NFIN la Mer est calme au cœur de l'Hyver,
après avoir esté si long-temps agitée. Le Ciel eft
"serein, & les vents sont retenus dans leurs antres
spacieux, d'où n'osant sortir, il semble qu'ils le
dépitent contre les rochers du mont qui les enser-
me» Ils murmurent autour de leur closture : mais
Eole empesche qu'ils ne s'échappent, & resserre
de prisons & de chaînes bruyantes tempertes. Il tient son seeptre
à la main pour modérer leur courage, & reprimer leur surie : car s'il
ne lefaisoit, ils sont si rapides qu'ils ébranleroient la Terre & le Ciel
avec la Mer; Se d'un puissant essort, ils les entraineroient avec eux
par Ievuide del'ain Les Alcions appîanissent les slots, oupluftoft,
3a Mer devient tranquile, comme si elle portoit du respeâ; à la n a is-
san ce de ces petits Oyseaux. N'appercevez-vous pas un nid a fiez pro-
che du rivage qu'une haleine molle agite doucement sur l'eau ? C'eft
un ches-d'œuvre de la Nature, que le malle & la semelle ont bafty
pour pondre leurs œuss, Se pour saire éclore leurs petits 3 non point
en petrrsfant de la sange comme les Hirondelles, pour le maçonner
contre des murailles, ou contre des solives de quelque plancher, ny
en travaillant de tous ses membres comme la Mouche à miel, qui de
ses six pieds saçonne les six angles de son petit logis,* mais avec leseul
outil de leur bec, sans le secours de quelque autre main que ce foi t.
Cependent (ô merveille ! ) quel édisice eft-ce que sont les Alcions?
c'est en vérité une chose si rare qu'on auroit bien de Ja peine à le croi-
re: car ils baslifîent comme un Charpentier de navires d'une façon
toute particulière, un certain vaifseau qui ne se peut renverfer, ny en-
soncer dans l'eau, affemblant Se entrelafsant les arêtes d'un petit poif-
fon qu'on appelle Aiguille de Mer, les unes eftcnduësen longueur
en guifede la chaîne d une toile, Se les autres en travers , comme ser-
vant de trame, puis redoublent cette tiffure, Se la courbent en forme
ronde un peu longuette, reffemblant prefque à une barque de Pe-
scheur. Quand l'ouvrage est parfait, ils l'approchent exprès du riva-
ge, où les ssots peuvent batre, asin que s'en trouvant doucement
K k heur-