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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 4.1878 (Teil 3)

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Chasrel, T.: Le Musée des arts décoratifs - conférence de M. René Ménard, [2]
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https://doi.org/10.11588/diglit.16910#0298

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LE MUSÉE DES ARTS DÉCORATIFS

CONFERENCE DE M. RENÉ MÉNARD
(suite et fin '.)

Quand une idée est juste, quand une ide'e est mûre, disait
M. René Ménard dont nous achevons aujourd'hui de résumer la
conférence, elle ne tarde pas indéfiniment à se faire jour.

C'est à un journal, au journal l'Art, qu'appartient l'honneur
d'avoir donné une impulsion décisive à la création d'un Musée
des Arts décoratifs en ouvrant une souscription dans ses bureaux.
Tous les collaborateurs du journal se sont inscrits sur les pre-
mières listes. Les souscriptions recueillies par l'Art se sont
élevées à environ 6,000 francs. La somme était insuffisante pour
lancer l'affaire, mais l'idée était lancée.

— Ici qu'il nous soit permis d'interrompre un instant M. René
Ménard pour le remercier de l'hommage qu'il a bien voulu rendre
h l'initiative de notre publication en faveur du Musée des Arts
décoratifs. Cet hommage franc et cordial ne nous étonne pas
de sa loyauté, mais pour n'en être pas touchés il nous faudrait
être complètement blasés sur les manifestations sympathiques et
les actes de justice, et nous pouvons bien avouer que nous n'en
sommes pas là. Cela dit, reprenons notre analyse et cette fois
pour la mener jusqu'au terme de la conférence. —

L'idée était lancée. De grands personnages, tels que M. le
duc d'Audiffret-Pasquier et M. le duc de Chaulnes, ont tenu à
honneur de prêter leur appui à une œuvre qu'ils considéraient
comme avantageuse pour le pays. Un comité de patronage s'est
constitué. Toute préoccupation politique étant exclue, les opi-
nions les plus différentes se sont groupées dans un but commun
de patriotisme. Mais beaucoup de bonne volonté et quelques
grands noms ne suffisaient pas, et les choses auraient pu traîner
longtemps si l'Union centrale des beaux-arts appliqués à l'indus-
trie n'avait apporté à l'œuvre le concours de son expérience et
de son immense popularité. Dès lors, tout change de face. Ce
qui était vague devient précis, et le projet se transforme en
réalité. Le président de l'Union centrale, M. Edouard André,
souscrit pour 25,000 francs. Cet exemple de libéralité trouve
aussitôt des imitateurs dans toutes les classes de la société, et
un généreux Anglais que la France trouve toujours prêt quand
il y a quelque bonne œuvre à accomplir, Sir Richard Wallace
souscrit pour 10,000 francs. (Le nom de Sir Richard Wallace a
été salué par les applaudissements unanimes et sympathiques de
l'auditoire.) En quelques jours la souscription atteignait le chiffre
de 150,000 francs.

L'excellent conférencier expose alors les principes essentiels
des statuts de la société qui a pris en main l'œuvre du Musée
des Arts décoratifs. Il insiste notamment sur le caractère large-
ment national du nouveau Musée, dont les collections, centrali-
sées mais non localisées et immobilisées à Paris, sont destinées
à circuler par toute la France et à être exposées dans toutes nos
villes manufacturières 2. Il insiste également sur l'inaliénabilité
des objets appartenant au Musée, lesquels doivent revenir à
l'Etat dans l'hypothèse d'une dissolution de la société.

Les objets dont se composeront les collections du Musée
peuvent se diviser en trois catégories : i° Objets donnés, —cela
viendra ; — objets achetés, — cela commence, en effet l'on peut
voir à l'Exposition universelle un certain nombre de pièces
achetées pour le Musée des Arts décoratifs. 2° Objets, ou collec-
tions, prêtés par des amateurs. La collection de tableaux exposée
au pavillon de Flore appartient à cette série temporaire et inces-
samment renouvelable; elle ne rentre du reste que d'une
manière indirecte dans le plan des organisateurs du Musée qui
ont surtout en vue les applications industrielles de l'art ; elle est
surtout un moyen de propagande et un encouragement aux
souscriptions. 30 Reproductions et moulages des chefs-d'œuvre
des collections étrangères, afin que l'ouvrier puisse, grâce à la
perfection des nouveaux procédés de reproduction3, se rendre
compte des merveilles disséminées dans toute l'Europe, telles
que les richesses du Musée de Naples provenant des fouilles de
Pompei, celles de Rome où abondent les chefs-d'œuvre de l'art
étrusque, celles du Musée de Saint-Pétersbourg, le plus riche
au point de vue de l'art grec, ou bien encore la fameuse salière
du Trésor impérial et royal de Vienne 4.

Le Musée des Arts décoratifs aura aussi sa bibliothèque.
Nous avons déjà la Bibliothèque nationale qui renferme tout,
ou peu s'en faut, mais une telle bibliothèque ne peut rendre
service qu'à un homme déjà instruit. L'ouvrier s'y perd, le jeune
artisan s'y noie. La bibliothèque du Musée des Arts décoratifs
leur sera plus utile, parce que, bureau de renseignements en
même temps que collection de livres, elle sera plus à leur portée.

La richesse d'un Musée dépend de la beauté des collections
mais aussi du classement. Le titre même du Musée des arts
décoratifs implique un classement qui subordonne la matière
première à la décoration. Les organisateurs du Musée ont com-
pris qu'il importait de montrer les transformations que subit la
matière brute pour former non pas seulement un objet mais un
de ces ensembles décoratifs qui caractérisent une époque ou un
peuple. Mais ce sera pour plus tard. Pour le moment, le classe-
ment groupe les objets en deux sections distinctes : décor de
l'habitation, décor intérieur et extérieur ; — décor de la personne,
vêtement, parure, armes, etc.

Tel est le côté pratique du nouveau Musée. Mais l'œuvre
offre aussi un autre aspect, le côté moral. « Dans des temps
malheureux pour notre pays, a dit M. René Ménard, des hommes
que je n'ai pas mission de qualifier ont prononcé le mot de
décadence. Ce mot implique deux choses ; il signifie à la fois
abaissement de l'intelligence et affaissement du sens moral. Pour
l'intelligence, l'Exposition a déjà répondu. Quant à l'affaissement
du sens moral, je remarque que dans aucun temps et chez aucune
autre nation l'on n'a vu pareil élan uni à une pareille abnégation
pour développer toutes les ressources vives d'un pays et com-
battre l'ignorance sous toutes ses formes. Pas le moindre symp-

1. Voir VArt, 4» année, tome III, pages 214 et 237.

2. Nous appelons tout particulièrement l'attention de la province sur ce principe fécond qui fera la fortune du Musée des Arts décoratifs comme il a fait le
succès du South Kensington Muséum, comme il fait à Nuremberg la popularité du Musée industriel bavarois, ainsi que nous l'expliquait dernièrement notre
collaborateur M. Stockbauer, sous-directeur de cet établissement. (Voir page 88.)

3. Comme l'a fait remarquer M. René Ménard, l'exposition du South Kensington Muséum dans la section anglaise montre que les nouveaux procédés de
reproduction sont appelés à rendre de réels services. Nous signalerons aussi dans la section française l'exposition de M. Caussinus, de la Drôme (classe xi, groupe 2),
dont les plâtres bronzés, colorés, jaspés, imitant les matières les plus diverses, bois, marbras et métaux, nous paraissent dignes d'attirer l'attention des organisâtes s
de musées de moulages, musées industriels, musées scolaires, etc.

4. Voir l'Art, }• année, tome IV, page 201.
 
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