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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 4.1878 (Teil 1)

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https://doi.org/10.11588/diglit.16908#0297

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261

expériences, a-t-il pu écrire la réflexion suivante : « Trouvera-
t-on le moyen de conserver ces images quand elles restent ex-
posées aux rayons solaires? Les arts pourront-ils s'enrichir
d'images peintes par la lumière ? C'est ce que l'on ne saurait af-
firmer actuellement»

De telles conclusions condamnaient la photographie à rester
réduite au blanc et au noir. Ne pouvait-on cependant faire
d'autres tentatives, et puisqu'il était impossible de résoudre di-
rectement la difficulté, ne devait-on pas essayer de la tourner?
Voilà précisément ce qu'a entrepris l'inventeur de la photochro-
mie, M. Léon Vidal.

Les épreuves photographiques, à l'aide des procédés au char-
bon ou a l'encre grasse, sont susceptibles, comme on sait, de
recevoir différentes teintes; elles peuvent être rouges, jaunes,
grises, au gré de l'opérateur. C'est ainsi que Braun, de Dor-
nach, qui vient de mourir, a exécuté ces magnifiques copies de
dessins des maîtres dans lesquelles sont reproduites toutes les
nuances des encres, toutes les variétés des crayons, l'encre de
Chine ou la sépia, la pierre d'Italie, la sanguine ou la pointe
d'argent. M. Léon Vidal se tint donc le raisonnement suivant :
Puisque l'on peut, à l'aide des impressions au charbon, obtenir
des monochromes de toutes les couleurs, rien ne s'oppose à l'em-
ploi successif des diverses parties d'un même cliché négatif pour
obtenir sur des mixtions de différentes couleurs les parties diver-
sement colorées du sujet à reproduire. Le groupement ou mieux
la superposition de ces monochromes ne formera plus qu'une
seule et même image polychrome donnée par la photographie,
c'est-à-dire aussi exacte que possible.

Tout le principe de la photochromie est résumé en ces
quelques mots. Pour plus de clarté nous citerons un exemple
choisi par l'inventeur lui-même pour expliquer son procédé :
« Imaginons, dit-il, un négatif représentant trois lettres entrela-
cées sur un fond blanc; il est bien simple, en cachant successive-
ment deux d'entre ces trois lettres, d'imprimer en une couleur
quelconque différente celle qui laissera traverser les rayons lu-
mineux. Cette opération étant répétée trois fois, on aura trois
monochromes, l'un jaune, l'autre vert, l'autre noir, par exemple,
qui, superposés, formeront du groupe des trois lettres entrela-
cées une véritable polychromie.

« Si le cliché négatif en question, au lieu de représenter
trois lettres tracées sur du papier, était la reproduction de ces
mêmes trois lettres en relief, il y aurait à tenir compte, non pas
seulement des couleurs pures de chacune des lettres, mais encore
de la couleur même de l'ombre et du modelé dans la couleur ré-
sultant de l'action de la lumière sur des surfaces accidentées.
Dans ce cas, les trois monochromes ci-dessus indiqués seraient
insuffisants, car ils ne donneraient que la valeur franche de cha-
cune des couleurs réellement modelées dans le ton lui-même,
mais sans que la couleur proprement dite de l'ombre vînt s'a-
jouter au modelé initial. Il y aurait donc, pour compléter cette
polychromie et en faire une épreuve complète, à imprimer l'en-
semble du cliché dans une tonalité égale à celle de la couleur de
l'ombre.

« Ces quatre monochromes superposés donneront l'illusion
du relief et formeront une polychromie telle que l'exécuterait un
peintre à l'aide de ses pinceaux. »

M. Léon Vidal poursuivait avec ardeur ses recherches^
quand le hasard l'amena à en exposer le but devant M. Paul
Dalloz, directeur du Moniteur universel. Celui-ci, qui a pour
toutes les questions artistiques une curiosité toujours ouverte et
passionnée, pressentit l'importance de cette invention. Il voulut
en assurer le succès. Une installation grandiose fut donnée à
M. Vidal sur le quai Voltaire; des ateliers furent établis, un
personnel fut dressé, et aujourd'hui la photochromie exécute,
indépendamment d'une quantité innombrable de reproductions

