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La chronique des arts et de la curiosité — 1868

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Nr. 41 (11 Octobre)
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https://doi.org/10.11588/diglit.26660#0199
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1868.

N° kl.

BUREAUX: 55, RUE VIVIENNE.

il OCTOBRE.

LA

ET

DE LA CURIOSITE

PARAISSANT LE DIMANCHE MATIN.


Comptes rendus et Annonces des Ventes publiques

ABONNEMENTS :

Correspondances étrangères. -— Nouvelles des Galeries


de Tableaux, Dessins, Estampes, Bronzes, Ivoires, Médailles,

PARIS ET ÜEPART E M E N T S

publiques, des Ateliers. —Bibliographie des Livres, Articles


Livres rares, Autographes, Émaux, Porcelaines, Armes

Six mois, 8. fr. — Un an, 15 fr.

de Revues et Estampes, publiés en France et à l’Étranger.


et autres objets de curiosité.

Étranger, le port en sus.

Revue des Arts industriels.




LES ÉMAUX CLOISONNÉS MODERNES.

De nos jours, lorsque l’École romantique eut
vaincu l’étrusque impérial et le troubadour à
gigot, le goût des amateurs se porta avec fureur
sur les objets du Moyen âge et de la Renaissance.
On rechercha les émaux non moins avidement
que les bahuts, les fers ciselés, les majoliques
et les manuscrits à miniatures. Un orfèvre intel-
ligent, Froment Meurice, fit émailler avec succès
des ostensoirs, des calices et aussi des figurines
en plein relief, rappelant ces divinités, ces héros,
ces chimères, qui, sur les bijoux de Caradosso
et de Cellini, faisaient fureur à la cour des papes,
des princes du nord de l’Italie et de François Ier.
On refit, notamment à Sèvres, des plais, des ai-
guières à la façon du vieux Limoges, qui allèrent
jusqu’à tromper des amateurs émérites.

Mais plus récemment on a pu constater une
véritable renaissance de l’émail.

M. Claudius Popelin s’est assuré une place à
part non-seulement en exécutant avec autant de
sûreté que de goût ses compositions originales,
mais encore en publiant, dans des leçons ingé-
nieuses et pratiques, le résultat de ses observa-
tions et de ses études. Grâce à lui et à des artistes
tels que MM. Gobert, A. de Courcy, Lepec,
Meyer, etc., l’émail des peintres, cet objet d’art
essentiellement français, figure maintenant au
milieu des tableaux et des dessins, dans les expo-
sitions annuelles et y conquiert des médailles.

Plus récemment encore, l’émail cloisonné, qui
n’était plus guère mis en œuvre que par les ar-
tistes de l’extrême Orient ou par les fabricants
d’orfèvrerie religieuse, vient d’être tenté par nos
artistes parisiens, et ils y ont réussi d’une façon
miraculeuse. C’est particulièrement sur les Chi-
nois et les Japonais qu’ils ont pris modèle.

Les Chinois paraissent avoir connu ce pro-
cédé merveilleux depuis une très-haute anti-
quité. Il nous est arrivé en Europe, par les Hol-
landais du xviie siècle et il y a quelques années,
à la suite du sac du Palais d’été, des spécimens
marqués à ces caractères irrécusables de simpli-
cité et de force qui distinguent les arts antiques
dans tous les pays. D’autres, d’un style un peu
plus souple, portent des inscriptions qui les font
authentiquement remonter à cette dynastie des
Mings qui régna depuis le milieu du xive siècle

jusqu’au commencement du xvne. D’autres enfin
sont fabriqués d’hier, et viennent à chaque sai-
son garnir les salles de ventes publiques de Paris
et de Londres.

Dans la collection du duc de Morny, il y avait
des cloisonnés de la plus grande rareté repré-
sentant les saisons. Souvent ces larges plaques,
qui dans le pays ornent des écrans, sont émail-
lées des deux côtés : sur l’un , les fruits ou les
fleurs s’enlèvent sur un fond blanc; sur l’autre, le
fond est bleu lapis. Il y a des cloisonnés de di-
mension considérable, des brûle-parfums pour
les temples ou les palais, des vasques telles que
celles qui, dans le grand salon d’honneur du
château du baron James de Rothschild, à Fer-
rières, servent de_ caisses ',,d£s palmiers. A Fer-
rières aussi nous avons vu un superbe cloisonné
enrichi de cabochons et de chaînettes de perles,
figurant un éléphant sacré en tenue de cérémo-
nie1. Les vases, les sceptres, lestasses, les pièces
d’orfèvrerie les plus délicates des artistes de
l’empire du Milieu sont décorés avec une finesse
et une richesse incomparables... Mains de fées
et patience de Chinois!

