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La chronique des arts et de la curiosité — 1868

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Nr. 5 (2 Février)
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18G8. — N° 5.

BUREAUX: 55, RUE VIVIENNE.

2 FEVRIER.


LA

DE LA CURIOSITE

PARAISSANT LE DIMANCHE MATIN.

Comptes rendus et Annonces des Ventes publiques

ABONNEMENTS :

Correspondances étrangères. — Nouvelles des Galeries

de Tableaux, Dessins, Estampes, Bronzes, Ivoires, Médailles,

P A F. ï S ET I)É I» A Fi T E M E X T S

publiques, des Ateliers. — Bibliographie des Livres, Articles

Livres rares, Autographes, Émaux, Porcelaines, Armes

Six mois, 8 fr. — Un an, 15 fr.

de Revues et Estampes, publiés en France et à l’Étranger.

et autres objets de curiosité.

Étranger, le port en sus.

Revue des Arts industriels.

LÉON LAGRANGE.

C’est à nous que l’on confie la triste tâche de
rappeler rapidement les travaux de notre colla-
borateur et ami Lagrange. C’est presque un legs
qu’il nous a fait lui-même dans son ignorance de
sa mort soudaine. A son arrivée de Marseille,
peu de mois après la fondation de la Gazette, il
venait nous serrer la main, une amitié sincère
s’engageait entre nous et, il y a moins d’un mois,
il nous écrivait de Nice une longue lettre, spiri-
tuelle, fine et sérieuse, pour nous prier de nous
occuper de son livre, Pierre Pucget, «comme d’un
fils adoptif. »

Bien peu d’entre nous, malgré les efforts que
nous pouvons faire pour mettre le plus possible
du nôtre dans notre collaboration assidue à la
Gazette des Beaux-Arts, bien peu peuvent espérer
avoir conquis plus de sympathie que Léon La-
grange. Son esprit vif et moderne, son amour de
l’érudition, la forme élégante et rapide de son
style, la loyauté de ses critiques et la netteté de
ses prévisions en avaient fait un juge écouté, es-
timé, aimé du public et des artistes. Et son
œuvre n’était qu’à peine entreprise! Chaque jour
cet esprit impartial conquérait une nouvelle
force. L’étude de la vente posthume de l’atelier
d’Eugène Delacroix lui avait ouvert dans l’art des
horizons plus colorés. Dans son livre sur Pierre
PugetG il avait fait un usage plus sobre du docu-
ment que dans son étude sur Joseph Vernet. Ses
articles dans le Correspondant, en le plaçant sur
un terrain catholique solide, lui permettaient
d’affirmer ses convictions avec une sérénité plus
complète. A la lecture attentive de ses derniers
travaux on sentait tout ce qu’il avait gagné à se
résumer et à s’étudier lui-même. Dans ce temps
où l’on rencontre plus souvent de la critique
qu un critique, la mort de Léon Lagrange est
particulièrement sensible.

Lagrange (Léon Marius), était né à Marseille le
8 mai 1828. Élève de l’institution Jauffret, il fit
toutes ses classes au collège Charlemagne en
compagnie d écrivains aujourd’hui célèbres ou
notables, de MM. About et Sarcey auxquels, au
collège et au concours général, il disputait les

1. Pierre Puget, peintre, sculpteur, architecte, décora-
teur de vaisseaux, par Léon Lagrange. Paris Librairie
académique Didier et Ce. Un vol. in-8°.

prix, et de MM. Ulbach, Vacquerie, etc., qui
étaient ses aînés. En 1844 et en 18A5 il fut lau-
réat au concours général. En 1847, il obtint, au
collège, le prix d’honneur de philosophie. Il est
curieux de remarquer que cette génération
forme dans les lettres, mais non point dans les
arts, le dernier regain de l’École romantique.

Lagrange ne se tourna point vers les lettres
comme la plupart de ses camarades, qui faisaient
déjà grand cas de ses aptitudes au travail litté-
raire. De 1847 à 1851 il étudia la peinture, les
beaux-arts à Paris, à Marseille, à Avignon, mais
moins je crois dans les ateliers que dans les mu-
sées et dans la nature même, car son œuvre de
critique est empreint d’un sentiment caractéris-
tique de 1’observation générale.