industrielles, des planches merveilleuses pour des ouvrages d'art
aussi luxueux par la forme que considérables par le fond. Les
étrangers, qui sont plus prompts que nous à apprécier nos
propres découvertes, se hâtent de faire appel au nouveau pro-
cédé. Les plus grandes maisons industrielles de l'Angleterre
font déjà reproduire une quantité d'objets d'art, et l'intelligent
directeur du Kensington Muséum, qui a organisé une exposition
de planches photochromiques, fera bientôt copier les trésors de
son musée. D'autres nations sont en voie d'acheter pour leur
compte le droit d'employer l'invention de M. Vidal. Enfin, de
toutes parts on fait appel à ce nouvel instrument aussi précis
qu'éclatant, d'une application également scientifique, industrielle
et artistique.

Pour la reproduction des objets d'orfèvrerie, la palette pho-
tochromique a des délicatesses infinies, une exactitude merveil-
leuse, comme on peut le voir dans les planches de la Galerie
d'Apollon. La chromolithographie copie plus ou moins fidèle-
ment ses modèles ; ce n'est qu'une traduction faite par des
artistes, et qui est sujette à toutes les licences, à tous les hasards
du crayon ou du pinceau. La photochromie, au contraire, n'in-
terprète pas; elle parle la langue même de la lumière. Dans la
première livraison de la Galerie d'Apollon on a la reproduction
de la Cassette de saint Louis retrouvée en 1853 dans l'église de
Dammarie-les-Lys, coffret en bois de hêtre, revêtu d'une peau
de vélin vernie et ornée de quatre-vingts pièces d'applique, où
les écussons de la famille et des frères d'armes du roi s'entre-
mêlent à onze médaillons historiés. Aucun enjolivement, aucune
fraîcheur factice n'altèrent l'authenticité plastique de ce précieux
monument dans le fac-similé qu'en donne M. Vidal. Il revit
dans son éclat sombre foncé par les siècles, dans le relief usé de
ses ciselures, dans le chatoiement terni de son émaillerie. Le
Bouclier et le Casque de Henri II, le Sceptre de Charlc-
magne, que contient la livraison suivante, montrent d'autres
qualités. Les délicates figurines qui décorent ces précieux chefs-
d'œuvre, les reliefs qui accrochent la lumière et les cavités qui
l'absorbent, la complication des ornements, la netteté des arêtes,
les éclats et les reflets propres à chaque métal, tout est accentué,
coloré avec une perfection qui tient du prestige. Les autres
pièces ne sont pas rendues avec moins de vérité. Les émaux, par
exemple, sont reproduits avec leurs lucidités vitreuses, leurs
bleus de turquoise, les éclairs de paillon qui sillonnent leur lim-
pidité. L'illusion est assez complète pour qu'on puisse croire
qu'on a devant soi les objets eux-mêmes. Ajoutons que chaque
planche est accompagnée d'un texte explicatif dû aux écrivains
compétents. Les premières livraisons de la Galerie d'Apollon
sont signées par MM. Paul de Saint-Victor, Louvrier de Lajo-
lais, Paul Mantz, Georges Lafenestre, etc.

En résumé, la photochromie, qui n'en est encore qu'à ses
débuts, exécute déjà des œuvres absolument uniques et qu'aucun
autre procédé connu ne pourrait tenter d'égaler. Tout porte à
croire qu'elle ne s'arrêtera pas en si beau chemin. Chaque jour
M. Vidal découvre, pour le détail de ses opérations, des res-
sources nouvelles qui les simplifient et donnent des résultats
plus parfaits. Nous n'avons pu que présenter l'indication rapide
de ce qui forme le principe de son invention ; mais la pratique
fournit des modèles plus ou moins compliqués et difficiles à re-
produire. C'est alors que se révèlent le goût, la science et l'ingé-
niosité de l'inventeur qui, comme un chef d'orchestre, dirige,
accentue, précipite ou adoucit le travail de la lumière, en cent
épreuves diverses, puis rassemble tout à coup ces couleurs dis-
persées comme des instruments, et fait cesser leur cacophonie
par la combinaison de leurs gammes se fondant dans la mélodie
d'un unique morceau.

Victor Champier.

ecquerel : la Lumière, ses causes et ses effets. — Voir aussi : la Lumière et tes couleurs au point de vue photographique, par Léon Vidal.
 
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