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La chronique des arts et de la curiosité — 1868

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Nr. 45 (8 Novembre 1868)
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Lefèvre dans la salle du conseil de ce
tribunal. Un modelé sobre et un dessin
savant accusent un artiste sérieux, fidèle
à l’enseignement d’un maître illustre.

Nous ne terminerons point cette trop
courte appréciation d’un monument re-
marquable et d’œuvres importantes sans
engager vivement nos lecteurs à visiter
un édifice qui, au dire des juges les plus
autorisés, illustrera notre époque, et sans
exprimer le vœu de voir, pendant quel-
que temps encore, les nouvelles salles du
Palais-de-Justice ouvertes le dimanche
au public. A une époque où tant d’archi-
tectes et de peintres se contentent si vo-
lontiers de l’à peu près dans la composi-
tion et poussent à l’extrême la négligence
de l’exécution, il est bon de montrer aux
artistes et au public des œuvres méditées
et achevées avec une rare conscience.

Émile Galiciion.

UNE FONTAINE POUR BORDEAUX.

On voit en ce moment, devant le gui-
chet de la cour du Louvre qui fait face au
pont des Arts, un groupe en bronze qui
doit former le couronnement d’une fon-
taine monumentale commandée par la
ville de Bordeaux.. Ce groupe, composé
de trois Naïades, est de M. Gumery. Il a
été fondu par M. Victor Thiébaut.

L’ensemble de la fontaine, qui doit
orner à Bordeaux la place de la Bourse, a
été composé par Visconti. C’est une
sœur, moins parée, nous dit-on, mais
non moins réussie comme silhouette, de
la charmante fontaine de la place Lou-
vois. Elle aura à peu près Tes mêmes pro-
portions; quant à celle-ci, ce n’est au-
jourd’hui un mystère pour personne que
la disposition autant que les profils et les
détails en avaient été profondément re-
maniés par Jules Klagmann. Tulil alter
honores...

Il y aura une grande vasque en pierre
du Jura et des enfants chevauchant des
dauphins. Ces enfants, qu’on a eu le tort
de ne point monter, sont d’un pension-
naire de la ville de Bordeaux : M. Jouan-
dot. Les Naïades de M. Gumery verseront
l’eau de leurs urnes en ce moment bou-
chées. Cette symétrie des trois urnes
penchées n’était pas une des moindres
difficultés que le sculpteur eut à vaincre,
Mais lorsque l’eau en jaillira, l’effet déco-
ratif sera plus mouvementé qu’il n’est en
ce moment.

Ce groupe est bien agencé. Les Nym-
phes ou les Grâces sont nues : elles
offrent en pleine saillie l’harmonie de
leurs robustes corps. Leur vêtement est
rejeté en plein derrière elles et dissimule
la partie inférieure de la colonne à la-
quelle elles sont adossées. Leurs bras ou .
leurs mains libres sont enlacés. Sans être
sœurs, elles sont de la même famille,
mais l’on peut reprocher à M. Gumery de
l avoir trop montré. Son groupe eût gagné
en attraits si le type des natures choisies
eût été plus varié. Le modèle qui a posé
était robuste, mais un peu gras. De là,
une belle allure, une silhouette bien sui-
vie, mais des attaches lourdes, des bras
et des jambes qui auraient peine à se
mouvoir librement. La lumière de Bor-
deaux qui est plus vive que celle de Paris
mordra peut-être sur le modelé et le fera
paraître plus fin.

Le socle sur lequel posent ces trois
Grâces aquatiques est très-étroit. Les

CHRONIQUE DES ARTS.

pieds offrent une saillie dans le vide qui
ferait naître une sorte d’inquiétude pour
leur stabilité, si elles ne semblaient en
avoir vaguement conscience en se reje-
tant insensiblement en arrière.

Ces critiques de détail n’enlèvent rien
à la valeur générale de’ ce groupe, qui
n’est lui-même qu’une partie subordon-
née à un ensemble que nous n’avons pas
sous les yeux. Il est à la hauteur des
œüvres précédentes de M. Gumery, le
Faucheur, le Monument du président
Fribre, à Chambéry, dont une des figures
du socle, l’Etude, a été si remarquée à
l’Exposition universelle.

Pu. Burty.

—-**Hm*~-

HISTOIRE DE L’ART GREC

AVANT PÉRICLÈS ET PHIDIAS,

PAR M. BEÜLÉ.

