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La chronique des arts et de la curiosité — 1868

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Nr. 23 (7 Juin)
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https://doi.org/10.11588/diglit.26660#0128
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LA CHRONIQUE DES ARTS.

profit, et d’apporter en échange un contingent d’idées
plus élevées, de jouissances plus délicates?

Pourquoi non? C’est ce qu’on commence à entre-
voir sur tous les points favorisés du pays, où la ri-
chesse, en s’accumulant, a peu à peu élargi la vie
dure et étroite d’autrefois, en créant les loisirs et en
raffinant le goût. Bordeaux, Limoges, Lille, marchent
ouvertement dans cette voie, sans compter les grandes
villes manufacturières de l’Angleterre, qui sont pres-
que aussi avides de petits tableaux que l’étaient les
anciens bourgeois de Hollande, si ces derniers étaient
mieux payés de leur passion pour les chefs-d’œuvre
de l’art contemporain.

Le but peut donc s’atteindre; quant au moyen, il
est dans ces expositions locales que de vaillantes et
généreuses associations établissent et font réussir à
force de dévouement et de persévérance.

A Montpellier, il y avait déjà une bonne semence
et un excellent moyen d’éducation artistique : c’est ce
beau musée, un des plus remarquables de nos provin-
ces, qui s’est successivement enrichi des collections
Fabre, Yaledan et Collot. Là brillent, entre autres ri-
chesses, une vingtaine de toiles des maîtres de Hol-
lande, réunies, pour la plupart, dans un charmant
petit salon carré. Le croirait-on, pourtant, bien que
le musée ne soit ouvert que deux jours de la semaine,
pendant quelques heures, de rares visiteurs parcou-
raient les galeries silencieuses, pendant que la foule,
attirée par les splendeurs d’un concours régional, se
pressait ébaubie autour des stalles encombrées de tau-
reaux énormes et de moutons modèles. Les gardiens
du lieu, empressés autour des représentants clair-se-
més du public, ajoutaient à leur complaisance natu-
relle quelque chose de ce besoin d’expansion des
solitaires, dont les instincts sociaux manquent habi-
tuellement d’aliment.

Quoi qu’il en soit, j’ai fait mon profit moi-même de
cette solitude, et me suis aussi félicité de ce que les
peintures modernes, temporairement réunies, n’aient
point été obligées, comme cela arrive ailleurs, d’em-
prunter l’espace couvert par les anciennes.

C’est donc là que, le 3 mai, la Société artistique de
l’Hérault a ouvert sa première exposition, qu’elle s’en-
gage à renouveler pendant quatre ans, auxquels vous
et moi souhaitons sincèrement de voir s’en ajouter
bien d’autres.

Cette Société a pour président un député du dépar-
tement, M. Pagezy, et pour auxiliaires actifs et dé-
voués une trentaine d’artistes et d’amateurs réunis en
commission. Afin de la rendre accessible à tout le
monde, on a décidé qu’il suffirait, pour en faire partie,
de s’engager à payer une somme annuelle de 5 francs
pendant quatre années. Chaque sociétaire reçoit cinq
billets de loterie qui donnent les mêmes droits que
ceux vendus 1 franc à la porte. En somme, la presque
totalité des fonds réunis sera, déduction faite des
frais, consacrée à des acquisitions dont le sort déter-
minera les possesseurs. On espère aussi que l’admi-
nistration du Musée Fabre prendra l’excellent parti
d’employer tout ou partie des sommes dont elle dis-
pose. Ce serait un moyen très-efficace d’attirer à
Montpellier les œuvres de nos meilleurs peintres, dont
aucun ne serait indifférent à l’honneur de voir son
nom figurer dans cette belle collection.

L’exposition de cette année ne m’a point paru être
un mauvais début.

