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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 4.1878 (Teil 1)

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Chasrel, T.: Gustave Courbet
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https://doi.org/10.11588/diglit.16908#0180

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i46 L'ART.

teur distingué, sagace critique d'art, artiste d'un talent très-fin et très-original, a fait partie de
l'Assemblée nationale de Versailles, où il siégeait sur les bancs de la droite. Voici en quels
termes, étudiant les beaux-arts à l'Exposition universelle de 1867, il rendait compte de l'exposition
particulière et personnelle ouverte par Courbet en manière de protestation contre les rigueurs du
jury :

ce M. Courbet n'offre au Champ-de-Mars que des échantillons de son talent. C'est au rond-
point de l'avenue de lAlma, à son exposition particulière, qu'il faut restituer ces épaves pour
reconstituer son œuvre.

« On trouve nombre de gens prêts à s'offusquer de ces hardiesses de séparation. Les expo-
sitions privées ont été reprochées aigrement à Ingres, elles le sont durement à MM. Courbet,
Manet, Doré. Susceptibilité maladive, infatuation, outrecuidance, disent les uns ; réclame, disent
les autres... Remarques relatives à l'individu, également inutiles et déplacées dans l'art, matière
générale. Si ces exhibitions ont pris chez nous la forme constante d'une protestation, la faute en
est aux jurys protectionnistes et au caractère national. Ce n'est pas, d'ailleurs, un motif pour nier
leur raison d'être. Procédé américain ou de l'autre monde, soit : elles nous choquent surtout,
parce que l'audace de l'action individuelle et les habitudes viriles des caractères entiers sont dures
à entrer dans les cervelles latines.

« Pour moi, je loue le procédé et je l'approuve sans hésitation, même lorsqu'il se produit à
la française, en accident d'amour-propre. Je le loue et je l'approuve, non comme américain, mais
comme conforme à la nature des choses et aux convictions harmoniques que la vue de la peinture
exige. Des salles de dimension moyenne réservées à chaque peintre, mais ce serait l'idéal des
musées, sauf à réunir, dans quelque carrefour ou Tribune, les chefs-d'œuvre empruntés aux divers
maîtres et aux diverses écoles, pour faciliter les comparaisons aux historiens, aux grammairiens,
aux esthéticiens, aux abstracteurs de quintessence.

« Acceptons donc avec la plus grande bienveillance l'hospitalité que nous offre, à ses risques
et périls, M. Courbet.

« Il retire de son isolement un premier et incontestable profit ; il y perd, dès l'entrée, l'air
aujourd'hui devenu banal d'un révolutionnaire. Ce qui semblait excessif, burlesque, entre un
Cabanel, un Gérôme. un Français, un P. Flandrin, n'est plus, dans une tonalité générale très-
sonore, qu'une note trop lancée, une faute de méthode dans le chant. Avec un peu d'étude, on
rattache aisément ce dissident à une race, il entre dans une famille. Des inépuisables nourrices
dont la mamelle reste tendue aux enfants nés avec un appétit naturel de la couleur, il en a tété
plusieurs. Élevé d'abord et plus longtemps en Espagne, il l'a été ensuite dans les Flandres, d'où
son goût puîné pour la lumière l'a poussé vers Venise. Tout cela n'empêche point un artiste d'être
original. Original, en effet, n'a jamais signifié absolument unique, sans ancêtres, ou seul de son
espèce, ce qui serait une anomalie dans l'échelle des êtres créés.

« L'autre avantage de cette exhibition privée, c'est, après avoir émoussé les angles tendus
aux gens corrects, assourdi les coups de tam-tam, voilé les tentations peu réfléchies, de faire
disparaître les fautes, dans l'éclat de quelques œuvres résumant des séries d'essais avec bonheur,
et quelquefois avec supériorité.

« Avant d'en suivre l'examen dans l'ordre assez naturel incliqué par lui, un reproche à
M. Courbet : éventer, sans choix, toutes les esquisses de son atelier sur le public, est-il d'un
meilleur goût que de secouer sur lui des calepins de notes ? Science de faire un livre, science de
faire une exposition sont perdues depuis longtemps. Les peintres pas plus que les poètes ne savent
ce que l'on gagne à se débarrasser, à se concentrer. Je me chargerais, en écartant de la salle où
nous sommes tout ce qui n'est intéressant que pour le peintre, de mettre en relief un des pre-
miers hommes de ce temps-ci.

« L'Hallali du Cerf sur un terrain de neige résume toutes les études et tous les paysages de
neiges que M. Courbet a tenu à nous montrer, et il les résume en les amplifiant et les annulant.

« C'est une joie presque inépuisable pour la curiosité d'un coloriste que l'analyse de cette
toile. Comme difficulté vaincue, nous n'en avons pas vu de plus forte depuis la Noce juive, de
 
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