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La chronique des arts et de la curiosité — 1868

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Nr. 26 (28 Juin)
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1868.

N° 26.

BUREAUX : 55, RUE VIVIENNE.

2 8 J U I N.

CHRONIQUE DES

ET

DE LA CURIOSITÉ

PARAISSANT LE DIMANCHE MATIN.

ARTS

Comptes rendus et Annonces des Ventes publiques

ABONNEMENTS :

Correspondances étrangères. — Nouvelles des Galeries

de Tableaux, Dessins, Estampes, Bi’onzes, Ivoires, Médailles,

PARIS ET DÉPARTEMENTS

publiques, des Ateliers. — Bibliographie des Livres, Articles

Livres rares, Autographes, Émaux, Porcelaines, Armes

Six mois, 8 fr. — Un an, 15 fr.

de Revues et Estampes, publiés en France et à l’Étranger.

et autres objets de curiosité.

Étranger, le port en sus.

Revue des Arts industriels.

LE CHATEAU DE CHILLY-MAZARIN L

L’ancienne théorie qui reconnaît au proprié-
taire le droit d’user et d’abuser de sa chose a
reçu de tous temps, au grand désespoir des ar-
chéologues, de lamentables applications. C’est
en vertu de ce principe qu’un certain M. Lecoq
ayant acquis, vers les premières années de ce
siècle, le superbe château de Chilly, près de
Longjumeau, n’eut rien de plus pressé que de le
faire démolir. C’était son droit; mais nous re-
grettons infiniment que, sans pitié pour un mo-
nument qui disait si bien ce qu’avait été l’art
français sous Louis XIII, il ait cru devoir suppri-
mer ainsi une des pages de nos annales, et pres-
que un chapitre de notre histoire.

Ces regrets, désormais stériles, seront parta-
gés par tous ceux qui liront dans le nouveau
volume de M. Patrice Salin — Notice sur Chilly-
Mazarin — la description du château si cruelle-
ment démoli. Les curieux y apprendront aussi
que l’auteur, déjà connu par une intéressante
étude sur l'Église Saint-Sulpice de Favières (1865),
a le respect et le goût des recherches historiques
et qu’il sait tirer parti des renseignements que
fournissent les vieux papiers et les vieux livres.
M. Salin ajoute d’ailleurs à ses publications des
gravures et des fac-similé d’un véritable intérêt
archéologique. De pareils travaux sont excel-
lents : il est bon que les hommes d’étude s’effor-
cent de reconstruire le passé au moment où les
élèves de M. Lecoq le démolissent.

Avant qu’Antoine Ruzé, marquis d’Effiat, gou-
verneur du Bourbonnais et de l’Auvergne, ne
fût devenu surintendant des finances, il existait
déjà à Chilly un château du moyen âge, dont
M. Patrice Salin nous a raconté l’histoire et dont
Claude Chatillon , l’auteur de la Topographie
françoise, nous a conservé le portrait (1610). Ce
château, qui, dans la géographie un peu fan-
tasque du temps, se trouvait vaguement sur le
chemin de Saint-Germain-en-Laye à Fontaine-
bleau, avait dû à cette situation l’honneur d’hé-
berger des rois. Philippe le Bel s’y arrêta ; Fran-
çois Ier aussi. Le marquis d’Effiat jugea en 1627
que cette résidence féodale n’était plus selon le

'1. Notice sur Chilly-Mazarin, par M. Patrice Salin.
1 vol. grand in-8°. Adrien Leclère, éditeur.

goût du jour, et ayant fait appeler l’architecte
Metezeau, il remplaça le vieux manoir par une
construction nouvelle. C’est ce château — le
second château de Chilly — qui fut démoli au
commencement de ce siècle et dont il ne reste
guère plus d’autres traces que les gravures de
Merian et de Pérelle.

La construction de l’édifice paraît avoir duré
trois ans, car nous voyons que, dès 1630, les
peintres et les sculpteurs furent appelés à Chilly
pour exécuter tous les travaux de décoration
intérieure.