Le catalogue compte 490 numéros et on y voit figu-
rer beaucoup de noms connus, ou même célèbres. J’ai
remarqué une tête de femme, et la Jeune Fille à la
■pomme, de M. Hcnner; Sur la falaise, de M. Didier;
la Herse, par M. Iléreau, deux chevaux traînant la
herse sur le sol labouré, toile d’un sentiment assez
énergique, mais dont l’exécution me paraît un peu
rudimentaire; des chiens de M. Balleroy; un petit ta-

bleau et une aquarelle, de M. Jules Laurens, qui est
un enfant du pays.

Le paysage abonde comme à l’ordinaire, fl y en a
trois, assez importants, de M. Gustave Castan; d’IIar-
pignies, une petite toile et deux aquarelles; deM. Paul
Flandrin, la Vallée d’11%ères, et les Cuirassiers après
la charge ; deux vues d’Orient, de M. Théodore Frère;
le Pont du grand Béguignage, à Bruges, de M. Jus-
tin Ouvrié. Le catalogue promettait un Troupeau de
moutons, de M. Schenk, que je n’ai pas su trouver sur
les murs, où d’autres moutons ne manquaient pas.

J’allais oublier M. Veyrassat, qui a fourni quatre ta-
bleaux, et Tourny, dont on voit trois bonnes copies à
l’aquarelle. (Deux avaient été vendues avant d’être
exposées.) Parmi les noms qui nous sont moins fami-
liers à Paris, mais qui dominent et doivent dominer
dans une exposition de ce genre, je citerai seulement
ceux de M. Mattet, conservateur du Musée, qui a
donné deux portraits, et M. de Saint-Étienne, dont la
Gazette a publié jadis une eau-forte, et qui, non con-
tent de s’employer avec le zèle le plus louable à faire
l’exposition de Montpellier, l’a enrichie de deux ou
trois eaux-fortes et de trois paysages.

La sculpture voyage difficilement et elle n’envoie
guère, en ces occasions, que son plus léger (je ne dis
point son plus mince) bagage: médaillons, petits bron-
zes, statuettes. C’est ainsi que figurent à Montpellier
MM. Carpeaux, Carrier-Belleuse, Cugnot, Boubaud, etc.

Faut-il le dire maintenant? Je n’ai pas vu avec plai-
sir figurer côte à côte, sur la même tablette, un petit
estampage en terre cuite du Prince Impérial, de
M. Carpeaux, flanqué, à droite et à gauche, de deux
bustes en bronze, de même dimension, du même
Prince Impérial. Je veux qu’on vende, et cju’on vende
beaucoup, à toutes les expositions, dans l’intérêt des
artistes et des acheteurs et des expositions; mais enfin
une exposition d’art n’est pas un magasin, et... l’on
me comprendra sans que j’en dise davantage.

G. A.

EXPOSITIONS.

Une exposition aura lieu à Gand dans la nouvelle
salle du Casino, construite spécialement pour les ex-
positions. Elle s’ouvrira le '13 septembre 1868.

On y recevra toute espèce de productions des arts
du dessin, pourvu que ces objets soient l’œuvre d’ar-
tistes vivants.

Les artistes qui désirent vendre leurs productions
auront soin d’en prévenir le secrétaire et de lui faire
connaître le minimum du prix auquel ils consentent
à les céder, afin de le mettre à même de répondre aux
demandes qui lui seront faites, et d’éviter toute cor-
respondance ultérieure.

Les artistes qui céderont leurs productions à la
souscription auront la faculté de les revendre, jus-
qu’à la fin de l’exposition. Le secret le plus absolu
sera gardé sur le prix auquel ils auraient cédé leurs
œuvres à la commission.

Toutes les lettres devront être adressées franches
de port, au secrétaire de la Société. MM. les artistes
sont priés d’indiquer, autant que possible, le sujet et
la dimension des œuvres qu’ils se proposent d’envoyer.

La commission directrice aura soin du déballage et
du remballage des objets envoyés au salon.

Les objets destinés à l’exposition devront être adres-
sés : A la Commission directrice de l’Exposition
Nationale des Beaux-Arts, à Gand, cm Casino.

