DOI article:
Véron, Eugène: Albert Dürer
DOI Page / Citation link: https://doi.org/10.11588/diglit.16910#0181
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L'ART.
Indépendamment' de son mérite technique, cette suite offre un intérêt tout particulier à raison de
la façon toute personnelle dont le maître concevait la Vierge. « Toutes les fois qu'il représente la
mère du Sauveur », dit M. Thausing « il la met directement et uniquement en rapport avec
Jésus enfant; c'est là toute l'importance qu'il lui attribue. La plupart du temps Marie ne s'occupe
que de son fils... La Vierge de Durer n'a pas cette indépendance, cette grâce, ce charme matériel
que possède la Vierge des maîtres italiens. Elle ne garde même pas longtemps l'auréole. On
dirait une simple mère, comme on en rencontrait chaque jour à Nuremberg... Elle a l'air d'une
honorable bourgeoise allemande... » On ne saurait apprécier plus exactement le caractère de ces
compositions. Ce caractère bourgeois et familier est tellement naturel à Durer que le maître n'est
pas sans éprouver quelque embarras quand certains épisodes de la pieuse légende qu'il traduit
sur le bois l'obligent à faire effort pour s'en écarter. A preuve cette planche représentant
l'apparition de l'ange qui ordonne à saint Joachim d'aller rejoindre sainte Anne à la porte d'Or,
et dont nous offrons à nos lecteurs une reproduction.
Disons ici que cette reproduction a été obtenue par un procédé nouveau, fruit de vingt
années de recherches, et qui constitue un progrès notable, s'il ne réalise pas l'idéal. Il consiste
dans le transport sur pierre de la gravure originale, sans aucune détérioration de celle-ci,
superposition mathématique, décalque de chaque trait de la gravure sur un papier semblable,
avec une encre identique, enfin un fac-similé auquel il ne manque guère que le prestige de
l'origine et qui donne l'idée d'une continuation de tirage.
L'inventeur de ce procédé, M. P. W. Van de Weijer, imprimeur-lithographe à Utrecht, a
droit à la reconnaissance de tous les iconophiles, de ceux du moins qui n'ont pas l'espoir d'aller
à Corinthe, car si les gravures sur bois de Durer sont des merveilles, il n'est malheureusement
pas donné à tout le monde de se les procurer.
Eugène Véron.
L'ART.
Indépendamment' de son mérite technique, cette suite offre un intérêt tout particulier à raison de
la façon toute personnelle dont le maître concevait la Vierge. « Toutes les fois qu'il représente la
mère du Sauveur », dit M. Thausing « il la met directement et uniquement en rapport avec
Jésus enfant; c'est là toute l'importance qu'il lui attribue. La plupart du temps Marie ne s'occupe
que de son fils... La Vierge de Durer n'a pas cette indépendance, cette grâce, ce charme matériel
que possède la Vierge des maîtres italiens. Elle ne garde même pas longtemps l'auréole. On
dirait une simple mère, comme on en rencontrait chaque jour à Nuremberg... Elle a l'air d'une
honorable bourgeoise allemande... » On ne saurait apprécier plus exactement le caractère de ces
compositions. Ce caractère bourgeois et familier est tellement naturel à Durer que le maître n'est
pas sans éprouver quelque embarras quand certains épisodes de la pieuse légende qu'il traduit
sur le bois l'obligent à faire effort pour s'en écarter. A preuve cette planche représentant
l'apparition de l'ange qui ordonne à saint Joachim d'aller rejoindre sainte Anne à la porte d'Or,
et dont nous offrons à nos lecteurs une reproduction.
Disons ici que cette reproduction a été obtenue par un procédé nouveau, fruit de vingt
années de recherches, et qui constitue un progrès notable, s'il ne réalise pas l'idéal. Il consiste
dans le transport sur pierre de la gravure originale, sans aucune détérioration de celle-ci,
superposition mathématique, décalque de chaque trait de la gravure sur un papier semblable,
avec une encre identique, enfin un fac-similé auquel il ne manque guère que le prestige de
l'origine et qui donne l'idée d'une continuation de tirage.
L'inventeur de ce procédé, M. P. W. Van de Weijer, imprimeur-lithographe à Utrecht, a
droit à la reconnaissance de tous les iconophiles, de ceux du moins qui n'ont pas l'espoir d'aller
à Corinthe, car si les gravures sur bois de Durer sont des merveilles, il n'est malheureusement
pas donné à tout le monde de se les procurer.
Eugène Véron.