M. Beulé vient de publier à la librai-
rie académique de Didier- Y Histoire de
l’art grec avant Périclès et une seconde
édition de Phidias, drame antique dont
des fragments on été publiés dans la Ga-
zette. Nous en reproduisons la préface :

« Est-il un plaisir plus pur que de
converser avec les génies d’un grand siè-
cle, et quelle forme, mieux que le dia-
logue, est propre à nous introduire dans
leur intimité? Il est moins téméraire de
les faire parler quand on a appris long-
temps à les écouter avec respect. Leurs
paroles et leurs pensées, disséminées
dans les historiens, se résument qinsi
d’une façon plus sensible : elles prennent
un corps, non pas solide ni animé par les
passions, mais semblable à ces ombres
blanches, transparentes, promptes à s’ef-
facer, que les poètes nous peignent dans
les Champs Élysées glissant au sein d’une
éternelle sérénité.

« La suite de scènes que j’ai publiées
jadis avec le nom de Phidias n’est point
un essai nouveau : le genre a été consa-
cré par des œuvres célèbres. C’est une
simple récréation littéraire. Pendant l’été
de 1860, j’habitais la vallée de Spa ; j’a-
vais des loisirs, jè voulus revivre dans
ma chère Athènes, où se sont écoulées les
quatre plus belles années de ma vie. Je
me suis transporté par le souvenir sur le
plateau sacré de l’Acropole, devant ses
marbres étincelants de perfection ; j’ai
prêté de ^nouveau un sens au bourdon-
nement des abeilles de l’Hymette , aux
murmures de la brise, aux échos de la
plaine, au silence même des ruines, et
j’ai retrouvé dans mon çœur le bonheur
évanoui. 0 Grèce, fleur du monde et
jeunesse de l’humanité, tu es devenue
pour nos générations tristes et turbu-
lentes l’image d’un paradis perdu ! Chez
toi, l’homme a atteint cet équilibre du
corps et de l’âme, de l’utile et du beau,
du citoyen et de l’État, de la liberté et
du dévouement à la patrie qui constitue
je ne sais quelle ivresse radieuse qui
fera tressaillir d’envie la postérité la plus
reculée !

« Notre époque a chassé l’idéal; elle est
éprise de la matière ; elle s’incline devant
la brutalité des faits. Nous faisons de
grandes choses, me dit-on, mais au mi-
lieu du découragement et des tempêtes.
Je compare la société moderne à notre
Océan condamné à des oscillations per-
pétuelles, qui se soulève ou s’abaisse nuit

et jour et ronge ses bords mal définis :
la marée haute fait écrouler les falaises,
la marée basse ne découvre que de la
fange. La société grecque, au contraire,
ressemble à la Méditerranée qui caresse
de ses flots bleus des côtes admirables,
précises, qu’on croirait façonnées par un
sculpteur; le moindre rocher garde sa
forme et sa couleur, la moindre plage son
sable d’or, la moindre colline ses pins
qui descendent sans péril se mirer dans
les eaux.

« Jamais on ne retourne dans ce milieu
vivifiant sans s’y retremper : on n’en re-
vient pas meilleur, on en revient consolé.
L’air libre de la Grèce est nécessaire pour
la santé de l’âme. Les jouissances hon-
nêtes que j’y puise, je les offre de nou-
veau aux jeunes gens et à ceux qui trou-
vent dans un culte sincère du beau le
secret de ne point vieillir. Il ne suffit pas
aujourd’hui de fermer tristement lesyeux,
tandis que nous nous sentons entraînés
vers la pente fatale : il faut contempler
les époques de lumière, il faut remonter
vers le bonheur. Le siècle de Périclès çst
pour l’humanité un de ces sommets vers
lesquels elle se retourne sans cesse, en
marchant vers l’exil. Que d’autres van-
tent la puissance de nos machines, notre
industrie, le luxe de nos demeures, la
variété de nos plaisirs. Pour moi, je le
jure, je donnerais une vie entière, con-
sumée dans ce tourbillon, cù tout est
vanité et fièvre, pour dix ans passés entre
Périclès et Phidias. »

Beulé.

a PROPOS

DU LOUIS XIV ET MOLIÈRE

PAR INGRES.

Monsieur,

Dans le numéro de la Chronique du 25
octobre, je lis que le taoleau d’Ingres
représentant Molière assis à la table de
Louis XIV « avait été payé 75,000 francs
au maître, et offert par l’Empereur au
foyer de la Comédie-Française. »

On comprend que dans un journal quo-
tidien une erreur se glisse, mais d’habi-
tude votre journal est trop bien renseigné
pour que vous ne désiriez point la recti-
fication d’un rapport inexact sur l’œuvre
d’un de nos plus illustres maîtres.

