CHRONIQUE
ÉTRANGÈRE
Angleterre. — La National Gallery de Londres a fait
quelques acquisitions nouvelles : un Paysage (vue de Gordale
Scar dans le Yorkshire), par James Ward, R. A., tableau de
dimensions exceptionnelles, peint pour le premier lord Ribbles-
dale et dans ses propriéte's ; un Intérieur d'étable, par George
Morland, donné par M. Thomas Birch Wolfe, de Brighton, qui
a fait don également d'un portrait de son oncle, feu le Rév. Sir
Henry Bate Dudley, à qui appartenait précisément le Morland;
ce portrait est l'œuvre de Gainsborough, dont sept vigoureux
paysages, dessinés aux crayons noir et blanc, ont été aussi
donnés à la National Gallery par M. Wolfe; un Gérard David,
le volet droit d'un triptyque, qui aurait été exécuté pour la cha-
pelle de Saint-Jean-Baptiste et Sainte-Marie-Madeleine en
l'église de Saint-Donatien, à Bruges, et commandé au peintre
par Bernardino de Salviatis, chanoine de cette église en 1501
et 1502 ; ce fragment de tableau d'autel représente le chanoine
donateur agenouillé en prières et entouré des saints ses patrons.
Ce morceau appartenait à feu M. Richard Barrett, de Lee
Priory (Kent); à la vente de sa collection, en 1859, il fut acheté
pour 551 1. 5 s. (15,781 fr. 25) par M. White.
— La National Gallery d'Ecosse a fait l'acquisition d'une
étude de Paul Véronèse, la Piscine de Bethsaïda; elle a acquis
aussi le tableau de feu R. T. Ross, R. S. A., Sunshine, œuvre
capitale de cet artiste.
— On assure que le gouvernement a promis au British
Muséum 2,000 1. st., qui seront affectées à l'exploration des
ruines de Ninive, sous la direction de M. Rassam.
— Les dessins admis au concours national d'art ont été
exposés le 12 août au musée de South Kensington. Ils étaient
au nombre de 1,400, choisis parmi les 138,000 dessins qu'ont
fournis les écoles d'art du gouvernement. Nous ferons connaître
les résultats de ce concours, qui permet d'apprécier l'efficacité
des réformes introduites depuis quelques années en Angleterre
dans l'enseignement du dessin.
— Le duc de Westminster a généreusement résolu d'ouvrir
son magnifique hôtel, Grosvenor House, à toutes les personnes
qui, à un titre quelconque, s'occupent d'art décoratif. Grosvenor
House restera ouvert, en août et septembre, tous les jours,
même le dimanche. Décidément la Sunday Society ne prêche
pas dans le désert. C'est le secrétaire de la Society of Arts qui
déli vre les billets d'admission. On ne saurait trop féliciter le
noble duc de cette libérale et patriotique résolution. Du reste,
si nos souvenirs sont exacts, ce n'est pas la première fois qu'il
donne pareil exemple.
—■ M. Alma-Tadema, qui se consacre depuis quelques
années à l'archéologie romaine, n'est pas sans revenir de temps
en temps à ses premières amours, c'est-â-dire aux tragédies
mérovingiennes, à l'histoire de Chilpéric et de Frédégonde, sans
parler des Pharaons de nous ne savons plus quelle dynastie, qui
ont également contribué à fonder sa réputation. C'est encore
Frédégonde qui a fourni le sujet d'un tableau que le peintre a
envoyé dernièrement à l'exposition de Berlin, et qui repré-
sente cette très-peu noble et encore moins honneste mais illustre
dame du vi° siècle, épiant, au lendemain du second mariage de
Chilpéric, l'infortunée Galswinthe qu'elle se propose d'assas-
siner à la prochaine occasion, afin de la supplanter. C'est un
tableau à deux compartiments : d'un côté la noce royale, Chil-
péric et sa nouvelle épouse, recevant sur la place publique les
hommages du peuple et du clergé ; de l'autre, dans sa chambre,
dont la fenêtre donne sur la place, Frédégonde attirée par le
bruit, soulevant le rideau pour contempler la scène, et, toute
frémissante d'ambition, d'envie et de fureur concentrée, rumi-
nant déjà ses criminels projets. On devine un contraste saisissant
entre cette figure sinistre de Frédégonde, seule, à demi nue, —
car elle vient d'interrompre sa toilette pour regarder ce qui se
passe au dehors, — et l'éclat tumultueux de la fête nuptiale.
