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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 2.1876 (Teil 3)

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Ballu, Roger: Les peintures de M. Bonnat au palais de justice
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https://doi.org/10.11588/diglit.16691#0151

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L'ART.

On a pu voir, l'année dernière, dans la salle de Melpomène, à l'exposition des œuvres com-
mandées par la Ville de Paris, une partie de la décoration de la Cour d'assises. Ai-je besoin de dire
que lors de la mise en place, l'artiste a fait des retouches importantes, et que pour porter un jugement
autorisé sur ces peintures, il faut les voir dans le milieu auquel elles étaient destinées?

Au-dessus du prétoire se trouve le motif principal encadré dans un ovale. Il représente la Justice
entourée du Crime et de l'Innocence. Assise sur un trône, la Justice étend le bras gauche comme pour
protéger l'Innocence, tandis que la main droite tient la poignée de la grande épée debout dont la vue

Le Christ.
Gravure de Fromenr, d'après le tableau de Bonnat.
(Palais de Justice de Paris.)

terrasse le Crime. Le manteau qui la drape, d'un beau ton de bleu foncé, se détache en vigueur sur
l'azur pâle du fond. Ces deux bleus, rapprochés avec hardiesse, loin de se nuire, sont d'un très-bon
effet. J'aime moins la tête, elle manque de cette expression de noblesse, de cette sévérité calme qu'on
voudrait y voir; mais cette restriction faite, la figure a un grand caractère, le mouvement est large et
simple.

L'Innocence à genoux, dans une attitude de prière, confiante, tend les bras vers la Justice. Jamais
M. Bonnat n'a mis dans une figure plus de distinction et de sentiment. Robuste d'ordinaire, sa pein-
ture se fait ici douce, presque tendre ; son pinceau a des délicatesses amoureuses pour cette nudité et
pour cette pudeur. La tête, présentée de profil et un peu en raccourci, ne laisse pas voir la physio-
nomie, mais aux tons nacrés du corps, à la fraîcheur de la peau baignée de rose, à l'élégance des
formes, à la chasteté du maintien on reconnaît l'Innocence. La belle éplorée, toute nue, laisse sa che-
velure d'un blond ardent tomber éparse sur ses épaules. Les mains jointes ne demandent pas un pardon,
elle n'a que faire d'un pardon, la candide! Elle supplie la Justice de laisser tomber sur elle un de ses
regards. Comment, en la voyant si belle de pureté, ne pas avoir hâte de la délivrer de son implacable
ennemi, le Crime ?

Il est là, lui, à droite. Ce corps vigoureux, athlétique, noueux de muscles, aux membres puissants,
aux chairs colorées et hâlées par le grand air et les aventures, contraste avec la féminine blancheur
 
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