COURRIER DES PAYS-BAS
{Correspondance particulière de l'Art.)
Première exposition des aquarellistes de La Haye.
— L'exposition rétrospective d'Amsterdam. — La Société
d'aquarellistes, qui s'est formée à la Haye, a ouvert sa première
exposition dans la grande salle de l'Académie de dessin. La
collection est petite mais exquise; elle ne contient que 120 des-
sins. Parmi les exposants étrangers on remarque Biseo, de
Rome, avec deux vues de l'Orient ; Cabianca, de Rome, avec
deux belles aquarelles, Cipriani, également de Rome, avec
une vue de Venise; Herkomer, de Londres, avec son superbe
portrait de jeune enfant, d'un dessin juste et délicat, d'un grand
goût ; Tusquets, de Rome, avec un paysage et une rue à Feren-
tina, d'un coloris brillant.
Les artistes belges sont : MM. Wauters, dont les deux têtes
d'étude surtout offrent les qualités les plus sérieuses des an-
ciens maîtres; Pecquereau, qui a envoyé de jolies vues prises
en Belgique; M. Oyens; M. Hubert qui a exposé des Soldats se
reposant devant le corps de garde} délicieuse aquarelle d'un dessin
spirituel; MM Gabriel, Dell' Acqua, Cluysenaer, Clays qui a
envoyé deux marines dont l'une magistrale.
Aima Tadema a deux aquarelles accomplies ; l'une reproduit
deux têtes de son grand tableau, appartenant à M. Levrève, intitulé
Portraits commandés. La tête qui regarde le tableau, toute
dans l'ombre, est travaillée de main de maître. L'autre repré-
sente une belle dame romaine étendue sur un banc et regardant
les passants. C'est, comme toujours, savant et sûr de dessin,
d'une grande délicatesse ; toutes les étoffes rendues à merveille ;
l'air ambiant autour de la figure couchée, la lumière pénétrant à
travers le rideau et la balustrade en pierre, le costume exquis,
la belle tête de la jeune Romaine, tout cela a un charme indi-
cible. Blommers a exposé deux aquarelles aussi consciencieuses
de rendu que charmantes d'intention et de sentiment. Israëls a
envoyé six dessins où brillent de grandes qualités, surtout dans
la scène intitulée Moedcrs hulp (le petit soutien de sa mère) ;
un portrait d'homme est d'un ton superbe, ainsi qu'un portrait
d'enfant. Bisschop a exposé une aquarelle qui mesure presque
un métré de largeur, et qui est, comme coloris et comme force de
rendu, le nec plus ultra de ce qu'on peut obtenir par le moyen de
l'aquarelle; cela a la vigueur d'un tableau peint.
Les belles marines de Mesdag, les paysages de Mauve,
les vues de villes de J. Maris, d'une vigueur rembranesque et
pleins de mystères; un coin lumineux et frais avec des canards,
par W. Maris ; des fusains poétiques de Bilders ; des fleurs
exquises de Mllc Van de Sande-Bakhuizen, les deux beaux paysages
de son frère, M. Jules Van de Sande-Bakhuizen; ceux de Van
Borselen et de Weissenbruch, les intérieurs magnifiques de Bos-
boom, deux églises et une chaumière, très-forts d'effet et char-
mants de coloris; des paysages très-réussis de M. Du Chattel;
— enfin des vaches superbes de De Haas, des chevaux de Nakken;
des illustrations charmantes de Ch. Rochussen, .ainsi que deux
grandes feuilles représentant des scènes de l'ancienne histoire de
Hollande, pleines d'esprit; de beaux dessins de Sadée, très-sobres
et très-exacts; des pâturages avec bestiaux de Stortenbeker; une
vue des Côtes de la mer Rouge, par M. de Famars Testas; —
voilà quelques-unes des richesses de cette exposition qui est un
très-heureux début.
