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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 4.1878 (Teil 3)

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Tardieu, Charles: La peinture à l'Exposition universelle de 1878, [2]: L'École franҫaise
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https://doi.org/10.11588/diglit.16910#0203

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180 L'ART.

de la femme ». Elles font pâlir les nus les plus réussis de l'exposition. Il est certain qu'en
comparaison, et même sans comparaison, les baigneuses groupées par M. Bouguereau dans son
dernier tableau, Nymphée, exhalent une vague odeur de baudruche. Devant les nymphes et
naïades de M. Henner on oublie palette et pinceau. Le peintre a le sens des carnations féminines;
il les fait frémir et palpiter ; il leur donne non pas seulement le ton mais en quelque sorte la
moiteur satinée de la vie. C'est quelque chose, c'est beaucoup. Mais quelle pauvreté d'invention! Quoi
toujours cette même naïade rêvant assise au bord d'un lac ténébreux, ou couchée sur un divan noir,
et le plus souvent vue de dos ! Le motif est charmant, nous en convenons volontiers, mais se peut-il
qu'il suffise à réaliser l'idéal d'un artiste aussi distingué? Décidément ce n'est pas tout d'être peintre,
et s'il était nécessaire de le démontrer, l'exposition de M. Henner fournirait un argument péremp-
toire. L'artiste lui-même a compris la nécessité de rassurer ses admirateurs en essayant d'une œuvre

En vue de Rome.
Tableau de Luminais. (Exposition universelle de 1878.)
Dessin d'Albert-Duvivier. Gravure de Smeeton.

plus complexe qui exigeât sinon beaucoup d'imagination, du moins un peu de composition, et s'il
s'est avisé de grouper sur une toile relativement vaste la collection complète des Naïades qu'il
nous avait déjà présentées l'une après l'autre depuis quelques années, l'effort est louable, et
comme toujours les chairs sont d'une tonalité ambrée dont le charme est irrésistible. Mais ces
jeunes personnes semblent singulièrement gênées de se trouver en si grand nombre au bord de
leur lac traditionnel. Habituées à prendre leurs aises dans la solitude, elles ne savent trop comment
se caser sur l'herbe, comment grouper dans l'eau leurs formes faites pour le monologue et non
pour les ensembles. De là un méli-mélo de torses, de bras et de jambes qui n'est pas du plus
heureux effet. Elles en veulent sans doute à M. Henner de les avoir arrachées à leur isolement
commode, et le fait est qu'il n'y a rien gagné. Heureusement ses portraits, par exemple celui de
M'"e H... et sa Magdeleine du Salon, son chef-d'œuvre, compensent cette mésaventure.

Ce que nous disons de M. Henner, nous avons le droit de le répéter, et à plus forte raison,

1. Voir l'Art, 1" année, tome II, page 222.
 
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