Nous ne serions pas surpris que l'artiste, à qui Frédégonde a
généralement porté bonheur, eût trouvé là un de ses plus légi-
times succès.
— Le troisième congrès annuel de la Société archéologique
de Bristol et du Gloucestershire a été clos après une session
bien remplie, et après diverses excursions à Westbury et dans
les environs. Parmi les mémoires dont il a été donné lecture
au congrès, VAthenœum signale ceux de M. R. J. King sur la
cathédrale de Bristol, du chanoine Norris sur l'église de Red-
cliff, et de M. John Taylor sur la collégiale de Westbury.
Belgique. — Un concours important vient d'être jugé à
Anvers. Le sujet du concours était une sorte de palais des
beaux-arts qui sera élevé dans cette ville par suite de la résolu-
tion prise, il y a déjà quelque temps, de déplacer le musée, dont
les chefs-d'œuvre, dans leur local actuel, ne sont pas suffisam-
ment à l'abri de l'incendie, — divers sinistres l'ont prouvé. Le
jury nommé, moitié par l'Etat, moitié par la ville, a été una-
nime à accorder le premier rang à MM. Jacques Winders, le
deuxième à M. Blomme, le troisième à M. Van der Hegge, le
quatrième à M. Jean de Coster, le cinquième à M. Joseph
Schadde, et le sixième à M. Ernest Dieltiens. Sauf M. Van der
Hegge, qui est de Bruxelles, tous les lauréats sont Anversois. Il
résulte du rapport du jury que tous ont dépassé, dans leurs
plans et devis, les sommes allouées pour l'érection du monu-
ment. En conséquence, la ville les invite à modifier leurs plans,
en tenant compte du maximum de dépense arrêté par les auto-
rités compétentes. Les six plans modifiés seront soumis à un
nouveau concours.
Italie. — Une exposition internationale aura lieu à Milan
l'année prochaine. Une année seulement après l'Exposition uni-
verselle de Paris, c'est peut-être un peu tôt, mais Italia fara da
se, et le succès de l'exposition parisienne semble stimuler le zèle
et l'ambition des Milanais. L'exposition future a déjà un organe,
l'Eco del progresso. D'après ce journal, elle sera d'un tiers plus
grande que n'importe quelle exposition précédente; l'espace mis
à la disposition des exposants sera d'un quart plus vaste qu'à
Paris. Le bâtiment principal occupera une surface d'environ
300 mètres carrés, il aura la hauteur d'une maison de cinq
étages. Ce bâtiment sera divisé en vingt galeries d'environ
300 mètres de longueur, dont huit seront consacrées aux beaux-
arts, tant anciens que modernes. Les constructions, dans le
style de l'architecture lombarde, survivront à l'exposition, dont
l'ouverture est fixée au iC1' avril 1879. On compte sur un grand
nombre d'envois de l'exposition de Paris, mais il faut espérer
que ces envois ne seront pas le seul élément d'attraction de
l'exhibition milanaise, à laquelle nous souhaitons, cela va sans
dire, un très-grand succès. Le directeur général est M. Frédérick
Guscetti, un Américain d'origine italienne.
Suisse. — Une exposition de plusieurs œuvres de François
Diday est ouverte à l'Athénée de Genève. Elle comprend quel-
ques-unes des premières esquisses du peintre, et un certain
nombre de tableaux, parmi lesquels un paysage qui pourrait
bien être son dernier ouvrage, car il a été peint en novem-
bre 1877, très-peu de temps avant la mort de l'artiste.
Le DirecteurGérant, EUGÈNE VÉRON.