L'exposition rétrospective, ouverte à Amsterdam, intéresse
vivement les amateurs d'art et de curiosité. Elle a un cachet
tout particulier. On avait organisé déjà plusieurs fois des expo-
sitions semblables ; cette fois on a imaginé de faire une histoire
La Haye, 26 Août.
illustrée d'Amsterdam, du xvie au xix' siècle. Un catalogue
rédigé avec beaucoup de soin et d'érudition en conservera le
souvenir quand les milliers d'objets seront de nouveau dispersés ;
il restera un livre à consulter. L'exposition, établie dans les
salles du Oudemannenhuis (hospice des vieillards, mais où les
vieux ont fait place depuis longtemps aux arts), embrasse onze
groupes dont l'organisation était confiée à onze groupes de
savants, artistes et hommes influents. La direction générale a
été confiée à M. Cuypers, architecte distingué, qui s'en est
acquitté avec autant de goût que de science. Les groupes ou
subdivisions comprennent : i° topographie, plans, cartes; 2"gou-
vernement; 30 la justice; 40 l'état militaire; 50 l'Eglise; 6» le
soin des pauvres; 70 le commerce; 8° l'industrie; 90 l'instruction
et les sciences; io° les beaux-arts; ii° faits remarquables.
Parmi les anciens plans de la ville, etc., catégorie très-riche,
on remarque en premier lieu le plan peint en 1536, par Cor-
nelis Anthoniszoon, le plus ancien qui soit connu; le grand
plan gravé sur bois par le même en 1544, et un dessin en
couleur fait sur l'ordre du roi Philippe II, par Jacob van Deven-
ter. Il y en a encore une soixantaine d'autres. Le dessin géo-
métrique de la ville est complété par des dessins pittoresques et
des croquis, parmi lesquels il y en a de Rembrandt, Bakhuyzen,
Everdingen, W. Van de Velde, Roghman, Van Kessel, Leupenius,
Hulswit, De Beyer, Pronk, de Vlieger, Hobbema; avec quelques
peintures par Ruysdael, Beerstraten, Van der Heyde, Van
Kessel.
Dans la section de la magistrature, il y a une foule de divers
documents concernant la construction de la maison de ville par
Van Campen. Les magistrats eux-mêmes sont représentés par des
peintures de la main de Mieris, Van der Helst, Mierevelt, San-
drart, de Bray, Hodges, Maas, Ovens, De Keyser, Netscher,
Teschbein etc.; on y remarque deux beaux portraits par Th. De
Keyser, représentant Laurens Reael et son épouse, en pied, de
grandeur naturelle; puis par des bustes, il y en a de fort
beaux par Quellinus ; enfin par des gravures et eaux-fortes.
On y voit le cuivre où Rembrandt a tracé le portrait de Six. Des
sceaux, des généalogies, etc., complètent l'histoire des Amster-
damois connus, tels que les Reael, les Backer, les Bicker, Hooft,
Witsen, Valckenier, Utenboogaerd, Tulp, Six, etc., noms bien
connus ne fût-ce que par l'histoire de la peinture néerlandaise.
Dans la section consacrée à la marine, on remarque une col-
lection unique de documents concernant De Ruyter. Elle contient
cent trente-trois numéros, et un modèle de sa statue orne la cour.
Il va sans dire que les gardes bourgeoises, les « schutters »
sont bien représentés, quoique les grandes toiles de Hais et de
Rembrandt, de Van der Helst et de De Keyser soient absentes.
Cependant on y trouve la plus ancienne peinture d'arquebusiers,
faite en 1533 par Cornelis Anthoniszoon; puis des peintures
pareilles par Dirck Jacobs en 1554 et par Ketel en 1588.
Les fabriques des églises catholiques, Israélites et celle des
israélites portugais ont envoyé plusieurs objets de prix ou offrant
de l'intérêt. Leurs trésors, à la vérité, ainsi qu'on l'a observé,
n'égalent pas ceux des églises de France ou d'Allemagne.
Cependant il y a quelques objets qui seraient au premier rang
partout : par exemple les deux grands plats en or des Portugais,
repoussés par Adam Van Vianen. Les esquisses peintes, l'histoire
de l'hostie miraculeuse, sont de beaux morceaux de peinture du
commencement du xvie siècle.