En 1852, poussé, m’a-t-on dit, autant par les
soins de sa santé que par la curiosité, il partit pour
Rome avec Bonnardel, grand prix de sculpture
qui, lui, mourut pendant son séjour à la villa
Médicis. Puis Lagrange poussa jusqu’en Égypte
et, en Asie-Mineure, jusqu’à Jérusalem.

De 1852 à 1860, l’ami dévoué qui nous fournit
ces dates précises constate une grande lacune
dans la volumineuse correspondance qu’il avait
pieusement conservée. Lagrange lui avait em-
prunté un certain nombre de lettres pour y pui-
ser des notes et mettre en ordre ses souvenirs de
voyage, dont il a publié quelques récits dans le
Correspondant et qui eussent formé d’intéressants
volumes. Son retour en France, à Marseille, est
de 1853. Son installation définitive à Paris date
de 1860.

Depuis l’automne, il s’était fixé à Sens, préfé-
rant, pour parfaire ses travaux et pour savourer
les affections de la famille, le silence et le recueil-
lement de la province, les libres promenades dans
la nature agreste, et cette causerie à distance
avec les amis, qui confie au papier des impres-
sions plus ressenties.

Le premier travail critique de Léon Lagrange
est, je pense, le Salon de 1851, publié dans le
Sémaphore de Marseille. Sa collaboration aux
Archives de P Art français, cet excellent recueil
fondé par une réunion d’esprits d’élite et si cou-
rageusement maintenue contre l’indifférence du
public français par M. Anatole de Montaiglon,
commence au tome III, mars 1855, par la publi-
cation des Papiers de Joseph Vernet, d’après la

bibliothèque du musée d’Avignon. Nous l’y re-
trouvons dans presque tous les volumes. 11 y
publie des notes sur la copie de la suite de Saint-
Bruno de Lesueur existant à la Grande-Char-
treuse, sur Bénigne Sarrazin, sur les sculpteurs
Honoré Aile et Lacroix, sur Abraham Louis et
Jean van Loo, sur Bernard Toro, sculpteur de
proues de vaisseaux, sur un tableau de François
Puget, etc. Dans la seconde série des Archives,
nous trouvons encore communiqués et annotés
par lui, des documents sur les Vernet, onze let-
tres de l’orfévre Germain, Dumont d’Urville et la
Vénus de Milo, enfin le point de départ de son
travail sur Pierre Puget qu’il devait publier dans
la Gazette, puis retoucher et refondre pour le
donner en volume.

Nous ne parlerons point de ses travaux dans la
Gazette et dans la Chronique. Nos lecteurs en
trouveront la mention très-exacte dans la table
alphabétique et analytique qu’a dressée notre
collaborateur Paul Chéron. L’esprit de ces tra-
vaux est présent chez tous ceux qui les ont lus!
Et en en relisant la liste, on sent mieux que je ne
le saurais indiquer l’activité de son cerveau et la
distinction de ses pensées. Pour ne citer qu’un
morceau, nous rappellerons avec quelle ingénio-
sité il avait trouvé le secret d’être neuf en parlant
de la Belle Jardinière, de Raphaël. Les délicats,
ceux qui lisent une page bien écrite comme ils
regardent un tableau bien peint, une eau-forte
bien mordue, ont noté la description originale et
vivante que Lagrange nous a faite du kief oriental
à propos d’un livre d’architecture récemment
publié. Si j’avais pour habitude de classer mes
jouissances et mes jugements, je placerais ce
morceau entre les splendides tableaux du Voyage
à Constantinople de Théophile Gautier et ceux,
d’un ton plus fin et d’une gamme plus attendrie,
d’un Été dans le Sahara, de M. Fromentin.

Au reste, Léon Lagrange était lui-même artiste
habile. J’ai vu de lui, bien qu’il fût à cet égard
plus que modeste, d’excellentes études peintes
dans l’Égypte. 11 m’a envoyé, un jour de l’an,
dans une lettre, un bout de croquis à l’aquarelle,
très-coloré et très-mouvementé, des paysannes
des environs de Subiaco. Il a dessiné une partie
de l’œuvre de Puget. H a publié une grande eau-
forte dans la Société des Aquafortistes. Enfin j’ai
de lui, tirées à quelques épreuves, une dizaine
 
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