ÉTRANGÈRE
Angleterre. — La National Gallery de Londres a fait
quelques acquisitions nouvelles : un Paysage (vue de Gordale
Scar dans le Yorkshire), par James Ward, R. A., tableau de
dimensions exceptionnelles, peint pour le premier lord Ribbles-
dale et dans ses propriéte's ; un Intérieur d'étable, par George
Morland, donné par M. Thomas Birch Wolfe, de Brighton, qui
a fait don également d'un portrait de son oncle, feu le Rév. Sir
Henry Bate Dudley, à qui appartenait précisément le Morland;
ce portrait est l'œuvre de Gainsborough, dont sept vigoureux
paysages, dessinés aux crayons noir et blanc, ont été aussi
donnés à la National Gallery par M. Wolfe; un Gérard David,
le volet droit d'un triptyque, qui aurait été exécuté pour la cha-
pelle de Saint-Jean-Baptiste et Sainte-Marie-Madeleine en
l'église de Saint-Donatien, à Bruges, et commandé au peintre
par Bernardino de Salviatis, chanoine de cette église en 1501
et 1502 ; ce fragment de tableau d'autel représente le chanoine
donateur agenouillé en prières et entouré des saints ses patrons.
Ce morceau appartenait à feu M. Richard Barrett, de Lee
Priory (Kent); à la vente de sa collection, en 1859, il fut acheté
pour 551 1. 5 s. (15,781 fr. 25) par M. White.
— La National Gallery d'Ecosse a fait l'acquisition d'une
étude de Paul Véronèse, la Piscine de Bethsaïda; elle a acquis
aussi le tableau de feu R. T. Ross, R. S. A., Sunshine, œuvre
capitale de cet artiste.
— On assure que le gouvernement a promis au British
Muséum 2,000 1. st., qui seront affectées à l'exploration des
ruines de Ninive, sous la direction de M. Rassam.
— Les dessins admis au concours national d'art ont été
exposés le 12 août au musée de South Kensington. Ils étaient
au nombre de 1,400, choisis parmi les 138,000 dessins qu'ont
fournis les écoles d'art du gouvernement. Nous ferons connaître
les résultats de ce concours, qui permet d'apprécier l'efficacité
des réformes introduites depuis quelques années en Angleterre
dans l'enseignement du dessin.
— Le duc de Westminster a généreusement résolu d'ouvrir
son magnifique hôtel, Grosvenor House, à toutes les personnes
qui, à un titre quelconque, s'occupent d'art décoratif. Grosvenor
House restera ouvert, en août et septembre, tous les jours,
même le dimanche. Décidément la Sunday Society ne prêche
pas dans le désert. C'est le secrétaire de la Society of Arts qui
déli vre les billets d'admission. On ne saurait trop féliciter le
noble duc de cette libérale et patriotique résolution. Du reste,
si nos souvenirs sont exacts, ce n'est pas la première fois qu'il
donne pareil exemple.
—■ M. Alma-Tadema, qui se consacre depuis quelques
années à l'archéologie romaine, n'est pas sans revenir de temps
en temps à ses premières amours, c'est-â-dire aux tragédies
mérovingiennes, à l'histoire de Chilpéric et de Frédégonde, sans
parler des Pharaons de nous ne savons plus quelle dynastie, qui
ont également contribué à fonder sa réputation. C'est encore
Frédégonde qui a fourni le sujet d'un tableau que le peintre a
envoyé dernièrement à l'exposition de Berlin, et qui repré-
sente cette très-peu noble et encore moins honneste mais illustre
dame du vi° siècle, épiant, au lendemain du second mariage de
Chilpéric, l'infortunée Galswinthe qu'elle se propose d'assas-
siner à la prochaine occasion, afin de la supplanter. C'est un
tableau à deux compartiments : d'un côté la noce royale, Chil-
péric et sa nouvelle épouse, recevant sur la place publique les
hommages du peuple et du clergé ; de l'autre, dans sa chambre,
dont la fenêtre donne sur la place, Frédégonde attirée par le
bruit, soulevant le rideau pour contempler la scène, et, toute
frémissante d'ambition, d'envie et de fureur concentrée, rumi-
nant déjà ses criminels projets. On devine un contraste saisissant
entre cette figure sinistre de Frédégonde, seule, à demi nue, —
car elle vient d'interrompre sa toilette pour regarder ce qui se
passe au dehors, — et l'éclat tumultueux de la fête nuptiale.
