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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 2.1876 (Teil 3)

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Concours définitif des Grands Prix de Rome
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https://doi.org/10.11588/diglit.16691#0171

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CONCOURS DÉFINITIF DES GRANDS PRIX DE ROME

POUR L'ANNEE 1876.

culpture. — Le sujet du concours de sculp-
ture était » Jason, fils d'OEson, enlevant la Toison
d'or, après avoir endormi, au moyen d'un breu-
vage magique, le dragon qui gardait l'arbre au-
quel elle était suspendue. »
Ce qui frappe tout d'abord, quand on vient de voir les toiles
du concours de peinture, c'est l'incroyable et croissante supério-
rité de nos sculpteurs sur nos peintres. Il y a là un fait vraiment
étrange au premier abord, si l'on songe à tous les encourage-
ments que reçoit la peinture, tandis que les sculpteurs ont à
surmonter des obstacles sans nombre. Le peintre, pour peu
qu'il ait quelque talent ou quelque chance, peut presque du
premier coup se faire une existence facile ; le sculpteur, quelle
que soit son aptitude naturelle, ne peut arriver à la pleine pos-
session de son talent qu'après un long et dur apprentissage ; et
lorsqu'il en est là, souvent il lui reste à lutter encore pendant
bien des années contre l'indifférence du public. Il suffit d'un
tableau passable pour poser un peintre et lui faire une réputation
lucrative. Après plusieurs bonnes statues, le sculpteur ne con-
quiert encore que les suffrages des connaisseurs ; son mérite de-
meure toujours plus ou moins à l'état nébuleux pour le public,
même quand, par acquit de conscience, celui-ci répète les louanges
entendues. C'est seulement quand le statuaire s'est imposé par
beaucoup d'œuvres remarquables, je ne dis pas à l'admiration,
mais à l'attention publique, qu'il peut espérer obtenir celle de
l'Etat et des municipalités, ses seuls clients possibles, et sortir
enfin de l'obscurité relative et souvent de la misère trop réelle à
laquelle il est demeuré condamné pendant quinze 'ou vingt
années.

La sculpture n'est pas une mère qui gâte ses enfants. C'est
justement pour cela qu'ils valent mieux que les autres.

Le n" 1, qui est un des meilleurs morceaux du . concours,
avec les nos 5, 6, 7 et 10, frappe à première vue par la
recherche du mouvement. Jason, renversé en arrière, dans une
attitude qui rappelle peut-être un peu trop les écuyers des che-
vaux de Marly, saisit des deux mains la Toison d'or, en mainte-
nant son regard fixé sur le dragon, comme s'il craignait de le voir
se réveiller. Cette préoccupation du héros, jointe à la vérité un
peu violente du mouvement, donne à l'œuvre un caractère de vie
très-saisissant. On sent là un effort pour échapper à l'académie
convenue. La tête paraît un peu petite, et en se tournant vivement
sur l'épaule elle dessine sur le derrière du cou un pli de peau qui
est désagréable. Le torse est bien campé et la ligne des jambes
est bonne. On pourrait cependant relever un peu de mollesse
dans le modelé général. Les muscles des jambes en particulier
sont bien peu accentués pour un effort aussi subit et pour une
attitude aussi instable. Peut-être même le sculpteur a-t-il voulu
éviter de mettre trop en relief cette instabilité, qui est le défaut
de la composition générale. Il est trop évident que Jason ne
pourra se soutenir dans cette posture au-delà d'un instant.

Le n" 6 est conçu dans le même mouvement que le n° 1. La
nécessité de représenter Jason détachant la Toison constituait
une difficulté grave. Evidemment il fallait que le héros fût
placé au premier plan et vu à peu près de face, tandis que dans
la réalité de l'action imposée le mouvement naturel offre seule-
ment trois alternatives, toutes trois plus ou moins désagréables :
10 Jason tournant le dos au spectateur; 2» Jason vu de face avec
l'arbre au premier plan; 3» Jason de profil avec l'arbre au même
plan. Pour échapper à cette difficulté, la plupart des concur-

on a dû lui imposer une attitude quelque peu contournée , qu'il
ne faut pas trop analyser. Le bras gauche de cette statue est
trop grêle et ce défaut est d'autant plus saillant que la main est un
peu large. En revanche le modelé du dos est excellent.

