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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 4.1878 (Teil 3)

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Véron, Eugène: Le Salon de Paris 1878, [7]: scènes de la vie contemporaine
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https://doi.org/10.11588/diglit.16910#0236

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LE SALON DE PARIS. 207

il y a trop de détails. Quant à la couleur, elle papillote et tire l'œil. M. Protais est toujours
l'immuable Protais que tout le monde sait par cœur, le fidèle portraitiste du troupier. M. Berne-
Bellecour ne connaît pas moins bien le soldat. Il le campe à merveille. Regardez dans les
Tirailleurs, le grand, au premier plan, dont on ne voit que le dos. Ce dos est vivant, malgré la
capote de zinc qui le recouvre ; il cause, cela se sent, rien qu'à le regarder, quand on ne le
lirait pas sur le visage des voisins. Ce sentiment de l'attitude, cette faculté de saisir le geste vrai
est à mes yeux une qualité des plus précieuses. C'est bien dommage que cette peinture soit si
mince, cette facture si petite et si mesquine. C'est un peu le défaut commun de nos peintres de
soldats. La furia francese n'existerait-elle donc plus, pas même en peinture?

Le tableau de M. Lançon, Au moment de quitter Vétape, est, comme toujours, plein de
conscience et d'observation. Cela a été pris sur nature et ces maréchaux ferrants mettent à ce
qu'ils font une attention qu'on ne retrouve pas toujours au même degré chez leurs collègues à

I

Le Cloîtré.

Dessin d'Alex. Brun d'après le tableau de James Bertrand. (Salon de 1878.)

grosses épaulettes. La composition est bonne, par la raison que tout se rapporte à un fait
unique. Le dessin est juste et vigoureux. C'est donc un bon tableau ? Loin de là. Que lui
manque-t-il donc ? La lumière. Tout cela est sombre, tout cela est noir, tout cela est faux.
M. Lançon a eu beau loger ses soldats dans une espèce de ruelle étroite et sombre ; cette
lumière-là n'est pas seulement atténuée, elle n'est pas vraie. Comparez les eaux-fortes de
M. Lançon avec ses tableaux. Dans les premières, il tire des effets, un peu durs et monotones
parfois, mais aussi parfois très-saisissants, des oppositions d'ombre et de lumière. Mais dans sa
peinture, il n'y a que de l'ombre. Sa gamme devient d'une étroitesse étrange. Il cherche son
modelé toujours par le noircissement des noirs, jamais par l'éclaircissement des clairs, et quoiqu'il
n'arrive pas dans les ombres aux charbonnages absolus de l'ancienne manière de M. Ribot, en
somme, il a encore moins de lumière et l'on dirait qu'il peint dans une cave encore plus sombre.
Ce n'est pas un défaut d'œil, ni une erreur de théorie, puisque en gravure il admet l'existence
du soleil et en tient compte. C'est donc un défaut de procédé. Pourquoi n'en pas changer?

Eugène Véron.

{La suite prochainement.)
 
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