La beauté du ton de ces cloisonnés est sur-
prenante. Les châles de Cachemyr et les tapis
de prière persans du xvie siècle n’avaient rien de
plus harmonieux dans la vivacité, de plus tem-
péré dans l’éclat. Les artistes chinois emploient
presque toujours les tons mats. Leur blanc est
parfois légèrement teinté de lilas. Leur bleu
lapis rappelle l’éther insondable des nuits d’été
et leur bleu turquoise la palpitation du ciel lors-
que naît l’aube. Ils ont un rouge éclatant comme
le cœur d’un œillet, — ce rouge que René Fran-
çois, dans son langage précieux, qualifie de
a chef et parangon de tous les émaux », — et
un jaune aussi velouté que celui des pétales du
chrysanthème couleur de soufre.

Ils représentent rarement dans ces émaux des
personnages, mais plus volontiers le signe mys-
térieux de la vie, la grue, symbole de la longé-
vité, le dragon à cinq griffes, attribut de l’empe-
reur régnant, la flamme ronde qui imite l'éclair,
le chien de Fô qui grimace et cet oiseau dont le

1. M. É. Galichon , directeur de la Gazette clés Beaux-
Arts , possède un vase cloisonné antique d’une forme et
d’un décor très-purs. Il est reproduit dans nos Chefs-
| d’œuvre des Arts industriels.

vol prédit les événements heureux, le Fong
Hoang; puis des fleurs, des rinceaux dans des
bordures formées de cette frise à angles droits
que les Étrusques ont beaucoup employée aussi
et que les classiques appellent «une grecque ».

Les grandes pièces en cloisonné du Japon sont
d’une tournure plus cavalière et plus artiste.
Leur charme réside plutôt dans l’invention du
décor et par cela même ils touchent moins le
gros des amateurs que l’extrême fini des Chi-
nois.

Les cloisonnés anciens sont d’une tournure
superbe, mais il faut convenir que ceux qui nous
arrivent aujourd’hui sont d’un travail presque
grossier et comme lâchés en vue de l’exporta-
tion chez les barbares. .L.

Souvent les manques, les accidents de cuis-
son ou de refroidissement ont été traîtreuse-
ment rebouchés avec des cires colorées; aussi
est-il bon de promener son ongle sur tout l’épi-
derme lorsque l’on marchande un objet mo-
derne. Le plus souvent l’extérieur est criblé
jusqu’à l’abus de ces petites bulles d’air qui,
pendant la cuisson, sont venues s’amonceler à
la surface de l’alvéole : on les appelle des pi-
quassures. Pour les faire disparaître, il faudrait,
en polissant au tour, entamer trop profondément
la matière1.

Il a été impossible jusqu’à ce jour de se pro-
curer des renseignements positifs sur les arts in-
dustriels dans l’empire du Soleil levant. Per-
sonne , parmi nos savants, n’a entrepris de
traduire les encyclopédies, illustrées cependant
de croquis explicatifs, qui nous apprendraient

î. Il y avait quelques-unes de ces pièces modernes, de
qualité inférieure, décorées souvent par des vols de grues,
dans les envois de porcelaine de commerce, faits l’hiver
dernier par le Daïmio de la province de Fizen.

Depuis quelques années on rencontre en abondance,
chez les marchands de Londres et de Paris, des cloisonnés
cl’un aspect sombre et peu décoratif. Ce sont des plateaux
ronds, des théières, des vases de forme lourde, générale-
ment à fond vert mat. Le motif central seul est assez dé-
terminé. En examinant de près, on reconnaît un décor
formé de combinaisons de ronds et d’angles s’emboîtant les
uns dans les autres comme ces figures géométriquement
capricieuses que forment des verroteries agitées dans un
kaléidoscope. Personne n’a pu nous dire encore dans quelle
province sont fabriqués ces cloisonnés à deux facet, sur
cuivre épais et qui sentent la décadence. Comme ils arri-
vent quelquefois en même temps que les terres de \ ipe et
les porcelaines de Satzouma, on pourrait supposer qu’ils
sortent de cette province ou d’un gouvernement limitrophe.
 
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