Le marquis d’Effiat ne s’adressa pas alors à
des ouvriers vulgaires : il choisit, tout simple-
ment, les plus illustres parmi les artistes à la
mode, et ce choix lui fut plus facile qu’à tout
autre. Il est bon de rappeler, en effet,' que le
marquis fut mêlé plus qu’on ne croit et plus
même que M. Patrice Salin ne le dit, au mouve-
ment des arts sous Louis XIII. Son mariage
l’avait mis en relation avec le monde des sculp-
teurs, des architectes et des peintres. Il avait
épousé Marie de Fourcy, la fille de Jean de
Fourcy, qui fut surintendant des bâtiments du
roi et qui, à ce titre, fut le protecteur des ar-
tistes. Marie de Fourcy avait les mêmes goûts
que son père, et il est curieux de constater
qu’en 1627 elle tenait sur les fonts de bap-
tême un enfant du sculpteur Simon Lerambert.
Quant au marquis d’Effiat , il avait, comme
beaucoup de gentilshommes du temps, le goût
des portraits. Une médaille, dont on a pu voir
un exemplaire dans la collection de M. Rattier,
nous le montre en buste. II se fit peindre par
l’un des Lenain en un portrait que M. Champ-
fleury n’a pas manqué de signaler, et dont la
trace est malheureusement perdue. Il existe à
Versailles une petite peinture sur cuivre, qui
date du xvne siècle, et qui est, dit-on, le portrait
du marquis d’Efiiat. Le surintendant était pres-
que un collectionneur : il avait réuni une série
de bustes de personnages historiques.

Ainsi informé des choses de l’art, il s’adressa
aux plus grands artistes du temps pour décorer
son château de Chilly. Nous reprocherons à M. P.
Salin d’avoir passé peut-être un peu rapidement
sur ce chapitre de l’ornementation intérieure du
château ou du moins d’avoir relégué dans les
notes des détails qui, au point de vue de notre

manie, nous paraissent parfaitement dignes des
honneurs du gros texte. Le décorateur en chef
de Chilly, ce fut Simon Vouet lui-même. Il fit,
seul, tous les plafonds de la grande galerie. Il
dessina, en outre, les cartons des peintures de la
chapelle qui représentaient, en dix tableaux,
l’histoire de saint Antoine, et dont l’exécution
fut confiée à un artiste qui allait devenir illustre,
François Perrier. Quant à la sculpture , très-
importante dans l’ornementation du château ,
elle fut l’œuvre de Jacques Sarrazin. Celui-ci
modela, dans la galerie et dans la chapelle, des
figures et des cariatides en stuc. Guillet de Saint-
Georges a dit un mot de toutes ces merveilles
qui, au moment où Dulaure publiait sa Descrip-
tion des environs de Paris, existaient encore.

Ces notes et bien d’autres renseignements
qu’on trouvera dans le livre de M. Patrice Salin
démontrent que le château de Chilly fut vérita-
blement un des types les plus complets de l’art
français sous Louis XIII. A ce point de vue, ce
château, l’église du village et le village lui-même
méritaient d’être étudiés, et nous comprenons
que M. Salin se soit épris de son sujet au point
d’en faire l’objet, non d’une plaquette, mais d’un
volume. Mais nous ne dissimulerons pas à l’écri-
vain que son érudition est entachée de quelque
intempérance. Il a multiplié les notes, et ici, il a
péché par excès de zèle. Pourquoi expliquer ce
qui n’a pas besoin d’explication ? Il n’est pas bon
que, dans une œuvre d’art ou dans un livre, les
fioritures parasites s’ajoutent au motif principal
au point de le surcharger et d’en allourdir la
grâce.

Mais laissons cette rhétorique, et revenons à
Chilly, à son château, à son église. M. Salin les a
décrits dans le passé et dans le présent, il a fait
revivre l’intéressante figure du maréchal d’Effiat,
il l’a montré dans son hôtel à Paris, et dans sa
résidence d’Auvergne, où est son tombeau. Pour
la partie iconographique, M. Salin a trouvé un
collaborateur habile, M. Karl Fichot, qui a gravé
à l’eau-forte ou lithographié les dessins, les
pierres tombales, les inscriptions, les plans qui
enrichissent son volume. L’intérêt du livre n’en
est pas médiocrement accru. Des monographies
comme Chilly-Mazarin, comme l'Église Saint-
Sulpice de Favières, comme ceiles que M. Patrice
Salin continuera sans doute à nous donner, sont
 
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