Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

La chronique des arts et de la curiosité — 1868

DOI Heft:
Nr. 17 (26 Avril)
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.26660#0091
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
1868.

N° 17.

BUREAUX: 55, RUE VIVIENNE.

26 AVRIL.

L A

CHRONIQUE DES ARTS

'ET

DE LA CURIOSITE

PARAISSANT LE DIMANCHE MATIN.





Comptes rendus et Annonces des Ventes publiques
de Tableaux, Dessins, Estampes, Bronzes, Ivoires, Médailles,
Livres rares, Autographes, Émaux, Porcelaines, Armes
et autres objets de curiosité.

ABONNEMENTS: -

PARIS ET DÉPARTEMENTS

Six mois, 8 fr. — Un an, 15 fr.
Étranger, le port en sus.

Correspondances étrangères. — Nouvelles des Galeries
publiques, des Ateliers. — Bibliographie des Livres, Articles
de Revues et Estampes, publiés en France et à l’Étranger.
Revue des Arts industriels.





LES DESSINS DES GRANDS MAITRES.

Un photographe, ou, pour dire plus juste, un
artiste doublé d’un amateur distingué, M. Adol-
phe Braun, de Mulhouse, vient d’entreprendre
la reproduction, par des procédés nouveaux et
inaltérables de photographie, de l’universalité
des dessins de grands maîtres de tous les temps
et de toutes les écoles que possèdent les collec-
tions publiques ou privées de l’Europe. C’est
une œuvre énorme et tout à fait dans l’esprit
de notre temps. Chaque jour, sous les coups
réitérés du progrès, il semble que les unités du
passé se brisent en mille parcelles, et que cette
poussière merveilleuse va féconder des coins
demeurés stériles. La Photographie, appliquée à
la reproduction de ces dessins que l’on conser-
vait jadis avec le soin jaloux des reliques, c’est
l’Imprimerie venant tirer à des centaines de
mille d’exemplaires le manuscrit, privilège des
bibliothèques royales ou religieuses, et appelant
le pauvre à la communion des grands esprits,
c’est le Moulage appliqué à la répétition des mar-
bres et des bronzes.

Plus de deux mille dessins sont déjà repro-
duits et imprimés par un procédé photogra-
phique inaltérable, de la dimension et avec la
couleur des originaux. Ils ont été choisis non pas
seulement parmi les trente-cinq mille que pos-
sède le Louvre, mais dans le musée de Bâle,
dans les Uffizi de Florence, dans la collection de
l’archiduc Albert, à Vienne, dans celles du grand-
duc et de la grande-duchesse de Saxe-Weymar-
Eisenach. Que M. Adolphe Braun obtienne aussi
les dessins que possèdent l’Angleterre et quelques
cabinets de Paris, et bientôt nous pourrons feuil-
leter les œuvres à peu près complets de Ra-
phaël et d’Albert Dürer, de Léonard de Vinci et
de Rembrandt, de Michel-Ange et de Ingres ou
Delacroix, d’Hoibein et de Rubens, de Watteau
et des Espagnols, de Turner et de Poussin, dé
Claude Lorrain et de Théodore Rousseau, c’est-
à-dire suivre dans l’éclosion et dans les variantes
de leur cours les génies les plus accentués et les
plus divers, les fleuves les plus majestueux et
les sources les plus fraîches.

Désormais les bibliothèques publiques pour-
ront fournir aux travailleurs les rellets aussi

exacts, qu’on peut l’espérer jamais, d’originaux
dispersés aux quatre coins du monde, et le dan-
ger d’exposer à la lumière ou de sortir de leurs
cartons ces originaux inestimables se trouve di-
minué d’autant. Désormais les peintres auront,
pour ce que coûte une bibliothèque à un écri-
vain, des séries de chefs-d’œuvre. Dans les
écoles d’art appliqué à l’industrie, dans les col-
lèges mêmes, les professeurs pourront offrir aux
élèves les plus graves et les plus beaux modèles
que nous ait légués le passé en dehors de la
grande peinture et de la sculpture.

