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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 5.1879 (Teil 4)

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https://doi.org/10.11588/diglit.17802#0347

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L'A

RT.

uns de bien réussis, par exemple, ceux de MM. Bertier, Chabry,
Doucet, Sargent, etc. Ii y a aussi quelques sculptures à citer, —
en moins grand nombre cependant, car la plupart des sculpteurs
n'ont pas assez l'habitude du dessin. M fout signaler particulière-
ment M M. Cuy pers, Dampt, Fallstedt, Perrin, et surtout le bronze
de M. Rodin , qui est rendu avec une vigueur de coloris bien
remarquable.

Parmi les eaux-fortes, nous citerons une Grive de M. Vagner,
l'Indiscret, de M. Casanova, à peine indiqué et où cependant la
vie et le relief sont rendus avec une verve et un esprit étonnants.
Il faut ajouter celle de M. Vcyrassat, quand ce ne serait que
pour le décharger de la responsabilité du dessin gris et terne
qui est publié sous son nom dans la première série. La couleur

vigoureuse de son eau-forte montre assez que les défauts du
premier dessin sont surtout imputables au tirage ou à la repro-
duction.

Je dois, du reste, pour rester dans la vérité, faire remarquer
que je n'ai pas eu sous les yeux les tirages définitifs, qui n'étaient
pas achevés quand cet article a été écrit. Je sais que plusieurs
clichés ont dû être refaits ou corrigés. Il se pourrait donc par-
faitement que plusieurs de mes critiques se trouvassent démen-
ties par le résultat final. Je dois même dire que je m'y attends
et que je le souhaite, car l'œuvre de M. Dumas me paraît être
de celles que doivent vivement encourager les amis des arts.

Eugène Véron.

CLXII

La Sculpture en Europe, i8j8, précédé d'une conférence sur
le génie de l'art plastique; par Henry Jouin, lauréat de
l'Institut. Un volume in-8° de 266 pages. — La Sculpture au
Salon de 18j8, précédé d'une étude philosophique sur le
buste ; par Henry Jouin, lauréat de l'Institut. Un volume
in-S° de 84 pages. — Paris, E. Pion, éditeur.

M. Henry Jouin est un spécialiste. II s'est dit avec raison
que la vie est trop courte pour qu'on la disperse, et que c'est sot-
tise et outrecuidance de prétendre embrasser à la fois plusieurs
sujets; aussi s'est-il adonné tout particulièrement à l'étude de la
sculpture. Depuis 187J il a publié chaque année, à ce point de
vue exclusif, un compte rendu du Salon et il a fait précéder cha-
cune de ces publications d'une étude sur une des questions
générales les plus importantes pour la sculpture. La série de ces
études comprend l'œuvre sculptée, le marbre, le procédé, la
statue, le groupe et le buste. C'est en somme une esthétique
sculpturale en fragments, — disjecti membra poetw, — mais
dont il suffit de rejoindre les parties successives pour constituer
un ensemble à peu près lié. Quand il a voulu faire un livre,
c'est David d'Angers qu'il a choisi comme sujet, et nous serions
bien surpris qu'il n'ait pas en ce moment quelque autre sculpteur
sous roche.

Timeo hominem unius libri, disaient nos pères ; qui trop
embrasse mal étreint, répète la sagesse des nations. L'étreinte de
M. Jouin est de celles qui ne laissent rien échapper. Les hommes
qui font autorité et dont la compétence s'impose au public sont
presque toujours ceux qui ont concentré tout leur effort sur
un point unique et qui ont poussé là leurs fouilles sans jamais
se laisser distraire par la tentation de sujets nouveaux ou plus
faciles.

Si nous voulions pousser la sévérité jusqu'à la rigueur, nous
trouverions bien à reprocher à M. Jouin quelques petites ex-
cursions vers la peinture ; nous ne serions même pas étonné
d'apprendre qu'il ait parfois courtisé Erato ou Polymnie ; mais
ce sont là des entraînements passagers et sans conséquence, que
lui pardonnera la muse de ses inspirations habituelles. On peut
même dire qu'elle les lui a déjà pardonnés, car elle l'a comblé
de ses dons. Elle a fait de M. Jouin un homme considérable ; elle
l'a couronné du laurier académique ; elle en a fait un dispensa-
teur de la gloire ; ses jugements font loi, et, chaque année, malgré
l'indulgence qui tempère ses sévérités, les artistes attendent avec
une inquiétude facile à comprendre la publication de ces bro-
chures savantes et décisives qui règlent les places et tranchent
les hésitations.

