'après lui en 1413, mais il est certain qu'elle vivait encore en 1427, puisqu'on possède, de
cette année même, sa déclaration pour l'impôt du cadastre, portant qu'elle habitait une maison
Tome XI. 57
I 1 s 1 t a t ion,
Lettre tirée de l'un des Corali du dôme de Sienne.
Dessin de Niccola Sanesi, d'après la miniature de Libérale da Veror.a
n n'attend pas de nous une
appréciation nouvelle du style
de Fra Filippo Lippi qui oc-
cupe un des premiers rangs
parmi les peintres florentins
du milieu du xv° siècle. Tous
les historiens de l'école ita-
lienne ont amplement parlé de
cet éminent artiste, tous ont
rendu hommage aux brillantes
qualités de son talent, et cons-
taté les progrès qu'il a fait
faire à son art. Du peintre,
il n'y a plus rien de nouveau
à dire. Aussi n'ai-je pas l'in-
tention de reprendre un sujet
qui peut être considéré comme
épuisé. Je me propose une tâ-
che plus modeste et plus con-
forme à la nature de mes étu-
des. Je voudrais, à l'aide de
La Visitation, '
divers documents presque tous
inédits que j'ai eu la bonne
fortune de découvrir dans les Archives de Florence, examiner et éclaircir certains faits, les uns
peu connus, les autres controversés, de la vie *si riche en aventures de Fra Filippo.
Parmi ces faits, le principal et le plus important est sans contredit celui qui concerne
Lucrezia Buti. En fait de détails à ce sujet nous n'avions jusqu'ici que quelques lignes de Vasari.
Il est vrai que les documents auxquels je viens de faire allusion ne m'ont donné que l'affirmation
du fait, sans indication précise d'aucune des circonstances qui l'accompagnent. Il m'a donc fallu
recourir à certaines conjectures. Le lecteur jugera si elles sont rationnelles, comme je le pense,
et de nature à fournir une explication plus satisfaisante et plus complète de cet épisode capital
de la vie de Fra Filippo.
Fils de Tommaso di Lippo, lequel était lui-même issu d'un autre Lippo, boucher, et d'Antonia
di Ser Bindo Sernigi, sa femme, Frère Philippe naquit à Florence vers 1406 dans une petite
maison de la rue d'Ardiglione près de la place del Carminé. On verra dans le cours de cet essai
pourquoi j'assigne à sa naissance la date de 1406 et non celle de 1412, adoptée par Vasari et les
autres historiens.
Le petit Filippo perdit son père peu après l'année 1410. Il avait alors cinq ans. Monna
Antonia, sa mère, n'était pas riche ; elle eut beaucoup de peine à l'élever, lui et une sœur
un peu plus jeune, Piera, qui plus tard fut mariée à un Antonio di Lippo, de Prato. Vasari
prétend que la mère de Fra Filippo mourut un an après la naissance de son fils, c'est-à-dire
d'après lui en 1413, mais il est certain qu'elle vivait encore en 1427, puisqu'on possède, de
cette année même, sa déclaration pour l'impôt du cadastre, portant qu'elle habitait une maison
Tome XI. 57
I 1 s 1 t a t ion,
Lettre tirée de l'un des Corali du dôme de Sienne.
Dessin de Niccola Sanesi, d'après la miniature de Libérale da Veror.a