Ils seront annoncés par une lettre d’avis adressée
au secrétaire de la commission. Cette lettre fera con-
naître le nom et le domicile de l’artiste, le prix de
l’objet à exposer, ainsi que la notice à insérer au ca-
talogue.

La commission prend à sa charge les frais d’envoi et

de renvoi de toutes les œuvres d’art jusqu’à destina-
tion, pourvu qu’elles lui soient expédiées par chemin
de fer, tarif n° 2.

Tous les tableaux et objets d’art doivent être remis
au local de l’exposition avant le 1er septembre.

Les objets envoyés à l’exposition devront rester au
Salon jusqu’à l’époque de sa clôture, qui est fixée au
2 novembre. La commission directrice établira une
surveillance sévère et donnera tous ses soins à leur
conservation, sans toutefois assumer la responsabilité
des accidents qui pourraient y survenir.

NOUVELLES.

*** L’Académie des Beaux-Arts, dans sa séance du
30 mai, a élu M. Barye à la place vacante dans la sec-
tion de sculpture, par suite du décès deM. Seurre.

*** L’exposition de la Société des Amis des arts
de Bordeaux, dont la Gazette a rendu compte dans
son numéro du 1er mai, a obtenu cette année un succès
tout à fait exceptionnel et que l’on attribue surtout à
la présence de la peinture d’Ingres, la Source. L’ex-
position publique a fermé le 21 et le tirage des lots
acquis par la Société a eu lieu le 23 mai. A ce mo-
ment, le total des acquisitions s’élevait à 86,000 francs.
Nous en donnerons prochainement le détail. Le con-
seil municipal a voté 8,000 francs pour l’acquisition
d’une Jeanne d’Arc, par M. A. Serres, et du tableau
laissé inachevé par Dauzats. Ce qui surtout est à
remarquer, c’est que la moyenne des prix d’acquisi-
tion s’est notablement élevée.

*** Nous apprenons une bien triste nouvelle. Le
plafond de la coupole de la bibliothèque du Sénat, un
des chefs-d’œuvre d’Eugène Delacroix aussi bien que
de la peinture décorative moderne., s’est détaché de la
muraille et est entièrement tombé. Les lambeaux de
cette vaste composition ont été immédiatement trans-
portés dans les ateliers de réparation du Louvre. Espé-
rons qu’il n’y a rien de gravement détérioré.

L’exposition rétrospective des Beaux-Arts ré-
cemment ouverte à Leeds doit, par le produit des
entrées, servir à la dotation de l’hôpital qui sera in-
stallé dans les bâtiments mêmes où se trouve le musée.
On y remarque un assez grand nombre de beaux ta-
bleaux de l’ancienne école italienne, tels que le Portrait
d’une jeune fille de Masaccio, une très-belle Judith
de Mantegna, le Martyre de saint André de Carlo
Dolci, le Christ et le Centurion de Paul Yéronèse,
une bonne copie, très-ancienne, de la Madone cle
Lorette de Raphaël, dont l’original est perdu, etc.

*** Le comte Irénée de Zaluski est mort le 20 mai,
à Dresde, des suites d’une blessure reçue dans un
duel. C’était un sculpteur d'un grand mérite. Parmi
ses œuvres, on remarque les bustes de l’empereur et
de l’impératrice d’Autriche qui, en 1867, furent
offerts par Leurs Majestés à l’empereur Napoléon. En
1866, le comte Zaluski entra comme volontaire dans
un régiment de cavalerie et fut nommé bientôt après
officier, pour sa bravoure à la bataille de Sadowa.

* M. Eugène Plon, auteur du bel ouvrage sur le
sculpteur danois Thorvaldsen, dont notre collabora-
teur M. Dauban a rendu compte dans le dernier nu-
méro de la Gazette, vient d’être élu membre étranger
de l’Académie royale des Beaux-Arts de Copenhague.

*** A Stockholm va être élevé un monument à la
mémoire du roi Charles XII; il sera l’œuvre du sculp-
teur Molin ; l’inauguration aura lieu le 30 novembre
de cette année, le cent cinquantième anniversaire de
la mort de ce prince.
 
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