Nous ne nous hasarderons pas à discuter les apprécia-
tions de M. Jouin sur les t poètes du marbre », comme il appelle
les sculpteurs en son langage lyrique. Ce sont là choses tout in-
dividuelles où la discussion ne peut rien. On ne modifie pas des
impressions par des raisonnements. Les impressions supposent
presque toujours des théories qui les expliquent et qu'il faudrait

d'abord atteindre, pour modifier les jugements qui en sont la
conséquence.

Aussi sont-ce les principes généraux et dominants de la cri-
tique de M. Jouin que nous lui demanderons la permission d'exa-
miner et même de discuter.

« L'art, dit M. Jouin, est la manifestation du beau. » Cela
a été dit bien souvent depuis Platon. Ce n'en est pas plus vrai
pour cela, pas plus en sculpture qu'en poésie et en peinture. L'art
est un mode d'expression de la pensée, telle qu'elle se formule
chez certains esprits de nature spéciale, qui sont des esprits d'ar-
tistes; c'est, si l'on aime mieux, la manifestation d'une émotion
se traduisant au dehors, soit par des combinaisons expressives de
lignes, de formes ou de couleurs, soit par une suite de gestes, de
sons ou de paroles soumis à des rythmes particuliers. Que les
émotions inspirées par la vue et la conception du beau puissent
trouver et trouvent fréquemment dans l'art leur expression, je
suis loin de le nier; mais ce que je nie absolument, c'est que le
beau soit l'inspirateur unique de l'art.

Le langage, soit par impuissance d'analyser les sensations et
de distinguer entre des perceptions voisines, soit par besoin de
simplification et de généralisation, a résumé dans le mot de
beauté l'ensemble des impressions admiratives; mais ce n'est pas
une raison suffisante pour que les métaphysiciens soient endroit
de conclure à l'unité fondamentale et substantielle de la cause
de ces impressions, en fait très diverses. A moins de retranche r
du domaine de l'art une bonne partie des œuvres qui font le
plus d'honneur au génie de l'homme, ou de violenter étrange-
ment le sens du mot, il est complètement impossible que cette
conception du beau suffise aux inspirations des artistes. L'art
s'adresse en réalité à tous les sentiments sans exception : espoir
ou terreur, douleur ou joie, haine ou amour, admiration ou
mépris, il rend toutes les émotions qui agitent le cœur de l'homme
sans s'inquiéter de leur rapport avec la perfection visible ou
idéale. Il exprime même le laid et l'horrible, sans cesser d'être
l'art et de mériter l'admiration. Qu'on me dise donc où est le
beau dans la peinture de Thersite, de Tartuffe, de la Marneffe,
dans la description des horribles et hideuses tortures de VEnfer,
dans le Champ de bataille d'Eylau, dans le Naufrage de la
Méduse, dans le Pouilleux et dans mille autres œuvres affreuses
qui n'en sont pas moins de grandes œuvres. Dans tout cela, il
n'y a de beau que la supériorité de l'esprit qui l'a conçu, que la
profondeur de l'émotion qui a mis l'esprit en mouvement, que
la puissance des procédés qui ont traduit aux yeux et cette idée
et cette émotion. Ce qui fait la beauté de l'œuvre, ce n'est pas
la nature du sujet, puisque le sujet en lui-même est répulsif; ce
n'est pas la vérité de l'imitation, car il est impossible que celle-ci
reproduise identiquement l'objet, et d'ailleurs il serait contra-
dictoire que l'exacte reproduction d'un objet laid fût belle. C'est
uniquement l'intervention du génie de l'homme, excité par une
émotion spéciale. La beauté de l'art est de création purement
 
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