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La chronique des arts et de la curiosité — 1868

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Nr. 40 (4 Octobre)
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https://doi.org/10.11588/diglit.26660#0195
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1868. — N° hO.

BUREAUX: 55, RUE VI VIENNE.

h OCTOBRE.

LA

\

ET

DE LA CURIOSITE

PARAISSANT LE DIMANCHE MATIN.

Comptes rendus et Annonces des Ventes publiques

ABONNEMENTS :

Correspondances étrangères. — Nouvelles des Galeries

de Tableaux, Dessins, Estampes, Bronzes, Ivoires, Médailles,

P A P. I S K T I) EPA II T EMENTS

publiques, des Ateliers. — Bibliographie des Livres, Articles

Livres rares, Autographes, Émaux, Porcelaines, Armes

Six mois, 8 fr. — Un an, 15 fr.

de Revues et Estampes, publiés en France et à l’Étranger.

et autres objets de curiosité.

Étranger, le port en sus.

Revue des Arts industriels.

LE MONUMENT D’INGRES.

On a écrit dans les journaux, et on répète dans
les ateliers que M. Etex a été chargé par la ville
de Montauban d’élever le monument à la mé-
moire d’Ingres. Cette nouvelle peut devenir une
réalité; mais elle ne l’est point encore, rien
n’ayant été décidé d’une manière absolue. Si jus-
qu’à présent l’invraisemblance du fait nous a
conduit à en différer l’insertion, aujourd’hui les
événements nous font un devoir de mettre le
public à même de se former une opinion.

On se souvient que la ville de Montauban, vou-
lant honorer la mémoire du grand peintre qu’elle
compte parmi ses notabilités, du citoyen qui lui
a constitué un musée en lui léguant.ses œuvres
d’art anciennes, plusieurs de ses propres pein-
tures et tous ses croquis, avait résolu, dans le
courant de l’année 1867, de lui ériger une statue.
Un concours fut ouvert à cet effet au mois de
juillet dernier, et, à ce concours, trente-quatre
concurrents envoyèrent trente-cinq projets qui,
aux termes du programme, devaient être jugés
par l’Académie des Beaux-Arts. Ces esquisses,
pour la plupart, étaient d’une faiblesse désespé-
rante. Plusieurs cependant méritaient des éloges ;
et, parmi celles-ci, il y en avait une de M. Carrier-
Belleuse qui fut trouvée, par beaucoup de per-
sonnes, admirable d’invention et de grâce. « Le
motif, a écrit M. Charles Blanc dans un article
publié pas le Temps, est si bien trouvé qu’on ne
peut plus regarder les autres modèles quand on
a vu celui-là. Il représente une Victoire aiiée cou-
ronnant le buste d’Ingres, placé sur une gaine à
hauteur d’homme. Par une attention délicate du
sculpteur, sa figure rappelle la Gloire qui cou-
ronne le poète aveugle dans VApothéose d’Homère;
de sorte que le peintre est ainsi couronné, pour
ainsi dire, par une enfant de son génie. Naturelle
et lyrique tout ensemble, aimable et respec-
tueuse, cette figure, aux ailes déployées, lève les
bras pour atteindre au sommet du buste, qui
semble ainsi dépasser la taille même de ia Vic-
toire, et dominer tout le monument, dont le
point le plus élevé est la couronne.

« Le piédestal sur lequel posent la Victoire et
le cippe est d'une élégance mâle. Cantonné de
quatre colonnes ioniques, au fût raccourci, du

genre de celles que les Grecs ont employées dans
les monuments funéraires, 1 offre des profils fins
et fiers, exempts de ces monotones quarts-de-
rond, de ces molles doue nés, de ces banales
cymaises dont notre architecture a été si long-
temps infectée, et ils sort d’un goût qui fait
penser aux fameux tombeaux de la Sicile et aux
chefs-d’œuvre contemporains des Propylées. Sur
la facecamûrieure du piédestal, le sculpteur a
modèle eiWVRadouci. d’un ton pâle, deux
génies seinbMliRy/A.neux nui tiennent l’inscrip-
tioç votiyÉBphs 'le^a^ÉU Louis XIII. Sur une
faRe latéral®'.saillit ’lègWment une figure de
Y Élude : c^st^uenfan^ji. regarde à la lampe
le buste clasalffSbjÿig. jubiler Tropbonius. Sur
la face correspondante, ressort avec la même
douceur une figure de Y Inspiration : c’est encore
un enfant qui tient une tablette sur laquelle on
lit les noms des auteurs grecs dont Ingres s’est
nourri : Homère, Pindare, Sophocle, Euripide.
Ces figures, sans être empruntées des œuvres du
maître, en redisent à merveille le caractère et le
style 1. »