Le commerce, l'industrie, la marine marchande, les gildes
{Correspondance particulière de l'Art.)
Première exposition des aquarellistes de La Haye.
— L'exposition rétrospective d'Amsterdam. — La Société
d'aquarellistes, qui s'est formée à la Haye, a ouvert sa première
exposition dans la grande salle de l'Académie de dessin. La
collection est petite mais exquise; elle ne contient que 120 des-
sins. Parmi les exposants étrangers on remarque Biseo, de
Rome, avec deux vues de l'Orient ; Cabianca, de Rome, avec
deux belles aquarelles, Cipriani, également de Rome, avec
une vue de Venise; Herkomer, de Londres, avec son superbe
portrait de jeune enfant, d'un dessin juste et délicat, d'un grand
goût ; Tusquets, de Rome, avec un paysage et une rue à Feren-
tina, d'un coloris brillant.
Les artistes belges sont : MM. Wauters, dont les deux têtes
d'étude surtout offrent les qualités les plus sérieuses des an-
ciens maîtres; Pecquereau, qui a envoyé de jolies vues prises
en Belgique; M. Oyens; M. Hubert qui a exposé des Soldats se
reposant devant le corps de garde} délicieuse aquarelle d'un dessin
spirituel; MM Gabriel, Dell' Acqua, Cluysenaer, Clays qui a
envoyé deux marines dont l'une magistrale.
Aima Tadema a deux aquarelles accomplies ; l'une reproduit
deux têtes de son grand tableau, appartenant à M. Levrève, intitulé
Portraits commandés. La tête qui regarde le tableau, toute
dans l'ombre, est travaillée de main de maître. L'autre repré-
sente une belle dame romaine étendue sur un banc et regardant
les passants. C'est, comme toujours, savant et sûr de dessin,
d'une grande délicatesse ; toutes les étoffes rendues à merveille ;
l'air ambiant autour de la figure couchée, la lumière pénétrant à
travers le rideau et la balustrade en pierre, le costume exquis,
la belle tête de la jeune Romaine, tout cela a un charme indi-
cible. Blommers a exposé deux aquarelles aussi consciencieuses
de rendu que charmantes d'intention et de sentiment. Israëls a
envoyé six dessins où brillent de grandes qualités, surtout dans
la scène intitulée Moedcrs hulp (le petit soutien de sa mère) ;
un portrait d'homme est d'un ton superbe, ainsi qu'un portrait
d'enfant. Bisschop a exposé une aquarelle qui mesure presque
un métré de largeur, et qui est, comme coloris et comme force de
rendu, le nec plus ultra de ce qu'on peut obtenir par le moyen de
l'aquarelle; cela a la vigueur d'un tableau peint.
Les belles marines de Mesdag, les paysages de Mauve,
les vues de villes de J. Maris, d'une vigueur rembranesque et
pleins de mystères; un coin lumineux et frais avec des canards,
par W. Maris ; des fusains poétiques de Bilders ; des fleurs
exquises de Mllc Van de Sande-Bakhuizen, les deux beaux paysages
de son frère, M. Jules Van de Sande-Bakhuizen; ceux de Van
Borselen et de Weissenbruch, les intérieurs magnifiques de Bos-
boom, deux églises et une chaumière, très-forts d'effet et char-
mants de coloris; des paysages très-réussis de M. Du Chattel;
— enfin des vaches superbes de De Haas, des chevaux de Nakken;
des illustrations charmantes de Ch. Rochussen, .ainsi que deux
grandes feuilles représentant des scènes de l'ancienne histoire de
Hollande, pleines d'esprit; de beaux dessins de Sadée, très-sobres
et très-exacts; des pâturages avec bestiaux de Stortenbeker; une
vue des Côtes de la mer Rouge, par M. de Famars Testas; —
voilà quelques-unes des richesses de cette exposition qui est un
très-heureux début.