Nous ne serions pas surpris que l'artiste, à qui Frédégonde a
généralement porté bonheur, eût trouvé là un de ses plus légi-
times succès.
— Le troisième congrès annuel de la Société archéologique
de Bristol et du Gloucestershire a été clos après une session
bien remplie, et après diverses excursions à Westbury et dans
les environs. Parmi les mémoires dont il a été donné lecture
au congrès, VAthenœum signale ceux de M. R. J. King sur la
cathédrale de Bristol, du chanoine Norris sur l'église de Red-
cliff, et de M. John Taylor sur la collégiale de Westbury.
Belgique. — Un concours important vient d'être jugé à
Anvers. Le sujet du concours était une sorte de palais des
beaux-arts qui sera élevé dans cette ville par suite de la résolu-
tion prise, il y a déjà quelque temps, de déplacer le musée, dont
les chefs-d'œuvre, dans leur local actuel, ne sont pas suffisam-
ment à l'abri de l'incendie, — divers sinistres l'ont prouvé. Le
jury nommé, moitié par l'Etat, moitié par la ville, a été una-
nime à accorder le premier rang à MM. Jacques Winders, le
deuxième à M. Blomme, le troisième à M. Van der Hegge, le
quatrième à M. Jean de Coster, le cinquième à M. Joseph
Schadde, et le sixième à M. Ernest Dieltiens. Sauf M. Van der
Hegge, qui est de Bruxelles, tous les lauréats sont Anversois. Il
résulte du rapport du jury que tous ont dépassé, dans leurs
plans et devis, les sommes allouées pour l'érection du monu-
ment. En conséquence, la ville les invite à modifier leurs plans,
en tenant compte du maximum de dépense arrêté par les auto-
rités compétentes. Les six plans modifiés seront soumis à un
nouveau concours.
Italie. — Une exposition internationale aura lieu à Milan
l'année prochaine. Une année seulement après l'Exposition uni-
verselle de Paris, c'est peut-être un peu tôt, mais Italia fara da
se, et le succès de l'exposition parisienne semble stimuler le zèle
et l'ambition des Milanais. L'exposition future a déjà un organe,
l'Eco del progresso. D'après ce journal, elle sera d'un tiers plus
grande que n'importe quelle exposition précédente; l'espace mis
à la disposition des exposants sera d'un quart plus vaste qu'à
Paris. Le bâtiment principal occupera une surface d'environ
300 mètres carrés, il aura la hauteur d'une maison de cinq
étages. Ce bâtiment sera divisé en vingt galeries d'environ
300 mètres de longueur, dont huit seront consacrées aux beaux-
arts, tant anciens que modernes. Les constructions, dans le
style de l'architecture lombarde, survivront à l'exposition, dont
l'ouverture est fixée au iC1' avril 1879. On compte sur un grand
nombre d'envois de l'exposition de Paris, mais il faut espérer
que ces envois ne seront pas le seul élément d'attraction de
l'exhibition milanaise, à laquelle nous souhaitons, cela va sans
dire, un très-grand succès. Le directeur général est M. Frédérick
Guscetti, un Américain d'origine italienne.
Suisse. — Une exposition de plusieurs œuvres de François
Diday est ouverte à l'Athénée de Genève. Elle comprend quel-
ques-unes des premières esquisses du peintre, et un certain
nombre de tableaux, parmi lesquels un paysage qui pourrait
bien être son dernier ouvrage, car il a été peint en novem-
bre 1877, très-peu de temps avant la mort de l'artiste.
Le DirecteurGérant, EUGÈNE VÉRON.