Malheureusement ce projet si bien conçu ne
répondait pas au programme qui demandait une
statue; et, par ce motif, il fut écarté du con-
cours ainsi qu’un autre qui se trouvait dans le
même cas.

Mais autant le projet de M. Carrier-Belleuse
avait préoccupé le public, autant le second, dû à
M. Etex, avait passé inaperçu, comme il est aisé
de s’en rendre compte en relisant les divers arti-
cles publiés sur ce concours. Le jour du jugement
venu, l’Académie se trouva fort embarrassée.
Aucune des esquisses conformes au programme
ne la satisfaisait complètement, et un fort .parti
penchait manifestement pour celle de M. Carrier-
Belleuse, mise hors concours. Un vote ambigu
fut le résultat de cette situation. L’Académie ne
proclama personne vainqueur, et au lieu de
choisir, aux termes du règlement, trois projets
et de les classer par ordre de mérite, elle n’en
plaça aucun, au premier rang, assigna le second
à l’œuvre de M. Maillet, et le troisième à celle de
M. Falguières. Personne ne fut satisfait, tout le
monde clabauda, ainsi le veut l’humaine nature.
Pendant que les candidats discouraient sur leur

Le Temps, 12 juillet 18G8.

déconvenue, un d’entre eux, doublement mal-
heureux, puisqu’il n’avait rien obtenu pour sa
statue et qu’il avait vu son monument placé
hors concours, M. Etex, prit le chemin de fer et
débarqua à Montauban. Comme bien on le pense,
il n’était point là pour se faire l’apologiste du
jugement de l’Académie. En toutes occasions,—
et elles étaient nombreuses alors, — il proclama
l’excellence de son projet, et il en publia l’éloge,
écrit par lui-même, dans le Courrier de Tarn-el-
Garonne.

« Monsieur le rédacteur, écrit-il à la date du
21 août, une lettre signée d’une personne auto-
risée a paru dans votre estimable journal hier.
20 août. Celte lettre m’oblige à rompre le silence
auquel je m’étais résigné, fort de ma conscience
et du devoir accompli.

« M. Ingres fut pour moi un second père, car,
outre la reconnaissance que je lui dois pour ce
qu’il m’a enseigné dans l’art, il m’a marié. A ce
titre-là, qui serait déjà plus que suffisant, il s’en
ajoute un autre plus important et pour l’honneur
de la France et pour la gloire de la ville de Mon-
tauban par devant la postérité.

« Une statue seule, s’isolant de tous les côtés,
ressemblante à notre maître vénéré, ne se prête
pas, il paraîtrait, à l’art monumental.

« Le concoursjugé par l’Institut le mois dernier
en est la preuve évidente, irrécusable.

« Il faut, de toute nécessité, associer son œu-
vre à son individu, à sa personnalité.

« Sa composition de Y Apothéose d’Homère est de
ses œuvres celle qui se prête le mieux à l’archi-
tecture et à la sculpture. Elle est si belle et si
complète, même comme architecture, que, ma
foi, il n’y a pas à hésiter.

« C’est pourquoi j’ai essayé de le montrer, lui
et son œuvre, à ce concours de l’Institut, où
l’idée trop audacieuse, dépassant le programme
et n’étant pas comprise, a été fatalement mise,
au premier chef, hors du concours, sous le
n° h bis.

« Et pourtant, quel moyen plus puissant d’iio-
norer la mémoire d’un artiste que de repro-
duire son œuvre, de la populariser, en assainis-
sant le goût public? Mille plaies se rouvrent au
résultat de ce concours du mois dernier, mille
souvenirs accablants se pressent en foule : je
 
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