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La chronique des arts et de la curiosité — 1868

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Nr. 13 (29 Mars)
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https://doi.org/10.11588/diglit.26660#0068
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LA CHRONIQUE UES ARTS.

Saint-Vincent de Paul. A travers mille vicissitudes,
malgré la révolution de 4 848, et grâce aux loyaux
scrupules de notre regretté Flandrin, il conserva la
moitié de ce travail : la coupole et la frise de l’abside.
Il conduisit à bonne fin cette difficile entreprise, qui
l’absorba pendant plus de six années. C’est en faire
un grand mais juste éloge que de dire que ces com-
positions, et notamment celles qui représentent les
sept sacrements, se lient harmonieusement 'a la belle
création de Flandrin. Picot trouva là l’occasion de
donner la mesure d’un talent et d’un caractère égale-
ment honorables, par le mérite de son œuvre et par
le cordial hommage qu’il rendit à celle de son émule.

Ce fut aussi son dernier travail publiquement ex-
posé. Notre confrère a eu cette sagesse, que j’admire et
que je voudrais avoir l’autorité de proposer comme
exemple, de ne pas donner le spectacle attristant de
l’affaiblissement de son talent, spectacle doublement
dangereux, puisqu’il amoindrit l’artiste en faisant ou-
blier des œuvres vigoureuses en présence des tenta-
tives débiles du vieillard, et qu’en même temps il
déshabitue le public, et surtout la jeunesse, du res-
pect salutaire pour une vie bien remplie.

Celle de notre cher et regretté confrère le fut non-
seulement par ses nombreux et considérables travaux ;
elle le fut encore par cette influence sur la jeunesse
que donne la plus affectueuse sollicitude. Picota di-
rigé pendant plus de quarante ans un des ateliers les
plus fréquentés de Paris. C’est à ses élèves qu’il avait
voué tout ce que son âme recélait de chaleur. Il suivait
d’un œil paternel, jusqu’au delà des succès du début,
les jeunes talents qu’il avait aidés à se développer par
son jugement sain, sa douce critique, sa connaissance
et son goût des bellés choses. Ce serait une grande
erreur de ^croire ceux-là seuls de bons maîtres qui,
doués eux-mêmes d’une individualité fortement tran-
chée, marquent d’une main de fer leurs disciples au
coin de leur génie. On enseigne moins ce qu’on est
que ce qu’on aime. Le savoir et la perspicacité, l’expé-
rience et le caractère, le cœur surtout, rendent souvent
les leçons plus efficaces que le génie lui-même.
Picot a eu la joie et la gloire de former des élèves
nombreux et singulièrement heureux. Vous connaissez
tous, messieurs, cette phalange de vaillants artistes
sortis de son atelier. Un triste souvenir appelle ici le
nom de Benouvilie, objet de l’attachement et de la
prédilection de son maître, ravi si jeune à des succès
qui présageaient le plus brillant avenir, éclatant té-
moin de la portée des leçons de Picot et de la liberté
qu’il savait laisser à l’épanouissement des dons per-
sonnels.

Picot a donc honorablement rempli la tâche de gar-
der intacte la tradition assaillie de toute part. Il a
formé une génération habile et féconde, nouvel anneau
de la chaîne sacrée qui relie le passé de l’école fran-
çaise à son avenir. Par sa discrétion, sa réserve, l’éga-
lité et la sûreté de son caractère, Picot s’est créé dans
le monde, parmi ses confrères, parmi ses élèves, des.
amitiés fidèles, dévouées, reconnaissantes. Les regrets
profonds et unanimes que sa perte inspire ne sont nulle
part plus vivement ressentis qu’au sein de l’Acadé-
mie. Elle gardera à sa mémoire un souvenir attendri
et respectueux. C’est en son nom que je te dis, cher
confrère, ce dernier et douloureux adieu.

COLLECTION CHAMPFLEURY.