J’aurai, je l’espère, à revenir prochainement
sur la publication entreprise par M. Adolphe
Braun, à propos soit d’œuvres complets de
maîtres, soit de collections publiques réunies en
un tout, soit de séries de spécimens d'écoles.
Aujourd’hui je vais rapidement feuilleter quel-
ques épreuves que j’ai sous les yeux et dont
l’exécution arrive bien près du trompe-l’œil.

Ce sont des académies au crayon rouge par
Raphaël, entre autres ces deux Hommes debout,
qu’il envoya, dit-on, en 1515, à Albert Dürer en té-
moignage de son admiration; une Vierge, du Lou-
vre, et l’admirable composition des Apôtres saint
Pierre et saint Paul arrêtant Attila aux portes
de Rome. — Puis un Christ en croix, de Michel-
Ange , et une Sainte Anne, de Sébastien del
Piombo; deux Têtes d’enfants, par Léonard de
Vinci, et trois Tètes de vieillards, par Lorenzo di
Credi; un énergique croquis de Jeune paysan,
d’André del Sarte; une Vierge assise sur les
nuages, par le Corrège; enfin une Adoration,
par Fra Bartholomeo.

Les Albert Dürer dessinés à la pierre d’Italie,
avec des rehauts de blanc posés en hachures au
pinceau, sont rendus avec une intensité de
vérité surprenante : une Tête de vieillard, aux
rides creuses comme celles d’un chêne cente-
naire ; le drame du Calvaire avec les cavaliers en
armure qui caracolent et les saintes femmes qui
gémissent; des draperies aux plis cassants mon-
trent le grand génie se retrempant sans cesse
dans l’étude minutieuse de la nature. — Des
études de Costumes de femme, par Ilolbein, sont
pleines de sveltesse. Un prodigieux dessin à la
plume, Thomas Morus et sa famille , révèle les
emprunts que Ingres a faits à ce maître si naïf et
si puissant.

L’école est, provisoirement, au moins je l’es-
père, un peu sacrifiée, et je n’en puis juger que
par un Jean Goujon, la Diane du château d’Anet,
par deux Lesueur et par deux croquis à la sé-
pia d’un imitateur de Greuze, Étienne Aubry.

Ces planches, pour les souscripteurs, varieront
de 1 fr. 75 à 2 fr. 25 pour les plus grands for-
mats. Si nous insistons sur ces prix, c’est qu’il y
a là une question pratique fort importante et que
les ministères des beaux-arts et de l’instruction
publique ne peuvent faire autrement que de
s’intéresser à une entreprise aussi nationale.

Le procédé, acquis par M. Adolphe Braun, de
M. Swan, pour la France et la Belgique, et nota-
blement perfectionné par lui, consiste à appli-
quer sur du papier du fusain, du crayon, de la
sanguine, de la mine de plomb, de la sépia, etc.;
à sensibiliser cette couche de couleur par du
bichromate de potasse et à tirer comme à l’ordi-
naire les épreuves au soleil. Puis, après une opé-
ration de cylindrage, les épreuves sont mises
dans l’eau, et tout ce qui n’a pas été attaqué par
la lumière tombe au fond de la cuvette. De là
les épreuves sont transportées sur un papier où,
par la pression du cylindre, l’image se trouve à
jamais retransportée sur le papier.

Nous n’insistons-aujourd’hui que sur la ques-
tion capitale de l’inaltérabilité. Les épreuves
peuvent être impunément, — nous l’avons expé-
rimenté nous-même, — tenues plusieurs jours
au soleil ou plongées dans l’eau chaude.

Quant au fait de diffusion des belles choses et
d’instruction mise à peu de frais à la portée de
tous, il suffit de la signaler et d’engager le lec-
teur à feuilleter lui-même les cartons1 de
M. Adolphe Braun.

Ph. Burty.

CORRESPONDANCE DE BELGIQUE.

Bruxelles, 18 avril 1868.

La séance publique de la Commission royale des
monuments s’est tenue le 31 mars dans la grande
salle des académies, au musée, sous la présidence du
ministre de l’intérieur. Dans un rapport détaillé et
qui a été fort applaudi, M. Rousseau, secrétaire de la

1. A Paris, 14, rue Cadet.
 
Annotationen