Le Molière assis à la table de Louis
XIV qui orne le foyer des artistes à la
Comédie-Française n’a pas été vendu à
l’Empereur comme on l’a dit, mais donné
par Ingres au Théâtre-Français en retour
d’un acte de gracieuseté.

Le directeur et les sociétaires de la
Comédie-Française avaient pensé que le
représentant des plus hautes traditions
de l’art, que le peintre des héros et des
divinités antiques, devait avoir un libre
accès auprès de Sophocle et de Corneille,
auprès de Racine et d’Euripide, et ils
avaient ouvert à Ingres les portes de la
maison de Molière. Mais en acceptant
d’avoir ses entrées à la Comédie, M. Ingres
avait pris la détermination de reconnaître
cette faveur par le don d’une peinture
de sa main, et d’une peinture faite exprès
pour honorer les comédiens dans le grand
homme qui avait honoré àjamaisleur pro-
fession. Telle fut l’origine du Molière as-
sis à la table de Louis XIV.

Plus tard, en 1863, si je me rappelle
bien l’année, Ingres fit de ce tableau une

répétition avec variantes, qui fut achetée
25,000 fr. par l’Impératrice pour sa col-
lection particulière, où elle figure encore
aujourd’hui. Voilà, cher Monsieur, l’his-
torique du tableau dont on u tant parlé
dans ces derniers temps.

Agréez, etc.

F D.

NOUVELLES.

Les notices de peintres, qu’on*i dit avoir
été trouvées récemment dans les archives
de Florence, ne sont pas aussi inconnues
qu’on l’a écrit. Elles se réduisent à fort peu
de choses, suivant des renseignements posi-
tifs. Que les critiques ne s’inquiètent ou ne se
réjouissent point trop. Sur Donatello, les
archives ne contiennent rien qui n’ait été pu-
blié. Seulement, depuis quelques années,
M. Semper, un jeune écrivain suisse, s’oc-
cupe de rassembler toutce qui a été imprimé
de relatif à Donatello, mais il ne possède au
cun document inédit sur ce grand sculpteur.
*

* H-

La Société des fabricants de bronze de
Paris ayant fondé des prix annuels pour les
meilleurs travaux exécutés dans toutes les
branches de son industrie, a ouvert, dans
son local, rue Saint-Claude, n° 8, sa qua-
trième exposition des produits destinés aux
concours. Le public est admis à les visiter
de dix heures du matin à quatre heures du
soir jusqu’au dimanche 8 novembre inclusi-
vement. La même Société a créé une école
gratuite de dessin et de modelure pour l’in-
struction des apprentis et jeunes ouvriers de
sa profession. L’exposition des objets admis
aux concours annuels aura également lieu
dans le même local les samedi et dimanche
1 h et 15 novembre, de dix heures du matin
à quatre heures du soir.

*

* *

M. Bruyas vient d’offrir sa collection de
tableaux à la ville de Montpellier. Cette col-
lection, très-riche en tableaux modernes de
Delacroix, Courbet, Corot, Rousseau, Cou-
ture, Trcyon, Decamps, Cabanel, Scheffer,
portera le nom de galerie Bruyas, et le do-
nateur en sera conservateur sa vie durant.

*

* *

Les candidats présentés à l’Académie des
beaux-arts par la section de peinture pour
la place de M. Picot sont dans l’ordre sui-
vant : MM. Lenepveu, Roger, Bouguereau,
Barrias, Pils.

L’Académie a ajouté à cette liste les noms
de MM. Jalabert, Fromentin, Yvon et Isabey.

Les lettres de candidature Pour la place
d’académicien libre, vacante à l’Académie
des beaux-arts par suite du décès de M. le
comte Walewski, ont été lues dans la séance
du samedi 7 novembre,

*

* *

Daps sa chronique du Temps, ,M. Feyrnet
raconte que le grand événement qui est de-
puis quelques jours l’entretien de Lyon,
c’est la visite de M. le duc de persigny au
musée, ou plutôt c’est ce qui l’a précédée.

■Le musée n’est ouvert aux Lyonnais que
le dimanche et le jeudi ; c’est peu. Mais que
les Lyonnais se plaignent s’ils trouvent que
ce n’est point assez; cela n’est pas mon af-
faire.

Or, dimanche dernier, avant que l’heure
de la clôture eût sonné, voilà qu’on invite les
visiteurs à se retirer. Pourquoi cela? Que si-
gnifie cette nouveauté ? On veut le savoir ;
on interroge les gardiens, et les gardiens
répondent qu’il faut que le public quitte les
salles, parce que M. le duc de Persigny va
venir voir le musée.

Et le public, en effet, se retira; en quoi

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