11 y a déjà plus de vingt ans que M. Champfleury,
en quête de renseignements touchant l’art et la litté-
rature populaire, recueillit peu à peu dans ses voyages
d’humbles monuments, dont jusque-là personne ne
s’était soucié; leur étude lui donna la clef de l’en-
semble historique consigné dans Y Histoire des
faïences patriotiques sous la Révolution.

De son seul chef, l’auteur de ce livre avait fait pour
l’histoire du peuple ce que les gouvernements ne
font d’ordinaire que pour la mémoire des rois. Cette
tentative, les principaux journaux de France et de
l’étranger en entretinrent souvent le public, la critique
sachant gré à M. Champfleury d’avoir montré, par des
monuments figurés, les véritables sentiments du
peuple à l’époque la plus passionnée de notre histoire.

Ici la Révolution, que les érudits pâlissent à étudier
dans les innombrables publications du temps, se
trouvait résumée en vives images par quelques cen-
taines de céramiques. Une telle acclamation des prin-
cipes de 4789 offrait un caractère particulier d’union
et de concorde, et témoignait d’une façon claire et
visible, par un journal sous émail, les réels sentiments
du peuple de 4 789 à 1792.

Aussi M. Sainte-Beuve disait-il dans ses Nouveaux
Lundis : « Si l’histoire de la Révolution française
était perdue, on la retrouverait en partie rien que par
les assiettes, par ce qui s’y voit peint et figuré. »

Un des maîtres de la science céramographique,
M. A. Jacquemard, développant la même question :

« Ce n’est, en effet, rien moins qu’un journal que
le livre dont nous essayons la rapide analyse, disait-il
dans la Gazette des Beaux-Arts ; la logique nous
entraîne même à le classer dans la série historique
tout auprès du bel ouvrage d’Ilennin sur les monnaies
révolutionnaires; telle assiette, par ses inscriptions et
ses emblèmes, prendra l’importance du monneron de
la fédération ou du monneron à l’Hercule, des pièces
constitutionnelles, du décime à la balance comme à la
table de la loi et de tant d’autres monnaies éphémères,
qui servent moins à marquer les fluctuations de la va-
leur du numéraire qu’à faire connaître la marche des
événements et leurs impressions sur les esprits1. »
Les Picards et les Normands, qui, les premiers en
France, ont poussé aux études archéologiques, com-
prirénTegalement l’importance de’œfles pièces histo-
riques.

Au musée d’Amiens se trouve une centaine de ces
céramiques, et à propos d’un don de même nature
fait au musée de Rouen, M. Alfred Darcel, dont les
travaux sur les collections du Louvre font autorité,
disait :

« M. l’abbé Colas, nommé conservateur du Musée
municipal de céramique, a voulu pour sa bienvenue
enrichir la collection qui lui était confiée et il lui a
donné une suite de soixante assiettes républicaines :
cadeau très-important, car ces produits céramiques,
que l’aristocratie des collectionneurs appelle des as-
siettes à deux sous, sont montés à des prix assez
élevés et quelques-uns sont devenus rares... Bien
donc que la fabrique de Nevers surtout, ainsi que
celles de Beauvais et du faubourg Saint-Antoine, en
certains cas, aiertt dû fabriquer la plupart des pièces
que M. l’abbé Colas a données au musée céramique
de Rouen, nous ne pouvons que nous féliciter de voir
celles-ci entrer dans un musée public rouennais,
car elles sont l’impression du sentiment populaire
pendant la plus grande des révolutions qui aient
changé les conditions de vie des sociétés modernes... »
Ainsi est constatée la double valeur d’une telle col-
lection et pour ceux qui s’occupent de questions his—

1. Toutefois il importe de faire observer que ces faïences
de Nevers, de Rouen, de Marseille, de Lunéville, de Mous-
tiers, etc., n’intéressent pas seulement ceux qui s’occupent
d’histoire; elles préoccupent aussi les amis de la céramique
en appelant leur attention sur des centres de fabrication
inconnus, et M. Jacquemard, à propos de quelques pièces
du cabinet de M. Champfleury, disait encore ;

« En 1789, Paris possédait quatorze fabriques, c’est-à-
dire deux de plus que Nevers et deux seulement de moins
que Rouen; croit-on que leurs ouvrages, conçus dans le
faubourg Saint-Antoine, au milieu du foyer de l’agitation
politique, soient moins nombreux ou moins ardents que
ceux de Nevers? »

toriques et pour ceux qui s’intéressent aux diverses
évolutions de l’art de terre.