L'exposition rétrospective, ouverte à Amsterdam, intéresse
vivement les amateurs d'art et de curiosité. Elle a un cachet
tout particulier. On avait organisé déjà plusieurs fois des expo-
sitions semblables ; cette fois on a imaginé de faire une histoire
La Haye, 26 Août.
illustrée d'Amsterdam, du xvie au xix' siècle. Un catalogue
rédigé avec beaucoup de soin et d'érudition en conservera le
souvenir quand les milliers d'objets seront de nouveau dispersés ;
il restera un livre à consulter. L'exposition, établie dans les
salles du Oudemannenhuis (hospice des vieillards, mais où les
vieux ont fait place depuis longtemps aux arts), embrasse onze
groupes dont l'organisation était confiée à onze groupes de
savants, artistes et hommes influents. La direction générale a
été confiée à M. Cuypers, architecte distingué, qui s'en est
acquitté avec autant de goût que de science. Les groupes ou
subdivisions comprennent : i° topographie, plans, cartes; 2"gou-
vernement; 30 la justice; 40 l'état militaire; 50 l'Eglise; 6» le
soin des pauvres; 70 le commerce; 8° l'industrie; 90 l'instruction
et les sciences; io° les beaux-arts; ii° faits remarquables.
Parmi les anciens plans de la ville, etc., catégorie très-riche,
on remarque en premier lieu le plan peint en 1536, par Cor-
nelis Anthoniszoon, le plus ancien qui soit connu; le grand
plan gravé sur bois par le même en 1544, et un dessin en
couleur fait sur l'ordre du roi Philippe II, par Jacob van Deven-
ter. Il y en a encore une soixantaine d'autres. Le dessin géo-
métrique de la ville est complété par des dessins pittoresques et
des croquis, parmi lesquels il y en a de Rembrandt, Bakhuyzen,
Everdingen, W. Van de Velde, Roghman, Van Kessel, Leupenius,
Hulswit, De Beyer, Pronk, de Vlieger, Hobbema; avec quelques
peintures par Ruysdael, Beerstraten, Van der Heyde, Van
Kessel.
Dans la section de la magistrature, il y a une foule de divers
documents concernant la construction de la maison de ville par
Van Campen. Les magistrats eux-mêmes sont représentés par des
peintures de la main de Mieris, Van der Helst, Mierevelt, San-
drart, de Bray, Hodges, Maas, Ovens, De Keyser, Netscher,
Teschbein etc.; on y remarque deux beaux portraits par Th. De
Keyser, représentant Laurens Reael et son épouse, en pied, de
grandeur naturelle; puis par des bustes, il y en a de fort
beaux par Quellinus ; enfin par des gravures et eaux-fortes.
On y voit le cuivre où Rembrandt a tracé le portrait de Six. Des
sceaux, des généalogies, etc., complètent l'histoire des Amster-
damois connus, tels que les Reael, les Backer, les Bicker, Hooft,
Witsen, Valckenier, Utenboogaerd, Tulp, Six, etc., noms bien
connus ne fût-ce que par l'histoire de la peinture néerlandaise.
Dans la section consacrée à la marine, on remarque une col-
lection unique de documents concernant De Ruyter. Elle contient
cent trente-trois numéros, et un modèle de sa statue orne la cour.
Il va sans dire que les gardes bourgeoises, les « schutters »
sont bien représentés, quoique les grandes toiles de Hais et de
Rembrandt, de Van der Helst et de De Keyser soient absentes.
Cependant on y trouve la plus ancienne peinture d'arquebusiers,
faite en 1533 par Cornelis Anthoniszoon; puis des peintures
pareilles par Dirck Jacobs en 1554 et par Ketel en 1588.
Les fabriques des églises catholiques, Israélites et celle des
israélites portugais ont envoyé plusieurs objets de prix ou offrant
de l'intérêt. Leurs trésors, à la vérité, ainsi qu'on l'a observé,
n'égalent pas ceux des églises de France ou d'Allemagne.
Cependant il y a quelques objets qui seraient au premier rang
partout : par exemple les deux grands plats en or des Portugais,
repoussés par Adam Van Vianen. Les esquisses peintes, l'histoire
de l'hostie miraculeuse, sont de beaux morceaux de peinture du
commencement du xvie siècle.
Le commerce, l'industrie, la marine marchande, les gildes