Le n" 5 ramène un peu trop la toison sur sa tête. Cela forme
un paquet désagréable. Il est vrai qu'à la rejeter un peu de côté,
comme la représente l'esquisse, on s'exposait à rompre l'équilibre
de la figure. Le bras gauche qui tient la Toison est beaucoup
trop court. On peut du reste faire une observation analogue
pour toutes ces statues. Il faut croire que ce défaut existait dans
le modèle qui a posé Jason.

En revanche, les jambes paraissent un peu longues pour le
torse. Cependant l'ensemble de la figure n° 5 et la disposition
de la ligne générale font assez bon effet.

Le n" 7 a esquivé la difficulté du mouvement. C'est un Jason
après le succès, un Jason au repos. Il soulève en l'air, de la
main gauche la toison ; de la droite, à demi baissée, il ' tient
son épée. La cuisse gauche est visiblement trop longue.
Cette statue est certainement une des meilleures, pour l'aspect
général et l'exécution de certains détails; mais malheureusement
elle manque un peu trop d'individualité. Le mouvement général
qui en fait le principal mérite est manifestement emprunté
au David de Mercié. Ce n'est qu'une imitation réussie. C'est
regrettable.

Le mouvement du n° 10 est beaucoup plus discret que celui
des n°» 1 et 6 sans être cependant froid. Jason saisit la Toison de
la main gauche et le couteau de la droite. Les pieds et les mains
sont bons. La jambe droite est un peu plus longue que la gauche.
La ligne générale se développe et se pondère bien, mais la
musculature est un peu sommaire, le faire est lisse et poli, ce
qui donne trop au héros l'air d'un enfant. Le pied gauche, placé
sur la tête du dragon, s'accorde mal avec le sujet.

A propos du dragon, une observation générale. Les concur-
rents semblent s'être entendus pour le dédaigner. C'est un tort.
L'action de Jason ne s'explique pas, si le monstre n'a pas au
moins l'air terrible.

Ces cinq statues sont vraiment remarquables ; il y a long-
temps qu'on n'avait trouvé dans un concours pour le prix de
Rome un pareil sentiment de la forme.

Les cinq autres nous paraissent inférieures, malgré des qua-
lités persistantes d'exécution, le n" 2 particulièrement ; le n° 3
ne vaut guère mieux. C'est une académie froide et sans mouve-
ment. Il donne au fait matériel de couper la corde une impor-
tance exagérée, la posture manque de naturel, et les muscles
sont d'une immobilité qui ne s'explique pas. Le bras tendu qui
tient le glaive est plus court que l'autre, ce qui est d'autant plus
choquant que le contraire serait nécessaire.

Cette absence de mouvement n'est pas moins sensible dans
les nos 8 et 9. Mais ce qui choque le plus, c'est le contraste du
sujet, du nu, de l'action avec le caractère moderne et absolu-
ment réaliste des têtes. Le n° 9 surtout a un de ces visages qui
s'accorderaient beaucoup mieux avec un torse revêtu d'une blouse
blanche, qu'avec la nudité héroïque d'un Apollon à la recherche
de ses rayons lumineux, dérobés par les monstres nocturnes.
Jason en effet n'est pas autre chose qu'une personnification
locale du dieu de la lumière, ce qu'on n'aurait peut-être pas
mal fait d'apprendre aux jeunes concurrents, quand ce n'aurait
été que pour les mettre en garde contre des disparates aussi
choquantes.

Je ne crois pas que le Jason du n" 4 soit réellement d'une

rents ont montré Jason non pas enlevant} mais emportant la toi-
son, ce qui est, dans le fait et en sculpture, infiniment plus aisé, j taille inférieure aux autres, mais il fait l'effet d'un enfant. Il
Pour le pouvoir placer devant l'arbre et le montrer, sinon ; paraît plus petit qu'il n'est en réalité, ce qui est en opposition
de face, au moins de profil, coupant le lien qui attache la Toison, complète avec l'impression que doit produire l'art. Il est immo-
 
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