Comment le peuple fut amené à employer ce sys-
tème à'épigraphie céramique, on le verra par la
disposition du catalogue de la collection, qui ne con-
tient pas seulement que des pièces patriotiques, mais
aussi met en lumière la nature d’esprit goguenarde
et railleuse, bachique et amoureuse de l’ancienne
France.

La collection de Faïences historiques, ayant trait
aux usages, mœurs, coutumes du peuple et aux
événements politiques de 1750 à 1830, se compose
de : Faïences patriotiques et satiriques, ayant trait
aux mœurs avant la révolution de 4 789 ; de Faïences
patronymiques; de Céramiques relatives à l’invention
des aérostats; de Faïences franc-maçonniques, etc.

Puis la série politique ; les Faïences de la Royauté
avant 4 789; les Faïences de la Révolution, datées de
4789, 4790, 4794,4792,4793, 4794, 4795, 4799,4 804,
4 803, 4 806, toutes portant des dessins symboliques
et des légendes.

Un échantillon des Porcelaines de Sèvres exécutées
sous le gouvernement républicain; les Faïences an-
glaises et espagnoles, à emblèmes satiriques contre la
France.

Les Faïences du premier Empire, ou relatives au
général Bonaparte, au premier Consul et à l’empereur
Napoléon Ier; celles de la Restauration ; celles du règne
de Louis-Philippe.

Du n° 9 au n° 94 du catalogue, il y a enchaînement
parfait. C’est pourquoi il était impossible de désunir
une suite dont le caractère historique eût disparu dans
un émiettement regrettable.

Peu de pièces manquent, sauf celles inconnues jus-
qu’ici, et les cabinets qui furent fondés à l’imitation
de celui de M. Champfleury sont loin d’atteindre
l’importance de cette collection, qui exigea tant de
sacrifices.

Les frères Grimm, voyageant en Allemagne pour
recueillir les traditions populaires, ne mirent pas plus
de zèle à leur mission, que M. Champfleury faisant
deux cents lieues pour rapporter une faïence à sym-
bole historique.

Plus d’un chroniqueur a dit la place considérable
que ces trouvailles accumulées occupaient dans un
modeste appartement de la rue Germain-Pilon. Et il
a fallu des circonstances particulières pour forcer leur
possesseur à se séparer de monuments qui avaient
été si longtemps les seuls compagnons d’une vie con-
sacrée à l’étude 1.

LES PREMIÈRES LITHOGRAPHIES EN FRANCE.

Paris, le 20 mars 1868.

Monsieur,

D’après un article inséré dans le numéro du 4 3 mars
du Petit Figaro, ce serait dans une maison récem-
ment abattue pour le prolongement de la rue Olivier
qu’aurait été installée, en 1812, la première pierre
lithographique que l'on ait vue à Paris.

L’auteur entre dans quelques détails, d’où il résul-
terait qu’au commencement de ce siècle, et lorsque
l’imprimerie lithographique était déjà répandue en
Allemagne, le gouvernement français aurait refusé à
M. Maulich l’autorisation de fonder un établissement
lithographique; mais que, bien plus tard, en 1810,
M. le comte de Lastevrie, étant allé en Allemagne

1. Le catalogue de la collection de M. Champfleury vient
de paraître.

Les amateurs qui désireraient le posséder peuvent s’adres-
ser à M. Mannheim, expert, 9, rue Saint-Georges, qui est
autorisé à recevoir les propositions pour la vente de l’en-
semble d’une collection dont la dispersion serait regret-
table.
 
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